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Abdelouahab Rahim: L'homme qui voulait 2,5 milliards de dollars

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  • Abdelouahab Rahim: L'homme qui voulait 2,5 milliards de dollars

    En essayant de connaitre un peu plus sur l'interlocuteur de Carrefour en Algerie, j'ai trouve cet article, assez recent, dans Jeune Afrique. Un article interessant a connaitre.

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    Le très discret président-directeur général d’Arcofina, un groupe algérien diversifié, sort de l’ombre pour vendre son colossal projet immobilier d’Alger Medina, qui doit remodeler le visage de la capitale d’ici à 2011.

    Insaisissable. Fuyant. Mystérieux. Et discret à faire naître les plus folles rumeurs et interrogations sur son passé, l’origine et l’importance de sa fortune, la nature de ses appuis politiques en Algérie, ses ambitions personnelles… Depuis plus de quinze ans, Abdelouahab Rahim, 57 ans, évite les médias. Certains prétendent que c’est par timidité. « Ma personne importe peu. J’aime travailler dans la discrétion et dans l’ombre. Il faut parler peu et bien », confie-t-il. Touche-à-tout du business, il avance donc avec prudence loin des projecteurs. Car, en Algérie, une réussite bling-bling ou une ambition trop clairement affichée soulèvent un vent de jalousie qui peut être fatal.
    Une retenue qui ne l’empêche pas d’être très bien introduit dans les milieux d’affaires. Son beau-frère, Réda Hamiani, ancien ministre des PME, est le président du Forum des chefs d’entreprise (FCE), le patronat algérien. Un appui qui a pu servir cet investisseur atypique expatrié pendant près de vingt-cinq ans en Europe et dans les pays du Golfe, et qui opère désormais une ascension discrète depuis son retour en Algérie en 1995. Et non moins efficace. À la tête de son groupe, Arcofina, il mène des incursions dans des métiers aussi différents que la distribution pharmaceutique, les assurances, la banque, les technologies de l’information, la grande distribution, l’hôtellerie, l’immobilier d’affaires… Sa principale filiale, Dahli (hôtel Hilton, immobilier de bureaux), aurait réalisé un chiffre d’affaires de 24 millions d’euros en 2007 (2,2 milliards de dinars – DA) pour un résultat net de 2,8 millions d’euros. En 2008, le chiffre d’affaires aurait progressé de plus de 35 %. Impossible à vérifier. Le voile qui entoure le patron d’Arcofina recouvre aussi les activités qu’il a créées à partir de 2001.

    Appel à l’épargne publique
    Mais tout a changé le 11 janvier 2009. Par opportunité, Abdelouahab Rahim a opéré un virage à 180 degrés. En ce début 2009, il occupe la une des journaux algériens pour la bonne cause. La sienne et son projet pharaonique d’Alger Medina. Un vaste coup de neuf qui doit remodeler la capitale algérienne, décrépite, embouteillée, en une cité du XXIe siècle. Sur 100 ha le long de la baie d’Alger, aux Pins maritimes, à l’est de la ville, il veut bâtir pour 2011 deux tours d’affaires, New York et Tokyo, un centre commercial de 35 000 m², un hôtel de 500 chambres, deux immeubles de 168 appartements de grand standing, un parc aquatique et une marina pour 600 bateaux de plaisance. Un boulevard, aussi large que les Champs-Élysées et bordé de 2 000 oliviers centenaires… importés d’Espagne, terminera d’attirer les Algériens.
    « C’est la future cité qui deviendra le poumon économique, commercial, social, culturel et sportif de la capitale. Avec 1 million de m² réservés au business, 1 million de m² pour les habitations et 500 000 m² réservés au commerce, Alger Medina sera non seulement une cité du business mais également un lieu de rencontres et de détente pour les 5 millions d’habitants de la capitale. Le projet créera 10 000 emplois et attirera 100 000 visiteurs par jour, hommes d’affaires, consommateurs et touristes », assure avec conviction Abdelouahab Rahim, qui n’a pas oublié ses études de marketing et de stratégie économique en France.
    L’ensemble du projet demandera un investissement de 2,5 milliards de dollars (1,9 milliard d’euros). Une aventure démesurée et hasardeuse ? Ce projet répond-il aux besoins des Algériens ? Le lancement d’un programme immobilier aussi vaste en cette période troublée et l’opacité du groupe, donc sa capacité à mener un tel projet, font hésiter quelques analystes. Qu’importe. Le patron d’Arcofina travaille pour la postérité. « Je ne suis pas un spéculateur, un importateur ou un affairiste, mais un bâtisseur. Mon approche n’est nullement dictée par l’appât du gain mais par la passion de bâtir et de construire quelque chose qui profitera aux citoyens. Je veux mettre à la disposition des Algériens un grand projet qui restera dans l’Histoire. Pourquoi ne pas leur offrir ce qu’ils trouvent en Europe, en Asie ou en Amérique », confie-t-il avec les intonations d’un homme providentiel, comme l’Algérie en a connu à ses dépens par le passé.
    Pour mener à bien son projet, Abdelouahab Rahim a élaboré un montage financier qui mobilise les moyens du groupe, fait appel aux banques et à tous les Algériens à travers un emprunt obligataire de 8,3 milliards de dinars (89 millions d’euros). Lancé le 11 janvier 2009, il veut séduire les épargnants avec un taux de 4 % la première année et de 6,75 % au terme de la septième année. Des taux qui sont dans la fourchette haute du marché. Garanties par les actifs d’Arcofina, les obligations seront cotées à la Bourse d’Alger. « Nous aurions pu nous adresser à nos banques, mais il est de notoriété publique qu’elles sont sous-capitalisées. Elles étaient donc incapables de financer un projet privé d’une telle envergure. Là, toute personne physique ou morale pourra souscrire à l’emprunt. Nous accorderons des taux d’intérêt importants, ce n’est pas par charité, mais pour que les souscripteurs profitent des retombées positives de notre activité. Notre démarche n’est pas uniquement mue par un intérêt commercial, c’est aussi une initiative d’intérêt public », justifie l’homme d’affaires, qui avoue un attachement très fort à sa patrie.

