Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Comment pourrais-je t'oublier, Malek?

Réduire
Cette discussion est fermée.
X
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Comment pourrais-je t'oublier, Malek?

    Cette histoire que je transcris sur ce forum, est réelle ... elle relate le souvenir poignant de la perte la plus cruelle que j'ai vécue jusqu'à ce jour : celle de mon meilleur ami d'enfance :Malek (Allah yarahmou)..
    ================================================== =======

    Comment pourrais-je jamais l'oublier ?
    Mon défunt ami Malek était ce genre de garçon qu'on apprécie dès le premier contact: sympathique, jovial et d'une gentillesse incomparable..Il était , pour moi, un cadeau que la Providence a bien voulu m'offrir pour etre le plus dévoué et le plus intime de tous les amis que j'ai eu à connaitre durant mon existence...Très estimé par tous, aussi bien par ses voisins que par ses camarades de classe, il jouissait d'un statut enviable dans l'univers hiérarchisé des enfants...Malek et moi avions le meme age: il était mon ainé de quelques mois, étant entendu que nous naquimes,dans le meme quartier presque sous le meme toit ...A peine étions-nous en age de voir le monde qu'une solide amitié s"était forgée entre nous au point de dépasser le stade de la fraternité...Bien étrange destin qui, non seulement nous a unis dans le bel écrin bleu de l'amitié , a fait aussi que nous soyions tous deux orphelins de mère dès notre plus tendre enfance! Toutefois , cette similitude mise à part, je dois dire que j'étais mieux loti que mon défunt ami car ma maratre n'était autre qu'une cousine à mon père, donc de mon sang , et , par conséquent , elle me traita comme son petit cousin , pleine de prévenances qu'elle était toujours à mon égard...Malheureusement, tel n'était pas le cas pour mon pauvre ami que le destin a affligé d'une maratre qui le tyrannisait à longueur de journée , empoisonnant ainsi son existence d'orphelin infortuné...Elle le persécutait impitoyablement , cette maritorne qui nourrissait à son égard une haine viscérale.Elle était sans enfants et ne ratait jamais une occasion de tarabuster le pauvre petit Malek qui, privé d'affection et de tendresse, constamment rudoyé et maltraité par sa maratre, était de surcroit durement éprouvé par une maladie pulmonaire mal soignée qu'il avait contractée quelques mois seulement après la mort de sa mère...D'un aspect extérieur rébarbatif, Zineb , la maratre de Malek, était de nature acariatre , glaciale , sèche et ne faisait jamais le moindre effort pour paraitre un peu agréable ...Physiquement mal lotie , elle était longiligne, squelettique , avec un visage émacié aux pommettes saillantes et aux dents proéminentes ...Il n'est guère dans mon intention de brocarder le physique d'une créature de Dieu, ce qui est blasphématoire aux yeux de notre religion, mais il s'agit , pour moi,plutot de vilipender la bétise humaine et sa brutalité , notamment lorsque sa victime est un pauvre petit enfant
    désarmé devant les aléas de la vie... Malek me racontait tout ...d'ailleurs nous n'avions pas de secret l'un pour l'autre ...Il me parlait chaque jour des inévitables brimades , privations de nourriture qu'elles lui faisait subir et des corvées domestiques auxquelles elle astreignait son corps frèle ,surtout les jours de repos...Le plus souvent , nous partagions le repas ensemble chez moi...Son père avait du intervenir maintes fois pour qu"elle soit plus clémente avec son fils...Etrangement, toutes les objurgations et les réprimandes que le père de Malek avait faites à sa femme, eurent l'effet d'un cautère sur une jambe de bois! Il en arriva meme à la tabasser, mais peine perdue, sa haine pour le petit s'était encore davantage exacerbée... Cette situation dramatique que vivait le pauvre enfant a tot fait de devenir un sujet de discussion chez les voisins qui en sont arrivés à se demander pourquoi M.Lamri, le père de Malek, persistait -t-il à garder comme épouse une femme qui martyrisait son unique fils! Ce n'est que bien plus tard que nous sumes que M.Lamri avait épousé cette femme stérile uniquement parce qu'il espérait qu'un jour elle hériterait de la fortune de son père...
    Il faut dire que toutes les tribulations que cette femme faisait subir à mon cher ami n'étaient pas de nature à me laisser indifférent: je n'étais certes qu'un enfant, mais je nourrissais déjà à l'endroit de cette horrible femme un sentiment de répulsion et de dégout...je l'exécrais du plus profond de mon ame et lui souhaitais enfer et damnation! Mille et une questions se posaient à mon esprit et restaient sans réponses, car je ne pouvais admettre qu'un enfant en si bas age soit laissé entre les mains d'une femme qui aurait , à n'en pas douter , une pierre en guise de coeur qui battait dans sa poitrine ..Paradoxalement,je dois dire que cette mal-vie qui était devenue le bréviaire de mon ami, avait eu pour effet de resserrer encore davantage les liens de notre déjà solide amitié: nous étions souvent ensemble, nous nous asseyions à la mème table à l'école et , de temps à autre nous faisions une petite promenade sur la route d'El-Anasser...En cours de route, nous nous racontions des blagues, les potins de la classe, nous cueillions des mures et ,infailliblement, nous parlions de Zineb...Que dire de cette femme, sinon prier pour que le diable l'emportat ! et cela était devenu un jeu amusant pour nous, lorsqu'à chacune de nos promenades nous levions les mains au ciel pour dire (,en arabe bien sur):
    Que Dieu lui crève les yeux ! - Amen
    Que Dieu lui assourdisse les oreilles ! - Amen.
    Que Dieu lui casse les dents ! - Amen.
    Que Dieu ...................................., cette dernière prière nous faisait éclater de rire , et nous rentrions chez nous ....Une chose était absolument sure : Malek autant que moi , avions le sentiment d'etre très heureux ensemble.
    ........................................ A suivre .................................................
    Dernière modification par joumy, 15 octobre 2012, 15h28. Motif: erreur
    Sois sage , O ma douleur , et tiens-toi plus tranquille.
    (Charles Baudelaire).

