Le 4 octobre 2002, Sohane, 17 ans,a été aspergée d'essence puis enflammée avec un briquet dans le local à poubelles de l'escalier H de la cité Balzac à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). L'auteur présumé des faits, Jamal Derrar, dit « Nono », 19 ans, est un petit caïd du quartier. Il doit comparaître le 31 mars devant la cour d'assises de Créteil, pour « actes de torture et barbarie ».
Le Point avait rencontré Sohane avant sa mort dans le cadre d'une enquête sur les bandes de filles. Elle était la plus calme du groupe. La plus jolie aussi. Française d'origine kabyle, Sohane habitait chez son père avec ses cinq frères et soeurs mais vivait surtout dehors, faute de s'entendre avec sa belle-mère. Elle traînait à la cité Balzac, où domine la loi des garçons et du business.
Depuis sa mort, Sohane est devenue le symbole de la lutte contre les violences envers les femmes en France. Nous avons rencontré sa soeur Kahina, 25 ans, étudiante en administration, économie et social. Elle nous parle de sa soeur, de la situation des filles dans les cités, mais aussi de ses souffrances et de ses angoisses avant le procès.
Le Point : Qui était vraiment Sohane ?
Kahina : C'était une jeune fille de 17 ans qui croquait la vie à pleines dents comme beaucoup de gamines de son âge. Une fille simple et généreuse qui ne prenait la tête à personne et que tout le monde appréciait. Elle était d'une grande beauté, mais ne le faisait pas sentir. Elle s'en moquait presque... Elle n'avait pas une once de vulgarité, c'était un ange.
Il nous arrivait de nous disputer comme toutes les soeurs. Je suis l'aînée, et je voulais qu'elle s'en sorte, qu'elle fasse des études comme moi, qu'elle ne traîne pas dehors... Lorsqu'on habite une cité, on est très vite confronté à l'échec. A l'école, petits, on nous fait croire que l'on sera de futurs médecins ou avocats. Puis un jour on se réveille et on se retrouve dans un BEP pourri. C'est le début de la galère, même pour trouver un misérable emploi. Je voulais que Sohane prenne conscience de ça. Je me suis accrochée à mes études, je pensais que si je réussissais, toute ma famille réussirait. Je ne savais pas que Sohane avait autant de difficultés.
C'était quoi, ses difficultés ?
Elle entretenait de très mauvaises relations avec ma belle-mère. Du coup, elle allait chercher du réconfort ailleurs. Elle traînait dans la cité Balzac et avait de mauvaises fréquentations.
Comment en est-on arrivé à cette folie ?
Sohane, c'était une proie facile. Elle n'avait pas de grand frère pour la défendre, comme ses copines. Il y avait moi, c'est tout. Et moi, je ne servais à rien. Je ne suis pas une racaille. Je fais du droit, de l'économie, autant dire rien dans les cités. En fait, ma soeur est morte à cause d'une embrouille minable entre mecs. Son petit ami, Issa, avait frappé la copine de Nono, l'auteur présumé des faits. Celui-ci a voulu régler ses comptes avec Issa. Mais, malheureusement, il s'est pris une raclée devant tous ses potes. Il s'est senti humilié et s'est vengé sur ma soeur.
Il est allé la chercher et l'a ramenée dans sa cité. « Je vais lui faire un truc de ouf », il a dit. La veille il avait acheté de l'essence. Ils sont descendus dans le local à poubelles, Nono a contraint deux copines de Sohane à assister au spectacle. Il a aspergé ma soeur d'essence et il lui a mis le feu avec un briquet. Que les choses soient claires : ce n'est pas un crime passionnel. Il n'y a jamais eu la moindre relation amoureuse entre Sohane et son bourreau. L'autopsie a confirmé que ma soeur était vierge. Comme beaucoup de filles dans les quartiers, Sohane voulait protéger sa virginité jusqu'au mariage.
Pouviez-vous imaginer un acte aussi atroce dans une cité ?
