«Fausse route»
par M. Saâdoune
par M. Saâdoune

Personne n'est vraiment surpris à Alger de constater que les responsables français n'apprécient pas du tout le serrage de vis en matière d'importations décidé par le gouvernement algérien. Par contre, beaucoup s'étonnent que l'expression publique de M. Novelli prenne la forme d'une promesse d'une « amicale pression» assortie d'un jugement sur les choix de la politique économique de l'Algérie.
Les raisons de l'inquiétude de M. Novelli sont connues, mais son discours est pour le moins très maladroit. Ce qu'on en retiendra, vu d'Alger, est que la France veut amener la partie européenne à faire de la Loi de finances complémentaire algérienne un point à l'ordre du jour de la réunion de l'UPM.
Le gouvernement algérien a déjà fait savoir, par la voix du ministre du Commerce, El-Hachemi Djaâboub, que les lois algériennes sont une «partie intégrante de la souveraineté nationale et ne peuvent être ni amendées ni annulées». C'est la réponse minimum. Les relations entre Etats s'entretiennent, souvent, par le biais de discussions informelles où l'on essaye de ménager les intérêts mutuels. Le responsable français a réellement fait «fausse route» en annonçant à l'Assemblée nationale de son pays que des mesures algériennes allaient être discutées dans un forum comme l'UPM. C'était bien la meilleure manière de braquer le gouvernement algérien qui ne peut accepter que l'on discute de ses mesures «souveraines» qui ne dérogent pas, selon lui, à ses engagements extérieurs.
A titre d'exemple, la commissaire européenne au Commerce extérieur était fondée à contester, au nom de ces engagements, l'introduction d'un effet rétroactif sur l'obligation faite aux sociétés commerciales étrangères d'avoir 30% de parts réservés aux Algériens. Le gouvernement algérien a sagement fini par annuler cette disposition.
Les autres mesures prises dans le cadre de la LFC 2009, critiquées d'ailleurs en Algérie même, sont bien entendu déplaisantes pour des exportateurs français et européens habitués à trouver un marché totalement ouvert. Néanmoins, ces mesures, aussi «déplaisantes» soient-elles, ne vont pas à l'encontre des engagements internationaux de l'Algérie. Le responsable français a bien manqué de prudence en affirmant publiquement que les «amis algériens font fausse route». A plus forte raison quand les «amis français» savent très bien qu'à Alger on pense qu'ils aiment beaucoup vendre... sans trop s'engager.
En matière de relations économiques et commerciales, il y a sans doute matière à discuter, voire à négocier dans les intérêts bien compris de chacun. Il n'y a pas matière à «pression», même si elle se veut amicale.
Le Quotidien d'Oran .