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L’Algérie réactive ses réseaux irakiens

dimanche 24 juillet 2005, par Bilal

L’Algérie multiplie les efforts en Irak afin d’aboutir à la libération des deux diplomates algériens, Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi, dont l’enlèvement a été revendiqué par la branche irakienne d’Al-Qaïda.

L’Algérie résolue à tout faire pour libérer ses deux diplomates enlevés à Bagdad, Irak.

« Les ennemis de Dieu et les pays tyrans doivent savoir que le chef de la mission algérienne a été enlevé au coeur de la zone la plus sûre », clame un communiqué de l’organisation terroriste de Zarkaoui, qui revendique ainsi deux jours après l’enlèvement à Al-Mansour. En guise d’avertissement, Al-Qaïda interpelle les pays arabes dont l’Algérie : « Ne savez-vous donc pas qu’Al-Qaïda est un brasier pour tous les ennemis de Dieu ? ».

Ce communiqué, qui confirme les premières analyses du rapt sur l’identité des ravisseurs, est en train d’être analysé par les services algériens pour en définir l’authenticité et les messages que peut contenir ce type de texte. Al-Qaïda indiquera que les autorités d’Alger avaient « ignoré » les avertissements de l’organisation Zarkaoui de quitter l’Irak.

Au MAE, on préfère rester prudent et ne pas en dire trop sur la complexité de cette affaire. « C’est délicat pour le moment. On est inquiets mais on suit les événements de très près », indique une source diplomatique algérienne. Pourtant, Alger n’a pas perdu son temps pour envoyer, dans la soirée de jeudi, une délégation d’experts et de diplomates connaissant l’Irak afin d’installer une cellule de crise à Amman, en Jordanie, avec le diplomate algérien demeuré en poste à Baghdad.

Le gouvernement algérien a également mobilisé tous les ambassadeurs et chefs de poste dans les capitales limitrophes, dont ceux de l’Arabie Saoudite, la Syrie, l’Iran, la Jordanie, l’Egypte et la Turquie, afin de commencer à établir des pistes susceptibles de mener les Algériens à des intermédiaires proches des réseaux de Zarkaoui. Du fait de la faible représentation diplomatique algérienne en Irak depuis trois ans, les Algériens tentent de réactiver les anciens réseaux irakiens de l’Algérie pour tenter de libérer les deux diplomates, Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi.

Une course contre la montre est engagée. L’optimisme mesuré d’Alger se fonde sur la réalité des réseaux d’Al-Qaïda en Irak. Qu’ils soient japonais, italiens, malais, britanniques ou indonésiens, les groupes affiliés à Al-Zarkaoui de l’organisation Al-Tawhid n’ont jamais libéré un otage. Une équation que même les spécialistes ne veulent pas envisager. « Aucune prise d’otage de Zarkaoui n’a fait de survivant. Ceci est un fait. Ils ne sont pas motivés par l’argent, donc aucune possibilité de négocier une rançon. Le seul espoir est la position algérienne sur l’Irak », analyse un spécialiste sécuritaire.

Partant de cette corrélation, le rôle de Ali Belaroussi, diplomate chevronné et fin connaisseur des factions sunnites et chiites, peut être déterminant pour négocier avec les ravisseurs un sursis, surtout que les deux diplomates passeront l’inévitable interrogatoire des hommes de Zarkaoui pour leur demander les motivations de la présence algérienne en Irak ainsi que la leur. Avec le diplomate égyptien Ilhab, les ravisseurs se sont montrés expéditifs, mais, élément troublant, son exécution ne s’est pas accompagnée de la traditionnelle vidéo qui confirme définitivement sa mort.

Autre élément en faveur des Algériens, le fait que les réseaux amis tissés tout au long de la période Saddam Hussein peuvent favoriser une amorce ou un début de négociations. Pratiquement aucun pays n’a réussi à faire libérer ses otages des mains de Zarkaoui, mais l’expérience algérienne dans la région, aussi bien avec le Hezbollah libanais, dans des affaires de kidnapping à Beyrouth, que les contacts amicaux avec les Iraniens depuis l’implication algérienne dans le règlement de la crise des otages américains en Iran, donne des atouts à notre diplomatie et à nos services de renseignements pour tenter d’extirper les deux diplomates.

Reste que la diplomatie algérienne peut être visée au même titre que les autres Etats arabes qui n’ont pas fermé leur ambassade à Baghdad. La présence d’éléments salafistes algériens dans les réseaux de Zarkaoui est un élément aggravant, même si l’arrestation de l’homme d’Abou Mossab Al-Zarkaoui, l’Egyptien Yasser Al-Misri, le recruteur chargé d’envoyer des kamikazes algériens en Irak, peut s’avérer un moyen de négociation. Le GSPC algérien avait prévu d’enlever des otages français, de préférence des diplomates, afin de les échanger contre Abderrezak Al-Para. Mais rien ne dit qu’Alger soit intéressé par un deal. L’organisation Hûmat Al-Daâwa Salafia (HDI), de l’émir Salim Al-Afghani, implanté dans la région de Chlef, est également en contact avec des correspondants yéménites et irakiens. Il s’avère qu’Alger ne va négliger aucune piste pour libérer ses deux diplomates, mais dans la discrétion que requiert ce genre d’affaire.

Par le Quotidien d’Oran