Quelle que soit l’explication, la crise du système éducatif en Algérie et dans le monde est une réalité. L’Unesco reconnaît aujourd’hui que la crise de l’éducation touche aussi bien les pays développés que les pays en voie de développement. Ce texte présenté dans le cadre d’une conférence destinée aux étudiants d’Alger, tente d’apporter quelques éclaircissements au sujet de cette crise et expliquer la face cachée de la réforme du système éducatif. J’aborderai premièrement la crise du système d’enseignement dans notre pays en présentant le flux scolaire qu’a connu notre pays et l’inversion de ce flux avec l’apparition du phénomène de déscolarisation que j’essaierai d’expliquer. deuxièmement, j’essayerai de cerner les causes réelles de la crise du système éducatif, le phénomène de déscolarisation et les politiques d’orientation scolaire de Benbouzid et de Harraoubia. Je terminerai mon exposé en tentant de dire ce qu’il faut pour un changement démocratique et qualitatif de l’école.
I- Une démocratisation certaine mais inachevée
Notre système éducatif fortement imprégné du contexte, dans lequel le système éducatif algérien est né (marginalisation scolaire de notre peuple pendant la colonisation où seulement 1/10e de la population était scolarisée avec 85% d’analphabètes), a connu une évolution qui est intimement liée aux différents projets de développement du milieu des années 1970. La double pression de la demande d’éducation et d’industrialisation rapide du pays a alimenté un fort besoin en main-d’œuvre qualifiée et en cadres. Cette évolution a permis l’explosion des effectifs scolaires, la construction d’un parc d’infrastructure scolaire exceptionnel et le développement spectaculaire de l’enseignement supérieur. Ce contexte exceptionnel de « la poussée nationaliste » a alimenté une demande croissante en formation et en instruction. La généralisation de la scolarisation, l’allongement de la scolarité jusqu’à 16 ans, l’explosion des effectifs dans le primaire, le secondaire, la formation professionnelle et l’enseignement supérieur ont bouleversé les rapports sociaux et ont participé à élever le niveau de formation de la population. En moins de 40 ans, dans la société, s’est cristallisé un fort consensus pour ne laisser aucun enfant sans éducation. Les effectifs scolarisés ont atteint 7,9 millions d’élèves dans les cycles primaire, moyen et secondaire. La progression des effectifs est spectaculaire. Mais cette capacité et ces potentialités, 45 ans plus tard, vont être contrariées, dès la fin des années 1980, par la crise de la dette extérieure qui va mettre l’Algérie sous la coupe de la Banque mondiale et du FMI, mais aussi à la crise de la société qui aura ses répercussions sur l’école.
II- Les causes sociales de la crise
Pour une bonne part, la crise dont nous parlons n’est pas une crise du système éducatif comme le pensent certains experts modernistes, mais une crise sociale se répercutant dans l’école : le chômage massif dans la société influe sur l’image qu’on porte sur l’école. Le développement mercantile à la place de l’innovation technologique discrédite le savoir pur et l’ascension sociale grâce aux études. Ce n’est pas la baisse du niveau qui explique aujourd’hui la crise du système éducatif, mais la déscolarisation massive à laquelle nous assistons. C’est un gaspillage de potentialités et de capacités énormes qui affaiblissent notre pays.
