Le ministre des affaires religieuses et des waqfs, Bouabdellah Ghlamallah, à liberté
“La salafia veut avoir un pied dans l’État”
“La salafia veut avoir un pied dans l’État”
Montée du salafisme, prolifération de fetwas, contrôle des imams, surveillance des mosquées, recrutement de kamikazes, présentation devant la justice de personnes pour non-observation du jeûne, évangélisation et d’autres sujets sensibles ont été abordés par le ministre des Affaires religieuses dans cette interview exclusive qu’il nous a accordée.
Liberté : Six personnes ont été condamnées à six ans de prison avant d’être relaxées par le tribunal de Biskra pour non-observation du jeûne ; qu’en pensez-vous en tant que ministre des Affaires religieuses ?
B. Ghlamallah : Tout d’abord, je tiens à dire que cela participe de la relation des Algériens avec la religion. La religion chez nous véhicule la notion d’appartenance. On ne peut pas dissocier notre appartenance à la religion de notre appartenance au pays. Car pour nous, les Algériens, l’islam et la patrie, c’est une même chose. Les ONG, par médias interposés, commencent à nous envoyer des lettres nous demandant de séparer la religion de la politique. Personnellement, je ne souhaite pas en arriver là. Mais si c’est le cas, cela va demander beaucoup de temps. Pour revenir à ces condamnations, comme l’a si bien dit l’un de leurs avocats, il n’y a pas dans le code civil un article de loi sur lequel on peut se baser pour condamner les non-jeûneurs. Mais la société a sa propre position sur le sujet.
Avez-vous été consulté sur cette affaire ?
Si le procureur de la République qui les a présentés à la justice m’avait demandé mon avis, bien entendu, je lui aurais dit de laisser “cette affaire entre eux et Dieu”. Il fallait peut-être juste les sermonner, les convoquer et leur dire que ce n’est pas bien de se comporter de cette manière. De là à les mettre en prison, je ne suis pas d’accord. Cette affaire est rentrée dans l’ordre sans mon intervention. Le tir s’est rectifié de lui-même. Il faut être rationnel. Je sais qu’il y a dans mon entourage des jeunes qui n’observent pas le jeûne, et après ?
Ne faut-il pas redouter que ce cas n’ouvre la voie à d’autres abus, rétrécissant davantage le champ des libertés ?
La justice les a condamnés non sur la base de la religion, mais sur la base d’une atteinte à la société. Ces personnes n’ont pas changé de religion. Elles ont violé une organisation sociale. Quant à celui qui change de religion, il est libre de le faire. Le Coran dit que nul ne doit être contraint à pratiquer une religion de force.
Comment sont organisées actuellement les prononciations de fetwas ?
Les fetwas sont du ressort des conseils scientifiques. Le HCI se prononce uniquement sur les questions sans antécédents que lui soumet le président de la République à titre exceptionnel.
Pourtant, le HCI s’est dit opposé à ce que l’argent de la zakat soit collecté par le ministère des Affaires religieuses et qu’il ait servi parfois au financement des microentreprises en faveur des jeunes…
Le Haut-Conseil Islamique a un avis sur la question, et on a le nôtre. L’Islam est vaste. Le président du HCI a le droit de donner son avis uniquement en tant que personne, et non au nom de l’institution qu’il dirige.
En attendant la nomination d’un mufti de la République, comment comptez-vous gérer la prolifération des fetwas dans les mosquées autour notamment des boissons comme le Coca-Cola ? Faire en sorte que l’Algérien qui, avant d’entamer une quelconque démarche, se réfère souvent à la religion et ne se perde pas dans le labyrinthe des fetwas tantôt contradictoires, tantôt irrationnelles ?
On a les conseils scientifiques au niveau régional qui prononcent des fetwas devant être suivies par tous les Algériens en fonction d’une conviction nationale. Si Dieu le veut, on va bientôt créer une institution de fetwas au niveau national. Maintenant, le problème qui se pose est la prolifération des sites de fetwas sur le Net. Ces gens- là sont libres. C’est au citoyen de choisir entre la fetwa nationale ou de suivre l’avis de telle ou telle personne. Il y a toutefois des gens qui se basent sur leurs convictions politiques en prononçant une fetwa. Ceux-là sont dangereux.
Parfois, ce sont des imams désignés par l’État qui s’adonnent à ce genre de pratiques…
Les imams désignés par l’État se réfèrent aux conseils scientifiques. Il y a toutefois certains qui ont attaqué Djezzy et la firme Coca-Cola. C’est des exceptions qui ne font pas la règle.
