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Maroc : Politique. Les derniers exilés

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  • Maroc : Politique. Les derniers exilés

    Opposants au régime de Hassan II ou détenteurs de secrets compromettants, ils ont quitté le Maroc sans véritable espoir de retour. Portraits croisés des refuzniks du nouveau règne.


    Mahjoub Tobji
    La star de Pau

    “Non je ne suis pas un réfugié politique, je suis juste de passage en France”, martèle à qui veut bien l’entendre l’ancien commandant des Forces armées royales. Pourtant, Mahjoub Tobji semble s'être

    définitivement installé à Pau, petite ville des Pyrénées-Atlantiques où il a posé ses valises en 2004. “À l’époque, je commençais à me sentir mal à l’aise au Maroc. J’avais besoin de changer d’air, de partir très loin”, explique l’auteur, deux ans plus tard, du livre évènement Les officiers de Sa Majesté. Un brûlot truffé de révélations inédites, et dont la cible principale n’est autre que l’ennemi éternel de Tobji : le général Housni Benslimane. À Pau, Mahjoub Tobji est devenu une petite célébrité. D’abord pour son parcours hors du commun : ce natif de Meknès en 1944, formé à l’Académie militaire de la même ville, a fait la guerre du Golan (1973), celle du Sahara (entre 1978 et 1983), et a été membre de la Garde royale (entre 1972 et 1978). Mais surtout pour son implication dans le milieu associatif local. “Il est très impliqué auprès des personnes âgées et des handicapés”, nous apprend un de ses proches, ajoutant que l’ex-aide de camp des généraux Sefrioui et Dlimi “fait régulièrement du sport, notamment de la natation, de la randonnée et de l’alpinisme”. À quand alors un retour au Maroc ? “Jamais je ne reviendrai”, répond catégoriquement l’intéressé, avant de se reprendre : “Je changerais peut-être d’avis le jour où Housni Benslimane ne sera plus là”.


    Mustapha Adib
    L'exilé volontaire
    “Mustapha serait sur le point de rentrer au Maroc pour lancer une start-up”, nous apprend un proche de l’ancien capitaine des FAR, installé en France depuis 2002, après avoir purgé deux ans et demi de prison pour avoir dénoncé la corruption au sein de l’institution militaire. Joint par téléphone, Mustapha Adib confirme : “J’y pense sérieusement, mais à condition bien sûr de trouver des sources de financement”. Et si l'ex-militaire songe à monter sa propre entreprise, c'est moins par choix que par contrainte. “J’ai envoyé des CV et des demandes d’emploi à plusieurs entreprises marocaines, mais en vain. La plupart ne me répondaient même pas, pour des raisons clairement politiques”, affirme-t-il. Même constat en France, où l’ingénieur en télécoms et lauréat de la prestigieuse ENST de Paris a eu droit au même traitement. “Même si je les intéresse, tous les grands groupes français ont des intérêts au Maroc, qu'ils préfèrent ne pas risquer”, explique-t-il. Pas de quoi décourager Mustapha Adib. À 39 ans, l'homme, qui alterne semaines de chômage et petits boulots, garde espoir. “Le pire est derrière moi”, souligne celui qui vient de réussir à déposer deux brevets d’invention pour le compte d’un de ses employeurs. Installé dans un appartement coquet du centre-ville de Paris, Mustapha Adib se serait, aux dernières nouvelles, marié avec une jeune médecin marocaine. Interrogé sur un éventuel retour dans les rangs de l'armée marocaine, il répond simplement : “Peut-être, mais à condition que justice soit faite. Pour moi comme pour les vrais coupables”.


