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Affrontements au Caucase : Une guerre énergétique

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  • Affrontements au Caucase : Une guerre énergétique

    Publié le samedi 09 août 2008 à 10:10
    liberation.fr- La Géorgie a profité de la «trêve olympique» pour lancer ce qui pourrait bien être le premier conflit Est-Ouest de l’après-guerre froide. Dans la nuit de jeudi à vendredi, les tanks et les bombardiers géorgiens sont partis à l’assaut de Tskhinvali, capitale de la minuscule république autoproclamée d’Ossétie du Sud qui narguait la Géorgie depuis plus de quinze ans avec le soutien russe. La riposte de Moscou n’a pas tardé : une longue colonne d’une cinquantaine de chars russes est entrée vendredi après-midi en Ossétie du Sud. «La Russie est garante de la sécurité des peuples du Caucase» et ne permettra pas «que la mort de [ses] compatriotes reste impunie», a déclaré le président russe, Dmitri Medvedev, de retour précipité à Moscou. Au prix de violents combats, les forces russes semblaient vendredi soir en passe de reprendre le contrôle de Tskhinvali. Les combats auraient fait 1 400 morts selon le «président» ossète, Edouard Kokoïty cité par Interfax.
    «Troupes». Derrière cette guerre géorgo-ossète se cache sans doute le premier conflit entre les Etats-Unis et la Russie depuis la fin de l’URSS. «Les Etats-Unis ont certainement donné leur feu vert au déclenchement des frappes géorgiennes», estime Vladimir Jarikhine, le directeur adjoint de l’Institut de la CEI (cercle de pays de l’ex-URSS). Il y voit pour preuve que le Conseil de sécurité de l’ONU, réuni d’urgence dans la nuit de jeudi à vendredi, n’a pas réussi à s’entendre sur une déclaration d’urgence condamnant l’offensive. «La Géorgie ne fait pas le poids et nous allons maintenant installer nos troupes en Ossétie du Sud et en Abkhazie pour défendre leurs frontières», ajoute cet expert exprimant généralement un point de vue proche du pouvoir russe. «Je ne pense pas que le président géorgien Saakachvili ait convenu de son attaque avec Washington, nuance Fiodor Loukianov, rédacteur en chef de la revue Russia in Foreign Affairs. Mais il était sûr que les Etats-Unis seraient obligés de le soutenir, et il lui fallait saisir l’occasion avant le changement d’administration à Washington.»

    Meilleur allié des Etats-Unis dans la région, Mikhaïl Saakachvili n’aurait certes pas pu défier la grande Russie sans le soutien financier et militaire que lui ont accordé les Américains depuis son élection en 2004. Remise à niveau par des instructeurs américains, l’armée géorgienne s’est aussi formée au feu en envoyant plusieurs milliers de soldats en Irak et en Afghanistan. L’étape suivante devait être l’intégration de la Géorgie à l’Otan, une provocation suprême pour Moscou, qui explique aussi la grande célérité de la réaction russe. Washington n’en semble pas moins assez embarrassé. Les Américains ont envoyé un émissaire pour se joindre aux efforts internationaux de médiation et appellent «à un cessez-le-feu immédiat» tout en rappelant «soutenir l’intégralité territoriale de la Géorgie». «Ce conflit met mal à l’aise les Etats-Unis car le président géorgien n’a cessé de parler de l’intégrité territoriale d’une manière provocatrice et il a été encouragé par les Etats-Unis, qui auraient dû l’inciter à davantage de modération», affirme Charles Kupchan, expert au Conseil des affaires étrangères, un centre de réflexion de Washington.

    «Faute».Les risques d’une extension du conflit préoccupent aussi les Européens. La présidence française de l’UE a annoncé vendredi soir «travailler à un cessez-le-feu en liaison avec l’ensemble des protagonistes». «Il faut obliger tout le monde à se mettre à la table des négociations car le risque de dérapage est bien réel : toutes les parties en présence, aussi bien Moscou que Saakachvili, ont l’illusion de pouvoir gagner quelque chose dans ce conflit», s’inquiète Salomé Zourabichvili, ancienne ministre des Affaires étrangères géorgienne depuis devenue l’une des leaders de l’opposition, soulignant que «le Kremlin veut pousser la Géorgie à la faute et lui ôter ses chances d’intégrer un jour l’Otan».

    Quels sont les enjeux ?
    Les immenses réserves gazières et pétrolières de la mer Caspienne ont accru l’importance géostratégique du Caucase, à nouveau au cœur d’un «grand jeu» opposant la Russie et les Etats-Unis. En Transcaucasie, au sud de la ligne de crête, d’anciennes républiques soviétiques comme l’Azerbaïdjan, puissance émergente grâce à ses richesses en hydrocarbures, et la Géorgie se sont rapprochées des Occidentaux. Ces derniers ont financé la construction de l’oléoduc BTC, qui porte le pétrole azéri jusqu’à la Méditerranée. Un gazoduc, Nabucco, est en projet avec, pour les Européens, l’idée de réduire leur dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie. L’administration américaine appuie en outre la candidature géorgienne à l’Otan. L’Azerbaïdjan, musulman et turcophone, entretient d’étroites relations avec la Turquie, pilier du flanc sud-est de l’Alliance atlantique. Les Russes dénoncent «un encerclement».

    S’ils contrôlent le nord du Caucase, intégré à la Russie, cette mosaïque de peuples montagnards en majorité musulmans reste explosive, d’autant que la rébellion indépendantiste tchétchéne continue, produisant à l’occasion des métastases en Ingouchie, au Daguestan ou en Kabardino-Balkarie. Moscou contre-attaque en poussant ses cartes en Transcaucasie, aux dépens de la Géorgie mais aussi de l’Azerbaïdjan, appuyant à fond l’Arménie dans le conflit du Nagorny-Karabakh, gelé depuis 1994. Cette enclave arménienne au sein de l’Azerbaïdjan s’était libérée les armes à la main en 1992 avant de se rattacher à la mère patrie, occupant au passage 20 % du territoire azéri. Cela complique un peu plus les relations déjà complexes entre Erevan et Ankara, même si une ébauche de normalisation se dessine ces derniers mois.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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