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Grisailles.

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  • Grisailles.

    Je vais aborder un sujet qui va peut-être me faire passer pour quelqu'un qui plane. Il s'agit d'écologie de protection de l'environnement.

    Certains vont dire : "houla, on est encore sous développés et ce gars vient nous parler d'écologie... Attends qu'on sorte de la pauvreté."

    Ce n'est pas si simple. Enfant, j'ai fait, sans le savoir, et vu faire, plein de bêtises.

    Je jetais des piles usagées dans la nature. Je ne savais pas qu'elle pouvaient polluer plusieurs mètres cubes d'eau dans la nappe phréatique.

    J'ai vu des gens faire leur vidange en pleine forêt. C'est un véritable crime. Les huiles de voiture usagées sont de vrais poisons qu'on ne doit même pas toucher avec les mains car certains composés toxiques qu'ils contiennent peuvent traverser la peau alors polluer le sol et les eaux avec ça pour des centaines d'années, c'est grave.

    J'ai aussi vu des gens jeter des gravats, des pots de peinture, des tôles peintes, des batteries au plomb dans dans les prés, les forêts ou la mer, chacun croyant être le seul à le faire. Ce n'est pas le cas. Des millions d'automobilistes font de même, des millions de citoyens font pire et la nature est peu à peu saccagée.

    Revenu à Alger après des années d'absence, je n'ai plus eu qu'une idée, repartir tant le spectacle de désolation que j'ai trouvé m'a déchiré le coeur.

    Les garrigues et les près où on pouvait cueillir le "halhal" (lavande sauvage) et le "fliou" (menthe pouliot), les cèpes et les lactaires sanguins, où chaque hiver mon père ramassait les escargots, la "guernina" et la bourrache pour la "tbiykha" (potée de légumes aux herbes sauvages) ont disparu, remplacés par des "villas", cubes de béton gris qui sortaient comme autant de pénitenciers lugubres, chacun d'un terrain vague pelé et parsemé d'immondices.

    J'ai vu la mer... Méconnaissable. Les rochers de mon enfance étaient surpeuplés, et dans les calanques battait une eau où flottaient des sacs et des bouteilles de plastique ainsi qu'une écume jaune.

    Tout semblait souffrir de l'inconséquence des hommes.

    J'ai cherché loin à l'ouest, un peu de pureté dans les lieux magiques où j'avais dormi sur les plages, sous la tente, après de longues marches avec mes copains... A Ténès, j'ai fait demi-tour, j'en avais assez vu : partout les collines naguère vierges et giboyeuses qui dominent la mer et qui étaient couvertes de forêts ont cédé la place à des constructions et partout il y avait des gens. Là où le rossignol chantait dans la chaleur de la nuit, il n'y avait plus que la grisaille du béton.

    Quelle était donc cette calamité ?

    C'est le vol de millions de sachets en plastique, pire qu'un vol de criquet sur ce pays, c'est ce vent de sable et de poussière, surgi dans ces lieux naguère fertiles et que je croyais contenu par la double barrières des Atlas. J'ai eu l'impression d'assister aux prémisses du Jour Dernier.

    Plus loin, sur des rochers, j'ai essayé de pêcher le "tchelba" (saupe) ou la "Kahla" (dorade grise), à la ligne comme au bon vieux temps. Plus rien. La mort, le plastique et le béton étaient partout et les poissons étaient partis.

    J'ai alors mesuré l'ampleur de la catastrophe. Je sais que j'aurais pu aller n'importe où et retrouver le même spectacle car chacun semblait penser que l'important c'était sa vie à lui, son confort, sa position sociale affichée, sa voiture, ses fringues. Quelle dérision ! Quel miroir aux alouettes !