Dans les cités, les filles qui se font frapper, humilier se comptent à la pelle. Et tout le monde s'en fout. Quand une fille se mange une claque, personne ne réagit. C'est normal. Dans toutes les cités, on connaît des filles qui ont été battues, violées, mais qui n'ont pas porté plainte. Il a fallu que ma soeur soit brûlée vive pour que la parole commence à se libérer. Le livre sur les tournantes a aussi fait bouger les choses (1).
Pourquoi cette violence des garçons envers les filles ?
Ce qui domine dans les cités, c'est l'absence de mixité. C'est culturel. On a été éduqués comme ça : les garçons d'un côté, les filles de l'autre. Au nom de la pudeur et du regard des autres, on ne se fréquente pas, on ne se connaît pas. Ça renforce le mépris, la crainte de l'autre, et on en arrive quelquefois à des situations extrêmes. Il y a aussi cette surenchère des caïds entre eux : il faut absolument être le plus viril, le plus ouf, l'Al Pacino de la cité... Chez nous, la référence, c'est « Scarface ». Parfois on a l'impression qu'on est en temps de guerre, certains se comportent comme des fauves.
Que pensez-vous du combat mené par l'association Ni putes ni soumises ?
Le combat est noble. Mais l'association s'est servie de la mort de Sohane pour exister. Ça a été de la récupération politique. Au départ, l'association s'appelait Femmes des quartiers, elle n'est devenue Ni putes ni soumises que par la suite. En fait, elle a récupéré le slogan de la manifestation qu'elle avait organisée à Vitry.
Il faut comprendre que nous étions totalement désemparés et seuls. Sans aucun mot de soutien : ni de la part de la mairie, ni du gouvernement, ni de Chirac. C'est moi qui les ai appelés pour leur dire : vous êtes au courant qu'une jeune fille a été immolée sur le territoire français ?
L'association Femmes des quartiers est entrée en contact avec moi par l'intermédiaire d'une journaliste. C'était un soutien inespéré. J'ai vu des rebeus qui me ressemblaient, ils voulaient rendre hommage à ma petite soeur. J'ai foncé.
Fadéla Amara, la présidente de l'association, nous a donné rendez-vous. Mais les caméras étaient déjà là. Il n'y a eu aucun entretien en aparté. Fadéla Amara n'a même pas présenté ses condoléances à mon père, comme le veut pourtant la tradition. Depuis nous n'avons plus aucune nouvelle de Ni putes ni soumises.
Je peux vous dire que ma soeur, si elle était vivante, ne serait pas une de leurs militantes. Après le procès, peut-être que j'essaierai de monter moi-même quelque chose. Je ferai appel à Zizou, qui bénéficie d'une aura qu'aucun homme politique n'aura jamais. Je n'ai pas la prétention de sauver toutes les filles des cités. Mais peut-être que mon expérience peut servir à quelque chose.
Quelle est votre vie depuis la mort de Sohane ?
Tous les matins je me fais violence pour me lever, prendre le métro, aller à la fac... J'ai perdu tout espoir. Petite, j'avais plein de rêves, de projets. Je voulais présenter un jour le JT d'une grande chaîne. Finalement, je suis devenue une star des faits divers. Je suis à jamais la soeur de Sohane qui a brûlé vive dans une cave de cité. J'avais des petits copains, ils m'ont tous fuie. Je suis la soeur de Sohane, donc dans leur tête une fille à problème. Aujourd'hui, je n'ai plus aucune vie sentimentale. J'ai 25 ans et j'attends avec impatience la vieillesse pour enfin pouvoir être sereine. C'est une vie trop lourde à porter. Je ne fais plus confiance aux autres. Je vois le mal partout, j'ai peur de tout. J'ai la phobie des transports, des caves... Depuis la mort d'Ilan Halimi, je vis avec la hantise d'être enlevée, d'être torturée. Sa mort m'a fait remonter trois ans en arrière. J'aimerais pouvoir rencontrer la famille d'Ilan. A Vitry, au moment de la mort de Sohane, il y a eu une grande solidarité, notamment de la part des filles qui galèrent. C'est un être humain qui a enlevé la vie de notre soeur, mais c'est d'autres êtres humains qui nous ont aidés à surmonter sa mort.
Qu'attendez-vous du procès ?
