Tibehirine: 5.000 kalachnikovs dans le placard des Français?
par Kamel Daoud
par Kamel Daoud

En Algérie, la réaction de «solidarité» avec la cible a été immédiate : des articles «garde communaux», de véritables dossiers d'autodéfense et une levée de boucliers rare depuis la clôture de la décennie 90, pour défendre l'honneur des acteurs survivants de cette période. L'agitation néo-pieds-noirs du général Buchwalter était malvenue, à la veille du 5 juillet, fête de l'Indépendance, et au milieu d'une tension nationale vive entre le bouteflikisme et son contraire local.
Dans toute cette cuisine, ce qu'il fallait retenir, expliquent les taoïstes, ce n'était pas la mise au point de Layada, ex-émir anobli par le repentir, à la place de l'Etat, comme le fut la mise au point de Mami à la place de Belkhadem lorsque Bouteflika était malade. Non, ce qu'il fallait retenir, c'était la position franco-française entre Sarkozy et le Sarkozy du lendemain. Ferme, très bonapartiste, il déclarera un jour qu'il lèvera le secret-défense quoi qu'il en coûtera, car la vérité n'a pas de prix à ses yeux. Diplomate et en homme averti, il expliquera le lendemain qu'il s'en tiendra au communiqué numéro 44 du GIA. Et si les apparences sont malmenées pour un Etat français qui se révèle tout aussi indigène que ses propres ex-colonies, le fond est sauf.
Lequel ? Celui que les initiés expliquent être le squelette dans le placard. Lequel ? Celui des 5.000 kalachnikovs promis à Zitouni, émir du GIA de l'époque, comme rançon de paiement, par dessus l'Etat d'Alger, enjambé sans souci par les Français de cette époque. « Lever le secret-défense, cela veut dire lever le secret-défense sur tout et donc sur ce sale contrat d'armement pour une guérilla islamiste dans un pays voisin souverain». Cela ne fait pas très propre, même une décennie après. «Sarkozy a compris qu'il fallait corriger les effets d'une mauvaise réplique qui lui a été soufflée».
Tout ceci n'est donc qu'une affaire de souffle et de fils de laine ? Oui ! Selon les versions les plus averties, c'est tout aussi une affaire franco-française qu'une affaire algéro-algérienne. C'est pourquoi Sarkozy a tout dit là où les bouteflikistes n'ont rien dit, jugeant inutile de se mouiller la chemise. Seul Zerhouni a fini par résumer en poésie cette mauvaise lessive : «Cela me rappelle le théâtre japonais, le kabuki. Vous voyez les marionnettes qui dansent, et il y a en arrière-salle un souffleur qui lit, parle et dicte les paroles de l'histoire», a-t-il ironisé. Noureddine Yazid Zerhouni a tenu à préciser que «cette scène se déroule à Paris, mais pas en Algérie et que moi je suis un ministre en Algérie».
Du neuf donc ? A peine. Sauf si on veut forcer l'interprétation avec le démantèlement annoncé d'un réseau d'espionnage algérien au profit d'un agent consulaire français à Annaba.
Le Quotidien d'Oran
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