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L’homme au cœur de la dynamique de développement

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  • L’homme au cœur de la dynamique de développement

    La performance économique entre bien-être social et développement humain

    L’insistance sur les droits sociaux dans les rapports que la Commission nationale de la protection et de la promotion des Droits de l’homme avait élaboré en 2008 ne peut être considérée comme une simple coquetterie intellectuelle ou une énorme hérésie que dicterait une volonté de faire diversion par rapport aux droits politiques et syndicaux. L’expérience algérienne en matière de démocratie politique est, dans ce contexte, assez parlante pour dire combien les liens entre les luttes sociales et les revendications des libertés politiques sont consubstantiellement liées. Le retard dans l’accès à la modernité politique est largement soutenu et sustenté par le sous-développement économique et social ; en d’autres termes, par la faiblesse du niveau de développement humain.

    Ce concept de développement humain- manié depuis maintenant plus de deux décennies par les démographes, les géographes, les sociologues, les médecins, les écologues,…-, commence à peine à faire son entrée dans les administrations des États du Sud. Habitués qu’ils sont aux classiques agrégats économiques et financiers-lesquels, bien sûr, gardent toute leur importance pour quantifier des performances, des tendances générales,…etc.,- les décideurs et les gouvernants de ces pays sont assurément bousculés dans leur manière de faire des constats et de procéder à des projections au sujet de la performance économique de leurs programmes. En tout cas, si l’on a recours à d’autres termes ou concepts pour porter un autre regard sur l’état de la société, c’est que les données classiques de la statistique ne sont plus suffisantes. Car, il y des situations sociales plus fuyantes et moins ‘’cernables’’ que ne le laissent supposer les graphes ou les histogrammes. Un ancien ministre a pu ironiser à propos de la situation des Algériens en disant : « l’Algérie est un pays pauvre qui se prend pour un pays riche ». Cette dernière assertion, assénée comme une vérité ou même un lourd verdict, possède son pesant de réalité économique imparable en ce sens que l’économie du pays repose presque exclusivement sur la rente pétrolière dont la redistribution pose plus de problèmes qu’elle n’en résout. Après plus de trois décennies de navigation à vue, de mauvaise gestion, de rapine et de clientélisme, les classes sociales qui en furent le produit ont globalement respecté le trinôme de la stratification classique observée dans toutes les économies dirigistes et rentières : la nomenklatura et ses satellites- brocardés un certain moment du nom de mafia politico-financière-, la classe moyenne et la classe pauvre.

    Les événements ayant marqué les scènes économique et financière mondiale depuis le mois de septembre dernier ne manquent pas de rappeler que le la dynamique du développement économique est soumise à plusieurs aléas aussi bien locaux que mondiaux. Cette ‘’solidarité’’ des éléments qui composent un ensemble complexe est aujourd’hui mise à rude épreuve par des données et des processus qui échappent quelque peu aux volontés nationales.

    Un cas d’école

    Le cas de l’Algérie peut être considéré, dans ce cas de figure, comme un cas d’école du fait que la mono-exportation des hydrocarbures et l’insertion du pays dans l’économie mondiale font peser sur le développement socioéconomique des populations de lourdes hypothèques. Si des redressements rapides- tels qu’un fort geste politique pour les investissements créateurs de richesses et d’emplois, une justice sociale plus perceptible au sein de la société-, les désordres sociaux risquent de s’amplifier et de devenir incontrôlables.

    La tendance lourde de l’actualité nationale qui s’est dessinée à partir depuis les deux dernières années demeure incontestablement les mouvements sociaux. Même si, ça et là, de fébriles gesticulations politiques mues par des échéances précises tentent d’escamoter cette réalité entêtée. Revendications salariales, grèves des fonctionnaires, contestations de certaines privatisations, bref, un réveil social qui ne doit, en tout cas, rien au hasard. Les augmentations des prix des produits alimentaires, le recul effrayant du pouvoir d’achat, la persistance du chômage, la régression de certains services sociaux, le constat de recettes pétrolières considérables- même si la nouvelle conjoncture mondiale met un peu de bémol à cette ‘’euphorie’’-, toutes ces contraintes ont, en quelques sorte, canalisé les énergies et la colère dormante de larges franges de la population pour exiger un mieux-être que l’on pense légitimement à la portée des Algériens.

    Cette tendance à la revendication et cette aspiration à un mieux-être social sont aussi nourri par les chiffres annoncés des investissements publics. Le nouveau plan d’investissement qui couvre la période 2010-2014 est doté d’un montant de 286 milliards de dollars. Logements, infrastructures de base, transferts hydrauliques, raccordement au gaz de ville, développement rural et d’autres axes aussi importants les uns que les autres figurent dans la palette des actions prévues dans ce Plan. Les ménages algériens aspirent légitimement pouvoir bénéficier d’une partie de la ‘’rente nationale’’ ainsi exposée dans les grands chantiers.