J'espère qu'il servira de leçon. Il faut savoir que pour certains jeunes, dans le quartier, Nono, c'est un héros. Un héros de cage d'escalier... Lors de la reconstitution, certains jeunes ont applaudi son arrivée dans la cité. Il faut que la justice donne un signe fort. Il faut que les petits caïds comprennent quel'on ne peut pas ****** la vie de toute une famille sans moisir en prison. Moi je réclame la perpétuité pour l'assassin de ma soeur. Sohane est morte à perpétuité. Et nous, nous sommes détruits à perpétuité.
Je pense à mon père. Il est arrivé à 19 ans en France, on l'a traité comme de la *****. Mais il ne s'est jamais plaint, pour lui, l'autorité, c'est sacré. Il s'est levé toute sa vie à 4 heures du matin pour pouvoir nous nourrir et nous élever. Tout ça pour qu'à la fin de sa vie un petit merdeux de cité lui fasse un bras d'honneur. Ce Nono, personne, dans ma famille, ne le connaît, on ne l'a jamais vu et il nous a niqué notre vie. Aujourd'hui on le hait. C'est fou. Mon père, ça fait vingt-cinq ans qu'il va chez le même médecin. Depuis la mort de ma soeur, il va consulter deux fois par mois. Avant-hier, pour la première fois, il a dit à son médecin qu'il était le père de Sohane.
Pouvez-vous imaginer pardonner à l'assassin de votre soeur ?
C'est difficile. A aucun moment il n'a émis le moindre regret. Je sais que pour évoluer, me libérer, je dois passer par le pardon. Je me dis qu'il y a toujours eu des crimes et que la barbarie est à visage humain. J'essaie de me raccrocher à Dieu. J'ai besoin de croire que ma soeur est autre part et qu'un jour je pourrai la retrouver. Autrement, je me suicide.
Pensez-vous que Sohane est devenue un symbole ?
Je n'en sais rien. Et à vrai dire je m'en fous un peu. Je voudrais surtout qu'elle soit en vie. Aujourd'hui, elle aurait 21 ans. Et ça serait une bombe... (rires). Il faudrait la laisser reposer en paix, qu'on arrête de salir sa mémoire.
http://www.lepoint.fr/societe/document.html?did=176234
Le Point avait rencontré Sohane avant sa mort dans le cadre d'une enquête sur les bandes de filles. Elle était la plus calme du groupe. La plus jolie aussi. Française d'origine kabyle, Sohane habitait chez son père avec ses cinq frères et soeurs mais vivait surtout dehors, faute de s'entendre avec sa belle-mère. Elle traînait à la cité Balzac, où domine la loi des garçons et du business.
Depuis sa mort, Sohane est devenue le symbole de la lutte contre les violences envers les femmes en France. Nous avons rencontré sa soeur Kahina, 25 ans, étudiante en administration, économie et social. Elle nous parle de sa soeur, de la situation des filles dans les cités, mais aussi de ses souffrances et de ses angoisses avant le procès.
Le Point : Qui était vraiment Sohane ?
Kahina : C'était une jeune fille de 17 ans qui croquait la vie à pleines dents comme beaucoup de gamines de son âge. Une fille simple et généreuse qui ne prenait la tête à personne et que tout le monde appréciait. Elle était d'une grande beauté, mais ne le faisait pas sentir. Elle s'en moquait presque... Elle n'avait pas une once de vulgarité, c'était un ange.
Il nous arrivait de nous disputer comme toutes les soeurs. Je suis l'aînée, et je voulais qu'elle s'en sorte, qu'elle fasse des études comme moi, qu'elle ne traîne pas dehors... Lorsqu'on habite une cité, on est très vite confronté à l'échec. A l'école, petits, on nous fait croire que l'on sera de futurs médecins ou avocats. Puis un jour on se réveille et on se retrouve dans un BEP pourri. C'est le début de la galère, même pour trouver un misérable emploi. Je voulais que Sohane prenne conscience de ça. Je me suis accrochée à mes études, je pensais que si je réussissais, toute ma famille réussirait. Je ne savais pas que Sohane avait autant de difficultés.
