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La piraterie Barbaresque ou alCorso

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  • La piraterie Barbaresque ou alCorso

    Voici comme promis un extrait sur la piraterie Barbaresque emprunter dans un sujet d'histoire universitaire qui serait intérressant d'analyser ensemble . Pour ma part j'ai comme un doute sur l'article que je croit quelque peu objectif , et un parti pris pour la rive nord méditerranéenne .
    Il est bon cependant de lire cette article , car il fournis des sources .

    Limites du sujet
    La piraterie était endémique en Méditerranée depuis des temps immémoriaux, et la difficulté, pour rédiger cet article, est de savoir quand commencer, et où s'arrêter, à la fois dans le temps, dans l'espace, et dans les circonstances, car il y eut des actes de piraterie de Musulmans contre des Chrétiens, de Chrétiens contre des Musulmans, de Musulmans contre des Musulmans, et de Chrétiens contre des Chrétiens.

    De plus, nos exemples mettent particulièrement l'accent sur Alger, la plus connue des Régences et la plus facile à étudier. Cependant, des auteurs récents ont écrit d'excellents articles sur Tunis, Tripoli et Salé. Nous nous sommes contentée (à ce stade) de traiter ces lieux en plaçant des liens vers ces articles à l'occasion de références. Nous invitons le lecteur à suivre ces liens. Cela en vaut la peine. Loin d'être des décalques d'Alger en plus petit, ces repaires ont chacun sa personnalité. Salé, le plus proche de l'Espagne, reçut en première ligne les flots de réfugiés de la Reconquista ; sa population morisque avide de vengeance, jointe à sa quasi-indépendance, le rendait particulièrement redoutable. Tunis essayait de jouer sur les deux tableaux : piraterie et commerce, d'où des situations particulièrement complexes et des manières plus amènes au moins extérieurement. Tripoli était un marché d'esclaves total, à la fois port de mer recevant les victimes européennes du corso, et "port du désert" (ainsi qu'elle se désignait elle-même) au débouché des caravanes transsaharienne de traite des noirs.

    Enjeux contemporains
    Le corso barbaresque n'inspire ni repentance ni regrets aux héritiers des pirates.
    La marine algérienne a donné des noms de pirates à plusieurs de ses corvettes : Mourad Raïs, Raïs Hamidou, d'autres encore [1] . Le Raïs Hamidou a sa statue à Alger[2]
    L'Algérie continue à exiger la repentance de la France pour la période de colonisation, qui seule à mis fin à la piraterie ( voici donc mes doutes sur l'auteur ).
    Au moment de la conquête française, la marine algéroise avait pratiquement reconstitué le nombre de ses navires, mis à mal par les bombardements anglais et américains de 1815 et 1816. Ce fait est parfaitement établi en archives[3]. Cependant, l'idée qu'il n'y avait (prétendument) plus de piraterie algéroise au moment de la conquête française est trop utile idéologiquement pour que certains y renoncent, et elle se maintient dans les médias malgré toutes les preuves archivistiques[4].
    La Lybie, héritière de la Régence de Tripoli, vient d'obtenir des excuses et une indemnisation de l'Italie, l'une des principales victimes du corso[5]. Le colonel Khadafi (et d'autres) cherchent à faire en sorte que cette indemnisation fasse précédent. La France, jusqu'ici, a dit non.
    Quand on marche sur la tête .... il ne faut pas s'étonner de constater que "Le ventre est encore fécond dont est sortie la bête immonde"[6]. ( parti pris flagrant sur l'auteur)

    Essai de chiffrage des victimes du corso
    Un essai de chiffrage a été tenté par le Professeur Robert Davis dans son ouvrage Christian Slaves, Muslim Masters: White Slavery in the Mediterranean, the Barbary Coast, and Italy, 1500-1800.
    Tout d'abord, il souligne certains raids massifs : 6000 captifs en 1554 lors du sac de Vieste en Italie ; 7000 esclaves dans la baie de Naples en 1544, au point que, sur le marché d' Alger le prix de l'esclave s'était effondré, et qu'un Chrétien y valait un oignon ; 4000 captifs en 1556 après un raid sur Grenade.
    Thomas Jackson résume en ces termes la méthode et les hypothèses de chiffrage du Professeur Davis :
    " Le Prof. Davis remarque que des recherches énormes ont été faites pour évaluer aussi exactement que possible le nombre de Noirs emmenés à travers l'Atlantique, mais qu'il n'y a pas eu d'effort semblable pour connaître l'ampleur de l'esclavage en Méditerranée. Il n'est pas facile d'obtenir un compte fiable -- les Arabes eux-mêmes ne conservaient généralement pas d'archives -- mais au cours de dix années de recherches le Prof. Davis a développé une méthode d'estimation.
    Par exemple, les archives suggèrent que de 1580 à 1680 il y a eu une moyenne de quelques 35.000 esclaves en pays barbaresque. Il y avait une perte régulière du fait des morts et des rachats, donc si la population restait constante, le taux de capture de nouveaux esclaves par les pirates devait égaler le taux d'usure. Il y a de bonnes bases pour estimer les taux de décès. Par exemple, on sait que sur les près de 400 Islandais capturés en 1627, il ne restait que 70 survivants huit ans plus tard. En plus de la malnutrition, de la surpopulation, de l'excès de travail et des punitions brutales, les esclaves subissaient des épidémies de peste, qui éliminaient généralement 20 ou 30% des esclaves blancs.
    Par un certain nombre de sources, le Prof. Davis estime donc que le taux de décès était d'environ 20% par an. Les esclaves n'avaient pas accès aux femmes, donc le remplacement se faisait exclusivement par des captures. Sa conclusion: «Entre 1530 et 1780, il y eut presque certainement un million et peut-être bien jusqu'à un million et un quart de chrétiens européens blancs asservis par les musulmans de la côte barbaresque». Cela dépasse considérablement le chiffre généralement accepté de 800.000 Africains transportés dans les colonies d'Amérique du Nord et, plus tard, dans les Etats-Unis. "
    L'on ajoutera que les femmes constituent le vrai "trou noir" de tout essai de chiffrage. Majoritaires dans les captures (qui se déroulent souvent à terre, sur les villages côtiers), elles n'interessent pas les religieux rédemptionnistes et nul ne se démène pour les racheter, sachant qu'elles ont été victimes d'abus sexuels qui les exclueraient de la société. Elles sont les victimes les plus nombreuses et les moins visibles.

