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Mohammed Dib, de Brême à Tlemcen, ou le dialogue des cultures

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  • Mohammed Dib, de Brême à Tlemcen, ou le dialogue des cultures

    «Tous liens rompus», tel est le slogan choisi par l’association culturelle La Grande Maison relevant de la Fondation Mohammed Dib (Tlemcen) et l’atelier de théâtre de l’université de Brême (Allemagne) pour le spectacle commun qu’ils ont donné dans la soirée du lundi dernier à la maison de la culture Abdelkader Alloula.

    La salle de spectacle de la maison de la culture Abdelkader Alloula de Tlemcen a abrité, dans la soirée de lundi dernier, un spectacle commun donné par l’association culturelle La Grande Maison, relevant de la fondation Mohammed Dib (domiciliée à El-Méchouar) et le département de français de l’université de Brême (Allemagne).

    En guise de lever de rideau, il a été proposé au public trié sur le volet la projection d’un court métrage intitulé « Tout va bien » du jeune réalisateur Benhamed Noureddine (membre de la dite association), adapté du roman «L’accompagnatrice » (1935) de l’auteure russe Nina Berberova, dont le tournage (à Tlemcen) a pris trois jours avec un casting puisé des membres de l’association (atelier de théâtre Dar Sbitar). »L’absurdité du sort et l’injustice de la vie», tel est le propos de ce film de fiction, selon le réalisateur, un thème qui rappelle étrangement « L’étranger » (1942) d’Albert Camus et son mythe de Sisyphe (porté à l’écran en 1967 par le réalisateur italien Luchino Visconti).

    Il convient de mentionner à ce titre qu’après la tenue du colloque « Littérature et cinéma » en 2006, l’idée de créer un atelier de cinéma germa et fit son chemin. A cet effet, un stage fut organisé au siège de l’association (janvier 2007) avec l’aimable concours de l’association « Pêcheurs d’images » de Lunel (Montpellier). Dans le sillage de cet échange, d’autres activités virent le jour, à savoir la création d’un sous-atelier d’écriture de scénario, un stage d’initiation aux métiers du cinéma à l’université Paul Valéry de Montpellier, des rencontres dans le cadre des journées du cinéma méditerranéen organisées par l’ASNPI de Lunel (France), l’écriture, la réalisation et le tournage d’un court métrage « Tout va bien » à partir d’un texte de Nina Berberova et d’autres à partir de l’oeuvre de Mohammed Dib : « Mille hourras pour une gueuse», dont le tournage se déroula en mars 2008 à Grau-du-Roi (Montpellier ) avec un casting composé de trois jeunes acteurs de l’association (Fewzi-Farah-Sanaa) sur Montpellier, plus précisément à Grau-du-Roi. Les jeunes acteurs scénaristes avaient été accueillis par l’ASCMPI (Association Pêcheurs d’images). La réalisation du court métrage était confiée à M. José Hernandez, réalisateur et membre de l’ASCMPI. Le tournage dura plusieurs jours. Le montage fut réalisé en atelier à Tlemcen en février 2008 avec José Hernandez. Le court métrage avait été présenté d’abord à Lunel pour le Festival du cinéma méditerranéen en mars 2008, puis à Tlemcen en mai 2008. Quant au spectacle scénique présenté sur les planches, il était basé sur un montage poétique animé par une troupe « mixte » comptant 24 comédiens (dont 11 Tlemcéniens et 13 Brêmois), qui ont eu à déclamer sur un fond chorégraphique et musical (guitare basse et percussion, outre les jeux de lumière) respectivement des poèmes de Mohammed Dib (Ombre Gardienne, L’Aube point, Sur la Terre errante, Port, Complainte, Etranger, Les statues, Tel jour, Tänzerin, Ponts) et des poèmes allemands de Bertolt Brecht (Bezeichnung Emigranten), Mascha Kaleko (Inventar) et Hilde Domin (Exil et Silence). Une mise en scène signée conjointement par Ginsburger Bernard (U. Brême) et Kara Slimane Fawzi (GM Tlemcen), le projet étant organisé par le duo Arend Elisabeth et Benmansour Sabéha.

