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Daho Ould Kablia : Lamari a dit des vérités

Daho Ould Kablia commente la sortie du chef d’état-major de l’ANP

jeudi 11 mars 2004, par Hassiba

Le ministre délégué aux collectivités locales, qui a animé, hier, un point de presse à Sétif, a estimé que l’on a fait de “très mauvais procès à l’Administration”.

M. Daho Ould Kablia, ministre délégué aux Collectivités locales, a eu la lourde tâche d’affronter, hier, les journalistes à Sétif en lieu et place de Zerhouni dont la défection est restée sans explication. Bien que courte, Ould Kablia ayant dû abréger la rencontre pour rejoindre le cortège présidentiel, la conférence de presse n’en a pas été moins houleuse.

D’emblée, le représentant du gouvernement se voit invité à commenter la sortie médiatique du chef d’état-major Mohamed Lamari, qui, rappelle-t-on, dans une interview à la revue El Djeïch, a cru utile de remettre les pendules à l’heure quant à la position de l’institution militaire par rapport à l’élection du 8 avril prochain.

Mohamed Lamari n’avait pas manqué d’exhorter les autres institutions de la République, l’Administration en tête, à observer les règles d’impartialité requises pour assurer la régularité du scrutin.

Les journalistes y voient une attaque frontale contre le département de Yazid Zerhouni, et par extension, celui de son ministre délégué aux Collectivités locales. Ould Kablia s’en défend énergiquement : “Le général Lamari, en sa qualité de chef d’état-major de l’ANP, a tout à fait le droit d’exprimer le point de vue de l’armée sur cette élection et je n’ai pas à le commenter”, commence par préciser le ministre délégué, avant de souligner : “Personnellement, je n’y vois pas un avertissement à l’encontre de l’Administration. Lamari a dit des vérités. Il a dit des vérités prouvées sur le terrain.”

Cela n’empêchera pas Ould Kablia de faire un plaidoyer sur l’intégrité de l’Administration : “Il est fait un très mauvais procès à l’Administration. On dit qu’elle ne va pas être neutre. L’Administration n’a qu’un rôle de spectateur. Elle n’est chargée ni plus ni moins que de la préparation matérielle de l’élection.” “Elle prépare les urnes, l’isoloir, le transport. Elle établit les listes des électeurs. L’Administration se limite à cela”, a-t-il insisté.

Le ministre rappelle les amendements apportés à la loi électorale à l’initiative de l’Assemblée populaire nationale et estime qu’elle constitue une garantie pour la régularité du scrutin. “Même pour les bureaux spéciaux, l’APN a tranché”, ajoute-t-il.

Ould Kablia s’adonnera à de laborieuses explications didactiques où il s’emploiera à décortiquer le mécanisme du vote au jour J pour démontrer par a+b que, techniquement, l’Administration est apolitique et qu’elle n’a qu’une présence logistique, innocente de toute prédisposition à la fraude. “À l’ouverture du scrutin, vous avez un président de bureau de vote, désigné par le wali il est vrai, mais que les représentants des candidats peuvent contester. Il est suppléé par le plus âgé et le plus jeune des électeurs auxquels viennent s’ajouter les six représentants des six candidats à l’élection présidentielle. Ce sont ces neuf personnes qui gèrent le bureau de vote et l’Administration n’a qu’un rôle de spectateur”, s’est-il évertué à expliquer. Et de lâcher : “Où va se trouver la tricherie ? Vous savez, il n’y a pas de gendarme dans l’isoloir pour obliger le citoyen à voter sur untel ou untel”.

Mais M. Ould Kablia ne dit pas un seul mot sur tout ce que fait l’Administration depuis des mois pour infléchir le processus électoral en faveur du super-candidat “fakhamatouhoum” !

Un confrère l’interroge à propos des graves révélations du Dr Ahmed Taleb Ibrahimi dans lesquelles le président de Wafa accuse ouvertement le département de Yazid Zerhouni d’avoir organisé sa disqualification, Ould Kablia se contente de rétorquer : “Je n’ai pas à répondre à des accusations qui ne me concernent pas. Je laisse le soin à M. Zerhouni de le faire”.

En fin limier, il déplace les accusations vers l’institution que préside Mohamed Bedjaoui. “Je trouve surréaliste qu’on avance des accusations d’une telle gravité. Il appartient au président du Conseil constitutionnel de dire si les chiffres rendus publics sont exacts ou pas. C’est à Bedjaoui qu’il faut demander des comptes, pas à M. Zerhouni”, réplique-t-il.

Interrogé sur les émeutes qui ont éclaté un peu partout à travers plusieurs régions du pays, et qui se propagent telle une traînée de poudre, Daho Ould Kablia estime que le mot “émeutes” n’est pas tout à fait indiqué pour nommer ces évènements. “Ce ne sont pas des émeutes, ce sont de petits mouvements, des mouvements d’humeur qui, parfois, sont motivés par des problèmes sérieux.

Dans le cas de Ouargla par exemple où j’ai eu personnellement à intervenir, il y avait un réel problème qui était celui des sociétés de prestation ou agences de placement, et le gouvernement y a mis un terme, sinon je reçois quotidiennement des rapports de la gendarmerie sur telle ou telle “émeute”.

Ainsi, j’apprends qu’à tel endroit quarante personnes ont protesté pour exiger un ralentisseur et qu’à tel autre, quarante personnes protestent pour exiger d’enlever un ralentisseur. Cela fait partie de la vitalité de notre société. Cela n’oblige pas moins les P/APC à s’occuper un peu plus de leurs administrés”, a-t-il argumenté.
Le ministre délégué sera vivement interpellé à propos de l’itinéraire improbable du chef de l’état qui, curieusement, dans son programme de visite de la wilaya de Sétif, aurait évité toutes les localités berbérophones de la wilaya.

Ould Kablia profite de la question pour tendre une perche à la Kabylie : “Je ne partage pas ce point de vue. Ces régions bénéficient des mêmes budgets que toutes les autres. D’ailleurs, je regrette que pendant trois ans, les wilayas de Tizi Ouzou et de Béjaïa, qui étaient le moteur du développement local par leur grand dynamisme, soient brisées par des événements, lesquels, il faut le dire, sont à caractère politique”, a-t-il souligné.

Enfin, à une question se rapportant à une information sécuritaire publiée par un confrère, il y a quelques jours et faisant état de l’infiltration dans la capitale par une cinquantaine de terroristes, Ould Kablia dément cette information en ironisant : “Ils les ont comptés ? Ils étaient en contact avec eux ? Pourquoi 50 et pas 100 ? Si cette information était sourcée, vous savez bien que les sources sécuritaires n’ont pas intérêt à divulguer ce genre d’information”.

M. Benfodil, Liberté