    Suite .......

  • #2
    Au Moyen-Age

    La piraterie musulmane, au début, ne se confond pas avec la côte des Barbaresques, puisque les Arabes sont arrivés bien plus au nord, et, que les Chrétiens sont également descendus bien plus au sud avec les Croisades. Vers la fin du IX ème siècle, les Sarrasins opèrent à partir de ce qui est aujourd'hui le sud de la France et l'Italie du Nord. En 846, ils saccagent Rome et le Vatican. En 911, ils contôlent les cols des Alpes, et l'Evêque de Narbonne, de passage au Vatican, ne sait comment rentrer chez lui.

    Le déclin de l'Empire romain d'Orient leur livre successivement, au IX ème siècle, Chypre, la Crète et la Sicile.
    Le samedi de Pâques 809, partis d'Espagne, ils mettent à sac Bonifacio en Corse et emmènent toute la population sauf quelques vieillards, dont l'Evêque.
    Philippe Conrad souligne l'envergure des raids : "Aux IXème et Xèmesiècles, ce sont des raids navals qui sont lancés contre les côtes chrétiennes. Pechina, près d'Almeria, puis Déniaau sud-est de l'Espagne se transforment en bases arrière d'une piraterie de grande envergure et ce sont davantage des navires affrétés par de véritables entrepreneurs corsaires que les flottes de l'émir ou du calife ommeyade de Cordoue qui créent une insécurité permanente entre le delta du Rhône et le sud de l'Italie. L'occupation de la Sicile à partir de 827, celle de Malte en 870, enfin celle des Baléares en 902 aggravent encore ce danger alors que la Corse et la Sardaigne se retrouvent dangereusement isolées, leurs populations se voyant contraintes de se replier dans l'intérieur pour y mener une simple vie pastorale. Le pape Léon III et Charlemagne mesurent le danger mais ne peuvent empêcher les attaques lancées en 812, au large de Naples, contre les îles de Ponza et d'Ischia et le raid de pillage effectué l'année suivante sur la côte de Toscane, contre Centum Cellae – Civitavecchia."

    Au X ème siècle, ils opèrent à partir des Iles Baléares. De 824 à 961, ils écument toute la Méditerranée à partir de la Crète. Ils mettent à sac la ville de Gênes, qui n'est pas encore la puissance maritime qu'elle deviendra.
    Au XIII ème siècle, l'Empire Byzantin s'écroule, provoquant une recrudescence de la piraterie.
    C'est également l'époque où, sur la côte des Barbaresques, Bougie est un nid de pirate d'une importance majeure.
    On ajoutera la très grande insécurité du pélerinage vers la Terre Sainte, qui ne reste possible, jusqu'à la fin des croisades, que grâce à la présence des ordres monastiques militaires.

    Ces quelques exemples n'ont pas prétention à l'exhaustivité. Ils permettent cependant de voir que la piraterie musulmane est un phénomène majeur déjà au Moyen-Age. On pourrait y ajouter les enlèvements à terre, inséparables d'une "culture de la razzia", dans les pays qu'ils occupent durablement comme l'Espagne. Pourtant, l'habitude est bien prise de démarrer au XVIème siècle. La question se pose donc de savoir dans quelle mesure cette piraterie a pris à cette époque une dimension supérieure, et dans quelle mesure c'est le seuil de tolérance des populations chrétiennes qui a diminué. Les victimes de l'esclavage existaient déjà au Moyen-Age, leur sort était tout aussi dur, mais, à partir du XVI ème siècle, leur voix devient audible.

    Cependant, s'il est peu légitime de faire démarrer au XVI ème siècle une étude sur la piraterie musulmane dans son ensemble, ce point de départ se défend mieux sans le cadre d'un sujet plus étroit, limité à la piraterie barbaresque ; non pas que la côte des barbaresques n'ait pas abrité de nids de pirates au Moyen-Age (elle en a abrité, en particulier Bougie) ; mais c'est au XVIème siècle qu'elle change de dimension, car c'est alors l'époque où la frontière entre la Chrétienté et l'Islam en arrive à coïncider à peut près avec la Méditerranée.

    Trois événements majeurs vont donner une dimension peut-être supérieure (et en tous cas plus symbolique) au corso barbaresque. Il s'agit des suites de la Reconquista, de l'échec du siège de Malte et de la bataille de Lépante.

    Suite......

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    • #3
      Les suites de la Reconquista
      La Reconquista, qui voit l'Espagne chasser les Maures de son territoire, et même prendre pied en Afrique du Nord, est un moment tournant. C'est pour se protéger de la menace espagnole que Selim Eutémi, Roi d'Alger, fait venir les Barberousse, qui l'étrangleront, prendront sa place, donneront une assise territoriale solide au corso algérois, et en feront un vassal turbulent mais intouchable du puissant Empire ottoman. Alger devient la capitale de l'esclavage blanc.

      La reconquête de leur pays par les Espagnols porte au rouge les relations entre la Croix et le Croissant ; les Musulmans, habitués à conquérir, sont ulcérés de subir une reconquête. La côte des barbaresques accueille une population de Morisques et de juifs chassés d'Espagne et brûlants de haine anti-chrétienne. L'affrontement prend des allures de guerre totale. Les discours de justification sont à leur apogée : les Espagnols se sentent en droit de reconquérir leur pays, les populations qu'ils chassent développent (et l'on développe en leur nom) un discours de victimisation.
      Les grandes défaites turques de Malte et Lépante

      L'échec du siège de Malte (1565) et la bataille de Lépante (1571) sont deux défaites ottomanes majeures, qui sonnent le glas des ambitions turques en Méditerrannée occidentale. Elles ont pour effet paradoxal d'aggraver la piraterie barbaresque en permettant aux Régences de gagner une indépendance de fait sur leur théorique suzerain, et de mener leurs opérations de prédation selon leurs intérêts propres, sans s'embarrasser outre-mesure des traités de paix que le Sultan peut signer, ni du besoin qu'il peut avoir des galères barbaresques pour des batailles classiques à objectif politique.