C'était quoi, ses difficultés ?
Elle entretenait de très mauvaises relations avec ma belle-mère. Du coup, elle allait chercher du réconfort ailleurs. Elle traînait dans la cité Balzac et avait de mauvaises fréquentations.
Comment en est-on arrivé à cette folie ?
Sohane, c'était une proie facile. Elle n'avait pas de grand frère pour la défendre, comme ses copines. Il y avait moi, c'est tout. Et moi, je ne servais à rien. Je ne suis pas une racaille. Je fais du droit, de l'économie, autant dire rien dans les cités. En fait, ma soeur est morte à cause d'une embrouille minable entre mecs. Son petit ami, Issa, avait frappé la copine de Nono, l'auteur présumé des faits. Celui-ci a voulu régler ses comptes avec Issa. Mais, malheureusement, il s'est pris une raclée devant tous ses potes. Il s'est senti humilié et s'est vengé sur ma soeur.
Il est allé la chercher et l'a ramenée dans sa cité. « Je vais lui faire un truc de ouf », il a dit. La veille il avait acheté de l'essence. Ils sont descendus dans le local à poubelles, Nono a contraint deux copines de Sohane à assister au spectacle. Il a aspergé ma soeur d'essence et il lui a mis le feu avec un briquet. Que les choses soient claires : ce n'est pas un crime passionnel. Il n'y a jamais eu la moindre relation amoureuse entre Sohane et son bourreau. L'autopsie a confirmé que ma soeur était vierge. Comme beaucoup de filles dans les quartiers, Sohane voulait protéger sa virginité jusqu'au mariage.
Pouviez-vous imaginer un acte aussi atroce dans une cité ?
Dans les cités, les filles qui se font frapper, humilier se comptent à la pelle. Et tout le monde s'en fout. Quand une fille se mange une claque, personne ne réagit. C'est normal. Dans toutes les cités, on connaît des filles qui ont été battues, violées, mais qui n'ont pas porté plainte. Il a fallu que ma soeur soit brûlée vive pour que la parole commence à se libérer. Le livre sur les tournantes a aussi fait bouger les choses (1).
Pourquoi cette violence des garçons envers les filles ?
Ce qui domine dans les cités, c'est l'absence de mixité. C'est culturel. On a été éduqués comme ça : les garçons d'un côté, les filles de l'autre. Au nom de la pudeur et du regard des autres, on ne se fréquente pas, on ne se connaît pas. Ça renforce le mépris, la crainte de l'autre, et on en arrive quelquefois à des situations extrêmes. Il y a aussi cette surenchère des caïds entre eux : il faut absolument être le plus viril, le plus ouf, l'Al Pacino de la cité... Chez nous, la référence, c'est « Scarface ». Parfois on a l'impression qu'on est en temps de guerre, certains se comportent comme des fauves.
Que pensez-vous du combat mené par l'association Ni putes ni soumises ?
Le combat est noble. Mais l'association s'est servie de la mort de Sohane pour exister. Ça a été de la récupération politique. Au départ, l'association s'appelait Femmes des quartiers, elle n'est devenue Ni putes ni soumises que par la suite. En fait, elle a récupéré le slogan de la manifestation qu'elle avait organisée à Vitry.
Il faut comprendre que nous étions totalement désemparés et seuls. Sans aucun mot de soutien : ni de la part de la mairie, ni du gouvernement, ni de Chirac. C'est moi qui les ai appelés pour leur dire : vous êtes au courant qu'une jeune fille a été immolée sur le territoire français ?
L'association Femmes des quartiers est entrée en contact avec moi par l'intermédiaire d'une journaliste. C'était un soutien inespéré. J'ai vu des rebeus qui me ressemblaient, ils voulaient rendre hommage à ma petite soeur. J'ai foncé.
Fadéla Amara, la présidente de l'association, nous a donné rendez-vous. Mais les caméras étaient déjà là. Il n'y a eu aucun entretien en aparté. Fadéla Amara n'a même pas présenté ses condoléances à mon père, comme le veut pourtant la tradition. Depuis nous n'avons plus aucune nouvelle de Ni putes ni soumises.
