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Yazid Haddar, neuropsychologue, cognitiviste: «Les stades sont les lieux d’expression des non-dits de la socié

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  • Yazid Haddar, neuropsychologue, cognitiviste: «Les stades sont les lieux d’expression des non-dits de la socié

    Yazid Haddar, neuropsychologue, cognitiviste: «Les stades sont les lieux d’expression des non-dits de la société»

    Reporters : Les stades se sont transformés depuis plusieurs années en un lieu de l’expression d’une violence parfois incontrôlée. Quelle explication peut-on donner à ce phénomène ?

    Yazid Haddar : Les stades sont devenus des lieux d’expression des non-dits de la société. Ils sont devenus le seul lieu où les jeunes peuvent exprimer leur désir et leur préoccupation en toute liberté. Les violences exprimées dans ce lieu sont les résultantes d’incivilités, de carences éducatives, de la violence qui gangrène la société algérienne. En face, l’incapacité de contrôler ce phénomène renvoie à l’absence d’une autorité politique et sociale. De plus, d’autres facteurs psychologiques, comme la gestion de la frustration et de l’échec, accentuent cette transformation des stades en chaudron bouillonnant. Comme le football a de tout temps été utilisé comme un instrument de propagande politique, tout échec dans ce sport peut avoir des conséquences politiques.

    Mais le football est-il, dans son essence, un sport violent ?

    Le football est un sport collectif et un spectacle. La confrontation de deux équipes aux intérêts antagonistes, dans un jeu où les duels sont fréquents, peut néanmoins conduire à des comportements agressifs ou déviants. Cela dit, on assiste de plus en plus à des violences dans beaucoup de pays.

    Certaines lectures considèrent que les violences sont plus souvent le produit d’une jeunesse en mal d’identification et souvent déclassée socialement. Jusqu’où peut-on accepter une telle appréciation ?

    La violence se donne toujours pour une contre-violence, c’est-à-dire pour une riposte à la violence de l’autre, écrivait J.-Paul Sartre dans sa Critique de la raison dialectique. Ainsi, la violence des stades est l’une des formes des violences qui existent dans la société algérienne. Il est vrai que nous n’avons pas réfléchi à la question d’une façon plus cohérente. Car la solution n’est pas forcément politique ou policière, c’est une vision d’ensemble, de l’éducatif, du social et du politique. C’est pour cette raison que j’ai proposé, dans l’un de mes articles d’analyse, la création d’un observatoire sur la violence qui regroupera des sociologues, des criminologues, des psychologues, des historiens, des politiques et des juges pour étudier ce phénomène et lui trouver des solutions adéquates. Il est vrai également que nous assistons à un phénomène d’habituation, dans le sens de conditionnement en psychologie cognitive, à la violence. Ainsi, l’Algérien ne réagit plus à la violence de son quotidien, il l’a apprivoisée et l’a intégrée dans son fonctionnement et enfin il adapte des solutions pour y faire face. De plus, la culture de l’assistanat, instaurée par les pouvoirs politiques successifs, a rendu le citoyen algérien dépendant de l’Etat, car il attend toujours des solutions qui viennent du pouvoir politique. L’Algérien est passif face à son environnement.

    Des observateurs considèrent que certains débordements peuvent être évités par des dispositifs de surveillance et de sécurité plus importants. Jusqu’où ces dispositifs peuvent-ils prévenir ou empêcher les déchaînements de violence ?

    Oui, il peut exister des dispositifs qui puissent assurer une sécurité dans les stades afin d’éviter les débordements. Ces dispositifs sont en lien avec la gestion des stades. Les modalités d’entrée, d’accès, de la sécurisation des joueurs, etc., devraient être réfléchies en amont, voire lors de la conception même des stades, c’est-à-dire au niveau architectural !

    Que pensez-vous de ce qui s’est passé au stade du 1er-Novembre, à Tizi Ouzou, où un joueur de la JSK a été tué par un projectile lancé à partir des gradins ?

    C’est malheureux d’assister à ce genre de violence. Cet incident explique la démission et la passivité des responsables des stades et en particulier ceux qui s’occupent de leur sécurisation. Cela dit, il y a une banalisation de la violence dans notre société ; mourir, c’est normal et souvent ce n’est autre que l’œuvre du destin, « le mektoub ». Combien de personnes meurent sur les autoroutes ? Combien de personnes ont été volées avec violence ? Combien de personnes kidnappées ?, etc. La responsabilité est aussi au niveau du citoyen ! La société, comme les politiques, est démissionnaire et semble ne plus vouloir prendre son destin en main !



    Auteur: Samir Tazaïrt
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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