B. Ghlamallah : Tout d’abord, je tiens à dire que cela participe de la relation des Algériens avec la religion. La religion chez nous véhicule la notion d’appartenance. On ne peut pas dissocier notre appartenance à la religion de notre appartenance au pays. Car pour nous, les Algériens, l’islam et la patrie, c’est une même chose. Les ONG, par médias interposés, commencent à nous envoyer des lettres nous demandant de séparer la religion de la politique. Personnellement, je ne souhaite pas en arriver là. Mais si c’est le cas, cela va demander beaucoup de temps. Pour revenir à ces condamnations, comme l’a si bien dit l’un de leurs avocats, il n’y a pas dans le code civil un article de loi sur lequel on peut se baser pour condamner les non-jeûneurs. Mais la société a sa propre position sur le sujet.
Avez-vous été consulté sur cette affaire ?
Si le procureur de la République qui les a présentés à la justice m’avait demandé mon avis, bien entendu, je lui aurais dit de laisser “cette affaire entre eux et Dieu”. Il fallait peut-être juste les sermonner, les convoquer et leur dire que ce n’est pas bien de se comporter de cette manière. De là à les mettre en prison, je ne suis pas d’accord. Cette affaire est rentrée dans l’ordre sans mon intervention. Le tir s’est rectifié de lui-même. Il faut être rationnel. Je sais qu’il y a dans mon entourage des jeunes qui n’observent pas le jeûne, et après ?
Ne faut-il pas redouter que ce cas n’ouvre la voie à d’autres abus, rétrécissant davantage le champ des libertés ?
La justice les a condamnés non sur la base de la religion, mais sur la base d’une atteinte à la société. Ces personnes n’ont pas changé de religion. Elles ont violé une organisation sociale. Quant à celui qui change de religion, il est libre de le faire. Le Coran dit que nul ne doit être contraint à pratiquer une religion de force.
Comment sont organisées actuellement les prononciations de fetwas ?
Les fetwas sont du ressort des conseils scientifiques. Le HCI se prononce uniquement sur les questions sans antécédents que lui soumet le président de la République à titre exceptionnel.
Pourtant, le HCI s’est dit opposé à ce que l’argent de la zakat soit collecté par le ministère des Affaires religieuses et qu’il ait servi parfois au financement des microentreprises en faveur des jeunes…
Le Haut-Conseil Islamique a un avis sur la question, et on a le nôtre. L’Islam est vaste. Le président du HCI a le droit de donner son avis uniquement en tant que personne, et non au nom de l’institution qu’il dirige.
En attendant la nomination d’un mufti de la République, comment comptez-vous gérer la prolifération des fetwas dans les mosquées autour notamment des boissons comme le Coca-Cola ? Faire en sorte que l’Algérien qui, avant d’entamer une quelconque démarche, se réfère souvent à la religion et ne se perde pas dans le labyrinthe des fetwas tantôt contradictoires, tantôt irrationnelles ?
On a les conseils scientifiques au niveau régional qui prononcent des fetwas devant être suivies par tous les Algériens en fonction d’une conviction nationale. Si Dieu le veut, on va bientôt créer une institution de fetwas au niveau national. Maintenant, le problème qui se pose est la prolifération des sites de fetwas sur le Net. Ces gens- là sont libres. C’est au citoyen de choisir entre la fetwa nationale ou de suivre l’avis de telle ou telle personne. Il y a toutefois des gens qui se basent sur leurs convictions politiques en prononçant une fetwa. Ceux-là sont dangereux.
Parfois, ce sont des imams désignés par l’État qui s’adonnent à ce genre de pratiques…
Les imams désignés par l’État se réfèrent aux conseils scientifiques. Il y a toutefois certains qui ont attaqué Djezzy et la firme Coca-Cola. C’est des exceptions qui ne font pas la règle.
Vous les avez sanctionnés ?
On les a mis en garde.
On les a mis en garde.
Envisagez-vous de raffermir le contrôle des imams et des mosquées pour empêcher la prolifération de ces dérapages ?
Le mot contrôle ne veut pas dire la mainmise. Les imams sont libres s’ils respectent le consensus national autour de l’intérêt du pays. On ne leur impose pas le texte du prêche, Certains sortent de ce contexte, profitant justement de cette marge de liberté. Mais si cette marge de liberté n’existait pas, il n’y aurait pas eu de création.
L’implication de l’imam de la mosquée d’Appreval a été évoquée dans le recrutement de jeunes kamikazes. Depuis, n’avez-vous pas révisé votre position sur cette notion de liberté accordée aux imams ?