      Une "frontière totale"
      La Méditerranée devient un des terrains principaux de cet affrontement et l'un des plus symboliques. La frontière avec l'Islam, autrefois mouvante, suit maintenant une ligne nette qui se confond avec la mer. Celle-ci devient une "frontière totale", non seulement entre religions, mais aussi entre Terre et Eau ; entre Droit et non-droit (les pseudo-traités) ; entre guerre et paix (avec la notion de Jihad permanent, où le traité de paix précaire et payant interrompt la guerre au lieu que ce soit la guerre qui interrompte la paix) ; entre le Bien et le Mal (les pirates) ; entre aujourd'hui et hier (des marchés d'esclaves aujourd'hui à Alger comme dans dans l'Antiquité) ; entre Terre et Enfer ; et même entre vie et mort.
      En forçant à peine le trait, on pourrait presque dire que la Méditerranée est devenue une frontière entre ce monde et l'au-delà. Celui qui la traverse est en principe perdu ; celui qui la retraverse pour revenir doit subir une purification au moins physique : la quarantaine, destinée à éviter que la peste, endémique en Barbarie, n'aborde dans un port occidental ; la quarantaine se déroule en général dans un îlot dépendant de Malte, dont l'infrastructure médicale, la meilleure possible pour son temps, fait l'unanimité ; la lutte contre la peste est efficace : les grandes épidémies sont rares en occident ; on est même surpris de cette efficacité, sachant que les Hospitaliers ne disposent malgré tout que de moyens de prophylaxie rudimentaires. Notre hypothèse : étant donné sa quasi-absence de ressources, notamment en eau, l'archipel maltais abrite une faune particulièrement pauvre, et probablement pas d'animaux susceptibles de servir de réservoir entre deux épidémies humaines ; donc, une fois les malades d'un bateau morts (ou guéris) au lazaret, la transmission est possiblement arrêtée.

      Le passage par Malte implique aussi une purification morale dans certains cas : à Malte, l'Inquisition organise un procès au moindre soupçon de reniement, suivi généralement d'une pénitence et d'une réintégration dans la communauté chrétienne par une cérémonie solennelle à l'église.
      Pour les écrivains, on ne revient pas de la côte des Barbaresques sous la même identité. C'est même un procédé classique quand l'auteur a besoin d'un coup de théatre : nous apprenons alors que la vraie identité de tel personnage nous a été cachée dès le début, et qu'il est en réalité une toute autre personne, autrefois enlevée par les pirates et resurgissant comme d'entre les morts, après transformation complète de ses noms, prénoms, qualité et même physique (puisque même des parents ne l'avaient pas reconnu avant le coup de théatre). Ce procédé littéraire est présent dès le Moyen-Age, avec la chantefable d'auteur inconnu Aucassin et Nicolette, où cette dernière, enlevée par les pirates, esclave au début de l'oeuvre, se révêle à la fin être la fille du roi de Carthage.

      Suite......

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      • #4
        Essai d'évaluation de la force navale

        Cet essai a été tenté, pour la seule Alger, par l'archiviste Albert Devoulx[3]. Ses estimations[7] sont les suivantes :
        1510 : 45 bâtiments
        1530 : 60 navires
        1581 : 35 galiotes, 25 "frégates" (ici : petits navires à rames non pontés)
        1634 : 4 galères, 1 brigantin, 8 "frégates", 70 navires ronds
        1674 :26 batiments
        1676 : 28 navires
        1724 : 24 navires
        1737 : 17 navires
        1740 : 14 navires
        1744 : 6 navires
        1753 : 22 navires
        1759 : 30 navires
        1762 : 47 navires
        1769 : 15 navires
        1787 : 13 navires (noter que le chiffre de 1769 est presque reconstitué malgré les bonbardements espagnols de 1783 et 1784)
        1796 : 23 navires
        1801 : 5 navires
        1802 : 20 navires
        1817 (soit deux ans après une sévère expédition américaine contre Alger, dite "Second Barbary War"[8], et un an après l'expédition anglaise de Lord Exmouth) : 7 navires, 120 canons
        1818 : 11 navires
        1820 : 14 navires
        1827 : 16 navires (noter qu'Alger a quasiment reconstitué sa flotte depuis les sévères corrections de 1815 et 1816 ; elle est cependant sous blocus)

        Alger, principal nid de pirates barbaresques

        Alger est ici l'exemple et le symbole de la côte barbaresque dans son ensemble.
        C'est la Reconquista et l'expulsion des Morisques d'Espagne qui donne une nouvelle dimension à la violence maritime et côtière.
        L'installation des frères Barberousse crée la Régence d'Alger et donne au corso musulman une assise territoriale solide ; les autres régences et les autres ports de départ n'ont pas la même puissance (mais malgré tout, la côte des Barbaresques est un tout et Alger n'en est qu'une partie) ; en se faisant vassale de l'Empire Ottoman, Alger se soumet à une souveraineté lointaine et de plus en plus fictive, mais dont le seul nom tient en respect les puissances européennes ; cette circonstance explique probablement la longue survie de ce nid de pirates qui n'était pourtant pas, en soi, une puissance militaire telle que l'Europe ait dû s'en accommoder pendant trois siècles.

        Même un allié n'est pas à l'abri de la prédation, comme François 1er en fit l'expérience avec son allié Barberousse. A peine arrivés, à sa demande, à Toulon, les Barberousse se plaignent que leur troupe n'a rien à manger, et font comprendre qu'ils entendent vivre sur le pays. Claude Farine écrit :
        «... "Presque tous les habitants de Toulon durent quitter la ville, abandonner leurs maisons, leurs métiers... pour faire place à des alliés pires que des ennemis... Les matelots enlevaient les jeunes garçons et les emmenaient esclaves sur leurs vaisseaux. Toutes ces atrocités se commettaient impunément. Barberousse, en véritable maître, ne permettait pas qu'on sonnât les cloches dans les églises...»

