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Présidentielle : Corps éléctoral

Un chiffre et des soupçons

mercredi 10 mars 2004, par Hassiba

Combien sont-ils exactement ? Souvent sujet à la polémique, le nombre des électeurs constitue
indubitablement la grande équation du scrutin.

Comme de coutume, à chaque rendez-vous électoral, les autorités, un peu à la manière d’un magicien qui sort un lapin de son panier, annoncent un chiffre qui confine à la perplexité.

C’est ainsi que pour le scrutin du 8 avril prochain, le
ministre de l’intérieur et des collectivités locales avance le chiffre, à bien des aspects effarants, de 17,5 millions d’électeurs. Mieux encore, pour le responsable du département de l’intérieur, qui cite les chiffres de l’office national des statistiques (ONS), près de 3 millions de personnes ont plus de 18 ans et ne figurent pas encore sur les listes électorales.

Théoriquement donc, ils devaient être un peu plus de 20 millions d’électeurs, soit près de 60% de la population. Le chiffre est-il conforme à la réalité ? “Non”, répondent, d’un accord unanime, la classe politique et les candidats engagés dans la course à la présidentielle. Leurs arguments : le ratio qui doit exister entre la population et les électeurs. Il est, en effet, universellement admis que le ratio devrait se situer entre 30 et 40%.
En d’autres termes, le nombre d’électeurs devant être admis à voter, lors du prochain scrutin ne devrait pas dépasser théoriquement les 14 millions. “Personne ne détient le vrai chiffre, mais le corps électoral est dopé au niveau national”, explique Lakhdar Benkhelaf, responsable de l’organique au sein de la formation du MRN et dont le parti a été l’initiateur du projet d’amendement de la loi électorale. Selon lui, “le ratio qui doit exister doit se situer entre 30 et 35%”.

Et s’il conteste plus que jamais le chiffre avancé par Yazid Zerhouni, c’est parce qu’il soupçonne des velléités de fraude. “Le corps électoral est utilisé par Zerhouni pour une fraude massive”, affirme-t-il. Il rappelle, dans ce contexte, que l’amendement proposé par son parti, préconisant la remise des listes électorales dans des CD aux partis, a été rejeté dans un premier temps avant que Zerhouni ne change d’avis, dit-il. Désormais, les partis disposent des fameux CD, mais avec les listes électorales “préparées” par Zerhouni, explique-t-il encore. Comme pour corroborer ses propos, il avance que dans la commune de Constantine, à titre d’exemple, 309 000 électeurs ont été inscrits alors que sur le CD qui leur a été remis, ils sont quelque 450 000. Un exemple suffisamment éloquent, à ses yeux, qui dénote la volonté du département de l’Intérieur de recourir à la fraude.

Autre indice invoqué par le responsable du MRN : la désignation des encadreurs dont l’écrasante majorité, dit-il, est issue des partis de la coalition gouvernementale ou des organisations de la société civile qui ont déjà exprimé publiquement leur soutien au candidat Abdelaziz Bouteflika.
Notre interlocuteur rappelle, par ailleurs, que le volume du corps constitué dont les éléments voteront désormais hors des casernes, évalué à 2 millions d’électeurs, a été estimé par Zerhouni à seulement 500 000.

C’est dire, en définitive, que le corps électoral, depuis longtemps enjeu, constitue, au regard du MRN, un instrument de fraude pour les autorités. Et à ce jour, il n’en finit toujours pas d’alimenter la polémique

Karim Kébir, Liberté