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L’Algérie des souffre-douleur

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  • L’Algérie des souffre-douleur

    La Tribune du 20 Mars 2008.






    Une wilaya agropastorale en retard de développement
    Tissemsilt proche du cœur, mais loin des yeux de la République





    Reportage réalisé par notre envoyé spécial à tissemsilt
    Ali Boukhlef


    Pour quelqu’un qui réside dans une grande ville, Tissemsilt paraît très loin et n’évoque pas vraiment grand-chose. Pour beaucoup d’Algériens, cette wilaya, ou plutôt cette localité, est synonyme de pauvreté, de dénuement et de privation.

    Pourtant, Tissemsilt n’est qu’à 230 km d’Alger. Elle n’est pas si loin. Ou si elle l’est, ce n’est qu’à cause de l’erreur humaine, ou plutôt d’un mauvais découpage administratif qui fait de plusieurs régions du pays des parents pauvres du développement.

    Au départ d’Alger, beaucoup de choses nous ont été racontées sur Tissemsilt. Tout ce qu’on dit tourne autour du climat rigoureux, notamment en hiver où il fait très froid la nuit, et de la pauvreté dans laquelle vivent les populations locales. Armés de ces «préjugés», nous décidons alors de tenter l’aventure -ce n’en est pas vraiment une, parce que Tissemsilt n’est ni à des milliers de kilomètres ni une forteresse- et de voir de plus près de quoi il en retourne. Même pas une adresse précise ou un contact préalable. C’est presque une marche vers l’inconnu.

    La route qui mène d’Alger aux villes de l’ouest du pays est animée en cette matinée du mardi 26 février, mais non saturée comme d’habitude. Car il y a des jours où la route est bondée de véhicules. La circulation est surtout ralentie par les milliers de camions de gros tonnage qui empruntent cette destination obligée. Il est vrai que l’ouverture de certains axes de l’autoroute Est-Ouest, notamment un petit tronçon au sud d’Alger et plus récemment quelques centaines de mètres dans la localité de Oued Djerr, relevant de la wilaya de Blida, a soulagé un tant soit peu les automobilistes. Mais les déboires de la circulation contrastent souvent avec les paysages féeriques de ces prairies verdoyantes de la Mitidja. En dépit du manque flagrant de pluie ces derniers mois, des champs interminables de céréales et de légumes ornent la route, lui donnant un aspect paradisiaque. Certains arbres commencent même à fleurir, annonçant ainsi un printemps précoce. Les champs de blé résistent encore à une sécheresse qui pointe à l’horizon.

    Un paradis cache-misère


    Dans les fermes en bordure de la route, seuls quelques paysans se hasardent à braver le froid matinal pour aller travailler leurs champs. Et les images d’une vie paysanne s’offrent aux yeux du visiteur trop habitué au béton et aux bruits stridents de la ville. Car, malgré les progrès techniques, les villageois des plaines de Hoceïnia ou de Khemis Miliana utilisent toujours le baudet comme moyen de locomotion. L’animal cohabite, dans ces contrées, avec des voitures dernier cri. Le service rendu par cette bête de somme aux populations a incité notre photographe à l’immortaliser à plusieurs reprises.
    Sauf que derrière ces belles images vertes se cachent peut-être des images incroyables. Presque impensables au temps de l’Internet et des nouvelles technologies. Pas seulement derrière, puisque à plusieurs endroits, comme c’est le cas dans les alentours de Khemis Miliana, par exemple, les inévitables bidonvilles qui enlaidissent l’environnement font leur apparition, offrant un spectacle désolant.

    Désolante est aussi la situation de ce village, un lieu-dit relevant de la commune d’El Amir Khaled de la wilaya de Médéa où les habitants, aveugles en majorité, nous dit-on, vivent essentiellement de l’aumône. Des hommes d’un certain âge, non-voyants, ont même installé des «sièges» aux abords de la RN 60 dans l’attente d’un éventuel bienfaiteur. Ils sont là à tendre la main matin et soir sur une route empruntée même par les hauts responsables de l’Etat issus d’une région voisine.

