"Sarkozy en Algérie en ami" : vu d'Alger, le début de crise provoqué par les propos du ministre des moudjahidins (anciens combattants), Mohamed Chérif Abbès, sur un "lobby juif" auquel serait lié Nicolas Sarkozy, à la veille de l'arrivée du président français, le 3 décembre, a eu l'effet paradoxal de reléguer au second plan la délicate question du passé colonial français.
L'intervention du président Abdelaziz Bouteflika, qui a rappelé à l'ordre son ministre, recentre la visite d'Etat du président Nicolas Sarkozy sur le terrain moins litigieux de l'économie et des affaires. La presse met d'ailleurs en exergue le fait que le président français va en Algérie pour "ramener des contrats". Des contrats de plus de 4 milliards d'euros doivent être effectivement signés. Une moitié se traduira par des investissements français, dont ceux de Total et Gaz de France. Insuffisants, selon les responsables algériens, qui critiquent régulièrement la frilosité des investisseurs français et leur reprochent de ne voir dans l'Algérie qu'un marché pour déverser leurs produits.
A ces critiques, les Français font valoir, chiffres à l'appui, que la France est le plus grand investisseur, hors hydrocarbures, en Algérie. Un débat qui se mène depuis longtemps sans animosité, les liens économiques ayant toujours été à l'abri des tensions diplomatiques. Si la presse se félicite globalement du fait que les deux chefs d'Etat aient choisi de jouer la carte de l'apaisement, l'affaire provoque des appréciations différentes.
Dans la presse francophone, Chérif Abbès est vivement attaqué. Certains demandent son départ, lui reprochant d'avoir contraint le président Bouteflika à appeler son homologue français pour aplanir la situation. "Le bon sens, les us démocratiques, la logique, et même l'honnêteté intellectuelle, dictent à ce "ministre", qui n'est pas d'accord avec son gouvernement et son président, de déposer sa démission avant qu'il ne soit "limogé" sans autre forme de procès", écrit le Courrier d'Algérie.
A l'opposé, le journal arabophone Echourouk le défend résolument : "Ce qu'il a dit a provoqué les réserves de la diplomatie algérienne, mais il devrait être dit par tous les Algériens, car la politique méprisante choisie par Sarkozy à l'égard de la "racaille" en France et à l'extérieur ne laisse nulle place à la construction d'une amitié solide fondée sur le respect mutuel des mémoires des deux pays."
Dans le même journal, le sénateur Ahmed Mahsas, figure de la guerre de libération, considère que les propos du ministre sont en "cohérence avec l'Algérie historique" et ne trouve aucun mal à évoquer "le lobby juif capitaliste qui existe partout et pas seulement en France".
Par Amir Akef pour Le Monde.
Article paru dans l'édition du 02.12.07.
L'intervention du président Abdelaziz Bouteflika, qui a rappelé à l'ordre son ministre, recentre la visite d'Etat du président Nicolas Sarkozy sur le terrain moins litigieux de l'économie et des affaires. La presse met d'ailleurs en exergue le fait que le président français va en Algérie pour "ramener des contrats". Des contrats de plus de 4 milliards d'euros doivent être effectivement signés. Une moitié se traduira par des investissements français, dont ceux de Total et Gaz de France. Insuffisants, selon les responsables algériens, qui critiquent régulièrement la frilosité des investisseurs français et leur reprochent de ne voir dans l'Algérie qu'un marché pour déverser leurs produits.
A ces critiques, les Français font valoir, chiffres à l'appui, que la France est le plus grand investisseur, hors hydrocarbures, en Algérie. Un débat qui se mène depuis longtemps sans animosité, les liens économiques ayant toujours été à l'abri des tensions diplomatiques. Si la presse se félicite globalement du fait que les deux chefs d'Etat aient choisi de jouer la carte de l'apaisement, l'affaire provoque des appréciations différentes.
Dans la presse francophone, Chérif Abbès est vivement attaqué. Certains demandent son départ, lui reprochant d'avoir contraint le président Bouteflika à appeler son homologue français pour aplanir la situation. "Le bon sens, les us démocratiques, la logique, et même l'honnêteté intellectuelle, dictent à ce "ministre", qui n'est pas d'accord avec son gouvernement et son président, de déposer sa démission avant qu'il ne soit "limogé" sans autre forme de procès", écrit le Courrier d'Algérie.
A l'opposé, le journal arabophone Echourouk le défend résolument : "Ce qu'il a dit a provoqué les réserves de la diplomatie algérienne, mais il devrait être dit par tous les Algériens, car la politique méprisante choisie par Sarkozy à l'égard de la "racaille" en France et à l'extérieur ne laisse nulle place à la construction d'une amitié solide fondée sur le respect mutuel des mémoires des deux pays."
Dans le même journal, le sénateur Ahmed Mahsas, figure de la guerre de libération, considère que les propos du ministre sont en "cohérence avec l'Algérie historique" et ne trouve aucun mal à évoquer "le lobby juif capitaliste qui existe partout et pas seulement en France".
Par Amir Akef pour Le Monde.
Article paru dans l'édition du 02.12.07.