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Alger : Des espaces publics qui échappent à l’Etat

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  • Alger : Des espaces publics qui échappent à l’Etat

    Heureux est celui qui réussit à acquérir, pendant le ramadan, un miniscule mètre carré sur les trottoirs d’Alger. Une telle surface, aussi réduite soit-elle, s’avère suffisante pour l’exercice d’un commerce fort lucratif.

    Une palette d’activités s’offre aux maîtres des lieux, en dépit du caractère informel de la profession. Cependant, c’est le secteur agro-alimentaire qui détient la palme, ramadan aidant. Une épicerie à ciel ouvert, sous un soleil de plomb, qui propose de tout, même des fromages de courte durée de vie.

    Pourtant, les gens s’y bousculent en ce début d’après-midi de jour de ramadan. On achète sans vérifier son porte-monnaie. A croire que l’on est à la veille d’une guerre mondiale, et qu’ainsi on est tenu, dans l’urgence, de constituer son propre stock alimentaire.

    «Mais là où le bât blesse, c’est qu’une bonne partie de la nourriture censée être consommée à la rupture du jeûne finira certainement à la décharge publique», soupire un homme de 50 ans, visiblement mal à l’aise d’être cloîtré au milieu d’une foule résolue à remplir ses sachets. Un petit paquet à la main, l’homme presse le pas afin de quitter les lieux le plus vite possible.

    «On n’a plus le droit de marcher tranquillement, sans être bousculé», grogne le quinquagénaire, comme pour s’élever contre le squat de la voie publique. La scène se passe au marché informel de la cité du 8-Mai 1945, ex-Sorecal, à Bab Ezzouar. Une localité de la banlieue, à 15 km à l’est d’Alger, où les commerçants clandestins se comptent par dizaines. Aucune attache ne les lie à l’Etat, à commencer par l’APC du coin qui affiche depuis longtemps une indifférence qui finit par lasser plus d’un. Cela étant, le site le plus prisé est situé devant le nouveau lycée. Face aux «alimentations générales» qui activent légalement. Les étals informels sont collés les uns aux autres, occupant la totalité du vaste trottoir attenant à la grande artère de la cité Sorecal.

    L’une de ces épiceries en plein air draine du monde. Et pour cause, le «local» est bien achalandé. Les deux, trois ou cinq dinars de moins que chez le commerçant «fiscalisé» font que les consommateurs affluent chez ce jeune homme de 25 ans. «J’ai juste besoin d’une boîte de conserve de thon pour ma macédoine. Elle coûte moins cher que chez l’épicier d’en face. En plus, je ne risque rien pour ma santé», se justifie une dame à l’allure occidentalisée.

    Une cliente réclame un sachet de pruneaux pour préparer son «l’ham lahlou». Un jeune homme pose la main sur une boîte de fromage, un autre, d’un certain âge, transperce des yeux un bocal de mayonnaise d’importation.

    A côté de cette minisupérette, un étal occupé par deux jeunes propose du qalbellouz. «C’est du Serir authentique, c’est garanti Aâmo !» lancent-ils à un homme qui semble bien maîtriser le sujet. «Tu veux dire qu’il vient tout droit d’El-Madania», rétorque l’homme d’une soixantaine d’années. «C’est ça», conclu, le jeune homme qui obtient finalement le quitus du vieil Algérois pour une vente de 5 morceaux à 25 DA l’unité. Serir est une sorte de «griffe» reconnue dans le carré des meilleurs halwadji d’Alger, spécialiste notamment du qelbellouz, un mets traditionnel dont la célébrité dépasse depuis longtemps les frontières du pays. Près des commerçants (à la sauvette ?), un jeune homme, tenant un bâton à la main, parlemente à voix haute avec un automobiliste qui vient de quitter son stationnement.

    «Tu dois payer comme les autres», menace-t-il sous les yeux de deux policiers, apparemment préoccupés par d’autres sujets plus importants.


    - Le Jeune Independant
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