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EN IMAGES : Ammar Bouras exhume l’Algérie des années 1990.

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    EN IMAGES : Ammar Bouras exhume l’Algérie des années 1990

    Algérie, chroniques photographiques 1990-1995 : dans un livre événement publié aux éditions Barzakh, à Alger, le plasticien Ammar Bouras, photoreporter au début des années 1990, présente des clichés d’une période oubliée, celle d’avant les violences, où tout un pays s’était réapproprié l’espace public… et son destin. Écho émouvant à l’actualité algérienne

    Malek Bachir
    Dimanche 28 avril 2019 - 08:14 | Last update: 2 years 7 months ago837Shares






    Marche du FIS. Photo prise depuis la Maison de la presse. Alger, juin 1991. « Ammar Bouras a été photojournaliste. Entre 1988 et 1993, après son installation à Alger, il a travaillé pour plusieurs journaux. Même après avoir quitté le métier de journaliste, il a continué de photographier. Plus remarquable encore aux yeux de l’historienne que je suis, quelles qu’aient été les circonstances de sa vie professionnelle, il a toujours conservé tous ses négatifs, constituant une archive exceptionnelle, soigneusement ordonnée chronologiquement. Cette archive, dont je ne connais pas d’équivalent, constitue une sorte de chronique photographique de la vie du pays. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Défilé de mode à l’hôtel El Aurassi, Alger, le 20 mai 1992. « Quand je regarde mes photos – et c’est un constat sans prétention –, je les vois comme le témoignage d’une période où il y avait un mélange, une confusion, une khalouta [mélange] incroyable (dans le bon sens du terme), un véritable foisonnement : les islamistes prêchaient, les étudiants des Beaux-Arts faisaient de l’art sans se soucier de ce qui allait se passer, songeant que ce qui était en train d’arriver, tous ces bouleversements, serait de toute façon sûrement plus porteurs que la période du parti unique. » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    Le chef du gouvernement de l’époque, Sid Ahmed Ghozali, durant la campagne des législatives. Minifestival de jeux d’échecs. Alger, le 13 décembre 1991. « Ces années, ce sont les années d’avant, les années du début, celles de l’entrée dans la violence des années 1990. Nous sommes dans les mois qui suivent les émeutes d’octobre 1988 et leur répression, et l’ouverture démocratique qui voit la création ou la légalisation de nombreux partis, parmi lesquels le Front islamique du salut (FIS), le Front des forces socialistes (FFS), le Parti de l’avant-garde socialiste (PAGS)... C’est la fin du parti unique. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Motard de la police algérienne, place de Tafourah à Alger, novembre 1991. « Mon projet de fin d’études s’intitulait : ‘‘La photo : de la lumière à la plastique’’. C’était vraiment ça, la possibilité d’écrire avec la lumière, d’agir sur le monde, d’avoir ce pouvoir d’arrêter des choses, d’en enlever, d’en ajouter. C’était vraiment un jeu de pouvoir. » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    Nelson Mandela, trois mois après sa libération, est l’invité d’honneur de l’Algérie, engagée dès son indépendance dans la lutte du peuple sud-africain contre l’apartheid. Coupole du 5 Juillet, Alger, le 16 mai 1990. « L’ouverture politique en Algérie entre alors en résonance avec les revendications démocratiques dans les pays du monde arabe – elle est le seul pays du Maghreb et du Moyen-Orient à connaître un tel bouleversement politique – et les transitions politiques des pays d’Afrique : en quelques années, ce sont plus de trente pays du continent qui ont connu des transformations politiques, dont la plus spectaculaire est la fin du régime d’apartheid en Afrique du Sud, où Nelson Mandela est libéré en février 1990. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Marche du Rassemblement pour la culture et la démocratie, le RCD. Alger, le 24 octobre 1991. « Avant, c’était plus facile. J’ai des photos prises devant l’APN [Assemblée populaire nationale], je pouvais prendre des photos de n’importe quel angle, sans me poser trop de questions. Mais ensuite, sortir un appareil photo, c’était comme prendre une arme. On pouvait être agressé par n’importe qui, même si le sujet de la photo était la Grande Poste ou la place des Martyrs. » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    Rassemblement de femmes. Cinéma L’Afrique. Alger, le 9 janvier 1992. « Alors même que commencent les assassinats, on retrouve encore l’ébullition de ces années. La sélection des images par ordre chronologique rappelle à quel point la vie quotidienne a continué d’être intense et même joyeuse alors que la violence, déjà, était là. L’histoire ne peut se raconter sans tenir compte de cette concomitance car il a continué à y avoir, même au milieu des attentats et des tueries, une vie artistique, sportive, collective et une résistance à la spirale de la violence. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Marche Front des forces socialistes (FFS) contre la bipolarisation FLN-FIS. Boulevard Zighout Youcef, Alger, le 31 mai 1990. « C’est une période, une séquence de notre histoire, qu’on a presque oubliée, trop vite. Quand je regarde ces photos, je me dis qu’on n’a pas tiré de leçons. Les choses étaient presque visibles, presque flagrantes et personne ne s’en rendait compte, on était en plein dedans, on découvrait la démocratie, le multipartisme, l’altérité, etc. » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    En marge d’une marche. Alger, le 24 octobre 1991. « Ce qui ‘’fait’’ passé, plus encore que les événements rapportés de loin par les photos, ce sont les détails plus anecdotiques, les vêtements – les incroyables blousons à épaulettes de l’époque et les survêtement de la Sonitex –, les coupes de cheveux qu’on n’oserait plus avec les brushing vaporeux des années 1980, les moustaches et les barbes, les foulards autour du cou. Comme partout, c’est la mode, en somme, qui nous date le plus intimement et crée la distance d’avec le passé. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Bassin du complexe sportif du 5 Juillet. Alger, le 20 février 1991. « Alors même que commencent les assassinats, on retrouve encore l’ébullition de ces années. La sélection des images par ordre chronologique rappelle à quel point la vie quotidienne a continué d’être intense et même joyeuse alors que la violence, déjà, était là. L’histoire ne peut se raconter sans tenir compte de cette concomitance car il a continué à y avoir, même au milieu des attentats et des tueries, une vie artistique, sportive, collective et une résistance à la spirale de la violence. Il est difficile parfois de regarder les photos sans penser à ce qui viendra après. » (Extrait de l’interview de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Marche des étudiants algériens en soutien à l’Irak. Alger, le 20 janvier 1991. « Ce qui frappe dans les photographies, c’est l’ébullition et l’omniprésence des corps dans la rue. Elles nous en font même entendre les voix. Ordonnée ou joyeuse, en deuil lors d’un enterrement, en colère, la foule est partout. » (Extrait de l’interview de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Gala pour la Journée nationale de l’étudiant. École des beaux-arts. Alger, le 19 mai 1993. « Quand j’étais étudiant, de 1988 à 1994, et avant le 5 octobre 1988, il y avait des bals masqués de fin d’année, des fêtes du 19 mai célébrant la journée de l’étudiant, des happenings… Après les émeutes, c’est plutôt devenu un lieu de revendication, d’engagement et de lutte. Les associations, les partis politiques venaient participer à des événements à l’école pour protester contre la torture ou l’islamisme ; l’établissement est devenu un lieu de rayonnement pour une pensée autre que celle qui dominait au dehors. Un lieu hors du temps, ‘’hors Alger’’. » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    Salle de sport Harcha. Alger, le 19 janvier 1993. « Les photos révèlent des corps, dont l’habillement devient message politique. C’est un temps de l’engagement des corps ». (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Quelques minutes après l’assassinat du président Mohamed Boudiaf. Annaba, le 29 juin 1992. « Boudiaf, c’est l’expérience la plus difficile et la plus traumatisante pour moi. Il était en visite présidentielle à Annaba. On m’y a envoyé. Boufarik, avion militaire et go. C’était ma première couverture présidentielle. Donc je suis parti… Mais je ne sais pas comment parler de ce moment… » (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    Enterrement de Djilali Liabes, figure intellectuelle respectée, assassiné, la veille, devant chez lui à Kouba. Alger, le 17 mars 1993. « Un jour, plus tard, on pourra réaliser une boucle temporelle pour revenir sur ce moment sidérant, le repenser, le transformer en un geste créateur ou même en faire l’histoire. Déclencher alors pour saisir une image – même floue –, c’est dire qu’on ne sera pas perpétuellement paralysé par la violence. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal)