    L’entrée dans le territoire de la wilaya de Tissemsilt ressemble, à des exceptions près, au tableau précédent. Sauf qu’à mesure qu’on fonce vers le sud-ouest, les champs verdoyants laissent souvent place à des arbustes qui résistent toute l’année aux aléas de la nature. Les premiers villages de la région sont pratiquement identiques à ceux laissés derrière. Mais au niveau de Youssoufia, le premier hameau est une véritable pièce d’identité de la région : c’est un village socialiste agricole (VSA), du nom de ces bourgs construits du temps de la révolution agraire de Houari Boumediene, calquant pratiquement les goulags russes du temps du communisme. Jadis, ces villages, au nombre de mille répartis à travers l’ensemble du territoire national, offraient des commodités de vie aux agriculteurs dans l’optique de les sédentariser, de sorte qu’ils ne s’occupent que de leurs terres. Mais les années suivantes ont donné d’autres résultats tout aussi ratés que la révolution agraire elle-même.

    Au village de l’aumône


    Sauf que Tissemsilt est à vocation agricole. Et les scènes de vie quotidienne observées sur le chemin du chef-lieu de wilaya le prouvent. Malgré l’étendue des montagnes rocheuses de Ouarsenis qui dominent les vallées de la région, des champs sont toujours cultivés.


    Seule Theniet El Had représente la vie citadine, un ancien village colonial qui a notamment enfanté l’un des footballeurs algériens les plus célèbres, Moussa Saïb. C’est là aussi que nous avons trouvé, presque par hasard, notre seul accompagnateur, le gentil Yacine, un informaticien et peintre par vocation. Il ne reste qu’une cinquantaine de kilomètres avant le chef-lieu de wilaya. Sauf qu’au fur et à mesure qu’on avance, le paysage change de décor. Si la beauté de celui-ci demeure intacte, l’aspect extérieur, du moins, des habitations, nous renseigne sur une misère pas si loin.

    Il est vrai, ici et là, des immeubles, style HLM, poussent parfois n’importe comment, mais dans des communes comme Laayoune ou Khemisti, les signes d’une vie révolue dominent. Non parce que les habitants sont agrippés à leurs traditions et mode de vie, chose tout à fait noble en ces temps de reniement, mais parce qu’ils ne disposent pas de moyens adéquats pour une vie décente. Ce qui sera d’ailleurs confirmé lorsqu’on a traversé ce qui peut être appelé «centre-ville» de Laayoune, qui ne dispose même pas de kiosque à journaux. Pis, les routes de la localité, souvent traversées par des tracteurs, sont complètement défoncées. Et la rue principale est transformée en un marché anarchique où tout se vend et s’achète.

    Après près de trois heures de route, nous voilà aux portes de Tissemsilt. Avant d’y entrer, Yacine, notre accompagnateur, qui connaît Alger mieux que le chef-lieu de la wilaya, nous dit que Tissemsilt n’a pas «le look d’une ville».
    Notre ami a dit vrai. Hormis les quelques bâtiments neufs, construits par l’EPLF (Entreprise de promotion du logement familial) de Tiaret, les premières images qui vous envahissent sont celles de troupeaux de moutons, ou de mulet tirant la charrette.

    La saleté, qui n’est pas l’apanage de Tissemsilt, vous saisit dès les premiers instants. Les eaux usées coulent pratiquement partout.

    Seuls les feux tricolores, récemment installés, et quelques bâtiments administratifs indiquent effectivement que nous sommes bien dans un chef-lieu de wilaya. Plus loin encore, nous sauront qu’il existe une «delala» où les jeunes s’adonnent à la vente illégale de téléphones portables devant le regard passif des policiers et des autorités, comme partout ailleurs en Algérie. Nous visiterons aussi cette place qui ressemble au mur des Lamentations où tous les problèmes de la wilaya sont concentrés. Nous nous sommes également rendus dans des endroits où même le champ téléphonique n’existe pas. Des «douars» où le mot pauvreté trouve sa véritable signification, malgré l’opposition du chef de cabinet du wali qui récuse le qualificatif. Ces villages s’appellent Boumengouche, Harizi et Mekabret. Des villages où le minimum vital n’existe pas. De véritables «no man’s land» dans l’Algérie des milliards.

    A. B.
    “La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur, ou d’indifférence; encore faut-il que l’on désire passionnément écarter ces voiles” Amin Maalouf

  • #2
    Bien sur que le chef du cabinet du wali recuse ce mot, il est fort à parier qu'il n'y a jamais mis les pieds
    « la libération de l'Algérie sera l'œuvre de tous », Abane Ramdane 1955.

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    • #3
      moha

      Ce n'est malheureusement pas le seul endroit où c'est comme ça.






      ps: l'algérie est une perle qui est en train d'être détruite.:22:

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