        Les 30000 pirates de Barberousse sont installés à Toulon pendant tout l'hiver 1543/1544, la cathédrale est transformée en mosquée, mais pour autant, on ne les voit pas se battre pour le Roi de France. Celui-ci finit par payer une rançon pour obtenir leur départ (ref : Jacques Heers, livre cité en sources).
        Les raïs (capitaines) d'Alger font vivre toute la ville par le produit de leur courses, et sont à même de poser leurs conditions. Progressivement, ils s'affranchissent de tout pouvoir politique, même local, si bien que le butin devient un but en soi.

        Par exemple, vers 1580, d'après de Grammont (Ouvrage cité en bibliographie), Morat-Reis, un capitaine vénéré par ses pairs, "se vantait de ne pas connaître une nation au monde à laquelle il n'eut pris au moins deux vaisseaux",'' ajoutant que "tout ce qui se rencontrait sur mer était de bonne prise, et qu'on avait le droit de courir sus à son propre père."
        Le corso, devenu plus que jamais un but en soi, prend des proportions inouïes au début du XVIIème siècle. De Grammont signale : "De la fin de 1628 au milieu de 1634, la France, qui fut cependant la moins éprouvée des nations maritimes, perdit 80 navires d'une valeur d'environ 5 millions, et dut racheter ou laisser renier 1831 captifs." On rappellera que la France était alors en principe protégée par un Traité de Paix.

        La je m'arrête et je reposterai la suite un peu plus tard , En attendant bonne lecture ..........

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        • #5
          Un petit récapitulatif s'impose

          La Reconquista, qui voit l'Espagne chasser les Maures de son territoire, et même prendre pied en Afrique du Nord, est un moment tournant. C'est pour se protéger de la menace espagnole que Selim Eutémi, Roi d'Alger, fait venir les Barberousse, qui l'étrangleront, prendront sa place, donneront une assise territoriale solide au corso algérois, et en feront un vassal turbulent mais intouchable du puissant Empire ottoman. Alger devient la capitale de l'esclavage européenne.
          Les Algérois avait déjà une longue expérience maritime quant les Barberousse parvinrent a prendre le controle d'Alger . On peut voir aussi que l'influence Ottomans était quasiment inexistantes .
          L'installation des frères Barberousse crée la Régence d'Alger et donne au corso musulman une assise territoriale solide ; les autres régences et les autres ports de départ n'ont pas la même puissance (mais malgré tout, la côte des Barbaresques est un tout et Alger n'en est qu'une partie) ; en se faisant vassale de l'Empire Ottoman, Alger se soumet à une souveraineté lointaine et de plus en plus fictive, mais dont le seul nom tient en respect les puissances européennes ; cette circonstance explique probablement la longue survie de ce nid de pirates qui n'était pourtant pas, en soi, une puissance militaire telle que l'Europe ait dû s'en accommoder pendant trois siècles.
          Nous voyons ici que la stratégie , et le choix de l'alliance était judicieux , il s'agissait bien de guerre musulman contre chrétiens , donc de dire que c'était une occupation ottomane est faux .

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          • #6
            Je reprend .

            Autres repaires


            Alger est de loin le plus important des nids de pirates de la côte barbaresque, mais pas le seul. Il importe de citer également les Régences de Tripoli [9][10] et de Tunis[11][9][12], qui sont, comme Alger, des vassaux indisciplinés de l'Empire Ottoman.

            On ajoutera aussi le cas de Salé[13] [14](limitrophe de l'actuelle capitale du Maroc Rabat), pas soumise au sultan du Maroc, à Salé les pirates n' obéissent qu'à eux-mêmes . Les Régences respectent à peu près leurs traités avec les puissances chrétiennes, si bien que, prise globalement, la côte barbaresque ne se laisse gêner, dans ses activités de piraterie, par aucun traité "de paix".

            Des repaires d'importance moindre existaient encore et sont difficiles à recenser intégralement ; celui d'Anfa[15], aujourd'hui Casablanca, au XV ème siècle ; les Portugais en viennent définitivement à bout en 1515.

            On nommera aussi Tétouan au Maroc, et Porto Farina (aujourd'hui Ghar el Melh), dans l'actuelle Tunisie.


            Une hyper-piraterie

            On rappelera (voir le portail intitulé pirates corsaires flibustiers ) qu'un corsaire se bat pour son pays dans le cadre d'une guerre officiellement déclarée, qu'il ne s'attaque qu'à des navires du pays ennemi, et qu'il respecte le droit de la guerre, en particulier dans la personne des combattants prisonniers (qu'il n'est pas question de vendre comme esclaves) et des civils (qu'il n'est pas question d'aller capturer à terre, et qui doivent être relâchés dès que c'est matériellement possible s'ils se sont trouvés à bord d'un navire capturé).

            Celui qui refuse de telles règles n'est pas un corsaire, mais un pirate. Il en va de même a fortiori de celui qui refuse de s'attaquer aux ennemis de son pays tels que l'autorité politique légitime les lui désigne. La Régence d'Alger est dans ces deux cas (voir plus loin).

            Le corso barbaresque est une pure et simple piraterie, il va même peut-être au-delà de la piraterie, avec ses enlèvements massifs de civils destinés aux marchés aux esclaves. Il vous fait regretter les "bons vieux" pirates individuels : ceux-là au moins n'avaient en principe pas une cité-Etat derrière eux, et leur capacité de nuire était limitée par la faiblesse de leurs moyens.

            C'est une hyper-piraterie pratiquant sans limites une hyper-violence.


            Une industrie de l'horreur


            Terreur et rentabilité

            Tous les témoins directs du corso barbaresque nous décrivent une horreur totale : galériens ramant sous les coups sans boire, mutilations, tortures, viols de femmes et d'hommes.

            Comment se fait-il que les Barbaresques n'aient même pas éprouvé le besoin de respecter, dans la personne de l'esclave, le capital qu'ils y avaient investi ?

