Semmar, exilé en France, est accusé d'avoir divulgué des informations confidentielles sur le géant pétrolier algérien Sonatrach
Margarita Arredondas
argelia
L'Algérie occupe la 134e place sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF)
Le tribunal de Dar El Beïda à Alger a condamné à mort le journaliste Mohamed Abdelkader Semmar - alias Abdou Semmar - pour avoir révélé des informations secrètes sur la compagnie pétrolière publique Sonatrach, un acte qualifié de "haute trahison". Semmar est le fondateur du média indépendant Algérie Part, connu pour son opposition au gouvernement d'Abdelmadjid Tebboune. Cette condamnation intervient après que le journaliste a dénoncé la corruption au sein de la compagnie pétrolière.
Alger a lancé un mandat d'arrêt international contre Semmar, qui est en exil en France depuis 2019. Un ancien cadre de Sonatrach, Lamine Ouis, a également été condamné à dix ans de prison pour avoir partagé des "informations fausses et confidentielles" avec Semmar.
Le journaliste algérien a également indiqué dans une vidéo qu'il avait reçu des menaces en raison de ses apparitions dans le média israélien i24 News. Selon Semmar, ses détracteurs l'accusent d'avoir demandé l'asile politique en Israël ou de travailler pour le Mossad. Il a toutefois tenu à rappeler qu'en tant que journaliste, il a "le droit et le devoir de s'exprimer dans tous les médias".
"Je saisis toutes les occasions pour parler de la situation en Algérie, que ce soit par le biais du Hezbollah, de l'Iran, du Soudan, de l'Arabie saoudite, des États-Unis ou d'Israël", déclare Semmar, qui assure qu'il "ne donnera pas d'espace médiatique à ceux qui manipulent l'information pour servir le régime algérien ou dénigrer le pays". "Je n'ai qu'un seul objectif : fournir des informations fiables et objectives", ajoute-t-il.
Semmar a également profité de l'occasion pour s'adresser directement au gouvernement algérien, lui demandant de l'autoriser à rentrer dans son pays. "De cette façon, il ne sera pas nécessaire de parler sur les chaînes étrangères", a-t-il déclaré. "Respectez la liberté de la presse et ce seront des journalistes étrangers qui viendront parler à nos médias", a-t-il ajouté.
La liberté de la presse en Algérie dans un état critique
L'Algérie est classée 134e sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières (RSF). RSF prévient que la situation des médias "ne s'est jamais autant détériorée", soulignant la pression exercée sur les médias indépendants et les arrestations de journalistes. RSF dénonce également le cadre juridique de plus en plus "restrictif".
Une réforme du code pénal adoptée en 2020 prévoit des peines d'emprisonnement d'un à trois ans pour la diffusion de "fausses nouvelles" et de "discours de haine" visant à porter atteinte à "la sécurité et l'ordre nationaux" ainsi qu'à "la sécurité de l'État et l'unité nationale". "Ces lois sont couramment utilisées pour poursuivre et condamner des journalistes. Dans cet environnement, la censure et l'autocensure prospèrent", a déclaré RSF.
- RSF prévient que la situation des médias "ne s'est jamais autant détériorée"
La répression et la censure des journalistes en Algérie ont également été récemment dénoncées par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et le groupe de défense des droits de l'homme Tahrir Institute for Middle East Policy (TIMEP). Les deux organisations ont dénoncé la détérioration de la liberté de la presse dans ce pays d'Afrique du Nord, notamment depuis l'arrivée au pouvoir du président Tebboune en décembre 2019, dans un rapport conjoint présenté au Conseil des droits de l'homme des Nations unies.
Atalayar
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