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L'éthanol tiré du maïs fait polémique au Mexique

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  • L'éthanol tiré du maïs fait polémique au Mexique

    Non content de subventionner le carburant consommé par des milliers d'Américains, qui font le plein au sud de la frontière à un prix plus avantageux, le Mexique va-t-il aussi financer l'éthanol exporté vers les Etats-Unis et produit avec du maïs mexicain ? Flambant neuve, l'usine Biocyclos de Navolato, dans l'Etat de Sinaloa, suscite déjà une polémique dans un pays où le maïs n'est pas une céréale comme les autres, mais l'aliment sacré des Précolombiens.

    Aux yeux de ses promoteurs, cette usine apporte une solution rationnelle au problème des excédents régionaux de grains, alors que ses détracteurs y voient une entreprise immorale, voire illégale, la nouvelle loi sur les biocarburants, promulguée début 2008, interdisant de produire de l'éthanol avec du maïs, sauf en cas d'excédents sur le marché national. Or le Mexique a importé près de 8 millions de tonnes de maïs en 2007.

    Financée par des capitaux privés mexicains, principalement ceux de la famille de la Vega, propriétaire du groupe sucrier Zucarmex, l'usine Biocyclos contraste, avec ses fûts de fermentation impeccables et son laboratoire d'analyse ultramoderne, avec les raffineries aussi vétustes que polluantes de Zucarmex, dont la filiale Destilmex a obtenu 50 millions de pesos (3.2 millions d'euros) de subventions publiques pour construire l'unité de Navolato.

    "NOTRE VIE"

    "Nous allons fabriquer 350 000 litres d'éthanol par an, à partir de 270 000 tonnes de maïs", annonce le directeur de Biocyclos, le Brésilien João Bortolussi. L'usine devait commencer à exporter en juillet vers la Californie et l'Arizona. "Mais en plus de biocarburant, nous produirons aussi quelque 100 000 tonnes de pâte de maïs à haute teneur en protéines, et nous espérons convaincre les industriels du secteur agroalimentaire de l'utiliser pour enrichir la nourriture des Mexicains", souligne-t-il.

    Destilmex a des contacts avec Minsa, l'un des principaux fabricants de tortilla, la galette de maïs qui est la base de l'alimentation au Mexique. Une cuillerée à soupe de Maix - une farine de couleur sable, issue du processus de distillation de l'éthanol -, ajoutée à neuf cuillerées de farine de maïs ordinaire, permet de concocter des galettes contenant 14 % de protéines, contre 9 % pour la tortilla industrielle. Reste à séduire les Mexicains, pour lesquels le maïs, appelé "notre vie" dans certaines langues indiennes, ne saurait faire rouler les camions.

    Pour le ministre de l'agriculture du Sinaloa, Jorge Kondo, l'équation est simple : "Le Sinaloa va produire cette année 5 millions de tonnes de maïs blanc, dont 3 millions pour la consommation humaine. Or cela coûte cher d'acheminer les 2 millions de tonnes d'excédents vers d'autres régions du Mexique. Il vaut mieux, explique-t-il, les transformer sur place et fournir ainsi des protéines aux vingt millions de Mexicains qui en manquent."

    Cette logique ne convainc pas l'opposition. Le 2 juillet, la commission permanente du Congrès fédéral a exigé des comptes sur les aides financières octroyées par le gouvernement à Destilmex, ainsi qu'à deux autres projets d'usines d'éthanol à partir de maïs.

    Après avoir visité, il y a un an, le chantier de Biocyclos à Navolato, le président mexicain Felipe Calderon a fait machine arrière, impressionné par les arguments de son compatriote Mario Molina, Prix Nobel de chimie et hostile aux biocarburants d'origine alimentaire.

    Lors d'un récent sommet régional à Tuxtla, au Chiapas, le thème des biocarburants a provoqué un vif débat entre les chefs d'Etat présents. Daniel Ortega, du Nicaragua, s'est opposé à leur usage, qu'il a qualifié de "péché mortel", tandis que le Mexique, la Colombie et le Salvador s'y sont déclarés favorables. Mais, a précisé M. Calderon, à condition de n'employer que des plantes qui ne soient pas de consommation humaine, ce qui exclut le maïs blanc.

    Le sujet est d'autant plus sensible que, avec la hausse vertigineuse du prix du pétrole, de nombreux automobilistes de Californie, d'Arizona ou du Texas franchissent la frontière pour remplir leur réservoir au Mexique, où l'essence coûte un tiers moins cher qu'aux Etats-Unis.

    La facture devient doublement douloureuse pour le gouvernement mexicain, contraint d'importer, principalement de chez son voisin du nord, 43 % du carburant consommé dans le pays.

    Par le Monde
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