Dalila Touat jugée à Mostaganem
par Kamel Daoud

Il s'agit de donner du travail à Dalila et pas au procureur qui l'inculpe, au juge qui va la juger demain ni aux policiers qui l'ont arrêtée.
Dans le cas de cette femme, il y a une sorte de limite intime qui a été dépassée, un symbole qui vient de se réveiller, l'atteinte sourde à un respect profond. On ressent le malaise et la bêtise. On sait que la justice est aveugle, mais l'Algérie a des yeux. Elle voit, regarde, juge, ne se laisse pas tromper par les textes et les robes. L'Algérie juge elle aussi et condamne, et inculpe. Et elle sait qui sont les vrais coupables. Quand des hommes manifestent, on parle d'émeutes. Quand une femme les rejoint, cela devient la Révolution. Quand des harraga prennent la chaloupe, cela s'appelle une aventure. Quand une femme est parmi eux, c'est un peuple qui s'enfuit. Quand on en arrive à mettre les femmes dans les prisons parce qu'elles manifestent, cela veut dire, paradoxalement, que dans le pays, il n'y a plus d'hommes. Peut-être.
Le Quotidien d'Oran