Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Quelque chose en nous du Hirak !

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Quelque chose en nous du Hirak !

    Quatre ans après le déclenchement du mouvement de février 2019, qu’en est-il de ce mouvement et de l’état politique du pays ?

    Pour l’heure, et à l’aune de sa revendication centrale d’abolition du système en place, on ne peut pas dire qu’il a abouti. Quatre ans après son déclenchement et plus de vingt mois après les dernières marches (début mai 2021), le Hirak est aujourd’hui physiquement et médiatiquement étouffé et n’a plus d’existence sociale qu’à travers sa répression et le peu de communication qui l’accompagne. Tout se passe comme si, en organisant son musellement musclé, le pouvoir entretient, à travers cette activité punitive, une certaine rémanence du mouvement populaire. Mais s’il fallait tenter un bilan de cet essai non transformé, on peut d’emblée observer que ce n’est point un maigre butin que d’avoir contraint Bouteflika, son clan et le premier cercle de sa cour au départ.

    Cet évènement a aussi fait que le pays a engrangé de précieux enseignements sociopolitiques et de réels acquis politiques. La première leçon consiste en ce fait que, dans l’expression d’une volonté de changement, la violence n’est pas une fatalité ; le pacifisme participe plutôt à l’intelligibilité de la revendication.

    Le second enseignement, maintes fois rappelé par l’Histoire, du mouvement est qu’un peuple maltraité, ou simplement mal traité, ne se résigne jamais vraiment à son sort, même si, parfois, il semble ne pas avoir une conscience claire et partagée de sa condition. Dans l’intervalle des soulèvements, les gouvernants, si injustes ou incompétents soient-ils, peuvent susciter et agréger des soutiens multiples, parfois antinomiques, en raison d’intérêts divers, réels ou illusoires. Dans ce cas, le statu quo ne se nourrit pas de convictions communes mais de la convergence de calculs de chapelles. Et dans les zones où il n’arrive pas à susciter l’adhésion, sincère ou intéressée, il tend à imposer le silence pour le temps qu’il peut. Ce temps peut être plus ou moins long.

    Certes, s’agissant de changement, le système politique, qui est le même depuis l’indépendance du pays, a surmonté le tsunami populaire du 22 février sans avoir eu à s’amender de l’une ou de l’autre de ses « constantes ». Tout le temps qu’ont duré les manifestations, l’institution militaire a assumé sa fonction de veille sécuritaire, en même temps qu’elle a continué à s’octroyer, ouvertement cette fois-ci, le rôle d’encadrement autoritaire de la vie politique nationale. Malgré un discours validant la revendication populaire pacifique, le pouvoir a vite fait de lui opposer sa réaction répressive caractéristique.

    Si le pacifisme spontané du Hirak ne lui a pas épargné la répression la plus rude, c’est à sa non-violence qu’il doit cependant cette pédagogie de l’endurance qui l’a aidé à durer dans la difficulté. La politique de répression, se trouvant dépourvue de l’argument du maintien de l’ordre, a été contrainte d’apparaître dans toute son illégitimité. Si bien qu’elle a dû se porter sur un autre terrain, le terrain sécuritaire, ce qui lui offre le loisir de doser sa rigueur en fonction de sa finalité politique et, surtout, de se poursuivre bien après que les marches furent définitivement empêchées.

    L’épreuve que de nombreux citoyens ont endurée pour leur engagement, a aussi suscité, dans la société, un sentiment d’empathie et de solidarité dont il est difficile de mesurer l’ampleur parce que les opinions citoyennes n’ont plus le loisir de s’exprimer. Mais on peut intuitivement en saisir la réalité. Et pour cause : les Algériens ont massivement partagé les manifestations et les espoirs du même Hirak ; ceux là ne peuvent aujourd’hui ignorer la souffrance d’anciens compagnons de la revendication !

