Abdelaziz Bouteflika bouclera, ce 9 avril 2011, douze années à la tête de la présidence de la République. Un poste dans lequel il a été installé pour la première fois en 1999 et qu’il est appelé à quitter officiellement en 2014.
Ainsi, Bouteflika aura eu droit à sa «décennie» et même plus, mais que laissera-t-il à l’Algérie ? Lorsqu’il est arrivé en 1999 pour se voir placé à la plus haute fonction de l’Etat, Bouteflika pourfendait à en perdre la voix les décennies qui avaient précédé son «ère». Maculant de noir celle de Chadli Bendjedid et de rouge celle des années 1990 sans oser ouvertement critiquer son mentor, Boumediène, auquel il aurait voulu succéder après sa mort, il ne ratait aucune occasion tout de même pour critiquer la politique socio-dirigiste des années 1970. Ainsi, Bouteflika se présentait aux Algériens comme le sauveur qu’ils attendaient, celui qui colorera de blanc et de rose leur vie et leur fera oublier la grisaille qui pointe à leur horizon depuis 1962. Celui qui consacrera la fin du règne des généraux, la fin du tout-Etat et l’arrivée de l’ultralibéralisme avec la bénédiction des pétrodollars. Celui qui redorera enfin le blason de l’Algérie dans le concert des nations et remettra de l’ordre dans la maison en y instaurant la paix.
Une décennie et deux années écoulées, les serments de Bouteflika ne résonnent même plus. Malgré un matelas financier des plus confortables, la décennie Bouteflika a été celle d’un pays fermé, bloqué, sans vision, sans stratégie ni perspective. Le nombre de harraga, ces jeunes qui fuient le pays sur des embarcations aléatoires, a atteint des cimes intolérables. La parenthèse enchantée d’entrouverture politique imposée en 1988 a vu son champ se rétrécir jusqu’à se refermer avec la bénédiction de la décennie Bouteflika. Le champ des libertés a largement été entamé et contracté jusqu’à l’étouffement. Les espaces d’expression n’existent presque plus et la presse est poussée au musellement, menacée par le code pénal. Même les manifestations de rue, que les bombes et les assassinats n’ont pas empêchées, sont de l’ordre du prohibé. Les rues sont habitées, plus d’une décennie durant, par les forces de l’ordre.
Bouteflika s’érige en rédacteur en chef de l’APS et de l’ENTV et point de place à ses contradicteurs. Aux appels à l’aide des citoyens qu’il tient à voir l’accueillir en nombre lors de ses déplacements, il brandit la menace et le mépris. Les partis politiques, les associations et les syndicats autonomes sont poussés à ne plus avoir de voix. L’exercice de la politique est devenu un mal à abattre. Les mouvements de redressement deviennent des moyens de faire exploser des partis de l’intérieur afin de les normaliser. Le Président estime que le nombre de formations politiques existantes est élevé ; on décide alors d’interdire l’agrément de nouveaux partis ou associations. D’année en année, le politique devient un interdit et on pousse l’Algérien, à travers l’érosion du pouvoir d’achat, à ne penser qu’à son couffin. Point d’autorisation pour les rassemblements ni pour les meetings et encore moins le droit à l’image.
Des portraits géants du Président sont accrochés sur les façades des immeubles dans toutes les villes, alors que le peuple en est réduit à vivre en marge de la vie en étouffant sa peine et sa colère. Même la liberté de culte est soumise à surveillance. La révision de la Constitution pour asseoir le troisième mandat a consacré la prétention pour un règne qui ne dit pas son nom. Un mandat jugé de trop par la classe politique et les observateurs. Aujourd’hui, sous le vent doux et le ciel dégagé du printemps, avec un souffle de jasmin venant de l’est et semant un parfum d’espoir, le temps des bilans est venu.
Nadjia Bouaricha (El Watan).
Ainsi, Bouteflika aura eu droit à sa «décennie» et même plus, mais que laissera-t-il à l’Algérie ? Lorsqu’il est arrivé en 1999 pour se voir placé à la plus haute fonction de l’Etat, Bouteflika pourfendait à en perdre la voix les décennies qui avaient précédé son «ère». Maculant de noir celle de Chadli Bendjedid et de rouge celle des années 1990 sans oser ouvertement critiquer son mentor, Boumediène, auquel il aurait voulu succéder après sa mort, il ne ratait aucune occasion tout de même pour critiquer la politique socio-dirigiste des années 1970. Ainsi, Bouteflika se présentait aux Algériens comme le sauveur qu’ils attendaient, celui qui colorera de blanc et de rose leur vie et leur fera oublier la grisaille qui pointe à leur horizon depuis 1962. Celui qui consacrera la fin du règne des généraux, la fin du tout-Etat et l’arrivée de l’ultralibéralisme avec la bénédiction des pétrodollars. Celui qui redorera enfin le blason de l’Algérie dans le concert des nations et remettra de l’ordre dans la maison en y instaurant la paix.
Une décennie et deux années écoulées, les serments de Bouteflika ne résonnent même plus. Malgré un matelas financier des plus confortables, la décennie Bouteflika a été celle d’un pays fermé, bloqué, sans vision, sans stratégie ni perspective. Le nombre de harraga, ces jeunes qui fuient le pays sur des embarcations aléatoires, a atteint des cimes intolérables. La parenthèse enchantée d’entrouverture politique imposée en 1988 a vu son champ se rétrécir jusqu’à se refermer avec la bénédiction de la décennie Bouteflika. Le champ des libertés a largement été entamé et contracté jusqu’à l’étouffement. Les espaces d’expression n’existent presque plus et la presse est poussée au musellement, menacée par le code pénal. Même les manifestations de rue, que les bombes et les assassinats n’ont pas empêchées, sont de l’ordre du prohibé. Les rues sont habitées, plus d’une décennie durant, par les forces de l’ordre.
Bouteflika s’érige en rédacteur en chef de l’APS et de l’ENTV et point de place à ses contradicteurs. Aux appels à l’aide des citoyens qu’il tient à voir l’accueillir en nombre lors de ses déplacements, il brandit la menace et le mépris. Les partis politiques, les associations et les syndicats autonomes sont poussés à ne plus avoir de voix. L’exercice de la politique est devenu un mal à abattre. Les mouvements de redressement deviennent des moyens de faire exploser des partis de l’intérieur afin de les normaliser. Le Président estime que le nombre de formations politiques existantes est élevé ; on décide alors d’interdire l’agrément de nouveaux partis ou associations. D’année en année, le politique devient un interdit et on pousse l’Algérien, à travers l’érosion du pouvoir d’achat, à ne penser qu’à son couffin. Point d’autorisation pour les rassemblements ni pour les meetings et encore moins le droit à l’image.
Des portraits géants du Président sont accrochés sur les façades des immeubles dans toutes les villes, alors que le peuple en est réduit à vivre en marge de la vie en étouffant sa peine et sa colère. Même la liberté de culte est soumise à surveillance. La révision de la Constitution pour asseoir le troisième mandat a consacré la prétention pour un règne qui ne dit pas son nom. Un mandat jugé de trop par la classe politique et les observateurs. Aujourd’hui, sous le vent doux et le ciel dégagé du printemps, avec un souffle de jasmin venant de l’est et semant un parfum d’espoir, le temps des bilans est venu.
Nadjia Bouaricha (El Watan).
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