  • #2
    Moulay Zine Zahidi
    Le fugitif
    Il a disparu dans la nature au lendemain de l’éclatement, en 2001, de l’affaire du CIH, un des plus grands scandales financiers qu’a connus le Maroc. On l’accusait d’avoir, du temps où il était le président de l'établissement financier, octroyé à profusion des prêts astronomiques à des entrepreneurs non solvables. Du coup, alors que certains de ses ex-collaborateurs sont appelés à comparaître devant la justice, lui opte finalement pour l’exil en Espagne, pays dont il détient d’ailleurs la nationalité (via une épouse espagnole). Depuis, Moulay Zine Zahidi mène une vie de fugitif. La raison en est toute simple : l'homme aurait, comme il l'a souvent confié à ses proches, peur pour sa sécurité. “Il n’invite quasiment personne chez lui, de peur qu’on sache où il habite. Il vous appelle toujours d’une cabine téléphonique plutôt que de son portable”, rapporte ce journaliste qui a réussi à lui arracher un rendez-vous tenu finalement dans le hall d'un hôtel au Portugal. De son exil espagnol, Moulay Zine Zahidi, très diminué physiquement, a toujours clamé son innocence. “Je ne faisais qu’appliquer des consignes venues d’en haut”, a-t-il toujours déclaré. Et pour le prouver, il n’hésite pas à faire dans la menace, prétendant détenir des documents compromettants pour des proches du Palais. En 2006, il passe à l’acte en accordant une interview explosive au Journal hebdomadaire. Les deux journalistes de la publication, partis en Espagne à la rencontre de Zahidi, ont été ensuite arrêtés et longuement interrogés par les autorités marocaines. Une année plus tard, la justice marocaine condamnait Moulay Zine Zahidi par contumace à 10 ans de prison ferme.


    Ahmed Rami
    Le putschiste antisémite
    Cela fait 35 ans que l’ancien adjoint du général Oufkir n’a pas mis les pieds au Maroc. Condamné à mort en 1972 pour son implication dans les coups d’Etat de Skhirat et du “Boeing royal”, le jeune officier des FAR a réussi à prendre la fuite, en passant clandestinement en Algérie puis en Libye, avant de poser définitivement ses valises en Suède. “À l’époque, j’avais lu dans la presse que les autorités suédoises proposaient l’asile politique aux déserteurs américains de la guerre du Vietnam. Je me suis alors dit qu’il fallait que je tente ma chance dans ce pays”, explique-t-il aujourd’hui. Le choix s’avère finalement judicieux : non seulement les autorités suédoises lui offrent le statut de réfugié politique, mais s'engagent également à assurer sa sécurité. “En 1975, la police suédoise a déjoué une tentative de kidnapping me visant. Une opération qui était montée par les services secrets marocains”, avance-t-il. Pas de quoi calmer les ardeurs révolutionnaires d'Ahmed Rami. De Stockholm, où il s’est installé, l'homme multiplie les sorties incendiaires contre la monarchie marocaine. Il lui consacre même quelques brûlots, intitulés Qui gouverne le Maroc ? ou encore Une monarchie coloniale au Maroc. Mais là où il est, Ahmed Rami fait surtout parler de lui par son antisémitisme tous azimuts. Depuis son arrivée en Suède, ce natif de Tafraout s’est lancé dans une véritable croisade contre les juifs, via l'animation de conférences et la publication d'ouvrages hostiles au judaïsme. En 1987, il va même jusqu’à créer une radio (Radio islam) à travers laquelle il diffuse de la propagande antisémite, néo-nazie et négationniste. Des positions qui lui valent en 1990 une condamnation à six mois de prison, “sous la pression du lobby sioniste”, répète-t-il. Marié depuis bientôt quatre ans à une Russe, avec laquelle il vient d’avoir un premier enfant, Ahmed Rami, 60 ans, caresse toujours le rêve de pouvoir rentrer dans son pays natal. “Si c’était possible, je ne resterais pas une seule minute de plus ici, assure-t-il. Mais bon, il me faudrait des garanties que rien ne m’arrivera une fois rentré au Maroc”. Pas de chance…