    Par leur contenu, les deux premières années de mobilisation ont donné naissance à un état d’esprit Hirak. S’il s’est aujourd’hui assoupi ou a été engourdi par la peur, il n’en est pas moins latent : on n’efface pas d’un trait de répression de longs mois dans la convivialité et d’échange entre manifestants, de débats et de confrontations autour des motivations et des arguments de chacun et d’évaluations comparées de leur action. Les arrestations de leurs compagnons de marches et les procès de certains d’entre eux auxquels ils ont parfois assisté ne peuvent que les marquer; ils ne peuvent alors que partager la souffrance d’autres citoyens châtiés pour leur action commune dans un mouvement qui a rassemblé une bonne partie du peuple…

    Le pouvoir ne semble pas beaucoup se soucier des stigmates que la politique répressive ne manquera pas de laisser; il ne prend pas en considération les effets psychologiquement et politiquement structurants de cette mémoire du Hirak. Le temps politique n’étant pas le temps sociologique, il veut passer à autre chose sans avoir à dresser l’inventaire de son traitement d’un fait d’Histoire. Le bâillonnement de l’expression l’empêche peut-être d’y déceler des répercussions à long terme ; il s’en tient à une politique de l’immédiat sans en interroger les conséquences à long terme, non plus. Quand on ne considère que les avis favorables, on ne constate les retombées négatives de sa gestion que le jour où elles lui reviennent en mode boomerang.

    C’est ainsi : un pouvoir qui se prive de la liberté de presse se contraint à jouer sans filet. Prémisses de ce fait : c’est la Présidence qui a dû réagir à l’abus de flagornerie dont des universitaires de Batna se sont rendus coupables avant que…des médias ne viennent y joindre leurs vitupérations outrées ; et d’après le commentaire de l’agence de presse officielle, c’est le Président qui, le premier, a fini par laisser poindre des raisons de « mécontentement » quant au travail de son gouvernement !

    Quatre ans après le 22 février, il peut se dégager une impression de gâchis au regard de bilans subjectifs de ce vaste et beau mouvement et au regard de l’état du pays. On doit nourrir aussi un sentiment de culpabilité devant les expiations injustifiées de ceux des Hirakistes qui ont été pris dans les mailles de la répression. Mais, malgré toutes les frustrations, l’évènement historique du Hirak n’a pas encore fini d’impacter l’avenir du pays.

    Le fait est que, déjà, les générations d’Algériens qui l’ont vécu en ressentent intérieurement le poids : on a tous en nous quelque chose du Hirak, pour paraphraser le chanteur.

    Mustapha Hammouche
    Twala
    22 février 2023
    Dernière modification par shadok, 23 février 2023, 13h46.
    Le bon sens est la chose la mieux partagée du monde... La connerie aussi - Proverbe shadokien

  • #2
    La grande leçon que ceux qui veulent un vrai changement doivent retenir de ce gâchis est d'avoir un projet politique précis au préalable...
    ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément

    Commentaire


    • #3
      Personnellement, je ne retiens que le coté "positif". Pour le reste, chacun d'entre nous assume et apprend de ses "erreurs".
      "Citizens of Iraq, Libya, Afghanistan, and Yugoslavia have seen how "peaceful" NATO is."

      Commentaire


      • #4
        Les enseignements à tirer du Hirak est que la jeunesse algérienne est politiquement consciente et engagée et que la mobilisation pacifique et les médias sociaux sont efficace.

        Malheureusement, la répression du pouvoir et la fragmentation politique ont compliqué la formation d'une coalition forte pour conduire à un changement politique en Algérie.

        Chacun prendra ses responsabilités devant l’histoire : ceux qui ont soutenu le mouvement, ceux qui l’ont combattu et ceux qui se sont retournés contre lui !
        Le bon sens est la chose la mieux partagée du monde... La connerie aussi - Proverbe shadokien

        Commentaire


        • #5
          Moralite de cette experience : Words are defense, actions are offense.


          Defense: fear and self-preservation
          Offense: confidence.
          Dernière modification par Someday, 23 février 2023, 16h18.
          We are what we pay attention to.

          Commentaire


          • #6
            Bachi
            ​​​​​​​
            La grande leçon que ceux qui veulent un vrai changement doivent retenir de ce gâchis est d'avoir un projet politique précis au préalable...
            Exactement ...
            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

            Commentaire


            • #7
              shadok
              Malheureusement, la répression du pouvoir et la fragmentation politique ont compliqué la formation d'une coalition forte pour conduire à un changement politique en Algérie.
              Elle est bien bonne. J'y croirais prèsque si je n'y étais pas ...
              "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

              Commentaire


              • #8
                Ce n'est pas les projets politiques qui manque, c'est juste une excuse a mon avis. Le rapport de force a change, le pouvoir a pris confiance. Le Hirak (ceux qui pretendent le representer) s'est replie dans un discours vide, qui n'interesse plus personne.
                Dernière modification par Someday, 23 février 2023, 16h51.
                We are what we pay attention to.

                Commentaire


                • #9
                  cozy

                  ​​​​​​​Quels sont ces "projets politiques" qui ne manquent pas ?! Je n'en vois aucun là ...

