Le lexique de la liberté est vaste. Les révolutions le nourrissent sans cesse, y introduisent des vocables inédits (comme le fameux « Dégage ! ») ou des définitions nouvelles. Nous avons demandé à des intellectuels, des écrivains et des journalistes, témoins éclairés du printemps arabe, de nous expliquer, à la lumière de l’actualité, ces « mots de la liberté ».
Autonomie
Ce que révèlent les révolutions arabes de l’année 2011, c’est la montée historique d’un nouvel acteur social, proprement moderne. Cet acteur se définit par le fait qu’il accède, au bout d’un long cheminement, à une triple autonomie. Autonomie physique en tant qu’individu, dont le projet de vie, défini par lui-même, n’est plus tributaire de sa communauté traditionnelle (famille élargie, clan, tribu, village, corporation). Autonomie psychique en tant que sujet, qui situe le principe de sa pensée et de son action dans sa propre conscience, et non pas dans la volonté divine, qu’il concevait auparavant comme déterminant son destin à sa place. Enfin autonomie politique en tant que citoyen, qui dénie au pouvoir toute légitimité transcendante – surnaturelle (divine) ou sacralisée (nationale) – et le considère désormais comme un simple mandataire de la volonté du peuple.
M.H.
Bouazizi
Rien ne prédestinait Mohammad Bouazizi à devenir un mythe, « l’étincelle » – c’est le titre d’un essai de Tahar Ben Jelloun – qui, en Tunisie, a déclenché la révolution. Fils d’une famille de sept enfants, marchand ambulant, le jeune homme pousse sa charrette pour vendre fruits et légumes. Ne possédant pas d’autorisation officielle, il subit les vexations d’une administration à laquelle il ne peut verser de pots-de-vin. Le 17 décembre 2010, on lui confisque son outil de travail. Il essaie de plaider sa cause auprès du gouvernorat, mais il s’y fait insulter et chasser. Humilié, Mohammad Bouazizi décide alors de s’immoler par le feu devant le siège du gouvernorat. L’acte désespéré de cet être qui « préfère mourir plutôt que de vivre dans la misère » provoque la colère des habitants de Sidi Bouzid. Malgré la répression, le mouvement s’étend spontanément à d’autres municipalités du pays. À l’appel de militants syndicaux, la révolte atteint la capitale le 27 décembre… En guise d’hommage, des avenues, des places portent désormais son nom, notamment à Tunis et à Paris. Un marchand des quatre saisons aura fait le printemps.
A.N.
Constituante
Pour fonder un État de droit à l’ère de la démocratie, une Assemblée constituante élue au suffrage universel paraît être la voie royale pour élaborer et voter la loi organique. La Constitution pourrait être préparée par des commissions et soumise ultérieurement à un référendum populaire, mais les représentants des divers partis sont seuls à pouvoir établir le consensus légitime. Dans « l’Orient compliqué », les choses ne sont pas aussi simples. À supposer neutralisées par un contrôle international violence et fraude, la question se pose : quelle loi électorale pour choisir les constituants ? Seule une loi complexe prenant en compte la représentation des minorités religieuses, nationales et linguistiques sans léser la majorité et en ne mettant pas en péril l’efficience du régime à naître est la bienvenue. Mais quels sages pourront lui donner le jour ?
Autre problème : et si la souveraineté populaire, cœur battant de la démocratie, donnait le pouvoir à des ennemis de la liberté, de l’égalité et des droits de l’homme, à un courant qui obstrue toute alternance ? Il serait donc légitime de se méfier d’un peuple trop longtemps opprimé, donné en pâture aux intégrismes et dont les organisations et les élites ont été continuellement décimées. Hitler lui-même est venu au pouvoir par la voie électorale. Le printemps arabe a donc, à l’heure où l’Occident souffre de plus d’un mal, à répondre à des défis qui ne lui sont pas seulement propres, mais qui pourraient grever l’avenir des sociétés humaines.
F.S.
Dégage ! (Erhal !)
Scandées par des millions d’Égyptiens durant les 18 jours de la révolution du 25 janvier, ces deux syllabes resteront un des mots-clés de l’histoire moderne de l’Égypte. Pour la première fois depuis que Ménès a unifié les royaumes du Nord et du Sud, le peuple d’Égypte osait défier ouvertement le « Pharaon » et réclamer sans appel son départ du pouvoir. Jusqu’alors, les révoltes étaient généralement dirigées contre l’occupant étranger, comme les deux révoltes du Caire contre l’armée de Bonaparte, et la célèbre révolution de 1919 contre les Britanniques. En outre, de multiples émeutes du pain et des mutineries contre la misère et la cherté de la vie ont jalonné le XXe siècle. Mais un soulèvement des masses populaires contre Pharaon, considéré comme le père de la nation, et vénéré depuis des millénaires en tant que divinité intouchable, constitue une véritable première dans l’histoire de l’Égypte. En demandant à Moubarak de « dégager », le peuple égyptien a brisé un tabou que les générations précédentes n’ont jamais eu le courage de remettre en cause : celui du culte de la personnalité. Il s’est débarrassé d’une culture ancrée dans l’inconscient collectif et a ouvert la voie à une transformation radicale de son existence et, au-delà, à un bouleversement de la carte politique de l’ensemble du monde arabe.