    J'aurais pu m'adresser aux gens et leur dire : "Qu'avez-vous donc fait ? Faites donc quelque chose pour ce pays ! Fondez un parti écologiste, battez-vous, enseignez aux gens à préserver leur nature, grondez les enfants quand ils lui portent atteinte et expliquez leur pourquoi vous le faites, apprenez à vivre sans saccager. Oubliez les rêves "d'affaires juteuses", renoncez à la sotte vanité de celui qui rêve de se construire son cube de béton pour en "louer le rez-de-chaussée", pensez un peu moins à l'argent, à la matière."

    Mais je n'ai rien dit parce qu'ils ne m'auraient pas compris. Qui étais-je pour leur faire la leçon? Un étranger qui ne retrouve pas sa terre natale ? Un métèque avec des idées d'un autre temps ?

    Comment leur expliquer que tout cela, c'est la mort et la destruction et rien d'autre ? Qu'il y a des valeurs qui, une fois perdues, ne peuvent être retrouvées même pour tout l'or du monde et qu'ils sont en train de vivre sans s'en soucier.

    Mais peut-être est-ce moi qui vis dans un rêve.
    Dernière modification par jardinier, 29 juillet 2008, 16h27.
    Quand le Titanic coule, le seul comportement rationnel consiste à s'en éloigner.
    Anonyme du 20ième siècle.


  • #2
    intéressant jardanier.


    Malheureusement l'environnement c'est un sujet qui fâche les Algériens

    Merci pour ce sujet.

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    • #3
      Envoyé par Tamedit n-was
      intéressant jardanier.


      Malheureusement l'environnement c'est un sujet qui fâche les Algériens

      Merci pour ce sujet.
      C'est vrai ? ça les fâche ? A ce point ?

      Merci de m'avertir.
      Quand le Titanic coule, le seul comportement rationnel consiste à s'en éloigner.
      Anonyme du 20ième siècle.

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      • #4

        j'exagère un peu, mais juste pour parler de la réalité sur l'environnement en Algérie, et le manque de la conscience collective sur ce point.

        Tu trouveras des décharges publiques .. sans que les responsables de ces localités bougent

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        • #5
          Ok.

          Bon, pour les décharges publiques, je ne critique pas à 100%.

          J'aurais tendance à les conserver tout en réglementant leur usage et tout en éduquant la population au recyclage des déchets verts, des plastiques, du verre et même du pain qui pourrait être le point de départ d'une filière qui le transformerait en aliment pour les volailles, les élevages de poissons ou le bétail par exemple.

          Je suis totalement opposé à l'incinération des déchets. C'est une horreur qui consiste à déverser dans l'atmosphère tout ce dont on veut se débarasser.

          Pendant 40 ans une poubelle française a pu contenir absolument n'importe quoi, de l'huile moteur aux médicaments en passant par les pots de vernis et de peinture, les circuits imprimés de matériel électronique et j'en passe. Tout cela était mélangé et brûlé. Vous imaginez les réactions chimiques ?

          Les produits étaient rejetés dans l'atmosphère où on pensait "qu'ils se dilueraient"...

          La production des dioxines et l'émission de métaux lourds par les incinérateurs d'ordures ménagères, quel que soit leur degré de perfectionnement a pollué de vastes régions en France où pendant 50 ans on a tout incinéré de façon absolument sotte avant de répandre les cendres chargées de poisons sur les champs.

          Le résultat est une explosion de certains cancers autour des incinérateurs.

          Quand on songe à cela, on s'aperçoit que la fameuse "inventivité occidentale" est surtout le fruit d'une politique à courte vue, qu'elle est la première source de nuisances environnementales et qu'une bonne attitude est de s'en méfier comme de la peste et de n'adopter une technologie qu'après qu'elle ait été correctement testée, ce que les maghrébins n'ont pas fait en adoptant massivement les téléphones portables, par exemple.
          Dernière modification par jardinier, 29 juillet 2008, 15h18.
          Quand le Titanic coule, le seul comportement rationnel consiste à s'en éloigner.
          Anonyme du 20ième siècle.

