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L’âge du père influe sur les fausses couches

vendredi 22 avril 2005, par Hassiba

A l’heure où les couples ont leurs enfants de plus en plus tard, une nouvelle étude s’interroge sur les conséquences d’un tel décalage à l’âge de la parentalité.

Depuis des années, on sait que l’éventualité d’une fausse couche avant la 20e semaine de grossesse augmente avec l’âge de la future mère : les femmes de 40 ans ont trois fois plus de risque de perdre leur foetus du fait d’un avortement spontané que celles de 25 ans. Mais l’âge du père n’est pas en reste. Ce facteur aurait lui aussi une influence sur le risque d’avortement spontané de la future mère, suggère une nouvelle étude franco-américaine. Réalisée notamment par des chercheurs d’une unité mixte Inserm-Ined spécialisée en « épidémiologie, démographie et sciences sociales », elle va être publiée dans la prochaine édition du Journal américain d’épidémiologie (datée du 1er mai).

Car, n’en déplaise au sexe fort, les spermatozoïdes semblent eux aussi subir l’outrage des ans du fait de ratés dans la réplication du matériel génétique des cellules précurseurs des spermatozoïdes. Au fil des ans, des erreurs s’accumulent. Tant et si bien qu’ils perdent de leur mobilité et contiennent davantage d’anomalies chromosomiques ou génétiques. Mais comme dame Nature fait bien les choses, de telles « erreurs » sont à l’origine de la moitié des fausses couches spontanées. Les chercheurs se sont donc posé la question du lien entre l’âge du futur père et le risque d’avortement spontané de sa partenaire.

Pour mener à bien cette étude, l’équipe de Rémy Slama et de Jean Bouyer a très attentivement réanalysé une cohorte de 5 000 femmes californiennes, suivies jusqu’au bout de leur grossesse durant les années 1990, afin de déterminer d’éventuels facteurs de risques d’avortements spontanés entre la 6e et la 20e semaine de grossesse. En effet, durant cette période clé, 15% des grossesses se terminent par une fausse couche. Grâce à un modèle statistique très élaboré, Rémy Slama a réussi à isoler l’âge du père d’autres facteurs comme celui de la mère, la consommation maternelle ou paternelle de tabac et de caféine, etc.

Au final, après deux ans de travail, les résultats de l’étude montrent que le risque de fausse couche augmente d’environ 30% lorsque le futur père a plus de 35 ans, par rapport à des couples où l’homme a moins de 35 ans. Mais cet âge de 35 ans ne constitue pas un seuil. En fait, on observe une augmentation régulière du risque, contrairement à ce qui se passe chez la femme (1). Ce facteur de risque double quand l’âge du futur père passe de 20 à 50 ans. En parfaite cohérence avec ce que l’on sait sur l’augmentation liée à l’âge des anomalies génétiques ou chromosomiques des cellules masculines de la reproduction. Et, de surcroît, l’effet de l’âge de l’homme semble le même, quel que soit celui de sa partenaire.

« En parallèle, l’effet de l’âge de la femme est atténué d’environ 20% à partir du moment où l’on prend en compte celui de son partenaire », précisent les chercheurs. Par exemple, si une femme de quarante ans a trois fois plus de risque de faire une fausse couche spontanée, l’âge de son partenaire intervient à hauteur de 20% dans cette éventualité. Contrairement à ce que la plupart des hommes pensent, rejetant volontiers sur leur épouse les raisons d’un avortement spontané.

Au final, si la survenue d’une fausse couche ne va repousser que de quelques mois le projet d’enfant d’un couple jeune, ce décalage sera plus préoccupant chez un couple de 35 à 40 ans, à un âge où la fertilité féminine décroît beaucoup plus vite.

Cette étude ouvre aussi des perspectives au niveau de la recherche, pour progresser dans la compréhension des influences masculines sur la reproduction. L’équipe de Rémy Slama va notamment orienter ses travaux sur l’influence des polluants atmosphériques sur les fonctions de reproduction.

Par Catherine Petitnicolas,lefigaro.fr

(1) 12% de fausse couche spontanée entre 20 et 30 ans pour la femme, 15% à 35 ans, 30% à 40 ans et plus de 50% à 45 ans.