            On pense à plusieurs éléments de réponse.

            D'abord, aux époques où les esclaves pleuvent sur Alger et où un Chrétien coûte moins cher qu'un oignon, le remplacement est facile et le capital humain ne coûte rien.

            Absence d'une économie marchande significative

            De plus, Alger n'a pas d'industrie, et pratiquement pas d'économie. Ses esclaves ne produisent rien qui se vende et n'apportent pas de rentrées d'argent directes. Les esclaves domestiques apportent une facilité de vie et des services sexuels, ce qui les place, en termes de science économique, du côté de la consommation et non de la production marchande. Il en va de même, quoiqu'ils travaillent dur, des esclaves publics employés à des travaux de terrassement, puisque les murailles qu'ils construisent ou réparent ne sont pas destinées à être vendues. Ils s'inscrivent dans ce qu'on appellerait aujourd'hui la dépense publique. Ces esclaves sont d'ailleurs ceux qui ont coûté le moins cher, puisque le Régent les prélève gratuitement sur chaque prise à titre d'impôt.

            La question de savoir comment transformer l'esclave en monnaie sonnante et trébuchante reste donc entière à ce stade. Ce n'est que dans un deuxième temps, en forçant les choses, qu'il rapportera des sommes d'argent significatives. Ce n'est possible que de deux façons, et les deux impliquent une extrème brutalité. La première est de s'en servir comme galérien pour piller les navires chrétiens, dont la cargaison amènera enfin des rentrées d'argent. Pas question de ménager un galérien, sinon, il arrête de ramer avant épuisement.

            Suite.....

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            • #7
              A demain soir pour la suite

              La suite demain soir il y a suffisament de quoi lire pour aujourd'hui .

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              • #8
                Les galères


                Les galères sont hégémoniques dans la flotte barbaresque jusqu'au début du XVII ème siècle, époque où des Hollandais et Anglais y introduisent les vaisseaux à voiles.

                En 1581, Haedo note la présence de 35 galiotes comprenant entre 15 et 25 bancs, et d'environ 25 "frégates" (petits navires à rames et non pontés : des galères, donc, malgré le nom de frégates) de 8 à 13 bancs.

                Le rôle des galères diminue à mesure qu'augmente celui des vaisseaux de haut bord, mais il n'en finit pas de décliner avec lenteur. Notre vieille connaissance, Ali Bitchnin, Amiral des galères, est, en 1645 encore, l'homme le plus important d'Alger, même si nous ne connaissons pas, à l'unité près, le nombre de ses galères. Il en a toutefois envoyé une vingtaine en 1638 à ce qui s'avéra la désastreuse (pour lui) bataille de Velone ; vu ses réticences à y aller, il est probable qu'il n'y a pas envoyé toute sa flotte. Ces navires furent rejoints par huit galère tunisiennes.

                Ensuite, la force navale d'Alger a l'occasion d'être observée par deux diplomates français ; d'Arvieux, en 1673, observe 30 vaisseaux et 3 galères. Laugier de Tassy n'a pas omis, lui non plus, en se promenant dans le port (en 1718, rappelons le) , d'apprécier la force navale d'Alger ; il donne le chiffre de "20 vaisseaux tant grands que petits, qui ne diminue pas et qui augmente plutôt" (en effet, il en dresse un tableau avec leurs noms et leurs capitaines : il y en a 24) ; parmi ces "vaisseaux" (Laugier appelle ainsi tous les bâtiments présentant une réelle valeur militaire, par opposition aux cercueils flottants des particuliers) on remarque au moins deux galères, repérables parce que ce mot fait partie de leur nom (peut-être y en a-t-il plus sans que ce soit détectable par les informations du tableau de Laugier).

                Laugier ajoute que : "les particuliers arment pendant l'été plusieurs barques latines, et au moins 12 bâtiments à rames chaque année, dont il ne revient pas la moitié" ; ces chiffres sont considérables, puisqu'ils concernent la seule Alger, et que nous sommes dans une période de déclin du corso.

                Ces bâtiments à rames sont de la famille des galères au sens large, quoique parmi les plus petites. Et qui dit galères dit galériens.

                L'on observe donc, y compris durant la période de déclin relatif des galères, un nombre suffisant de ces bâtiments pour user bien des galériens, les petits bâtiments "dont il ne revient pas la moitié" n'étant pas les moins redoutables pour leurs rameurs. Rappellons que ceux-ci sont nombreux à bord, et qu'ils doivent souvent être remplacés.

                Rappellons aussi, à titre de comparaison, que Louis XIV n'a jamais possédé plus de 20 galères.


                Les rançons

                La seconde source de profit provient des rançons et, là encore, la plus extrème brutalité est de mise pour mobiliser les ordres charitables et faire monter les enchères.

                Jean Mathiex (article cité en sources) écrit : "A Alger, en 1690, le prix de rachat d'un esclave chrétien est de 400 livres en moyenne. Vers 1710, il passe à 200 piastres, puis à 500 en 1729 (environ 1500 livres). En 1778-1782, 4200 à 4500 livres pour les rachats individuels, 1800 à 2000 pour les rachats par groupes. Les prix continuent ensuite à monter : 2500 à 3000 livres en 1785, 3000 à 12000 livres (prix exceptionnel) en 1789, 4500 livres en 1793. Les prix ont décuplé en un siècle."

                On précisera que, parallèlement, le rôle des galères diminue jusqu'à disparaître, même en Alger. Le corso devient une pure et simple industrie de la rançon, d'autant plus rentable que le sort de l'otage est terrifiant. S'il l'était moins, les ordres charitables ne feraient pas de quêtes auprès du public pour racheter les captifs ; les rançons seraient chose rarissime (aussi rarissime que le fait de capturer le fils d'un Duc ou d'un Prince), et le corso barbaresque aurait probablement disparu avec les dernières galères. Or, à la veille de la Révolution, et même bien après, le corso se maintient. C'est un pur anachronisme, mais un anachronisme qui dure. Les prises sont certes moins nombreuses qu'à la grande époque, mais, comme les rançons sont dix fois plus élevées, l'un compense l'autre.

