a contre courant
Quelle mouche a piqué le gouvernement pour qu’il présente un projet de loi de privatisation d’un certain nombre d’établissements publics dont la RAM, Al Omrane et ADM, qui sont des leviers essentiels dans l’économie nationale, tout en étant, jusqu’à preuve du contraire, des affaires rentables ? Le paradoxe est que cette initiative intervient dans un contexte international marqué par la faillite du système libéral avec la crise aiguë du capitalisme financier et le retour de l’Etat comme acteur incontournable de régulation du marché.
Voilà bientôt 15 ans que le Maroc privatise à tour de bras sans qu’on ait procédé jusqu’ici à une évaluation objective de la politique de privatisation pour connaître ses répercussions sur l’évolution de l’économie nationale et pouvoir ainsi rectifier le tir à la lumière des résultats obtenus.
La première tâche du gouvernement est donc d’organiser cette opération d’évaluation avec la participation de tous les acteurs concernés, dont les organisations politiques et syndicales, pour dresser le bilan, et au besoin revoir la stratégie de privatisation chaque fois que l’intérêt du pays et de la société l’exige.
Pour l’heure, il s’agit de tirer les leçons de l’échec des orientations ultra-libérales faillies qui ont conduit les économies occidentales à la récession avec le spectre du chômage qui va s’étendre, la dégradation du niveau de vie des populations précarisées et l’affaiblissement des secteurs sociaux. Rien ne justifie donc que le Maroc évolue à contre-courant de l’évolution mondiale où l’Etat est désormais appelé à jouer le rôle d’acteur de régulation et de contrôle. Si l’initiative privée est à encourager pour prendre part à la politique de développement menée par le gouvernement, l’Etat se doit également de préserver un secteur public qui est performant à l’image des trois établissements précités qui ne constituent nullement un fardeau pour l’Etat, mais plutôt des outils d’impulsion dans des secteurs économiques majeurs, à savoir le tourisme, l’habitat social et le transport.
La privatisation n’apportera rien de nouveau dans la consolidation de leur activité. Elle ne pourrait être en fait que la voie ouverte aux nouveaux acquéreurs, à la recherche du profit, pour procéder à des actions de compression du personnel et de réduction des droits des salariés et pour éventuellement abandonner certaines activités non rentables mais qui constituent une mission de service public (pour la RAM, les tarifs des vols vers les provinces sahariennes).
Il serait donc absurde que notre gouvernement, dont le programme adopté par le parlement s’appuie sur le développement des deux secteurs, public et privé, se lance tête baissée dans cette privatisation injustifiée, au moment où les événements actuels liés à la crise financière attestent des limites du libéralisme tous azimuts.
Par Ahmed ZAKI
17/10/2008
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