    Abdelkrim Motiî
    Rentrera, rentrera pas…
    Le retour au Maroc du chef du mouvement islamiste marocain (ex-Chabiba islamiya) a été plusieurs fois annoncé ces dernières années. En 2006, des sources proches de sa famille confiaient à TelQuel qu’il avait même reçu des garanties dans ce sens par le biais d’un membre de la diplomatie marocaine. Mais il n’en fut rien. Pourtant, depuis l’intronisation de Mohammed VI, Abdelkrim Motiî, installé en Libye dès le milieu des années 80, après un séjour de dix ans en Arabie Saoudite, a multiplié les appels du pied en direction du Palais. Le même Motiî qui a combattu avec acharnement la monarchie marocaine du temps de Hassan II. En 1983 et 1984, le présumé assassin du leader socialiste Omar Benjelloun en 1975, a même envoyé des commandos armés au Maroc pour en découdre avec le Pouvoir. Une tentative de putsch qui lui a valu deux condamnations à mort par contumace. Mais à défaut de tirer sur le roi, il sort de temps en temps de son mutisme pour régler, à coups de communiqués incendiaires, ses comptes avec ses anciens camarades d’Al Adl Wal Ihsane et du PJD, deux formations qu’il n’a pas hésité à qualifier de “nid d’espions à la solde du Pouvoir”. “Mais il ne faut pas être surpris aujourd’hui par ce revirement de position, explique ce spécialiste de l’islamisme marocain. Abdelkrim Motiî est rentré dans le rang, parce que son mouvement ne représente et ne pèse plus rien”. Pour ce qui est de sa vie en Libye, on n’en sait pas grand-chose. Le vieil homme de 84 ans, qui a le statut de réfugié politique, est logé et nourri aux frais du Pouvoir libyen. “En contrepartie, il est une sorte de conseiller des autorités libyennes sur les questions d’ordre religieux”, ajoute notre spécialiste. Le reste du temps, il multiplie les va-et-vient entre l’Espagne et la Belgique, où il aurait de la famille.


    Anas Jazouli
    Le vrai-faux opposant
    Nul ne pouvait prévoir qu’un Anas Jazouli opterait un jour pour l’exil. Et pour cause. Ce touche-à-tout, la quarantaine à peine entamée, avait tout pour réussir au Maroc : il s’était fait une belle petite place dans les hautes sphères de la capitale et son agence de communication et d’évènementiel marchait plutôt bien. Pourtant, en tentant en 2002 d’organiser le concours Miss Maroc, il s’attire les foudres (et les menaces) des islamistes, qui le qualifient alors de “Salman Rushdie marocain”. “J’ai même eu droit à une fatwa lancée contre moi, précise t-il. Ma sécurité n’était plus assurée au Maroc. Lorsque je me rendais chez la police, on me répondait qu'on ne pouvait rien pour moi. Que je n'aurais pas dû me lancer dans cette aventure”. Anas Jazouli décide alors de quitter le pays en 2003, accompagné de sa femme et d’un bébé de quelques mois. Direction la France, où il demande, une fois sur place, le statut de réfugié politique… qu’il se verra refuser. Prié de quitter le territoire français, Jazouli voit se constituer dans l'Hexagone un mouvement de solidarité non négligeable en sa faveur. Et pour faire pression sur les autorités françaises, il n’hésite pas à observer une grève de la faim de 40 jours, dont il dit encore garder des séquelles. En parallèle, il tente de régler ses comptes avec les autorités marocaines qu’il accuse de l’avoir “abandonné”. Il monte pêle-mêle diverses ONG, aux noms pompeux (Association des opposants marocains, Maroc Libertés, Mouvement laïc marocain, Mouvement de défense des minorités au Maroc…), mais au contenu souvent creux. Il côtoie aussi à l’époque un certain Hicham Mandari, “une simple relation de voisinage”, insiste-t-il aujourd’hui. En 2004, il va même jusqu’à monter un collectif pour défendre les 43 homosexuels arrêtés à Tétouan. Finalement, Anas Jazouli va avoir gain de cause en 2006, lorsque le ministère de l'Intérieur français décide de lui accorder le précieux sésame : une carte de séjour courant sur une dizaine d'années. Depuis, l'homme s’est bien “calmé”. “Je me consacre pleinement à deux petites entreprises que je viens de monter. Une en informatique et l’autre commercialisant des vélos customisés”, explique celui qui vit dans la petite ville de Montereau, en région parisienne. Ce qui ne l’empêche pas de penser à un éventuel retour au Maroc, “mais à condition qu’on m’assure qu’il n’y aura pas de représailles contre moi et qu’on me rende tout ce que l’on m’a pris”.

    Par Mehdi Sekkouri Alaoui tel quel.

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