                Cas d'esclaves satisfaits de leur sort


                Les cas d'esclaves bien traités peuvent toutefois exister, selon les époques et les circonstances. Toutes les époques ne furent pas aussi dures que celle qu'observa Diego de Haedo, esclave en temps de peste et de famine. Certains esclaves domestiques s'entendant bien avec leur maître pouvaient avoir un sort plus enviable que celui qu'ils avaient eu avant leur capture, en tant que paysan ou pêcheur. Il fallait cependant que le maître soit assez riche pour que la maison soit bonne, et assez réaliste pour n'attendre dès le départ que des services domestiques et non une rançon royale. Ces bonnes places étaient d'ailleurs payantes. Pour les garder, l'esclave payait à son maître une partie du montant du rachat (ce qui interdisait de le vendre) sans toutefois compléter la somme (ce qui aurait entraîné libération, ou plutôt, ici, licenciement).

                D'autres captifs qui n'avaient pas lieu de se plaindre étaient ceux qui avaient une vraie qualification en rapport avec la mer : charpentier, gabier, marin qualifié ; ils étaient très recherchés ; celui qui avait l'étoffe d'un capitaine était repéré dès la capture, et intégré dans les rangs des raïs ; Joan Gonsales Cabana, capitaine catalan, est immédiatement acheté par Ali Bitchnin, qui lui propose le commandement d'un de ses navires et la main d'une belle renégate ; le Catalan accepte et devient un Morat (Mourad) Raïs, un de plus.

                A un bon capitaine, nul poste n' était fermé, pas même celui de Régent d'Alger Dernier emploi très enviable, celui de cabaretier. En effet, l'on considérait, à Alger, qu'un Musulman avait le droit de boire de l'alcool mais non d'en vendre. Sa vente était donc réservée aux chrétiens. Les bagnes comportaient tous une taverne, et même plusieurs (Emanuel d'Aranda, hôte involontaire du bagne d' Ali Bitchnin, use du pluriel pour en parler), fournies en alcool par des cargaisons capturées, et fréquentées non seulement par ceux des esclaves qui se trouvaient avoir quelques sous, mais aussi par les marins et les janissaires musulmans. Le patron de la taverne était bien l'esclave qui servait, même si les Turcs s'y entendaient à prélever des taxes.

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                Dernière modification par sandaryo, 11 septembre 2009, 01h10.

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                • #9
                  Les esclaves noirs


                  Evaluer l'importance de l'esclavage noir est difficile. On trouve mention d'esclaves noirs à l'occasion, quand un d'Aranda en croise un(e) par exemple. Il est difficile de dire si cet esclavage était numériquement faible (à notre avis, c'est le cas à Alger) , ou si les études sont manquantes (à notre avis, c'est le cas à Tunis et Tripoli, quoique les études manquantes commencent à sortir).

                  D'où l'intérêt de l'étude de Jean-Michel Deveau Esclaves noirs en Méditerranée, mentionnée en source avec lien.

                  L'esclavage noir est nettement plus important dans les Régences de Tunis et surtout de Tripoli, qui se veut "port du désert" en même temps que port de mer, et où aboutit une part importante de la traite transsaharienne[9] [10].

                  L'impossible régulation


                  Le corso barbaresque s'insère dans un cadre étatique (l'Empire ottoman et ses Régences indisciplinées) toujours assez fort pour protéger le pirate et toujours trop faible pour s'en faire obéir et le réguler. Il s'insère aussi dans le cadre d'une religion empreinte de juridisme, mais sans que ce juridisme apporte la moindre diminution de la violence, puisque précisément l'Infidèle, à la base, n'est pas sujet de droit, ce qui réduit à l'état de chiffon de papier les couteux "Traités de paix" que les puissances occientales peuvent conclure avec la Sublime Porte et ses Régences.
                  Dans les Régences barbaresques, le régulateur est introuvable. Ni l'autorité étatique, ni l'autorité religieuse ne jouent ce rôle bien que l'État soit présent pour faciliter la prédation (les puissances européennes n'auraient pas laissé subsister les Régences si la Sublime Porte n'avait pas été derrière), et l'autorité religieuse de même (avec l'idée de Jihad permanent).
                  Le corso se distingue donc très nettement de la course, et c'est à tort que certains auteurs utilisent ce terme à propos des entreprises barbaresques.


                  Absence de régulation étatique


                  En théorie, le régulateur devrait être l'État, mais quel État ? La Régence d'Alger est vassale supposée de l'Empire Ottoman, mais elle s'en affranchit largement et ne reconnait pas les traités de paix que celui-ci passe avec les puissances occidentales ; quand la Sublime Porte se mêle d'avoir ses propres critères d'intervention militaire navale, la révolte flambe parmi les raïs, attisée par exemple par un Ali Bitchin.
                  Il est d'ailleurs difficile de démêler jusqu'à quel point cette impuissance à maîtriser ses vassaux barbaresques est réelle et jusqu'à quel point elle est instrumentalisée. Que les raïs d'Alger soient de maniement difficile pour leur suzerain ottoman, c'est avéré. Cependant, cette impuissance à réguler, involontaire jusqu'à un certain point, est aussi rentable, puisque les puissances européennes sont contraintes de conclure des "Traités de paix" (payants) non pas avec Constantinople mais avec chacune des Régences vassales.
                  Ces Régences sont elles-mêmes souvent impuisantes lorsqu'il s'agit de réguler, puisque les Régents tremblent devant leur garde de janissaires, et que ces derniers sont payés grâce aux prises des raïs (capitaines pratiquant le corso).


                  Refus d'être en paix avec les amis de Constantinople


                  La question des traités de paix que l'Empire Ottoman, au niveau supérieur, passe avec la France montre les mêmes problèmes de façon récurrente. L'alliance franco-turque est une constante depuis François 1er et Soliman, mais la paix conclue avec la Sublime Porte ne cesse de soulever les protestations des raïs d'Alger, qu'elle prive de proies parmi les plus rentables (les riches navires marseillais), d'autant plus que les autres grandes puissances négocient elles-aussi des traités de paix, ce qui ne laisse plus, comme proies possibles, que les malheureux pêcheurs des régions côtières espagnoles et italiennes.