C. C.
Économie
Pendant des semaines, al-Jazira a repris en boucle une petite scène où l’on voyait une Tunisienne, proche de l’évanouissement, murmurer que ses quatre fils étaient au chômage : c’était le drame de sa vie. Les hommes qui l’entouraient hochaient la tête d’un air grave. Pour eux aussi, c’était là l’essentiel. Depuis le début du printemps arabe, dès qu’on interroge des citoyens égyptiens, yéménites ou marocains, c’est toujours la question économique qui prend le pas sur les autres. Bien sûr, on parle globalement de dignité, de démocratie, de rejet du despotisme, etc., mais quand on s’adresse à un individu donné, quand on lui demande pourquoi il est en colère, qu’est-ce qui le pousse à manifester, on peut être sûr qu’il évoquera la cherté de la vie, la difficulté à trouver un logement, et le chômage. Ceux qui réclament aujourd’hui le pouvoir sont-ils bien conscients de cette donnée ? Ont-ils un plan pour fournir un emploi à chaque Égyptien qui entre sur le marché du travail ? Comprennent-ils la question de l’eau au Yémen ? Ont-ils une alternative au tout-tourisme en Tunisie ? Mille questions similaires attendent d’être traitées. Ce sont elles qui décideront de l’avenir du printemps arabe.
F.L.
Facebook
On le savait agora, Hyde Park, retrouvailles, partage… Mais voici le « livre des visages » investi d’une nouvelle mission, pas moins que réveiller et bouleverser le monde arabe. La « révolution Facebook » est en marche depuis bientôt un an. Un manifestant égyptien a même ainsi baptisé sa fille, née pendant le printemps du Caire ! Difficile de croire que Zuckerberg, l’inventeur du réseau intercampus à Harvard, aurait imaginé qu’un jour son outil de génie servirait à organiser des manifestations à Alexandrie ou à Taëz, avec une liste des délateurs du pouvoir à éviter dans un quartier de Tunis ou de Tripoli, ou des avertissements adressés à des manifestants dans un faubourg de Damas, du genre : « Attention, franc-tireur embusqué sur le toit du bureau des Postes… ».
En plus de cette logistique de combat, Facebook remplit le vide laissé par une opposition souvent désuète. Les réseaux sociaux et les blogs tenus par les « cyberactivistes » informent en continu (on peut toujours compter sur des amis plus matinaux qui font pour vous le tour de la presse…), mobilisent, coordonnent (les rendez-vous, les slogans des vendredis, les manifs, les sit-in, les manifestes, voire l’appel aux « like » pour protéger un site…), jouent aux sondeurs d’opinion pour ensuite évaluer et faire l’autocritique. Que reste-t-il à faire pour un parti politique ? Défi à venir : Facebook, si efficace dans le combat pour la liberté contre un régime dictatorial qui monopolise les médias, pourra-t-il convoyer au mieux la construction démocratique souhaitée quand il n’est plus le seul à diffuser la bonne parole ?
J.D.
Femmes
À Deraa, ce sont les femmes qui, les premières, se sont rassemblées pour exprimer leur révolte après la disparition de leurs enfants. Quand on sait que dans les dictatures, les femmes sont les plus sensibles, pour des raisons dit-on œdipiennes, au charisme du chef, le régime aurait dû réagir en châtiant les coupables des abus commis à l’encontre des enfants. Mais il a laissé pourrir, et la gangrène s’est répandue dans tout le pays. Nous vivons dans des contrées où les hommes ne semblent capables d’affirmer leur virilité qu’en écrasant les femmes. Partout, pendant le printemps arabe, les femmes sont descendues dans la rue. Place Tahrir, elles priaient aux côtés des hommes. Le prix Nobel de la paix attribué à l’opposante yéménite, les trois cents femmes en tête de liste aux élections tunisiennes sont la preuve de l’engagement de la gent féminine dans ces révolutions dont elles sont les actrices… Même l’Arabie saoudite, qui sent gronder la révolte féminine, vient d’accorder aux femmes le droit de vote. Largesse dérisoire quand on sait qu’elles n’ont toujours pas le droit de conduire, pire, qu’elles n’ont le droit de se déplacer qu’avec la permission de leur « gardien ». Mais le printemps est sans aucun doute leur saison.
F.A.D.
Gavroche
Les échos des manifestations du Caire et de Tunis sont parvenus jusqu’à Deraa, ville des confins, au sud de la Syrie. « Le peuple veut la chute du régime. » Par jeu, par provocation, les enfants de Deraa ont gribouillé le slogan sur un mur sans se douter que celui-ci avait des oreilles. Aussitôt raflés par les sbires du régime, ils ont subi des tortures inouïes et leurs parents sont restés sans nouvelles. Quand ils les ont réclamés, on les a envoyé en « fabriquer d’autres ». Dans Deraa assiégée depuis lors, seuls les enfants filaient à travers les barrages pour dénicher des vivres. Hamza el-Khatib avait 13 ans quand il a été pris. Gavroche est mort d’une seule balle sur les barricades de l’insurrection républicaine de 1832. La faute à Rousseau. Hamza a été torturé. On l’a fouetté, battu, brûlé, on lui a broyé les os, on l’a émasculé. Quelle cause suprême justifie pareille perversion ?
