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Procès El Khiyari : Le jugement de la honte

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  • Procès El Khiyari : Le jugement de la honte

    La sentence de trois ans de prison ferme infligée au défenseur des droits de l’homme Chakib El Khiyari a été confirmée par la Cour d’appel de Casablanca. Un tour de vis supplémentaire de la justice marocaine qui met sur la table la question de la grâce royale.
    Par : Hicham Bennani«Il faut que le Palais intervienne, car on ne peut plus faire confiance à la justice marocaine», dénonce Amine El Khiyari, frère de Chakib El Khiyari, président de l’association Rif des droits de l’homme. Mardi 24 novembre, la Cour d’appel de Casablanca a confirmé le jugement de première instance de Chakib El Khiyari, poursuivi pour outrage à magistrat et au corps constitué. Résultat : trois ans d’emprisonnement ferme et une amende de 753 930 dirhams.
    «Le jugement n’est pas seulement de trois ans. Il est d’une année supplémentaire si jamais El Khiyari ne paye pas l’amende au Trésor», précise Mounir Benlakhdar, avocat de Chakib El Khiyari.
    Le délai de cassation devant la cour suprême est de dix jours. Tarek Sbaï, Lahbib Hajji, Mohamed Khattab et Mounir Benlakhdar, les quatre avocats de Chakib El Khiyari opteront-ils pour un pourvoi en cassation ? A l’heure où nous mettons sous presse, aucune décision n’a été prise. «Je n’ai pas encore parlé à mon client. Je pense qu’il y a vraiment beaucoup de vices de forme. La Cour suprême n’est pas vraiment un recours sur les faits, mais un recours sur les droits», indique Mounir Benlakhdar. Et d’ajouter : «Tout chef d’Etat a le pouvoir d’amnistier quelqu’un. Nous sommes dans une monarchie qui a une référence à la fois musulmane et parlementaire, entendez que le jugement soit prononcé au nom de Sa Majesté. Il y a donc une obligation morale et temporelle». Pour Amine El Khiyari, «il est déplorable que le jugement, qui est vraiment lourd, soit prononcé au nom du roi».

    Régression des libertés publiques. Depuis le 21 février 2009, Chakib El Khiyari est en détention préventive à la prison civile de Oukacha. La justice marocaine lui reproche d’avoir «mené une campagne médiatique visant à nuire et à discréditer les efforts déployés par les autorités marocaines dans la lutte contre le trafic de drogue», selon la MAP. Pourtant, El Khiyari a simplement dénoncé les mafias de la drogue et des trafics humains en plaidant pour une législation juste qui protège les victimes et condamne les criminels. «Sa condamnation n’est pas un fait isolé. Elle est liée à un acharnement de la justice contre le travail associatif et même contre la presse indépendante, fustige Khalil Jemmah, fondateur de L’association des amis et des familles des victimes de l’immigration (AFVIC), c’est un signe fort de la régression des libertés publiques.» D’après Jemmah, El Khiyari ne voulait pas s’adresser à la presse avant le verdict final, car il faisait confiance à la justice marocaine. «Il ne voulait pas demander de grâce royale parce qu’il s’estime innocent», atteste Jemmah. Amine El Khiyari annonce que son frère sera soutenu par de nombreuses ONG marocaines et internationales : «Chakib va prouver son innocence à ses détracteurs et va continuer à travailler activement dans sa cellule.»
    En mars 2009, juste après l’arrestation d’El Khiyari, la coalition européenne pour des politiques justes et efficaces en matière de drogues (ENCOD) avait envoyé une lettre ouverte à Mohammed VI pour exprimer sa «profonde préoccupation face au sort de Chakib El Khiyari». La lettre mentionne le fait que le condamné avait fondé l’association des droits de l’homme dans le Rif en 2005 dans le but de défendre un certain nombre de questions telles que le traitement des migrants d’Afrique subsaharienne et la violence faite aux femmes. «Il est également connu pour son action de soutien aux droits culturels des Amazighs», peut-on également lire sur ce document qui considère cette arrestation comme une «violation grave de la liberté d’expression. Le fait qu’il ait été arrêté juste avant sa participation à des rencontres internationales semble indiquer que le gouvernement marocain ne souhaite pas que le monde entende les témoignages d’une population directement touchée par les politiques néfastes menées au nom de la guerre aux drogues.» Il y a un an, le 25 octobre 2008, Chakib El Khiyari se démenait corps et âme pour venir en aide aux habitants de toute la province de Nador, victimes des intempéries avec plus de 22 morts. Il contactait les associations pour aider les familles démunies. Il était même l’informateur des autorités locales qui n’avaient aucune idée de la situation sur le terrain. Aujourd’hui, Chakib El Khiyari pourrait rester trois ans derrière les barreaux.