                  Ces traités sont une source de révolte récurrente. Tel est déjà le cas au XVIème siècle à l'époque des Beylerbeys, quand un Hassan Veneziano se met à la tête des raïs pour éliminer le Pacha nommé par le Sultan, venu avec pour instructions expresses de faire respecter les traités.

                  Vers 1620, Jans Janszoon alias Mourad raïs le jeune, trouvant qu'Alger passait trop libéralement des traités de paix, part opérer à partir de Salé au Maroc.

                  Ali Bitchnin, lui, reste à Alger, mais s'emploie à saboter les traités de paix avec la France.

                  En revanche, quand cette dernière est dirigée par Napoléon, la problématique s'inverse : cette fois-ci, la France est en guerre contre la Porte, mais les raïs se gardent prudemment d'attaquer les navires français (voir plus loin).

                  Suite.....

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                  • #10
                    Refus de combattre les ennemis de l'Etat


                    Un corsaire, rappellons le, se bat pour son pays dans le cadre d'une guerre officiellement déclarée.

                    Or, la Sublime Porte ne réussit presque jamais à obtenir des raïs d'Alger qu'ils prennent part à ses guerres. La résistance de l'Amiral des galères Ali Bitchnin , qui refuse à plusieurs reprises au Sultan le concours des galères algéroises, est caractéristique à cet égard.

                    En 1659, Constantinople croit avoir trouvé le moyen d'obtenir qu'Alger participe à ses guerres. Elle envoie une importante somme d'argent pour rémunérer cette participation. Las ! c'était une fausse bonne idée ! Le Pacha détourne une partie de la somme à son profit, déclenchant une des pires révoltes de l'histoire d'Alger, raïs et janissaires étant pour une fois alliés contre leur souverain supposé. Alger décide de remettre le pouvoir entre les mains de l'Aga (commandant en chef) des janissaires, le Pacha nommé par Constantinople n'étant plus qu'un ambassadeur.

                    Un autre exemple est le refus de combattre la France de Napoléon, très documenté. Constantinople s'estimait non sans raisons en guerre contre la France depuis que celle-ci s'était emparée de l'Egypte, partie intégrante de l'Empire ottoman. Le Sultan aurait voulu que les raïs algérois s'attaquent à elle en priorité.

                    Cependant, la France, quoique en guerre déclarée contre la Sublime Porte, obtient une totale tranquilité tant que règne Napoléon. Le Sultan de Constantinople a beau bombarder de décrets commitatoires son vassal d'Alger, rien n'y fait. L'archiviste Devoulx cite une lettre du 24 février 1801 écrite au nom du souverain turc :

                    « Il a appris cependant qu’après avoir incarcéré le consul français pendant un mois, vous l’aviez relaxé ; et que, lorsque vos corsaires rencontrent des navires français, ils ne les traitent pas comme les traiteraient des navires de la Sublime-Porte. Vous les épargnez et ils sont à l’abri de vos attaques. Il y a plus, vous réservez vos sévices et vos agressions pour les sujets de la Sublime-Porte, bien que vous soyez vous-mêmes ses vassaux ! »
                    Ces bonnes dispositions vis à vis de la France sont encouragées en 1802 par une visite au dey d'Alger, d'un officier de Napoléon lui signifiant que ce dernier a été capable d'envahir l'Egypte, et qu'il ne verrait aucune difficulté à détruire Alger si cette dernière venait à attaquer des navires français ou italiens.
                    Aux « premiers jours de ramdan de l’année 1230 » (du 7 au 16 août 1815), le souverain turc adresse un nouveau « firman » (décret) au Régent d’Alger pour exiger encore une fois que cessent les attaques contre les navires turcs ou amis de la Turquie :
                    « Les corsaires de la Régence d’Alger capturent les navires de commerce appartenant soit aux sujets de la Sublime-Porte, soit à des nations qui sont en paix avec elle ; ils réduisent en captivité leurs capitaines et leurs marins et s’emparent de leurs cargaisons. Cependant la Sublime-Porte est responsable de ces navires ; ils sont munis de sauf-conduits et elle est en paix avec eux. »
                    Même la qualité de musulman ne protège pas totalement le faible d'une attaque, puisque les raïs d'Alger ont eu l'occasion de capturer des navires tunisiens (Tunis étant également vassale de l'Empire ottoman, donc en principe à l'abri de ses "corsaires").

                    Pendant le traité de paix, la guerre continue


                    Laugier de Tassy relate la façon dont se passe la rencontre entre un barbaresque et un navire de commerce d'un pays ami. Le raïs n'a pas le droit d'interprêter les traités de paix de façon "laxiste". Il arraisonne donc le navire et lui demande de l'accompagner en Alger pour vérifications.

                    Celles-ci se déroulent devant le Consul du pays concerné. S'il s'avère que le navire n'aurait pas dû être arraisonné, on le laisse repartir, ou du moins on laisse repartir les passagers. Pour les marins, il leur faut prouver, oui, prouver, qu'ils ne se sont pas défendus, car alors, cet "acte de guerre" évident les rendrait bons pour l'esclavage.

                    A supposer donc, que, bien que protégé en principe par un coûteux traité de paix, le navire se soit laissé arraisonner sans résistance et conduire en Alger ; à supposer que les autorités du pays aient bien voulu reconnaître qu'il avait vocation à être libéré avec tout ou partie de ses occupants, il n'est pas pour autant tiré d'affaire, car la "paix" peut être rompue à tout moment, comme Laugier de Tassy nous l'explique :

                    En 1716, nous dit-il, les corsaires ne faisaient presque plus de prises. Donc :

                    "La milice fit assembler le Divan, où elle représenta qu'il ne se rencontraient plus de batiments ennemis à la mer. Que tous ceux qu'ils trouvaient étaient français, anglais ou hollandais ; que, le pays ne pouvant se soutenir sans faire de prises, il fallait déclarer la guerre à une des trois nations à la pluralité des voix."