    Fortune faite, il revient au pays
    Né à Aït Rzine, près de Béjaïa, ce Kabyle a renoncé à un environnement luxueux, feutré et surprotégé en Suisse pour céder à l’appel du pays et revenir s’installer en Algérie, avec femme et enfants, pendant la décennie noire. Par bravade ? Inconscience ? « Au milieu des années 1990, au plus fort de la guerre qui faisait des dizaines de morts par jour, j’ai fait le pari de rentrer au moment où les autorités incitaient les Algériens à revenir faire des affaires. Je me suis réinstallé quand tout le monde fuyait. Ce n’est pas le profit qui m’a poussé à revenir, mais la conviction de servir mon pays », confesse-t-il. Donc acte. Pour lui, cette décision vaut toutes les preuves de sincérité d’un homme désintéressé.
    Le PDG d’Arcofina ne court plus derrière l’argent depuis longtemps. À l’en croire, sa fortune est faite. « Je suis parti faire des affaires en Europe et au Moyen-Orient », se contente-t-il de préciser. Il quitte son pays pour la Tunisie dans les années 1970 avant de rejoindre Paris et Genève. Il y a travaillé pour plusieurs laboratoires pharmaceutiques, en charge de développer le courant d’affaires avec le monde arabe. « Avant de revenir, j’étais déjà un homme riche et comblé. Ma famille et moi, ma femme et mes quatre enfants, menions une vie très aisée en Suisse. Pour les vacances, nous allions par exemple à New York ou aux Bahamas », détaille-t-il.
    Mais l’homme d’Aït Rzine est-il simplement revenu en homme d’affaires ? Ou celui qui se définit comme un bâtisseur rêve-t-il aussi d’un destin politique ? À la surprise générale, en novembre 2008, il prend la tête d’une fronde avec une dizaine de dissidents sur les 120 dirigeants membres du FCE pour partir créer l’Union nationale des investisseurs (UNI), présentée comme un club de réflexion de patrons. « Ils veulent canaliser les investissements vers eux, comme un genre de droit de passage, glisse un fidèle du FCE. C’est purement opportuniste et mercantile. Le plus surprenant, c’est qu’il a planté un couteau dans le dos de son beau-frère. » Homme de l’ombre jusque-là discret et ambitieux, Abdelouahab Rahim devra se livrer davantage s’il veut entrer dans l’Histoire. Au risque de prendre des coups à son tour. Mais avec un emprunt coté à la Bourse d’Alger, il lui faudra bien jouer la carte de la visibilité et de la transparence sur ses activités. Pas sûr que l’on change aussi vite des habitudes de trente ans.

    (c) 27/01/2009 1536 - Jeune Afrique- Par : Jean-Michel Meyer et Farid Alilat -
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