Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Maroc: "le pouvoir économique n'a pas changé de mains"

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Maroc: "le pouvoir économique n'a pas changé de mains"

    Pour le sociologue Ali Benhaddou, les réformes annoncées ne mettent pas véritablement en cause le rôle ni la suprématie des élites du royaume.

    La nouvelle Constitution marocaine, adoptée le 1er juillet dernier par référendum, amorce une démocratisation des institutions du royaume. Reste à l'appliquer... Pensez-vous que les élites du pays soient prêtes à l'accepter ?


    Les élites du royaume sont depuis toujours réfractaires au changement. Leur objectif premier, de génération en génération, est de préserver leur statut et leurs privilèges. Mais, en même temps, elles sont liées à la monarchie. A partir du moment ou le roi décide de promouvoir des réformes, elles n'ont guère d'autre choix que de les accepter, ou de s'en accommoder. Cela dit, les réformes annoncées ne mettent pas véritablement en cause leur rôle ni leur suprématie.

    Sont-ce les mêmes familles qu'à l'époque d'Hassan II qui sont au pouvoir aujourd'hui ?

    Dans les grandes lignes, oui. Le roi a cependant promu plusieurs de ses anciens camarades du Collège royal qui, eux, viennent d'horizons divers, y compris de couches sociales plus défavorisées. Pour le reste, le pouvoir économique n'a pas changé de mains. Ce sont les mêmes qui sont à la tête des grandes entreprises, publiques ou privées, ou parfois les héritiers de la génération qui était aux affaires sous Hassan II. Adil Douiri, aujourd'hui l'un des grands noms de la finance après un passage au ministère du Tourisme est le fils de M'Hamed Douiri, l'un des fondateurs de l'Istiqlal, plusieurs fois ministre sous Hassan II. Mostafa Terrab, patron de l'Office chérifien des phosphates, est le petit-fils de Moulay Mustapha Belarbi Alaoui, l'une des figures de la politique et de la haute administration sous Hassan II. Driss Benhima, personnage clef du règne de Mohammed VI, lui aussi issu d'une grande famille, est le fils de l'ancien Premier ministre Mohamed Benhima. On pourrait multiplier les exemples... Ce sont des dynasties.

    Ces dynasties ont aussi investi la technocratie, laquelle pèse au Maroc beaucoup plus lourd que la classe politique...

    Absolument. Il en a toujours été ainsi depuis le début du règne d'Hassan II. Les technocrates exercent le pouvoir. On a tout fait depuis 1965 pour stériliser le champ politique. Pour manipuler aussi le jeu politique, afin qu'il ne constitue pas une menace. Or le débat politique est, avec l'action syndicale, un instrument de pacification de la société. Le supprimer, ou l'amputer de l'essentiel, c'est prendre le risque de la violence et de l'extrémisme. C'est d'ailleurs, en partie au moins, l'absence de vrai débat politique qui explique, à mon sens, la montée de l'islamisme

    Le Mouvement du 20 février a-t-il changé la donne ?

    Il est l'expression de l'exaspération de la société civile. Celle-ci veut voir la politique reprendre ses droits.

    La réforme des institutions est-elle vraiment prioritaire au Maroc ? Ne vaudrait-il pas mieux imposer d'abord une redistribution de la ressource nationale afin que les inégalités soient moins criantes ?

    La démocratie est la base du développement. Mais la démocratie, c'est beaucoup plus qu'une réforme des institutions. La démocratie est à la fois politique, culturelle, économique. Elle induit en effet une redistribution des richesses seule à même de faire disparaître l'extrême pauvreté au Maroc.




    Chakib Alami pour L'Express
Chargement...
X