III- Le phénomène de la déscolarisation
Les chiffres de la déperdition sont illustratifs de la baisse des effectifs scolarisés. 500 000 élèves sont laissés derrière nous. Cette tendance se confirme, dans tous les paliers, y compris à l’université où le taux d’abandon est important. Résultat : il y a une inversion du flux de scolarisation dans notre pays. Nous assistons à un phénomène de déscolarisation grave. Pour illustration de l’effectif originel d’une génération d’élèves, 79% n’obtiendront jamais le bac et des 21% finiront par l’obtenir, seulement 3,1% n’auront jamais redoublé, les autres ont redoublé au moins une fois. 160 000 élèves quittent le secondaire dont 102 000 en 3e année secondaire. Au collège, en 1998, 192 000 élèves du fondamental ont quitté l’école avant d’atteindre la 9e année et 148 000 en fin de cycle. Le BEF affiche des taux de réussite moyens : 40,5% en 1997 ; 41,5% en 1998 ; 41,74% en 2000 ; 43% en 2005. La mise en place de la nouvelle réforme ne va pas changer les causes structurelles de cette déperdition structurelle : l’investissement en moyen pédagogique, la réduction des effectifs des élèves par classe, la faiblesse du travail de remédiation et l’absence de recherche court-circuite la refonte. Le désengagement financier de l’Etat et la réduction de l’offre pédagogique mine la réforme de l’éducation. Les projections des experts pour 2024, malgré la baisse population scolaire surtout dans le primaire, prévoient les mêmes difficultés pour faire accéder la masse des jeunes à un niveau d’exigence élevé. Les taux d’accès des élèves au secondaire ne dépassera pas les 40% d’une génération d’élèves. Les taux de redoublement dans le collège resteront stationnaires entre 40% et 45% et l’accès des élèves du moyen au secondaire dont l’hypothèse la plus optimiste ne dépassera pas le taux de 60%. On est loin des déclarations d’intention du ministre de l’Education nationale. C’est seulement au primaire qu’on aura les meilleur taux de réussite 80%.
IV- La nouvelle politique d’orientation scolaire dans l’éducation nationale
La politique de l’orientation scolaire des experts algériens en laboratoire suit non seulement la mondialisation de l’éducation, mais aussi un certain mimétisme scolaire des élites algériennes en pleine évolution et très inspirées par la Banque mondiale et le FMI et par le projet néo-libéral d’une élite à la recherche d’intégration au bloc social au pouvoir. La majorité des experts sont convaincus qu’il faut abandonner l’école publique et accrocher l’enseignement à l’économie de marché. Ainsi est créée une école à deux vitesses avec un espace public et privé, y compris dans le supérieur. Ce glissement vers la marchandisation de l’école est approché par tâtonnements : dans l’éducation nationale, une façon d’arriver à ce résultat est la sélection précoce. La loi d’orientation scolaire sur l’éducation prévoit dans son projet une « sélection précoce qui commence à la 10e année scolaire. Le tri social commence par l’examen de 6e à la fin du 1er et du 2e cycle primaire (la masse les élèves qui se verront rejetés du 3e cycle, c’est-à-dire du collège seront orientés vers la formation professionnelle. Ceux qui échapperont à ce premier barrage, rencontreront celui du BEM pour l’accès en seconde ; le troisième barrage de sélection est le baccalauréat. L’accès contrôlé à l’université à cause du numerus clausus est le principal facteur de la démotivation des étudiants et du taux d’abandon.
I- Une démocratisation certaine mais inachevée
Notre système éducatif fortement imprégné du contexte, dans lequel le système éducatif algérien est né (marginalisation scolaire de notre peuple pendant la colonisation où seulement 1/10e de la population était scolarisée avec 85% d’analphabètes), a connu une évolution qui est intimement liée aux différents projets de développement du milieu des années 1970. La double pression de la demande d’éducation et d’industrialisation rapide du pays a alimenté un fort besoin en main-d’œuvre qualifiée et en cadres. Cette évolution a permis l’explosion des effectifs scolaires, la construction d’un parc d’infrastructure scolaire exceptionnel et le développement spectaculaire de l’enseignement supérieur. Ce contexte exceptionnel de « la poussée nationaliste » a alimenté une demande croissante en formation et en instruction. La généralisation de la scolarisation, l’allongement de la scolarité jusqu’à 16 ans, l’explosion des effectifs dans le primaire, le secondaire, la formation professionnelle et l’enseignement supérieur ont bouleversé les rapports sociaux et ont participé à élever le niveau de formation de la population. En moins de 40 ans, dans la société, s’est cristallisé un fort consensus pour ne laisser aucun enfant sans éducation. Les effectifs scolarisés ont atteint 7,9 millions d’élèves dans les cycles primaire, moyen et secondaire. La progression des effectifs est spectaculaire. Mais cette capacité et ces potentialités, 45 ans plus tard, vont être contrariées, dès la fin des années 1980, par la crise de la dette extérieure qui va mettre l’Algérie sous la coupe de la Banque mondiale et du FMI, mais aussi à la crise de la société qui aura ses répercussions sur l’école.