    Mounir Benlakhdar, avocat de Chakib El Khiyari
    «El Khiyari est poursuivi en vertu d’un dahir de 1948 et d’un autre de 1959 alors que nous sommes en 2009 !»
    Que pensez-vous de la décision de la Cour d’appel de Casablanca ?
    C’est un arrêt médiocre. Comme il y a des vices de forme, il faut que les PV soient annulés. El Khiyari est accusé d’avoir traité avec des espions espagnols qui travaillent au consulat. Mais il n’y a aucune preuve tangible dans cette affaire. Le motif de la sentence repose sur les articles 263 et 265 du code pénal marocain et le dahir du 23 octobre 1959 sur les délits de change.

    Quels sont les vices de forme qu’il y a eu dans la procédure ?
    Le temps légal de garde à vue à été dépassé. D’après le nouveau Code de procédure pénale révisé en 2002, en cas de prolongement de garde à vue, le détenu a le droit de voir son avocat pendant une demi-heure, ce qui n’a pas eu lieu, bien que je me sois déplacé au commissariat de Casablanca les 18 et 19 novembre dernier et que je n’aie pas pu le voir.
    La peine de trois ans d’emprisonnement est-elle valable ?
    Il était poursuivi pour outrage à magistrat, ce qui ne donne pas lieu à une instruction, étant donné que la peine est normalement d’un mois à un an au maximum accompagné d’une amende de 500 dirhams seulement. Il n’y avait donc pas lieu de le traduire devant le juge d’instruction.

    Pourquoi parle-t-on d’outrage à magistrat ?
    Ce qu’il a dit concernant l’outrage à magistrat à la Cour constituée, je pense que tout le monde le dit maintenant. Il y a des avocats qui sont corrompus. Tout le monde est concerné par le trafic de drogue. Il y a un dossier devant la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Casablanca qui porte le numéro 886 dans lequel il y a des officiels qui sont poursuivis. De quel outrage parle-t-on ?

    Alors, pourquoi l’accusé a-t-il écopé de deux années de plus que ne prévoit la loi ?
    Les deux autres années dont El Khiyari a écopé sont pour le délit de change. Il avait reçu un chèque du journal espagnol El Pais qui est de l’ordre de 300 euros. Il était obligé d’ouvrir un compte à Mellila pour pouvoir encaisser ce chèque. Il n’a pas constitué de fond dans une banque étrangère, il a fait une opération qui se fait partout dans le monde. Il est poursuivi en vertu un dahir qui date de 1948 et d’un autre qui date de 1959, alors que nous sommes en 2009. Le communisme n’existe plus. Le mur de Berlin est tombé. Dans le droit douanier international, ce qu’on appelle la clause de la nation privilégiée n’existe plus, n’importe quel argent peut circuler dans n’importe quel pays.

    Qu’allez-vous entreprendre avec El Khiyari ?
    Si je demande une grâce royale, ce sera une requête. Mais nous ne sommes pas encore décidés. J’aimerais bien aller en cassation d’abord parce que mon client est innocent. Si cela est confirmé en dernier lieu, nous pourrons avoir recours à la grâce royale.
    le journal Hebdomadaire
    المجد والخلود للرفيق والمناضل المغربي ابراهام سرفاتي
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