    Une transition problématique

    Au vu de l’impasse historique qui a frappé d’obsolescence le système politique et l’ordre socioéconomique algériens, le Plan d’ajustement structurel était venu “remettre de l’ordre’’ dans la maison Algérie en l’astreignant à une transition vers l’économie de marché au prix que l’on connaît : libéralisation des prix, plans sociaux pour les entreprises publiques, un taux de chômage effarant et, fait dont on ne mesure pas encore assez les conséquences, le laminage de la classe moyenne qui, partout dans le monde, représente l’ossature culturelle et idéologique de la cohésion sociale et de la construction du projet démocratique.

    La décennie du terrorisme n’a pas remis en cause cette nette bipolarisation des classes sociales ; au contraire, elle lui a fait subir une agrégation jusqu’à la limite de la masse critique. En plus clair, les riches ont continué à s’enrichir et les pauvres à s’appauvrir. Si l’on pouvait s’offrir le luxe de prendre le critère de la Banque mondiale fixant le seuil de pauvreté- une personne vivant avec moins d’un dollar par jour est considérée pauvre-, plus de deux tiers des Algériens seraient déclarés pauvres. Les leviers et relais sociaux mis en œuvre par les pouvoirs publics ne font qu’amortir le choc, différer les contestations et émousser temporairement l’esprit de jacquerie.
    Les contrastes de statut social n’ont sans doute jamais été aussi visibles et leur décryptage n’a, non plus, été aussi illisible au sein des différentes franges de la population qu’au cours de ces dernières années reconnues comme étant la période faste de la stabilisation des indices macroéconomiques (très faible encours de la dette extérieure, faible inflation, taux de croissance appréciable du PIB, taux de chômage officiellement réduit à moins de 12 % de la population active,…). Au cours de cette période de transition de l’économie nationale-étape sensible pour tous les pays passant d’une économie administrée à une économie de marché-, le hiatus entre les différentes couches de la société se fait de plus en plus béant menaçant parfois même la stabilité du pays et la paix civile. Le nombre d’exclus ne cesse, en effet, d’augmenter, même si le gouvernement- à travers certains des différents dispositifs sociaux- essaye de contenir le cercle de la pauvreté en venant en aide aux catégories les plus vulnérables.

    Avec l’ouverture de l’économie nationale au privé, une nouvelle faune d’entrepreneurs a pris le relais d’une économie publique moribonde. Dans presque tous les secteurs d’activité, des miro-entreprises de travaux, de prestations de service ou de production ont vu le jour. Le recrutement du personnel s’est limité au strict minimum pour faire des gains de productivité, partant, des gains de marge bénéficiaire. Cela dans le cas où l’employé est déclaré à la sécurité sociale. Souvent, ce n’est pas le cas. Dans plusieurs villes d’Algérie, des ateliers de fabrication de chaussettes et d’autres lingeries, de petites usines de confection en maroquinerie, emploient des travailleur et des travailleuses à ‘’huis-clos’’, c’est-à-dire les portes fermées, de peur d’une visite inopinée de l’inspection du travail.

    Comme on l’a observé à partir de certains témoignages, le travail au noir ne se limite pas à des activités commerciales non déclarées, mais il a aussi gangrené une partie des activités légales où les patrons d’entreprises bien installées ne déclarent pas la totalité du personnel recruté. La peur qui plane sur des emplois déjà précaires ne peut aboutir qu’à la loi de l’omerta. D’ailleurs, très peu de plaintes sont déposées au niveau des inspections de travail des wilayas se rapportant au nom respect des lois du travail. À ce niveau, les connivences sonnantes et trébuchantes entre l’administration et certains patrons sont un secret de Polichinelle.

    Une enquête menée par le CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement) révèle que sur 7500 PME, 42% des effectifs ne sont pas déclarés et 30% de leur chiffre d’affaire échappent au fisc.

  • #2
    Laminage de la classe moyenne

    Les conséquences d’une transition économiques mal conduite ont entraîné une libéralisation effrénée des prix, des plans sociaux pour les entreprises publiques, un taux de chômage effarant et, fait dont on ne mesure pas encore assez les conséquences, le laminage de la classe moyenne qui, partout dans le monde, représente l’ossature culturelle et idéologique de la cohésion sociale et de la construction du projet démocratique.

    La décennie du terrorisme n’a pas remis en cause cette nette bipolarisation des classes sociales ; au contraire, elle lui a fait subir une agrégation jusqu’à la limite de la masse critique.

    Dans ce contexte, que valent les indices macroéconomiques (endettement, chômage et inflations “maîtrisés’’, PIB en croissance,…) dont se targuent nos gouvernants face au regard des institutions internationales et face aussi aux populations dont on cherche à obtenir le consentement. Un autre regard est pourtant possible. Il nous renseigne sur une certaine détresse sociale qui a pour noms la maladie, la régression de l’espérance de vie chez certaines catégories de la population, la déscolarisation, la malnutrition ou la sous-alimentation.