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          • #6
            Quand on songe à cela, on s'aperçoit que la fameuse "inventivité occidentale" est surtout le fruit d'une politique à courte vue, qu'elle est la première source de nuisances environnementales et qu'une bonne attitude est de s'en méfier comme de la peste et de n'adopter une technologie qu'après qu'elle ait été correctement testée, ce que les maghrébins n'ont pas fait en adoptant massivement les téléphones portables, par exemple.
            eh oui, c'est ça aussi le "progrés"...


            "Avant notre venue, rien ne manquait au monde, aprés notre départ, rien ne lui manquera." omar Khayyam

            "Les forêts précèdent les peuples, les déserts les suivent." Chateaubriant

            "C'est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain n'écoute pas. "victor Hugo
            "Il faut avoir bcp de patience pour apprendre à être patient."

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            • #7
              Oui, les incinérateurs relève d'un principe carrément magique : le feu épure !

              De la technologie les saloperies et autres sacs laissés n'importe où ? Non, c'est de l'inconséquence tout à fait élémentaire. Les sacs plastiques ont demandé beaucoup de travail, sans ce travail au niveau des decharges, la France en serait couverte.

              En France, Marseille a été la dernière grande ville à s'équiper d'une épuration de l'eau d'égout, en 87. Cette ville balançait sans complexe ses égouts par des longs tuyaux (un émissaire), rallongés d'année en année, où parait-il les poissons aimaient y chercher à manger ... (et où la pêche était interdite).

              http://www.six-fours.net/reportages/...raneen-10.html

              Pour bien comprendre l’évolution il faut remonter à 1960. A cette époque tout est rejeté directement à la mer. Non seulement les déchets urbains constitués par les égouts des villes mais aussi les déchets industriels. Des milliers de tonnes de boue rouge sont déversées dans la mer non loin de Fos sur mer. Ces déchets et notamment les boues industrielles recouvrent et tuent les herbiers marins, éliminant ainsi les poissons qui vivent et se nourrissent de ces herbiers.

              Paul Ricard, amoureux de la Mer, décide en 1966 de faire quelque chose contre cette situation. C’est alors qu’il fait la rencontre d’Alain Bombard et qu’il décide de créer l’« Observatoire de la Mer » sur l’île des Embiez.

              Parallèlement à cela les esprits évoluent et le concept même d’écologie nait. C’est ainsi qu’en 1972 fût créé le premier ministère de l’environnement.

              1972 c’est également la date, à laquelle Nardo Vicente rejoint l’observatoire sur l’Île des Embiez. Il recense alors de Marseille à Menton 440 émissaires qui déversent des eaux brutes non filtrées à la mer. L’Emissaire c’est le nom que l’on donne à ces tuyaux qui s’avancent dans la mer et par lesquels les eaux d’égouts sont rejetées dans le milieu naturel.

              Pour marquer les esprits il se lance dans le tournage d’un film sous marin, montrant les dégâts causés par ces émissaires. Ce film fût présenté pour la première fois à Marseille en 1980 et fût récompensé plus tard par la Palme d’or du film scientifique au festival de Rio de Janeiro. Nardo Vicente : « On est jamais prophète en son pays ».

              Ce documentaire était structuré en 3 parties :

              1) Le Paradis :
              Dans cette partie le professeur Vicente montre les fonds sous-marins de la réserve de Port-Cros. On ne peut alors qu’être séduit par la beauté de la faune et de la flore, des herbiers sous-marins et de la diversité des poissons y vivant.

              2) Le Purgatoire :
              Le purgatoire ce sont les plages artificielles du Mourillon à Toulon. A cet endroit ont été installées des plages crées de toutes pièce par l’homme et prises sur la mer. 20 hectares d’herbiers de posidonie (Plantes marines aujourd’hui protégées par la loi) sont recouverts de sable. Pire encore, ce que les responsables n’avaient pas prévu, c’est que 47 hectares supplémentaires de posidonies meurent, du à la très forte turbidité engendrée aux alentours des plages par le déversement de sable. Avec les posidonies disparaissent les nombreuses espèces de poissons, qui y font leurs nids.
              Apparemment les municipalités du littoral, n’ont toujours pas compris la leçon, puisqu’elles continuent régulièrement à rajouter des quantités énormes de sable sur les plages.