                    C'est la Hollande qui est choisie.

                    "On arrêta donc en même temps un navire de cette nation qui était dans le port".

                    Le Dey en est bien désolé pour le Consul de Hollande, un homme qu'il apprécie :

                    "Il donna au Consul autant de temps qu'il en voulut pour rêgler ses affaires, il le consola et le plaignit. Ce consul était fort aimé du Dey, et il avait une réputation bien établie parmi les Chrétiens, les Turcs et les Maures."

                    Le Consul de Hollande est traité avec tous les ménagements possibles, mais les marins hollandais entrés en amis dans le port sont dirigés vers les bagnes d'Alger.

                    Suite.....

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                    • #11
                      Merci Sandaryo pour cet article.

                      Il serait bon maintenant d'en faire la critique.

                      -L'auteur note: "Le corso barbaresque n'inspire ni repentance ni regrets aux héritiers des pirates.
                      La marine algérienne a donné des noms de pirates à plusieurs de ses corvettes : Mourad Raïs, Raïs Hamidou, d'autres encore
                      . Le Raïs Hamidou a sa statue à Alger."

                      *Moi, c'est ce que j'appelle la grosse blague 2009.

                      D'abord, Murad Raïs et Raïs Hamidou n'étaient pas des pirates mais des corsaires. La différence est de taille, croyez-moi!!

                      Secundo, plusieurs frégates françaises de combat portent des noms de corsaires et même d'anciens pirates!
                      Ex: les frégates Duquesne (frégate lance-missiles), Cassard ou Jean Bart (anti-aériennes) ou encore Surcouf (frégate type La Fayette).

                      -L'auteur poursuit: "L'Algérie continue à exiger la repentance de la France pour la période de colonisation, qui seule à mis fin à la piraterie".

                      *Il nous fait toujours rire!

                      Toujours pas de piraterie en Algérie, on est d'accord, mais plutôt des corsaires.
                      Secundo, alors que la France mettait fin à la course algérienne (en profond déclin depuis le bombardement d'Alger par Lord Exmouth en 1816), la course se poursuivait ailleurs et ne fut définitivement abolie qu'en 1856.
                      Ah! les beaux prétextes pour envahir un pays!
                      Mais où sont donc passées les armes de destruction massive de Sadam Hussein? La bonne blague, quoi. Tout le monde serait plié de rire s'il n'y avait pas eu des centaines de milliers d'Irakiens sous terre.
                      Pareil pour nos ancètres qui n'avaient sans doute pas la force d'en rire après les massacres coloniaux.

                      Je crois que ce n'est même pas utile de poursuivre la critique. Cet article est tout simplement de mauvaise foi et ne mérite pas d'être discuté sérieusement.

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                      • #12
                        "L'Algérie continue à exiger la repentance de la France pour la période de colonisation, qui seule à mis fin à la piraterie".

                        je dirai que c'est la faiblesse de la force navale d'Alger (après la bataille de Navarin ) qui a faciliter la chute d'alger
                        وقد طوَّفتُ في الآفاق حتى رضيتُ من الغنيمة بالإيابِ

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                        • #13
                          Alors, pour en finir avec tous ces mensonges sur l'Algérie pirate, je vais vous citer un extrait d'un "Dictionnaire de droit international public et privé" publié en 1885.

                          A l'article "course", nous lisons:

                          Expédition de corsaires ou de bâtiments armés par de simples particuliers, avec l'autorisation du gouvernement, dans le but d'opérer la capture en mer des bâtiments de commerce et de marchandises appartenant aux ressortissants d'une nation ennemie"

                          C'est ce que faisaient les Algériens, par exemple (et j'insiste sur le par exemple) avant 1830.

                          L'auteur de l'article poursuit:
                          [Le 15 avril 1856, les puissances européennes] ont signé une déclaration commune proclamant que la course est et demeure abolie.

                          Le texte a été signé par la France, l'Angleterre, l'Autriche, la Prusse, la Russie, la Sardaigne et l'Empire Ottoman puis ratifié par tous les Etats de l'Europe et par quelques Etats de l'Amérique.

                          Et devinez quoi, les Etats-Unis ont refusé de le signer.
                          Comme ce pays avait alors une marine de guerre faible et une marine de commerce forte, il a refusé l'abolition tant que les navires de guerre auraient le droit de s'emparer de navires de commerce, en temps de guerre.

                          Lorsqu'on a proposé d'interdire également les prises de navires en temps de guerre, c'est l'Angleterre qui, cette fois-ci, a refusé (elle avait la plus grande flotte de guerre à l'époque).

                          Admirez donc l'hypocrisie, encore une fois, des puissances occidentales.

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                          • #14
                            Toute l'Europe s'est faite une gloire de la chute du soi disant nid de pirates algériens, alors qu'eux, Européens et Etatsuniens, continuaient à faire les corsaires sans que cela ne soit particulièrement scandaleux.
                            Le bon vieux deux poids, deux mesures!

                            Magnifique, n'est-ce pas?!!!

                            Bouberita, quand tu dis que la défaite de Navarin a affaibli la marine algérienne, c'est vrai mais cela n'explique pas la chute de la province ottomane d'Algérie.

                            Rappelons-nous en effet que la victoire française du 5 juillet 1830 fut avant tout une victoire terrestre puisque l'armée française a débarqué à Sidi Fredj, le 14 juin et qu'elle a avancé par terre jusqu'à Alger.

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                            • #15
                              Belle analyse mes amis , mais vous oublier que j'avais prevenu au tout début de ne pas vous foccaliser sur le parti pris de cette article , ( J'ai due censuré des rajouts quelques peu affigeant comme " le terrible napoléon" , " la redoutable France", "la lacheté barbaresque" et j'en passe . En ce mois de Ramadhan on est un peu susceptible nous autres !

                              Le seul nom de pirate que je connaissait et qui été utilisé par la marine française c'était "surcouf " . A la fin de cette article il serait intérressant d'apporter des éléments contredisant celui-ci .

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