  • #2
    j'ai les larmes aux yeux ....je suis impatiente de lire la suite crois moi !!!!
    Quand on ne travaillera plus les lendemains des jours de repos, la fatigue sera vaincue.

    Commentaire


    • #3
      Glorious :

      Merci pour l'intéret que tu accordes à cette triste histoire qui m'a marqué à tout jamais ... Voici la 2ème partie .
      ================================================== =======

      Je ne pourrais continuer ce récit, sans préciser que notre Miséricordieux Créateur a comblé mon défunt ami Malek d'un visage angélique , au teint brun qui cachait pudiquement l'air contrit du aux inévitables vexations qu'il subissait chaque jour que Dieu fait...Il avait une belle chevelure abondante , d'un noir de jais , avec une mèche rebelle qui lui pendait sur le front au point de géner sa vue et l'agacer quelquefois...
      Le dernier hiver de sa vie, il rechuta brusquement et garda le lit pendant trois semaines, au terme desquelles il se releva complètement changé : une facheuse tendance à parler de la mort était curieusement apparue dans les propos de mon ami...Au début je répondais à ses questionnements en arguant que la mort était l'apanage exclusif des vieillards ... mais je constatais malheureusement,qu'à chaque fois que je détournais le sujet ,il ne tardait pas à y revenir: la mort était devenue son leitmotiv,un instinct de conservation maladif, une paranoia qui s'est emparée de mon pauvre ami...Je pris soudain peur , car j'estimais que ses paroles étaient prémonitoires d'une fin imminente...Malek s'était brusquement départi de son optimisme et le voilà gagné par le découragement, lui qui avait , jusque là, opposé une résistance stoique à deux adversaires irréductibles: une maratre impitoyable et une maladie dévastratrice...Ses forces mentales l'ont abandonné , et son rève d'une vie paisible est définitivement emporté par le tourbillon hallucinant du désespoir... L'état de santé de Malek se dégradait au fil des jours...Je vivais dans l'étau de l 'angoisse , partagé tour à tour, entre le désarroi, l'espérance et la peur de perdre mon plus cher ami...Bien qu'habité par le sentiment que ses chances de guérison étaient insignifiantes, je ne cessais pourtant de faire des prières pour lui, et de faire des offrandes aux pauvres à chaque fois que j'en avais les moyens.Il est vrai que je ne sous-estimais pas cette maladie et sa morbidité, mais je me refusais de croire qu'elle put etre mortelle! Cette résistance que j'opposais à un destin qui poursuivait son chemin inexorablement, avait fini par installer en moi l'angoisse de la mort qui a pris place dans mes fantasmes... D'autre part, tout un chacun sait que toute maladie d'un membre de la famille génère inquiétude et tristesse, et altère sérieusement l'atmosphère conviviale coutumière dans le nid familial....Malheureusement , cette règle était absente dans le foyer de M. Lamri dont le fils unique était laissé à une maratre qui restait de marbre devant les souffrances de cet enfant, de ce petit etre frèle qui avait besoin de soin et d'attention...Révoltant et inadmissible est ce drame humain ou un enfant agonisant était soumis aux seuls soins dispensés par un médecin du centre de santé , à titre gratuit... Ce gamin, étalé sur un lit, luttant contre les affres de la maladie, avait surtout besoin d'une mère à son chevet: une mère ou une personne bienveillante, aux petits soins pour lui, le caressant,le cajolant, le serrant contre sa poitrine affectueuse , le baignant de sa tendresse pour alléger ses souffrances...L'épreuve de la maladie réclame la présence d'une personne aimable, compréhensive , humaine et pleine d'aménité, et non un monstre qui n'a d'humain que la morphologie!
      Tois semaines après , Malek se releva et la vie reprit doucement son cours normal....mais , ce n'était, comme on dit, que le calme qui précède la tempète.En, effet, deux mois après, il rechuta et retourna au lit : cette fois-ci son état s'était terriblement aggravé avec l'apparition d'une fièvre persistante , de douleurs abdominales récurrentes et une respiration difficile...Son père, qui était pauvre et ne pouvait se payer le luxe d'emmener son fils chez le professeur Amrane à Sétif, seul phtysiologue connu dans la région, s'était , encore une fois ,rabattu sur le dispensaire ou un traitement semblable au premier fut prescrit au petit Malek... Cette fois j'ai vraiment peur pour mon pauvre ami, c'est pourquoi je m'empressais, chaque fois, de rentrer vite de l'école pour aller lui rendre visite, m'enquérir de son état et bavarder un peu à propos de la vie scolaire et autres évènements ...Sa maratre , visiblement agacée par mes allées et venues incessantes, accepta à contre- coeur mes visites car, en contrepartie j'acceptais de lui faire quelques commissions...