    Poétique de l’exil


    Flanquée d’une collègue «interprète» (pour la traduction simultanée), Mme Arend Elisabeth, professeur d’université de langues romanes (francophone et italienne) fera une lecture sémantique poétique du vocable « exil ». Pour clore en apothéose le spectacle, une comédienne brêmoise descendit théâtralement de la scène et distribua à la salle, tel un « tract », des papillons sur lesquels était porté le poème de Hilde Domin « Silence and exile » (écrit dans les deux langues, l’allemand et le français) en invitant l’assistance à « réciter » en choeur le texte « dédié » aux poètes qui ont souffert de ce syndrome du déracinement: « Unverlierbares Exil (Exil inaliénable) / Du tragst es bei dir (Tu le portes en toi) / Du schlupfst hinein (Tu t’y glisses) / Gefaltetes Labyrinth (Labyrinthe de plis)/ Wuste (Désert) / Einteckbar (Qu’on peut porter en soi) ». Il convient d’indiquer que ce spectacle a pu être organisé grâce au soutien du DAAD (Bureau des échanges académiques allemand), l’ambassade d’Allemagne à Alger, l’université Abou Bakr Belkaïd de Tlemcen, la direction de la culture et la maison de la culture. La délégation allemande ainsi que les membres de l’association culturelle organisatrice ont été conviés à un dîner offert en leur honneur par le recteur de l’UABT, M. Noureddine Ghouali. A noter l’absence du nouveau directeur du CCF, M. Sylvain Treuil, qui était retenu par l’ouverture du cycle «Philosopher en Algérie» avec la première conférence programmée ce jour-là intitulée «Concept d’Afrique ou philosophie africaine », une rencontre-débat animée en tandem par Salim Abdelmadjid et Jean-François Poirier. Enfin, en marge du spectacle, nous avons recueilli quelques impressions sur cette initiative culturelle. A ce propos, M. Ňeorges Walendy, attaché culturel à l’ambassade d’Allemagne à Alger,Ġnous confiera: «Je me réjouis énormément de cette expérience. C’était quelque chose de très beau, très intéressant, très audacieux de montrer la poésie. C’est vraiment quelque chose qui n’est pas facile... J’ai surtout apprécié le fait qu’on ait mélangé les différents styles de poésie ainsi que les différentes langues : il y avait des voix en arabe, des voix en français, des voix en allemand. Je souhaite également que tout cela ne soit que le début d’une coopération culturelle très fructueuse entre l’Allemagne et l’Algérie parce que c’est vraiment à travers un projet pareil qu’on essaie de mettre les jeunes ensemble pour se connaître... Quant à Mme Sabéha Benmansour, présidente de la fondation Mohammed Dib, elle nous apprendra que « La première expérience que nous avions réalisée était faite sur un texte difficile qui est « L’Aube Ismaël » de Mohammed Dib. Nous l’avions réalisée à Brême en octobre 2007. Avec nos jeunes adhérents de l’atelier de théâtre, quelques-uns parce que nous n’avions pas pu être nombreux pour le voyage, en relation avec les jeunes Allemands qui avaient déjà travaillé le texte, nous avions réussi à monter un spectacle commun en l’espace de trois/quatre jours sur la base d’un texte extrêmement difficile. Ce qui est intéressant dans cet échange, dans cette expérience, c’était de voir d’abord comment deux points de vue émanant d’espaces différents peuvent concorder, peuvent se parler, peuvent converger pour donner quelque chose qui serait de l’ordre d’un espace commun de regard sur ce qui est universel, c’est-à-dire l’expression poétique, l’expression artistique...

    Dialoguer avec les œuvres de Dib


    Nous avons invité nos amis de Brême à nous rejoindre dans l’espace même où était mise cette oeuvre de Mohammed Dib et ils sont arrivés avec leur propre texte, et ces textes-là ont dialogué en fait avec le texte de Dib dans l’espace (de la fondation) Mohammed Dib. Il y a eu une symbiose absolument extraordinaire. Mais ce qui est vraiment extraordinaire, c’est que ça s’est fait en deux jours et demi de travail, ce qui est quand même un record ! Je suis très, très heureuse de cet échange et j’espère que ce n’est que le début... ».

    Mme Arend Elisabeth, responsable de la délégation allemande, soulignera pour sa part : « Pour moi, je peux dire que je suis tout à fait heureuse de ce genre d’échange qu’on vient d’établir avec la fondation La Grande Maison. Ça a commencé il y a déjà cinq ans, maintenant le moment est venu pour élargir la base de la collaboration entre la fondation et moi en tant qu’universitaire, mais aussi intégrer des étudiants pour leur donner la possibilité vraiment de se connaître, de travailler ensemble et de se rendre compte de ce qui est différent mais également et surtout de ce qui est commun. Ce qui compte pour moi, c’est aussi le fait qu’il y a des amitiés qui se sont développées à partir de notre travail ».

    M. B. Ginsburger, dramaturge à l’université de Brême, qui fait beaucoup de théâtre avec ses étudiants de l’université de Brême, puisqu’il dirige un atelier vieux d’une vingtaine d’années, estime que « Pour moi, le dialogue, pour aller tout de suite à l’essentiel, le dialogue est quelque chose de fragile, le dialogue qui s’est installé ici s’est installé sur la poésie ; la poésie aussi est un objet délicat. Et on a établi un dialogue à la fois fort et fragile sur un objet délicat et fondamental... Ce que je voudrais, c’est que ce type de dialogue s’instaure de plus en plus souvent parce que là il permet d’établir des liens très forts entre les gens et cela sur un objet poétique. Et la poésie, c’est vraiment une manière de faire quelque chose et un petit peu de faire un monde... ».

    A titre de rappel, une délégation constituée de cinq membres de l’association culturelle La Grande Maison représentant la fondation Mohammed Dib, en l’occurrence Mme Benmansour Sabéha , M. Ali Abdoun , Mlle Soulimane Farah, Mlle Benyahia Someya et Kara Slimane Fewzi (comédiens) s’était rendue le 25 mars 2007 en Allemagne dans le cadre des échanges culturels entre La Grande Maison et l’université de Brême. L’accueil fut assuré par le département des études francophones de l’université de Brême, représenté par le Dr Elisabeth Arend, l’Institut Français de Brême ainsi que les jeunes étudiants de l’atelier de théâtre de l’Université de la même ville dirigé par M. Bernard Ginsburger.
    Quotidien d'Oran
    Mieux vaut un cauchemar qui finit qu’un rêve inaccessible qui ne finit pas…
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