Cet imam a été innocenté par la justice après avoir purgé trois mois de prison. Supposons que cela soit vrai. C’est l’implication d’un imam sur les 22 000. C’est une exception. Les kamikazes sont “fabriqués” sur la base d’une idée vieille et archaïque. Avant, on disait que la terre qui n’appartient pas aux musulmans est la terre des mécréants. On est un pays musulman. La preuve est l’adhan qui s’enchaîne d’El-Tarf à Souk-Ahras, de Annaba à M’sila jusqu’à Tindouf. Le djihad n’est pas permis en Algérie.
Le mot contrôle ne veut pas dire la mainmise. Les imams sont libres s’ils respectent le consensus national autour de l’intérêt du pays. On ne leur impose pas le texte du prêche, Certains sortent de ce contexte, profitant justement de cette marge de liberté. Mais si cette marge de liberté n’existait pas, il n’y aurait pas eu de création.
L’implication de l’imam de la mosquée d’Appreval a été évoquée dans le recrutement de jeunes kamikazes. Depuis, n’avez-vous pas révisé votre position sur cette notion de liberté accordée aux imams ?
Cet imam a été innocenté par la justice après avoir purgé trois mois de prison. Supposons que cela soit vrai. C’est l’implication d’un imam sur les 22 000. C’est une exception. Les kamikazes sont “fabriqués” sur la base d’une idée vieille et archaïque. Avant, on disait que la terre qui n’appartient pas aux musulmans est la terre des mécréants. On est un pays musulman. La preuve est l’adhan qui s’enchaîne d’El-Tarf à Souk-Ahras, de Annaba à M’sila jusqu’à Tindouf. Le djihad n’est pas permis en Algérie.
Votre département a entamé récemment une campagne de sensibilisation contre le phénomène de harragas, kamikazes, émeutiers… Y a-t-il un répondant ?
Oui. Des parents témoignent que grâce à certains imams, leurs enfants ont été détournés de cette voie. Les auteurs des tueries sont les ennemis du pays et les ennemis de l’Islam. Ils utilisent souvent l’appât de la drogue pour enrôler les jeunes dans leurs rangs. Ces jeunes fument un jour un joint et deviennent l’esclave de celui qui lui procure la drogue.
On met en garde les jeunes contre la résolution de leurs problèmes par la violence en leur donnant des exemples puisés dans l’histoire et la réalité même du terrain. Toute une pédagogie a été mise en place pour récupérer ces jeunes.
Quelle est actuellement l’emprise des salafistes sur la société ?
Notre devoir est de chercher à faire en sorte que l’Algérien puise ses positions en fonction de la réalité algérienne. Il y a des salafistes qui ont célébré comme les Saoudiens l’Aïd mardi, et non pas mercredi comme nous. Quelle différence y a-t-il entre eux et les évangélistes ? Aucune. Ils portent tous les deux atteinte à la nation en acceptant une immixtion dans les affaires du pays. On a le devoir de dire que toute position qui n’émane pas de l’identité nationale algérienne est nuisible à son auteur et son environnement. Comment s’est constituée la salafia ? Elle s’est constituée à travers les médias, par le biais de ceux qui leur facilitent les procédures de visas et de bourses et par ceux qui veulent avoir un pied dans l’État.
Oui. Des parents témoignent que grâce à certains imams, leurs enfants ont été détournés de cette voie. Les auteurs des tueries sont les ennemis du pays et les ennemis de l’Islam. Ils utilisent souvent l’appât de la drogue pour enrôler les jeunes dans leurs rangs. Ces jeunes fument un jour un joint et deviennent l’esclave de celui qui lui procure la drogue.
On met en garde les jeunes contre la résolution de leurs problèmes par la violence en leur donnant des exemples puisés dans l’histoire et la réalité même du terrain. Toute une pédagogie a été mise en place pour récupérer ces jeunes.
Quelle est actuellement l’emprise des salafistes sur la société ?
Notre devoir est de chercher à faire en sorte que l’Algérien puise ses positions en fonction de la réalité algérienne. Il y a des salafistes qui ont célébré comme les Saoudiens l’Aïd mardi, et non pas mercredi comme nous. Quelle différence y a-t-il entre eux et les évangélistes ? Aucune. Ils portent tous les deux atteinte à la nation en acceptant une immixtion dans les affaires du pays. On a le devoir de dire que toute position qui n’émane pas de l’identité nationale algérienne est nuisible à son auteur et son environnement. Comment s’est constituée la salafia ? Elle s’est constituée à travers les médias, par le biais de ceux qui leur facilitent les procédures de visas et de bourses et par ceux qui veulent avoir un pied dans l’État.
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