              3) L’Enfer :
              L’enfer c’est à cette époque la pointe du Cap Sicié. Toutes les eaux d’égouts de la ville de Toulon et des communes avoisinantes sont rejetées non traitées à cet endroit. Ce sont 350.000 m3 d’eaux usées qui sont rejetées à la mer chaque jour. Et encore le pire dans cette pollution ne sont pas les matières fécales, qui en grande quantité sont dangereuses mais se diluent. Le pire ce sont les nombreux détergents qui se retrouvent à la mer et tuent le milieu naturel.
              Nardo Vicente et son équipe ont risqué leur santé à plonger dans cette eau marron pour filmer le fond. Le résultat était catastrophique : des fonds sous-marins désertiques, presque sans vie. Les herbiers avaient complètement disparu pour laisser place à des fonds boueux et jonchés de matières plastiques.

              A la fin de la projection Gaston Deferre, alors maire de Marseille, qui avait assisté à la présentation du film, se leva, se tourna vers le public et proclama : « Marseille aura sa station d’épuration ! ». Et en effet, cela aura duré longtemps mais en 1987 Marseille a sa station d’épuration. Malheureusement pour des raisons d’économie les eaux ainsi traitées, qui ne sont pas complètement libérées de leurs impuretés, ne sont déversées qu’à quelques mètres de profondeur, alors que des études scientifiques montrent, que si ces eaux étaient déversées par 100 mètres de fond au delà du plateau continental, les organismes existants à cette profondeur ainsi que la pression y régnant permettraient de finir le travail.

              Deux ans plus tard en 1989 Monaco fait mieux. La centrale d’épuration de la principauté est mise en service et déverse ses eaux usées au delà du plateau continental. Le résultat est formidable et permet d’entretenir aux alentours du rocher une réserve sous-marine exemplaire.

              Toulon est resté très longtemps à la traîne et n’inaugura sa centrale d’épuration, nommée Amphitria, qu’en 1999. Une récente plongée de l’équipe de Nardo Vicente, à l’endroit même où avait été tourné le film 26 ans plutôt, montra que les choses, sans être parfaites, se sont bien améliorées. La végétation sous-marine commence à reprendre du terrain. Malheureusement là aussi les décideurs ont économisé sur les tuyaux de déversement. Les eaux traitées par Amphitria ne sont déversées qu’à 6 mètres de fond.

              Le professeur Vicente conclu sa conférence en disant : « Nous sommes dans la bonne voie, mais il y a encore beaucoup à faire ! ».

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              • #8
                Ceci est, hélas, le résultat d'une approche technocratique.

                Le monde est seulement en train de commencer à s'apercevoir que le pire moyen d'organiser la présence humaine sur un territoire c'est d'en confier le soin à des ingénieurs grandes écoles en évitant scrupuleusement de consulter la population qui va subir cette organisation. (mais qui va la financer )

                Un autre problème se greffe sur celui-là, c'est celui des transferts de technologies caviardées au "profit" des pays du tiers-monde.

                Par exemple, la progression, dans le monde, du traitement de l'eau à la française, avec l'implantation dans le tiers-monde et les ex-pays de l'Est de compagnies comme la Lyonnaise des Eaux laisse supposer que les problèmes légués aux municipalités qui ont eu affaire à ces compagnies vont se retrouver à l'avenir dans des pays qui leur ont confié le soin de résoudre leurs problèmes de traitement des eaux usées.

                Sachant que certains de ces pays sont en proie à une corruption endémique, et que la voix des écologistes ne s'y fait guère entendre, on devine que le pire est à venir.
                Quand le Titanic coule, le seul comportement rationnel consiste à s'en éloigner.
                Anonyme du 20ième siècle.

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