      ================= A SUIVRE =======================
      Sois sage , O ma douleur , et tiens-toi plus tranquille.
      (Charles Baudelaire).

      Commentaire


      • #4
        la suiteuuuuuuuuuuu
        Quand on ne travaillera plus les lendemains des jours de repos, la fatigue sera vaincue.

        Commentaire


        • #5
          3 ème partie et fin....


          Une semaine s'était écoulée et l'état de Malek allait de mal en pis...Quelques jours après, un lundi, en rentrant de l'école à midi , j'eus la surprise de voir un attroupement devant la maison de mon ami , qui était mitoyenne à la notre...Cela ne pouvait etre que le drame que je craignais le plus...J'accourus vers le groupe , lorsqu'un camarade du quartier vint à ma rencontre et me lança :"Joumy! c'est ton ami Malek qui est mort !"..." A Dieu nous appartenons, à Lui nous retournerons"... J'eus l'impression que le ciel s'est effondré sur ma tete...Je ne sais ce qu'il fut advenu de moi durant plusieurs heures...j'étais hébété, abasourdi , comme dans un état second...J'avais pleuré toutes les larmes de mes yeux...j'avais sangloté toute la soirée contre la poitrine de mon père...Le silence régnait dans la maison de mon pauvre ami qui n'avait ni mère ni soeur pour pleurer sa mort! Il ne me reste aujourd'hui, que des bribes de souvenirs de la journée suivante , celle ou mon ami allait etre enterré...Je garde le souvenir de mes camarades de classe qui sont venus assister aux funérailles, au meme titre que nos deux enseignants d'arabe et de français ainsi que le directeur de l'école...Tout comme je me souviens du cortège funèbre qui accompagna mon pauvre ami Malek à sa dernière demeure... Le moment le plus émouvant qui m'a bouleversé fut celui ou toute l'assistance quitta le cimetière , laissant le pauvre Malek seul au fond de sa tombe...
          Le lendemain , un autre moment pathétique nous attendait lorsqu'à huit heures nous entrames en classe comme d'ordinaire...Notre instituteur de français, un homme élégant, distingué, de ceux qu'on appelle communément de la vieille école, vètu pour la circonstance d'un costume et d'une cravate noirs, s'est placé derrière son bureau , regarda longuement la chaise vide du défunt , et nous dit d'une voix étouffée par l'émotion:" Mes enfants, notre cher Malek nous a quittés pour un monde meilleur...Nous le rejoindrons tous un jour...Prions pour lui pour que notre Créateur le comble de sa miséricorde"...A peine eut-il fini sa phrase que des larmes sillonnèrent ses joues...Plusieurs d'entre nous ont éclaté en sanglots...En d'autres circonstances, les larmes de l'instituteur auraient paru ridicules, voire grotesques, mais cette fois-ci, ces larmes nous ont révélé une autre facette de la dimension humaine qui caractérisait cet homme à la grandeur d'ame , généreux et pétri de noblesse ...
          Beaucoup de mes camarades me conseillèrent, par compassion, d'oublier cet ami que je venais de perdre...L'oublier? mais comment le pourrais-je ? et puis je considère cela comme une lacheté de ma part...mon ami restera toujours présent dans mon esprit...Durant plus d'une semaine,mon désarroi était tel que je me trouvais intellectuellement inhibé , incapable de comprendre ce qui se disait en classe, au point ou j'étais souvent apostrophé par notre maitre qui était conscient de la dure épreuve que je traversais...A cet age de la vie, je considérais la mort de mon ami comme une injustice, une aberration...et ce n'est que bien plus tard , ayant atteint l'age de la raison, que je compris que la mort est la destinée de tous les etres , quels que soit leur rang, leur age , leur race ou leur religion: la mort est juste. Je n'ai pas la capacité d'expliquer la mort en elle-meme, dans son essence et sa nature, mais il est juste de dire qu'elle est une réalité à laquelle aucun etre humain ne peut échapper...J'accepte , comme tout croyant, la volonté de notre Créateur , et me prosterne humblement devant Sa Toute-Puissance , néanmoins, l'etre humain que je suis autant que tout le monde, est fait de chair, de sang , et de sentiments...et en tant que tel, mon coeur et mon esprit réagissent au gré des évènements qui meublent ma vie de tous les jours: la joie, le deuil, la haine, l'amour....C'est pourquoi, je n'oublierai jamais ce jour sombre ou la mort , en fauchant mon meilleur ami, a , dans son passage funeste , lardé mon coeur et mon ame d'une profonde blessure qui ne guérira jamais...
          ================================================== =======