    Entre la Norvège, premier de la classe, et le Niger, dernier du peloton en 2006, l’Algérie a été classée 102e en matière de développement humain. Le rapport annuel du Programme des nations unies pour le développement (PNUD), avait conféré un indice de développement humain de 0,72 à notre pays. Cet indice est un ‘’agrégat’’ qui récapitule les données relatives à l’espérance de vie à la naissance (71 ans pour l’Algérie), le taux d’alphabétisation des adultes (70%) et le niveau de vie (PIB/habitant : de 73 dollars). Cette forme d’évaluation sociale concerne 177 pays.

    Le rapport du PNUD portant sur l’année 2009 et remis en novembre 2010 au président du Conseil national économique et sociale (CNES), Mohamed Seghir Babès, a soulevé des controverses liées à la fiabilité des chiffres sur lesquels a travaillé l’organisme onusien. Ce dernier appelle le gouvernement algérien à plus de coopération dan le domaine.S’agissant l’indice du développement humain(IDH), l’Algérie est classée en 2010 à la 100e place perdant ainsi 4 points par rapport à sa position de 2009. Il lui est attribué un indice de 0,677 .La Libye est le pays maghrébin le mieux classé mondialement (53ème position), avec un indice de 0,755, suivie de la Tunisie, 81ème, avec un indice de 0,683. Le Maroc est à la 114ème place avec un indice de 0,567 et la Mauritanie est en 136ème position, avec un indice 0,433.

    Les mutations rapides de l’architecture de l’économie algérienne ont directement contribué à l’aggravation de la vulnérabilité des couches les plus défavorisées de la société. Si auparavant, malgré les dysfonctionnements structurels de l’économie et la navigation à vue des dirigeants, un semblant de cohésion sociale était maintenu, c’était incontestablement dû à la distribution de la rente pétrolière. Mais, la construction était d’une telle fragilité que la chute, même temporaire, des cours de l’or noir parvenait à compromettre. Les réformes auxquelles avait recouru le gouvernement algérien à partir de 1989 pour sortir de cette impasse ont été régulièrement freinées par plusieurs facteurs : la résistance des rentiers du système, le lourd héritage bureaucratique, la déstructuration des entreprises publiques et la difficulté de l’évolution des mentalités. En fait, c’est de la remise en cause de l’État-providence en faveur d’une économie compétitive dans un contexte de mondialisation accélérée qu’il s’agit dans cette période cruciale de la vie du pays.

    Le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Domique Strauss-Kahn, n’a pas manqué, lors de sa visite en Algérie il y a trois semaines, de souligner la fragilité de l’économie algérienne qui s’appuie quasi exclusivement sur les seules recettes des hydrocarbures. Outre le nécessité de diversifier les activités économiques du pays, le responsable de l’institution financière de Bretton Woods a aussi souligné l’impératif d’ouverture audacieuse de l’économie sur l’entreprise privée et la constitution d’un tissu solide de PME/PMI.

    Chiffres, agrégats et autres appréciations

    Depuis le début des années 1990, la santé économique d’un pays, et particulièrement la santé de ses habitants au sens large du terme, ne se mesure pas uniquement en termes de stabilité macroéconomique. Sur ce plan-où seule la froideur des chiffres semble prévaloir-, l’Algérie a réussi, à un prix social exorbitant auquel et dans une période de son histoire marquée par le phénomène du terrorisme, à accéder à une performance que lui envient beaucoup de pays du tiers-monde, y compris certains membres de l’OPEP. La santé économique et sociale d’un pays se mesure aussi par d’autres paramètres qui sont corrélés directement avec le niveau et la qualité de la vie des individus. Ce sont les indicateurs (ou les indices) de développement humain que le PNUD a vulgarisés, particulièrement à partir de 1992 à travers ses rapports annuels, comme instruments d’évaluation sociale. Le rapport de cette organisation des Nations-unies est destiné à promouvoir un développement dont les objectifs seraient la protection du capital écologique pour les générations futures, la réduction de la pauvreté et des inégalités, l’emploi, la cohésion sociale, la démocratie, la croissance économique pour une amélioration générale des conditions de vie.

    Les Indicateurs de développement humain (IDH) retiennent trois composantes : la longévité, le savoir et le niveau de vie. Ils permettent de classer les pays selon une nouvelle grille plus ‘’humanisée’’, en tout cas plus réaliste que les simples indicateurs de la performance économique des pays considérés. Il s’agit de “pallier les insuffisances d’une approche en termes de revenus par habitant’’. Dans ce contexte le développement humain est défini comme un développement donnant hommes la liberté d’utiliser pleinement leurs capacités dans tous les domaines : économique, social, culturel et politique. Donc, en plus de l’appréciation quantitative, qui demeure non seulement valable mais indispensable, la classification par les IDH introduit la vision qualitative qui exprime mieux les contrastes liés au niveau de vie et au mode de vie des populations.

    Par Amar Naït Messaoud , la Dépêche de Kabylie

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