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Pourquoi Total investit massivement en dehors des hydrocarbures

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  • Pourquoi Total investit massivement en dehors des hydrocarbures

    Développement de ses filières gazière et photovoltaïque, vente d’électrons aux professionnels : le pétrolier français investit massivement hors des hydrocarbures. Objectif : anticiper les futurs enjeux environnementaux.

    Patrick Pouyanné aime aller sur les terrains où on ne l’attend pas. En juin dernier, le PDG de Total, chaperonné par son comité exécutif, s’est rendu en Californie à la rencontre d’entreprises emblématiques comme Google, Tesla, SolarCity. Une tournée pour mieux comprendre l’esprit start-up des sociétés de la Silicon Valley ? Pas seulement. Total suit de près le numérique, les énergies renouvelables et les nouvelles technologies afin de doper sa productivité. En mai, le groupe reprenait pour 950 millions d’euros le français Saft, une entreprise de batteries haut de gamme. Un mois plus tard, il rachetait pour 200 millions Lampiris, un fournisseur d’électricité et de gaz belge. Via son fonds Total Energy Ventures (TEV), le pétrolier est également entré dans le capital d’United Wind, une société new-yorkaise qui développe des projets de miniéoliennes. Tout récemment, il a pris un ticket dans AutoGrid, un californien qui optimise les flux d’énergie entrants ou sortants des réseaux.

    Une division ambitieuse

    Le pétrolier est-il devenu fou ? Pourquoi cette frénésie d’investissements hors des hydrocarbures alors que la plupart des autres majors restent scotchées sur l’oil and gas ? Pas de panique, Total ne quitte pas le monde du brut - il vient d’ailleurs de réinvestir dans le gaz de schiste aux Etats-Unis. Il n’a pas l’intention non plus de devenir une utility façon Engie. Face aux enjeux environnementaux et climatiques, il veut diversifier sa palette. Dans son plan à vingt ans One Total, le pétrolier intègre les mutations du paysage énergétique. « L’énergie du XXIe siècle sera l’électricité, claironne Patrick Pouyanné. Nous voulons nous positionner sur (sa) chaîne de valeur à travers le gaz, mais aussi la production d’électricité renouvelable. » Le 1erseptembre, le PDG officialisait cette nouvelle stratégie en créant aux côtés des pôles exploration et production, raffinage-chimie et marketing et services, une quatrième branche baptisée Gas, Renewables & Power (GRP). La division a de grandes ambitions. « Notre budget annuel va tourner autour d’1 milliard de dollars, dont 500 millions pour les renouvelables, et nous avons l’objectif de générer 1 milliard en cashflow d’ici cinq ans », indique Philippe Sauquet, patron du pôle GRP.

    Le défi du stockage

    Gaz, renouvelables, électricité, Total est sur les trois segments. L’électricité, avec l’activité trading, la vente d’électrons aux professionnels et Lampiris. Le gaz fait partie de son coeur de métier. Il est la ressource de la transition énergétique, la meilleure pour pallier l’intermittence des éoliennes et du photovoltaïque. Côté renouvelables, Total mise sur le solaire depuis une trentaine d’années. Mais c’est à partir de 2011 qu’il décolle vraiement, quand il prend une participation majoritaire dans SunPower, un des trois grands fabricants de panneaux américains. Ces dernières années, le prix des cellules a baissé drastiquement. Mais le problème du photovoltaïque est qu’il donne son plein rendement en milieu de journée, alors que la consommation d’électricité y est la plus faible. Le défi de demain consistera donc à stocker cette électricité pour la restituer aux périodes de pointe. C’est d’autant plus nécessaire qu’émergent des solutions d’autoconsommation et que les conditions de vente d’électricité intermittente sont moins favorables. « En Europe, les fournisseurs ne bénéficient plus d’un tarif d’achat garanti, mais doivent vendre l’électricité au prix du marché, indique Michel Cruciani, chargé de mission au Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières. D’où l’utilité de s’appuyer sur des solutions de stockage. »

    Spécialiste des batteries pour le spatial et l’automobile, Saft ne consacre que 5 % de son chiffre d’affaires aux applications stationnaires susceptibles de stocker l’énergie. « Ils ont la technologie, on a le marché, on les pousse donc à aller plus loin, indique Philippe Sauquet. Saft bénéficiera chaque année d’un budget supplémentaire tournant autour de 50 millions de dollars, qui correspond aux dividendes que la compagnie versait à ses actionnaires quand elle était cotée. »

    Des synergies à créer

    Grâce à SunPower, et surtout au trading d’électricité et de gaz, qui représente 30 milliards de dollars de chiffre d’affaires, la division GRP est déjà un géant. « Avec les grands projets que nous avons lancés, nos volumes de gaz vont croître de 20 % dans les cinq ans et ceux de gaz naturel liquéfié vont doubler », estime Philippe Sauquet.

    Il reste maintenant à assembler les pièces du puzzle, à créer des synergies entre les traders basés à Londres, à Houston et à Singapour, les experts du gaz et du solaire, les ingénieurs de Saft, les commerciaux de Lampiris. « C’est notre grand défi », reconnaît Philippe Sauquet. Un défi d’autant plus délicat que l’offensive de Total dans l’électricité ne laisse pas indifférent. Le rachat de Lampiris, petite société à l’image très écolo, a fait grincer des dents : quelque 5 000 clients ont déserté après l’annonce. Total, qui a appréhendé les renouvelables par le biais des parcs solaires, doit maintenant séduire le grand public. Pour y parvenir, le groupe va devoir montrer la sincérité de sa démarche, prouver que sa diversification n’est pas juste un plan de communication. Au début des années 2000, le britannique BP avait adopté le slogan « Beyond Petroleum » et opté pour un joli logo vert et jaune en forme de soleil. La belle image s’est fracassée en 2010, lors de l’accident de la plateforme Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique.

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