II- Les causes sociales de la crise
Pour une bonne part, la crise dont nous parlons n’est pas une crise du système éducatif comme le pensent certains experts modernistes, mais une crise sociale se répercutant dans l’école : le chômage massif dans la société influe sur l’image qu’on porte sur l’école. Le développement mercantile à la place de l’innovation technologique discrédite le savoir pur et l’ascension sociale grâce aux études. Ce n’est pas la baisse du niveau qui explique aujourd’hui la crise du système éducatif, mais la déscolarisation massive à laquelle nous assistons. C’est un gaspillage de potentialités et de capacités énormes qui affaiblissent notre pays.
III- Le phénomène de la déscolarisation
Les chiffres de la déperdition sont illustratifs de la baisse des effectifs scolarisés. 500 000 élèves sont laissés derrière nous. Cette tendance se confirme, dans tous les paliers, y compris à l’université où le taux d’abandon est important. Résultat : il y a une inversion du flux de scolarisation dans notre pays. Nous assistons à un phénomène de déscolarisation grave. Pour illustration de l’effectif originel d’une génération d’élèves, 79% n’obtiendront jamais le bac et des 21% finiront par l’obtenir, seulement 3,1% n’auront jamais redoublé, les autres ont redoublé au moins une fois. 160 000 élèves quittent le secondaire dont 102 000 en 3e année secondaire. Au collège, en 1998, 192 000 élèves du fondamental ont quitté l’école avant d’atteindre la 9e année et 148 000 en fin de cycle. Le BEF affiche des taux de réussite moyens : 40,5% en 1997 ; 41,5% en 1998 ; 41,74% en 2000 ; 43% en 2005. La mise en place de la nouvelle réforme ne va pas changer les causes structurelles de cette déperdition structurelle : l’investissement en moyen pédagogique, la réduction des effectifs des élèves par classe, la faiblesse du travail de remédiation et l’absence de recherche court-circuite la refonte. Le désengagement financier de l’Etat et la réduction de l’offre pédagogique mine la réforme de l’éducation. Les projections des experts pour 2024, malgré la baisse population scolaire surtout dans le primaire, prévoient les mêmes difficultés pour faire accéder la masse des jeunes à un niveau d’exigence élevé. Les taux d’accès des élèves au secondaire ne dépassera pas les 40% d’une génération d’élèves. Les taux de redoublement dans le collège resteront stationnaires entre 40% et 45% et l’accès des élèves du moyen au secondaire dont l’hypothèse la plus optimiste ne dépassera pas le taux de 60%. On est loin des déclarations d’intention du ministre de l’Education nationale. C’est seulement au primaire qu’on aura les meilleur taux de réussite 80%.
IV- La nouvelle politique d’orientation scolaire dans l’éducation nationale
La politique de l’orientation scolaire des experts algériens en laboratoire suit non seulement la mondialisation de l’éducation, mais aussi un certain mimétisme scolaire des élites algériennes en pleine évolution et très inspirées par la Banque mondiale et le FMI et par le projet néo-libéral d’une élite à la recherche d’intégration au bloc social au pouvoir. La majorité des experts sont convaincus qu’il faut abandonner l’école publique et accrocher l’enseignement à l’économie de marché. Ainsi est créée une école à deux vitesses avec un espace public et privé, y compris dans le supérieur. Ce glissement vers la marchandisation de l’école est approché par tâtonnements : dans l’éducation nationale, une façon d’arriver à ce résultat est la sélection précoce. La loi d’orientation scolaire sur l’éducation prévoit dans son projet une « sélection précoce qui commence à la 10e année scolaire. Le tri social commence par l’examen de 6e à la fin du 1er et du 2e cycle primaire (la masse les élèves qui se verront rejetés du 3e cycle, c’est-à-dire du collège seront orientés vers la formation professionnelle. Ceux qui échapperont à ce premier barrage, rencontreront celui du BEM pour l’accès en seconde ; le troisième barrage de sélection est le baccalauréat. L’accès contrôlé à l’université à cause du numerus clausus est le principal facteur de la démotivation des étudiants et du taux d’abandon.
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