Je peux vous dire que ma soeur, si elle était vivante, ne serait pas une de leurs militantes. Après le procès, peut-être que j'essaierai de monter moi-même quelque chose. Je ferai appel à Zizou, qui bénéficie d'une aura qu'aucun homme politique n'aura jamais. Je n'ai pas la prétention de sauver toutes les filles des cités. Mais peut-être que mon expérience peut servir à quelque chose.
Quelle est votre vie depuis la mort de Sohane ?
Tous les matins je me fais violence pour me lever, prendre le métro, aller à la fac... J'ai perdu tout espoir. Petite, j'avais plein de rêves, de projets. Je voulais présenter un jour le JT d'une grande chaîne. Finalement, je suis devenue une star des faits divers. Je suis à jamais la soeur de Sohane qui a brûlé vive dans une cave de cité. J'avais des petits copains, ils m'ont tous fuie. Je suis la soeur de Sohane, donc dans leur tête une fille à problème. Aujourd'hui, je n'ai plus aucune vie sentimentale. J'ai 25 ans et j'attends avec impatience la vieillesse pour enfin pouvoir être sereine. C'est une vie trop lourde à porter. Je ne fais plus confiance aux autres. Je vois le mal partout, j'ai peur de tout. J'ai la phobie des transports, des caves... Depuis la mort d'Ilan Halimi, je vis avec la hantise d'être enlevée, d'être torturée. Sa mort m'a fait remonter trois ans en arrière. J'aimerais pouvoir rencontrer la famille d'Ilan. A Vitry, au moment de la mort de Sohane, il y a eu une grande solidarité, notamment de la part des filles qui galèrent. C'est un être humain qui a enlevé la vie de notre soeur, mais c'est d'autres êtres humains qui nous ont aidés à surmonter sa mort.
Qu'attendez-vous du procès ?
J'espère qu'il servira de leçon. Il faut savoir que pour certains jeunes, dans le quartier, Nono, c'est un héros. Un héros de cage d'escalier... Lors de la reconstitution, certains jeunes ont applaudi son arrivée dans la cité. Il faut que la justice donne un signe fort. Il faut que les petits caïds comprennent quel'on ne peut pas ****** la vie de toute une famille sans moisir en prison. Moi je réclame la perpétuité pour l'assassin de ma soeur. Sohane est morte à perpétuité. Et nous, nous sommes détruits à perpétuité.
Je pense à mon père. Il est arrivé à 19 ans en France, on l'a traité comme de la *****. Mais il ne s'est jamais plaint, pour lui, l'autorité, c'est sacré. Il s'est levé toute sa vie à 4 heures du matin pour pouvoir nous nourrir et nous élever. Tout ça pour qu'à la fin de sa vie un petit merdeux de cité lui fasse un bras d'honneur. Ce Nono, personne, dans ma famille, ne le connaît, on ne l'a jamais vu et il nous a niqué notre vie. Aujourd'hui on le hait. C'est fou. Mon père, ça fait vingt-cinq ans qu'il va chez le même médecin. Depuis la mort de ma soeur, il va consulter deux fois par mois. Avant-hier, pour la première fois, il a dit à son médecin qu'il était le père de Sohane.
Pouvez-vous imaginer pardonner à l'assassin de votre soeur ?
C'est difficile. A aucun moment il n'a émis le moindre regret. Je sais que pour évoluer, me libérer, je dois passer par le pardon. Je me dis qu'il y a toujours eu des crimes et que la barbarie est à visage humain. J'essaie de me raccrocher à Dieu. J'ai besoin de croire que ma soeur est autre part et qu'un jour je pourrai la retrouver. Autrement, je me suicide.
Pensez-vous que Sohane est devenue un symbole ?
Je n'en sais rien. Et à vrai dire je m'en fous un peu. Je voudrais surtout qu'elle soit en vie. Aujourd'hui, elle aurait 21 ans. Et ça serait une bombe... (rires). Il faudrait la laisser reposer en paix, qu'on arrête de salir sa mémoire.
http://www.lepoint.fr/societe/document.html?did=176234
Commentaire