Mauritanie : l’étrange constitutionnalisme algérien
Par :Mustapha Hammouche -Liberté-Commentant le coup d’Etat opéré par l’armée en Mauritanie, le ministre algérien des Affaires étrangères a déclaré, hier, que “l’Algérie condamne les changements de pouvoir en violation des règles constitutionnelles”.
Il y a peut-être des raisons de se tenir à distance de la junte conduite par le général Ould Cheikh Ahmed, mais l’argument de la constitutionnalité a quelque chose d’effronté.
Dans le tiers-monde, l’histoire a souvent offert aux armées l’opportunité de s’emparer de la souveraineté nationale.
Mais comme tout mariage, même forcé, il se fait pour le meilleur ou pour le pire, il arrive donc qu’une armée, évoluant d’elle-même ou contrainte à l’évolution, veuille se décharger d’une fonction qu’elle sait ne pas être sa vocation. Elle propose alors à la société de se réapproprier la décision politique en s’inspirant des règles universellement admises du moment. C’est ce qui semble être arrivé en Mauritanie au cours des deux dernières années. Ce dernier coup d’?tat se justifie, du point de vue des généraux putschistes, par la dérive autoritaire du pouvoir civil démocratiquement promu.
Question en suspens.
On peut être, par principe, contre l’intervention militaire dans la vie publique. Mais quand la rupture intervient dans un pays dépourvu des règles d’évolution démocratique, cette attitude ne nous met pas du côté du progrès. Il suffit de se référer aux expériences turque ou portugaise, pour s’en convaincre. On peut, cependant, légitimement s’y opposer, par orthodoxie démocratique ou par antimilitarisme de conviction.
Mais ce n’est vraiment pas le genre d’afféteries que le pouvoir algérien peut se permettre, au vu de son expérience passée et présente. C’est le général Khaled Nezzar qui l’écrit noir sur blanc, attestant, détails anecdotiques à l’appui, cette consubstantialité du pouvoir et de la force dans notre pays.
Ces dernières décennies, la pratique de l’arbitraire politique a perdu de sa légitimité internationale, même si elle reste tolérable quand elle est maquillée de formes démocratiques. Ce qui permet de faire l’économie du viol armé de la Constitution, puisque la démocratie d’apparat autorise à la changer autant de fois que de besoin. C’est à peu près le cas de notre pays. Mais aussi du Maghreb, dans le monde arabe et en Afrique.
Medelci, pour affirmer la vigilance légaliste du Maghreb, nous relate que… Al-Kadhafi a dépêché un représentant dûment mandaté à Nouakchott ! Spectacle surréaliste que celui d’un régime qui n’a pas de constitution et qui, depuis quarante ans, est “guidé” par le seul bon vouloir d’un colonel accourt au chevet de la démocratie mauritanienne, certes à l’état fœtal, mais qui a le mérite d’être envisagée ! Il ne faut pas faire de coup d’?tat, mais on peut l’avoir fait !
Dommage qu’on n’ait pas soufflé mot de la partition de la Palestine par les milices du Hamas ou de la néantisation de l’?tat libanais par l’armée du Hizbollah. Mais c’est l’islamisme en marche, et c’est donc dans l’ordre des choses.
Belkhadem, islamiste conséquent, a proclamé que la société algérienne n’avait pas le Coran pour Constitution. Mais le viol intégriste de la Constitution, même national, est licite.
D’où nous vient donc cette soudaine, et sûrement, passagère préciosité démocratique ?
M. H.
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