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Les élections n'enthousiasment pas les pauvres d'Alger

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  • Les élections n'enthousiasment pas les pauvres d'Alger

    ALGER (Reuters) - Pauvreté et mécontentement ne manquent pas dans les maisons aux toits d'aluminium du "bidonville des kamikazes", à Alger. Pourtant, les élections législatives organisées cette semaine n'y enthousiasment pas grand-monde.

    Beaucoup de ces démunis pensent en effet que le scrutin ne sera vraisemblablement pas transparent et que le parlement, dans ce pays exportateur de pétrole, ne sert à rien.

    "Nous pensions que les candidats, ou du moins certains d'entre eux, viendraient dans le bidonville et parleraient aux gens", explique l'un de ses habitants, Saïdani Hamoud, 23 ans. "Personne n'est venu, alors pourquoi irais-je voter ?"

    Ce ghetto doit son récent sobriquet au fait qu'il a produit l'un des trois kamikazes qui se sont fait sauter le 11 avril à Alger, tuant 33 personnes.

    Marouane Boudine a grandi dans cet ensemble composé de 200 habitats de fortune faits de brique, de fer rouillé et de plastique - autrefois appelé Le Jardin - où l'on n'a pas l'impression que les élections du 17 mai vont apporter des solutions à des graves problèmes de chômage et de logement.

    Or régler ces problèmes, améliorer l'accès à l'éducation et aux services de santé et réduire la dépendance du pays aux revenus du pétrole seront nécessaires pour stabiliser une société qui ne s'est pas encore remise des violences des années 1990 et qui a été choquée par le récent retour des attentats à la bombe par des groupes islamistes.

    DEUX MONDES

    Le conflit algérien, qui a opposé l'armée à des groupes armés islamistes, a coûté la vie à environ 200.000 personnes et causé des dégâts estimés à 20 milliards de dollars.

    L'assemblée, qui compte 389 sièges, est perçue par beaucoup comme une chambre dominée par un pouvoir exécutif puissant et composée d'hommes politiques disposés à entériner ses décisions.

    Les habitants du "bidonville des kamikazes" ont tendance à se sentir oubliés, même si les attentats du 11 avril, revendiqués par Al Qaïda au Maghreb, lui ont valu une éphémère notoriété. "Le fossé entre les gens vivant dans le bidonville et les hommes politiques est très important", estime Abdelhamid Bouhala, 39 ans, qui y habite.

    "En fait, nous vivons dans deux mondes différents, et nous pensons que voter ne va pas améliorer nos conditions de vie au quotidien."

    Les attentats à la bombe ont rappelé que les problèmes sociaux ayant contribué à la montée en puissance des partis islamistes dans les années 1980 et au début des années 1990 étaient toujours là, malgré la manne gazière et pétrolière.

    Les détracteurs du pouvoir imputent cet état de fait à une gestion étatique de l'économie et à sa dépendance vis-à-vis d'une planification à la soviétique.

    "Je ne serai pas un terroriste, mais mon fils pourrait en devenir un", explique Abdelhamid, qui est agent de sécurité. "Je veux qu'il soit bien élevé, qu'il ait de bonnes manières, qu'il reçoive une bonne éducation. Je ne suis pas sûr qu'on puisse atteindre ces objectifs en étant coincé dans un bidonville."

    UNE ÉCONOMIE DÉSÉQUILIBRÉE

    Ce dernier, situé au sommet d'une butte appelée Oued Ouchayah, dans le quartier de Kouba, sans eau et sans égouts, est situé près des villas chic du quartier que l'on surnomme "Dallas" en référence à la série américaine des années 1970 sur les magnats du pétrole texans.

    Selon des chiffres officiels, le chômage était de 75%, en 2005, chez les jeunes de moins de 30 ans, contre 73% en 2004.

    Le président Abdelaziz Bouteflika a lancé un plan de relance économique d'un montant de 140 milliards de dollars visant à créer deux millions d'emplois et à construire un million de maisons. Mais jusqu'ici il n'a pas vraiment réussi à redynamiser le secteur privé non énergétique, qui crée très peu d'emplois.

    "Le pétrole ne s'associe pas bien aux réformes économiques. L'Algérie n'a toujours pas une économie productive. Elle ne produit rien d'autre que du pétrole et importe tout ce dont elle a besoin, du blé au lait en passant par les médicaments", estime l'économiste Abdelhak Lamiri.

    "La pression sociale va continuer à s'accroître, et le gouvernement n'a pas d'autre choix que de satisfaire les besoins de la population. Sinon, un jour ou l'autre nous aurons une explosion sociale."

    Selon les autorités algériennes, la pauvreté n'explique pas le terrorisme. "Vous ne pouvez pas justifier le terrorisme par la pauvreté. Comment pouvez-vous expliquer, alors, que des Saoudiens fortunés soient impliqués dans le terrorisme ?", a demandé un jour à la presse l'ex-Premier ministre Ahmed Ouyahia.

    Abdelhamid juge qu'il faudrait démolir le bidonville. "Les Marocains l'ont fait", dit-il, faisant référence à la destruction de quartiers insalubres menée à Casablanca, la capitale économique du Maroc, après qu'une dizaine de kamikazes provenant de ces quartiers eurent tué une trentaine d'autres personnes en 2003. "Notre gouvernement devrait faire la même chose. C'est à lui de redonner espoir à la population."

    "Quand le dernier arbre aura été abattu - Quand la dernière rivière aura été empoisonnée - Quand le dernier poisson aura été péché - Alors on saura que l'argent ne se mange pas." Geronimo
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