                  "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

                  Commentaire


                  • #10
                    Harrachi78

                    Il faut attendre shadok pour une reponse. J'ai une idee vague : Mazafran I, Mazafran II ... un truc pareil
                    We are what we pay attention to.

                    Commentaire


                    • #11
                      cozy

                      Bah, justement, il y eut quelques balbutiements de réunionS au tout début, ensuite ce fut très vite étouffé par les nihilistes et certains populistes ... puis après plus rien ... lol
                      "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

                      Commentaire


                      • #12
                        Le dicton: Qui trop embrasse mal étreint résume bien le hirak et pourquoi il n'a abouti à rien.

                        Je ne juge pas, la contestation au 5e mandat a réuni tout le monde, toutes les tendances idéologiques, y compris les plus extrêmes. Ca va du salafiste, voire le daechiste au plus sécessioniste des Kabyles. Tout le monde était contre le 5e mandat et était dans la rue pour le dire. C'était très bien.
                        Mais une fois cet objectif atteint, tout ce beau monde continua à manifester. Ce front qui ne voulait plus absolument rien dire, tellement il était hétéroclite. Ca n'avait plus aucun objectif politique commun.
                        ca ne pouvait absolument rien donner.
                        Si Tebboune n'avait que 20 % de l'électorat lors de son élection, à la prochaine, il pourrait bien engranger plus de 50% de l'électorat algérien.
                        Ca illustre l'échec des démocrates.
                        Dernière modification par Bachi, 23 février 2023, 19h36.
                        ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément

                        Commentaire


                        • #13
                          Bachi
                          ​​​​​​​
                          Tout le monde était contre le 5e mandat et était dans la rue pour le dire.
                          Justement, c'est pour cela qu'il fallait rassembler sur un stricte minimum consensuel, qui soit raisonnable et qui ne touche en rien aux aspects idéologiques, afin de pouvoir être défendu fermement par tout le monde sans crainte, le temps qu'une alternative viable au régime puisse se mettre en place ou, au pire, ouvrir des espaces dans le régime pour et les consolider pour une suite plusongue.

                          Ça aurait pu se faire dans les premières semaines, et ça aurait pu faire adhérer si toutes les têtes connues avaient affiché une démarche commune. Au lieu de ça, les populistes et les populeux se sont mis à intimider tout ce qui n'adherait pas à leur démarche suicidaire, et ils ont finis par se,retrouver seuls à gueuler au bout du compte ...
                          "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

                          Commentaire


                          • #14

                            Bachi,

                            Exacte, mais il faut rajouter que dans les pays où l'économie n'est pas générés par la gouvernance, les contestations qui s’inscrivent dans la durée ne peuvent pas aboutir, comme c'est le cas de l'Algérie (à moins de bloquer la source des revenus pétrolière et gazière).

                            Sinon la manne qui continue toujours à tomber dans la cagnotte du pouvoir, permet la corruption, et l'achat de "consciences" y compris l’âme même des contestataires...

                            L’exemple si besoin en est celui du printemps noir de 2001 en Kabylie, avec tout ce qui s'en est suivit...

                            Le Hirak de 2019 ne fait pas exception, sujet à toutes les manipulations, il ne pouvait échapper à une récupération par un personnel lige qui détiennent aussi les clés du coffre-fort.
                            Dernière modification par infinite1, 23 février 2023, 19h48.

                            Commentaire


                            • #15
                              Harrachi78

                              Tu sembles ne pas avoir bien suivi le Hirak. Il y avait des dizaines d'initiatives politiques menées par des membres de la société civile ainsi que des partis politiques. Malheureusement, toutes ces initiatives se sont heurtées à l'intransigeance de Gaïd Salah et à son incapacité à comprendre que le Hirak était avant tout une expression patriotique, dont les revendications visaient à renforcer les institutions de l'État en les plaçant sous l'autorité de la loi plutôt qu'à les affaiblir.

                              Le Hirak est sans aucun doute la plus grande promesse démocratique depuis l'indépendance de l'Algérie. Toutefois, il a malheureusement été confisqué par le pouvoir, tout comme l'indépendance l'a été en 1962. Chacun doit se poser la question de sa propre responsabilité dans cette confiscation qui aura des répercussions sur les générations à venir.
                              Le bon sens est la chose la mieux partagée du monde... La connerie aussi - Proverbe shadokien

                              Commentaire

                              Chargement...
                              X