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Crise financière : les responsables jouissent d'une insolente impunité

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  • Crise financière : les responsables jouissent d'une insolente impunité

    Aristote disait qu'une bonne tragédie devait provoquer une catharsis : le choc induit par la pièce est censé "purifier" la conscience du public. A l'aune de ce principe, la crise financière relève de la science botanique plutôt que du théâtre grec antique. La version américaine de ce schéma a été mise au point pendant la Grande Dépression. Le scénario compte des scènes émouvantes où les responsables font leur mea culpa, des procès retentissants et des peines de prison qui accablent les accusés.

    Et c'est comme cela que les choses se sont passées à la fin du siècle dernier, lorsque le scandale des malversations de sociétés comme Enron, Tyco ou Worldcom a éclaté. Le 18 juin encore, Richard Scrushy a été condamné à verser 2,9 milliards de dollars (2,1 milliards d'euros) par une cour civile. L'ancien patron de Healthsouth purge une peine de prison de sept ans pour corruption. Et les sanctions n'ont pas fini de pleuvoir sur lui.

    PEU DE REMORDS

    La crise d'aujourd'hui donne singulièrement lieu à peu de manifestations de remords. Les condamnations en justice sont rares, et les prisons pour délinquants en col blanc attendent toujours les spécialistes de l'enrichissement sans scrupules.

    Bien sûr, les grands pontes de Wall Street ont formulé de vagues excuses. Lloyd Blankfein, le patron de Goldman Sachs, a écrit : "Nous regrettons d'avoir contribué à l'euphorie des marchés. Certaines pratiques étaient malsaines." Mais ce n'était là que quelques digressions isolées dans le cours d'une lettre expliquant comment Goldman Sachs comptait sortir du dispositif du TARP, afin de retrouver la "dynamique de croissance et d'innovation qui est le moteur des marchés de capitaux".

    En fait de crimes et de sanctions, on n'a presque rien vu. Certes, Allen Stanford, le financier basé aux Caraïbes, a été convaincu d'escroquerie, et Bernard Madoff est en prison. Mais aucun des deux n'a joué de rôle déterminant dans la formation de la bulle du crédit. Pour le moment, le procès le plus significatif concerne des employés de l'Etat de New York, poursuivis pour avoir accepté des pots-de-vin de la part de fonds d'investissement. Aucune accusation ne pèse sur les fonds eux-mêmes. Ni sur la meute de millionnaires et de milliardaires qui a prospéré quand le système financier courait à sa perte.

    Il est possible que de nouveaux développements judiciaires nous attendent. Mais d'ici là, le public pourrait avoir perdu tout appétit pour ce genre de purification morale. Les spectateurs se sentent peut-être eux-mêmes coupables. Après tout, nombre d'entre eux ont profité des bulles boursière et immobilière. Ou alors, c'est qu'après toutes ces années d'abus, l'étalage de la cupidité des riches ne choque plus personne.

    Le Monde
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