    Photos prises dans les territoires de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), lors d’un voyage de solidarité effectué par les étudiants des Beaux-Arts et certains artistes algériens, pour marquer leur soutien au Front Polisario, en conflit avec le Maroc autour de la souveraineté du Sahara occidental. Mars 1992. « Chacun luttait à sa manière ; la tolérance, la vie étaient là. Ce que je n’arrive presque plus à trouver maintenant, comme si l’opportunisme avait pris le pas sur l’engagement. Je ne suis pas nostalgique pour autant, j’ai toujours préféré le "ici et maintenant" ». (Extrait de l’interview d’Ammar Bouras)


    « Les photographies prises d’un poste de télévision, sous le titre ‘’اعترافات إرهابي’’ [Confessions d’un terroriste]. Dans le poste, une émission de télévision au cours de laquelle les terroristes font leurs ‘’aveux’’, sous la forme d’un récit circonstancié de leur parcours terroriste. J’ai voulu qu’Ammar Bouras évoque pour moi le moment où ces photos ont été prises. Il se souvient d’une voix off qui interrogeait l’homme, et demandait : ‘’Comment tuiez-vous ?’’ Réponse : ‘’Nous égorgions’’. Mais la voix insiste à plusieurs reprises pour avoir plus de détails. Jusqu’à ce que l’homme finisse par expliquer : « Nous prenions la tête, et avec le couteau nous tranchions la gorge. » Et dans le même temps, il mime : saisir la tête par les cheveux pour la ramener en arrière, et trancher la gorge d’un côté à l’autre. « Le choc », dit simplement Ammar. » (Extrait de la préface de l’historienne Malika Rahal).

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