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Algérie: La stratégie industrielle à besoin encore d'être débattue.

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  • Algérie: La stratégie industrielle à besoin encore d'être débattue.

    Chronique du jour: Décodages.


    Faut-il se lancer aujourd’hui dans la construction de grands groupes industriels publics comme l’a annoncé récemment le ministre de l’Industrie et de l’Investissement ? Mais pour aller vers la conquête de quoi ?

    L’industrie mondiale est déjà en proie à de grandes batailles de compétitivité et de parts de marché et les protagonistes sont des champions mondiaux non pas publics mais à capitaux privés en perpétuelle restructuration, délocalisation, externalisation.

    Champions mondiaux qu’il sera bien difficile de concurrencer, cela va de soi. Notre «nouvelle» option industrielle, vraisemblablement inspirée par l’expérience sud-coréenne des «Chabols» (qui a démarré, faut-il le rappeler, voila près de 40 ans !) peut-elle se payer le luxe de refaire l’histoire et échouer une nouvelle fois surtout que le contexte industriel mondial est aujourd’hui encore plus difficile, évoluant à un rythme infernal. Combien de temps nous faudrait-il pour construire des grands groupes performants et pourra-t-on le faire avec des entreprises publiques dont on sait maintenant qu’elles ne peuvent être gérées sous contrainte d’efficacité à cause, notamment, de leur exposition aux inévitables immixtions du pouvoir politique.

    Ne vaudrait-il pas mieux chercher à ouvrir le capital de nos entreprises publiques industrielles dans le cadre d’une stratégie d’intégration aux chaînes de valeur internationales dont les grands champions mondiaux localisent aujourd’hui des segments entiers sur différents sites (et dans différents pays) par des stratégies d’externalisation, d’outsourcing et que les pays émergents cherchent à accueillir en rivalisant d’ingéniosité.

    L’Algérie a déjà une expérience en matière de grands groupes industriels publics. Rappelons-nous : notre industrie manufacturière tout entière était organisée pour l’essentiel en une dizaine de grands groupes : Sonacome, Sonelec, SNMC, SONIC, Sogedia... On misait à l’époque déjà sur l’effet de taille pour aider nos grandes sociétés nationales à devenir des champions, ne voyant pas que leur premier handicap était déjà leur gestion étatique, administrative loin de toutes contraintes d’efficacité. Qu’en reste-il aujourd’hui après le rythme d’évolution infernal imposé par l’industrie mondiale et les écarts toujours plus grands entre les champions mondiaux et les tentatives d’industrialisation des pays du Sud ?

    Il n’est plus besoin de ressasser tout cela ! Disons tout simplement qu’il serait bien maladroit de refaire cette histoire qui plus est dans un contexte industriel mondial totalement différent de celui des années 1970 et plus exposé à la compétition. Nous pensons, pour notre part, que notre industrie a surtout besoin aujourd’hui d’une politique déterminée et cohérente de soutien à la PME à capitaux privés. L’Algérie a besoin d’un «Small Business Act» qui prépare nos petites et moyennes entreprises industrielles à devenir des «gazelles», c’est-à-dire des entreprises à forte croissance, innovantes et compétitives à la fois sur le marché intérieur et sur les marchés d’exportation en les inscrivant dans les processus de globalisation actuellement en œuvre. Un «Small Business Act», c’est bien évidemment une série de mesures et d’actions en faveur de la petite entreprise qui ne sauraient se limiter à l’actuel programme de mise à niveau bien timide ou l’actuel ministère de la PME et ses faibles moyens.

    C’est en 1953 que le gouvernement américain adopte et met en œuvre le «Small Business Act» (SBA), programme dédié à la petite entreprise, qui stipule «le gouvernement doit aider, conseiller et protéger dans toute la mesure du possible les intérêts de la petite entreprise». Ainsi, «le libéralisme économique n’est pas toujours là où on l’attend». C’est le gouvernement américain qui a mis en place de nombreuses aides en faveur des petites entreprises privées et créé le «Small Business Administration» (SBA), employant 3 000 agents et dirigée par un membre du cabinet du président US administration... chargée de l’application de ce programme d’aides à la petite entreprise.

