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    Regain de confiance chez les 40 voleurs

    par Kamel Daoud

    Des millions ont été tués «au nom de Dieu» en quelques siècles. Des milliers le sont «au nom de la stabilité», totem politique des temps modernes. Après Moubarak, l'enthousiasme était grand de voir la terre se transformer en ciel à portée de main de chacun, et les dictateurs tomber les uns après les autres sans trop de morts ou de discours.

    Avec le Rat de Tripoli, on retombe tous au sous-sol. Ce qui se passe en Libye ne concernent donc pas uniquement les Libyens, à l'évidence : si le Rat gagne la bataille des armes, le message est là pour les 40 voleurs qui restent. La Révolution libyenne n'a pas encore abouti mais sa leçon est grande : désormais, les autres dictateurs sur la liste du domino savent que le TPI est une mouche que l'on peut chasser de la main, que la pression internationale est corruptible, que l'Occident pense d'abord aux siens et à son allume-cigare, que l'on peut tuer des milliers en ne provoquant que des conférences de presse.

    Avec le Rat de Tripoli donc, les dictateurs comprennent qu'on peut gagner et envoyer des avions de chasse et pas des chameaux pour gagner quelques années de règne. Colère donc de voir le printemps arabe finir dans l'impasse d'un fou et sous ses armes, sans scrupules, sans gêne, sans mauvaise conscience et sans hésitations sur les moyens. Au Bahreïn comme ailleurs, rien ne retient la main qui frappe désormais : «si Kadhafi le fait, pourquoi pas nous ?», disent les 40 voleurs cachés dans leurs jarres. Le Rat de Tripoli a donc placé la barre haut en terme de moyens de répression et cela tue l'âme de voir tout le reste du monde regarder ce pays se faire manger par une famille, sans rien pouvoir faire. Pourquoi ce silence ? Parce que. Les uns disent que l'Occident veut que Kadhafi désarme l'opposition pour décider, ensuite de le désarmer lui et n'avoir aucun adversaire en ces terres dans quelques semaines. Les autres disent que c'est à cause du pétrole.

    D'autres disent que c'est à cause du précédent irakien, ou le Vietnam ou de la destruction romaine de Carthage. D'autres disent encore que c'est à cause des pays voisins et de leur gaz, de leurs terroristes, de leurs El Qaïda ou de leurs immigrés clandestins. D'autres disent, enfin, que Kadhafi va être utilisé comme Saddam après sa première défaite : tampon et occupation locale, en attendant l'occupation internationale. Que va-t-il donc arriver ?

    Quelque chose de plus complexe, dit la vision, les yeux mi clos : ce que les dictateurs refusent par les armes, la nature va l'imposer par la guerre et la violence. Le monde «arabe» va vers sa guerre, vers une nouvelle cartographie, vers des croyances inédites et une décolonisation dure. C'est se tromper que de croire que «cela» va s'arrêter au cas d'un seul monarque ou d'une réforme ou avec des élections ou des avions de chasse. C'est une terre qui bouge vers la Montagne magique, quelque chose qui remonte du biologique et va vers le politique et le dépasse dans le cri. C'est un mouvement des entrailles vers le drapeau. Illusion que de croire que cela peut s'arrêter ou s'inverser ou se négocier. Ceux qui ne tomberont pas aujourd'hui se feront lyncher demain ou seront pendus le surlendemain. Saddam est leur ancêtre, la honte sera leur souvenir.


    Le Quotidien d'Oran

    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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