          Dernière modification par joumy, 17 octobre 2012, 15h55. Motif: erreur
          Sois sage , O ma douleur , et tiens-toi plus tranquille.
          (Charles Baudelaire).

          Commentaire


          • #6
            seul le temps fera qu'on souffrira moins, ce n'est pas pour autant qu'on n'oublie, mais la douleur s'atténue,

            .....peindre et écrire, exprimer ce qu'on ressent,c'est bien ... comme l'expurger

            une histoire triste je l'avoue mais ce fut un plaisir de te lire
            bon courage joumy
            Quand on ne travaillera plus les lendemains des jours de repos, la fatigue sera vaincue.

            Commentaire


            • #7
              Merci

              Glorious :
              " Un seul etre manque et tout vous parait dépeuplé " disait Alphonse de Lamartine , ce à quoi André Gide répliquait par cet aphorisme qui recentre la vision sur le futur et ses espérances , en disant :" Un seul etre manque et tout est repeuplé "...pour dire combien la vie est précieuse et ne mérite pas qu'on la néglige en restant focalisé sur un passé qui a laissé dans son sillage tristesse et désolation ...
              Dans cet univers dont nous contemplons l'immensité et l'ampleur de notre ignorance , chacun de nous est à la barre de ce navire qu'est la vie que notre Créateur nous a généreusement donnée , une vie faite de choses merveilleuses , d'autres moins bonnes et d'autres enfin faites de deuil, de désillusions et d'infortune ... Accepter et assumer son destin est , pour tout croyant, une attitude qui lui permet de traverser les dures épreuves sans coup férir ...la douleur , il faudrait s'en accommoder , la prendre pour compagne et pourquoi pas pour maternante ?
              Dieu fasse que nous quittions ce monde en parfaite symbiose avec notre religion , en paix avec notre Créateur , pour rejoindre ces etres chers qui nous ont devancés dans ce monde éternel...
              Merci Glorious pour les paroles apaisantes que tu as eu l'obligeance de m'adresser ci-dessus ...
              Sois sage , O ma douleur , et tiens-toi plus tranquille.
              (Charles Baudelaire).

              Commentaire


              • #8
                L'histoire est émouvante, la sagesse transparaît à travers une écriture, digne et maîtrisée, contrastant avec les mouvements irréguliers que l'événement imprime sur l'âme.

                Amicalement

                Ps. Songe à l'écriture romanesque.

                Commentaire


                • #9
                  Il me semble avoir dejà lu et avoue avoir été ému par cette histoire, fortement apprécié le style narratif de son auteur, dans plusieurs forums postées sous des pseudos différents, safir...ali gator...joud etc etc serait tu le même joumy?
                  أصبحنا أمة طاردة للعلماء مطبلة للزعماء

                  Commentaire


                  • #10
                    t´as une belle plume en tous les cas.

                    Commentaire


                    • #11
                      Ce gamin, étalé sur un lit, luttant contre les affres de la maladie, avait surtout besoin d'une mère à son chevet: une mère ou une personne bienveillante, aux petits soins pour lui, le caressant,le cajolant, le serrant contre sa poitrine affectueuse , le baignant de sa tendresse pour alléger ses souffrances...L'épreuve de la maladie réclame la présence d'une personne aimable, compréhensive , humaine et pleine d'aménité, et non un monstre qui n'a d'humain que la morphologie!
                      ...

                      Histoire très triste et émouvente, ça m'a profondément emue !J'ai pleurée en lisant ton histoire si touchante...

                      Merci du partage Joumy.
                      J'aurais aimé être un PC pour pouvoir redémarrer ma vie en mode sans échec ...

                      Commentaire

                      Chargement...
                      X