    Ces aides touchent à 4 volets :
    1. L’accès aux marchés publics: La loi impose que les marchés publics inférieurs à 100 000 dollars soient mis de côté pour être réservés aux petites entreprises. Ainsi, 62 milliards de dollars de marchés publics sont attribués annuellement aux petites entreprises sur un total de 200 milliards de dollars passés par l’Etat fédéral. La SBA délivre pour ce faire et à ce titre aux PME un certificat de compétence qui atteste de leur capacité à soumissionner.
    2. La défense des PME: Au sein de la SBA, il y a un bureau de défense de la PME («Office of Advocary») mandaté pour être «les yeux et les oreilles» des PME. Ce bureau propose des dispositions en faveur des PME. Il est aussi le porte-parole des PME quand elles rencontrent des difficultés.
    3. La formation, le conseil, l’assistance: La SBA développe de très nombreuses actions pour former et conseiller les chefs d’entreprises.
    4. Les aides au financement: Le gouvernement américain, par l’intermédiaire de la SBA, met en place des programmes financiers qui répondent aux besoins de petites entreprises. Il s’agit principalement de garanties de prêts (quelque 11 milliards de dollars annuellement) et de soutien à l’industrie du capital risque par le biais du programme SBIC (Small Business Investment Act). Le «Small Business Act» a largement contribué au développement des PME et les USA disposent de 22 millions de petites entreprises qui emploient 52% de la population active et contribuent pour 50% du PIB. Ces PME ont créé, depuis 1993, 10 millions d’emplois nouveaux. Pour sa part, et s’inspirant de l’expérience américaine, la France a mis en œuvre en juillet 2006 le «Plan Gazelle», dédié aussi aux PME (de 20 à 249 salariés). Rappelons que nous devons cette appellation de «Gazelle» pour les PME à l’économiste américain David Birch, pour qualifier les PME américaines créatrices d’emplois et à forte croissance. Birch distinguait les «gazelles» d’une part des «éléphants» ces grands groupes cotés en Bourse qui ont tendance à détruire des emplois, d’autre part, des «souris» ces très petites entreprises (TPE) ayant vocation à ne pas grandir.


    Les décideurs français ont constaté une faible croissance des PME et ont pu identifier 3 problèmes :
    1. Pour atteindre ses objectifs de croissance une «gazelle» doit recruter. Le marché du travail étant en France peu flexible, l’entreprise a peur de prendre trop de risques.
    2. Il n’y a pas d’encouragement fiscal pour soutenir les PME qui veulent augmenter leur taille et développer leur potentiel de croissance.
    3. Les banques ne suivent pas et n’assistent pas les PME en croissance qui rencontrent de nouvelles contraintes et qui souffrent de délais de paiement trop lents.


    L’objectif du «Plan Gazelle» en France est de travailler à faire émerger des PME innovantes et compétitives par un accompagnement de l’Etat. Il y a alors de la part de l’Etat :
    1. Un soutien financier à l’innovation
    2. Une assistance conseil.


    Plus concrètement le «Plan Gazelles» concerne les entreprises qui ont une croissance annuelle de leurs chiffres d’affaires d’au moins 20% pendant 4 ans en partant d’une base minimale de 100 000 dollars de chiffres d’affaires.
    Les mesures concrètes d’aide à ces «gazelles» sont :
    1. Gel de l’impôt sur les sociétés.
    2. Possibilité de décaler le paiement des cotisations sociales de salariés nouvellement embauchés.
    3. Remboursement immédiat du crédit d’impôt recherche.


    De plus, un soutien financier public est accordé aux «gazelles». Des «Small Business Investment Company» (SBIC) inspirées des modèles américain et anglais qui rassemblent pouvoirs publics et opérateurs privés, assistent financièrement les PME dont les délais de paiement, trop longs, freinent considérablement les capacités de développement. Les ressources des SBIC sont constituées de capitaux collectés par emprunts obligataires dont principal et intérêts sont garantis par l’Etat. De plus, les banques et les compagnies d’assurances font des apports. N’y a-t-il pas là quelque source d’inspiration pour l’Algérie dont les PME, pourtant moteurs incontestables de croissance, d’innovation et de compétitivité, sont complètement plombées par manque de stratégie des pouvoirs publics ?


    Abdelmadjid . Bouzidi.
    Le soir d'Algérie- 14 Mai 2008
    “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf
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