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Irak : Les images de l’horreur

samedi 22 mai 2004, par Hassiba

Encore des images de l’horreur en Irak.
Cette jeune soldate, souriant à pleines dents face à l’objectif et le pouce levé en signe de travail bien accompli, penchée sur le corps d’un détenu irakien enveloppé dans un sac noir et recouvert de glace, s’appelle Sabrina Harman.

Elle figure également sur une autre photo où elle apparaît, derrière un entassement d’hommes nus, en train de regarder la scène avec un plaisir sadique. A son tour, elle est sur le point de voler la vedette - et de quelle manière - à sa camarade Linndye England. La seconde photo, rendue publique, montre le caporal Charles Graner posant devant le même cadavre. Ce dernier, on le sait, figure sur la plupart des photos déjà publiées. Plus compromettantes pour ce militaire, les accusations de son ex-femme dans le Pittsburg Post-Gazette où elle affirme ­p ; cela s’est passé en 2001 - avoir été frappée au sol par son ex-mari, traînée par terre tirée par les cheveux, le tout sous le regard de ses enfants ; elle a demandé à la justice de la protéger de Charles Graner parce qu’il l’avait menacée de la tuer Ces deux photos mettant en scène les deux militaires américains ont été diffusées en boucle jeudi par la plupart des chaînes de télé américaines. Sabrina Harman, âgée de 26 ans, travaillait dans une pizzeria avant de s’engager au lendemain du 11 septembre 2001 dans l’armée américaine. Elle rêvait de faire carrière dans la police criminelle comme son père. Le prisonnier irakien, décédé, enveloppé dans un sac noir recouvert de petits sachets remplis de glaces, s’appelle Manadel Al Jamadi. Selon la chaîne de télé américaine, ABC, ainsi que le Los Angeles Times, citant tous deux le soldat Jason Kenner, ce prisonnier est arrivé « en bonne santé » à Abou Ghraïb. Il a indiqué qu’il avait vu « d’importantes contusions » sur le corps du détenu quand il a été ramené des douches. « J’ai vu qu’il était mort là-bas (). Les interrogatoires se déroulaient dans les douches (). Il était attaché au mur par des menottes. » Avant d’indiquer que le corps a été placé dans de la glace pendant que des agents de la CIA et des militaires ayant participé à l’interrogatoire se disputaient pour savoir qui se débarrasserait du corps.

Pour en revenir à Sabrina Harman, il faut savoir qu’elle n’a pas seulement posé pour des photos souvenirs devant des prisonniers nus, entassés, simulant des fellations ou se masturbant. C’est elle qui a fixé des fils électriques aux mains de ce détenu juché sur un carton, la tête couverte d’une cagoule, et lui a dit qu’il serait électrocuté s’il en tombait. En attendant sa comparution devant la cour martiale, Sabrina Harman a été affectée à l’aéroport de Baghdad après qu’on lui ait retiré son arme. Pour sa défense, elle a affirmé au Washington Post, du 9 mai dernier, que son travail consistait à rendre « la vie infernale » aux prisonniers « pour qu’ils parlent ». Elle a révélé que les ordres venaient « des officiers du renseignement militaire, des agents de la CIA et des sous-traitants civils qui menaient les interrogatoires ». Le sergent-chef Ivan Frederick est sur la même longueur d’onde qu’elle. Il a envoyé par e-mail des photos de détenus irakiens à sa famille en demandant pourquoi les personnes responsables de la mort de Manadel Al Jamadi n’étaient ni inquiétées ni poursuivies comme lui. Il n’empêche, il est accusé par le soldat Jeremy Sivits d’avoir pris le prisonnier, qu’il avait lui-même accompagné, de lui avoir boxé le torse. Quand le prisonnier est tombé, le sergent Frederick m’a dit : « Je pense que j’aurai pu lui filer un arrêt cardiaque », avant qu’un médecin n’intervienne pour le ranimer.

Sur les sept inculpés, dont Jeremy Sivits qui a été condamné à un an de prison, aucune information n’a encore filtrée sur la soldate Megan Ambuhl, âgée de 29 ans. Pour l’heure, elle ne figure sur aucune des photos rendues publiques. En ce moment, les autorités militaires américaines tentent de circonscrire les faits aux seuls sept militaires incriminés. Mais voilà que le soldat Samuel Provance a décidé de parler parce qu’il pense que les renseignements militaires tentent d’étouffer l’affaire. Hier encore, le Washington Post a publié une série de photos aussi choquantes que les précédentes et de nouveaux témoignages de sévices.

Ce qui est sûre, c’est que le scandale d’Abou Ghraïb n’a pas encore livré tous ses secrets et qu’il finira par éclabousser toute la chaîne de commandement américain et, par contre coup, cette Administration Bush qui tente de se défausser sur des boucs émissaires.

Par Hassane Zerrouky, Le Matin