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Les imams en politique

samedi 3 avril 2004, par Hassiba

Le doute n’est plus permis à entendre des responsables du MSP éructer une semi- fatwa à l’encontre d’une corporation qui a les mêmes qualités et les mêmes défauts que les gouvernants, les partis et les citoyens.

Un Algérien a beaucoup plus de ressemblances avec un autre Algérien plutôt qu’avec un Moldave ou un Suédois. Sur LCI, M. Bouteflika a martelé que le peuple de ce pays est musulman. Et il a parfaitement raison. A côté, ses amis politiques entendent établir des distinctions, en convoquant le religieux dans une campagne électorale, strictement politique. Bien aminci, sans relief singulier, le MSP s’érige en clergé auto-proclamé dans un pays d’essence sunnite, longuement perturbé durant une décennie rouge par des « cheikhs » et des imams dont aucun ne peut se prévaloir d’un diplôme d’une quelconque université islamique. Et c’est le cas pour les dirigeants du MSP qui ne sont que des profanes infiltrés dans le champ politique en manipulant sans vergogne l’islam de toute une nation qui n’en peut mais.

C’est qu’un FLN vous manque et tout semble dépeuplé ! Les appels au meurtre, parfaitement irresponsables dans une situation lourde de tous les dérapages dont les Algériens sont capables, n’ont à aucun moment été atténués sinon dénoncés par tous les garants de l’ordre public et du respect de la Constitution. Celle-ci dans son article 36 stipule clairement que « la liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables ». Mon opinion est aux antipodes de celle du MSP qui, avant même la modification de la Constitution promise par M. Bouteflika, sépare déjà le bon grain de l’ivraie journalistique. Suis-je apostat si je diverge avec M. Soltani ? Et quel est le clergé local légitimé pour m’exclure de la religion que je tète depuis ma naissance ?

Les journaux ciblés par des récitants du Saint Coran se trouvent être ceux qui ont les plus gros tirages et les plus grosses ventes. C’est de la simple arithmétique à la portée d’un comptable stagiaire, même dans un pays sous-développé. Et quid de ces millions de lecteurs-électeurs que totalisent chaque mois ces publications ? Sûrement des apostats, selon les élucubrations du MSP passé subrepticement du caritatif au politique dont la vocation fondamentale est de rassembler. Les journaux en question sont strictement à l’image d’une société où les citoyens stationnent où ils veulent, construisent comme ils l’entendent et affichent un divorce qui dure d’avec l’Etat et ses démembrements qui, eux aussi, font de la politique au mépris souverain de leur dignité de services publics.

Mais enfin, suis-je apostat ? La grandiloquence assurément grotesque d’une secte nourrie à la rente d’une pseudo-bourgeoisie de bazar n’ébranlera en rien les convictions religieuses, qui relèvent de l’espace privé, de millions d’Algériens qui voteront contre le MSP et certains imams payés par les contribuables. Ces derniers, par leurs appels à la haine et à la violence, ne grandissent pas M. Bouteflika qui se trouve lesté d’un compagnonnage dont il n’a pas réussi à calmer les ardeurs.

A. B. Le Matin