F.A.D.
Autonomie
Ce que révèlent les révolutions arabes de l’année 2011, c’est la montée historique d’un nouvel acteur social, proprement moderne. Cet acteur se définit par le fait qu’il accède, au bout d’un long cheminement, à une triple autonomie. Autonomie physique en tant qu’individu, dont le projet de vie, défini par lui-même, n’est plus tributaire de sa communauté traditionnelle (famille élargie, clan, tribu, village, corporation). Autonomie psychique en tant que sujet, qui situe le principe de sa pensée et de son action dans sa propre conscience, et non pas dans la volonté divine, qu’il concevait auparavant comme déterminant son destin à sa place. Enfin autonomie politique en tant que citoyen, qui dénie au pouvoir toute légitimité transcendante – surnaturelle (divine) ou sacralisée (nationale) – et le considère désormais comme un simple mandataire de la volonté du peuple.
M.H.
Bouazizi
Rien ne prédestinait Mohammad Bouazizi à devenir un mythe, « l’étincelle » – c’est le titre d’un essai de Tahar Ben Jelloun – qui, en Tunisie, a déclenché la révolution. Fils d’une famille de sept enfants, marchand ambulant, le jeune homme pousse sa charrette pour vendre fruits et légumes. Ne possédant pas d’autorisation officielle, il subit les vexations d’une administration à laquelle il ne peut verser de pots-de-vin. Le 17 décembre 2010, on lui confisque son outil de travail. Il essaie de plaider sa cause auprès du gouvernorat, mais il s’y fait insulter et chasser. Humilié, Mohammad Bouazizi décide alors de s’immoler par le feu devant le siège du gouvernorat. L’acte désespéré de cet être qui « préfère mourir plutôt que de vivre dans la misère » provoque la colère des habitants de Sidi Bouzid. Malgré la répression, le mouvement s’étend spontanément à d’autres municipalités du pays. À l’appel de militants syndicaux, la révolte atteint la capitale le 27 décembre… En guise d’hommage, des avenues, des places portent désormais son nom, notamment à Tunis et à Paris. Un marchand des quatre saisons aura fait le printemps.
A.N.
Constituante
Pour fonder un État de droit à l’ère de la démocratie, une Assemblée constituante élue au suffrage universel paraît être la voie royale pour élaborer et voter la loi organique. La Constitution pourrait être préparée par des commissions et soumise ultérieurement à un référendum populaire, mais les représentants des divers partis sont seuls à pouvoir établir le consensus légitime. Dans « l’Orient compliqué », les choses ne sont pas aussi simples. À supposer neutralisées par un contrôle international violence et fraude, la question se pose : quelle loi électorale pour choisir les constituants ? Seule une loi complexe prenant en compte la représentation des minorités religieuses, nationales et linguistiques sans léser la majorité et en ne mettant pas en péril l’efficience du régime à naître est la bienvenue. Mais quels sages pourront lui donner le jour ?
Autre problème : et si la souveraineté populaire, cœur battant de la démocratie, donnait le pouvoir à des ennemis de la liberté, de l’égalité et des droits de l’homme, à un courant qui obstrue toute alternance ? Il serait donc légitime de se méfier d’un peuple trop longtemps opprimé, donné en pâture aux intégrismes et dont les organisations et les élites ont été continuellement décimées. Hitler lui-même est venu au pouvoir par la voie électorale. Le printemps arabe a donc, à l’heure où l’Occident souffre de plus d’un mal, à répondre à des défis qui ne lui sont pas seulement propres, mais qui pourraient grever l’avenir des sociétés humaines.
F.S.
Dégage ! (Erhal !)
Scandées par des millions d’Égyptiens durant les 18 jours de la révolution du 25 janvier, ces deux syllabes resteront un des mots-clés de l’histoire moderne de l’Égypte. Pour la première fois depuis que Ménès a unifié les royaumes du Nord et du Sud, le peuple d’Égypte osait défier ouvertement le « Pharaon » et réclamer sans appel son départ du pouvoir. Jusqu’alors, les révoltes étaient généralement dirigées contre l’occupant étranger, comme les deux révoltes du Caire contre l’armée de Bonaparte, et la célèbre révolution de 1919 contre les Britanniques. En outre, de multiples émeutes du pain et des mutineries contre la misère et la cherté de la vie ont jalonné le XXe siècle. Mais un soulèvement des masses populaires contre Pharaon, considéré comme le père de la nation, et vénéré depuis des millénaires en tant que divinité intouchable, constitue une véritable première dans l’histoire de l’Égypte. En demandant à Moubarak de « dégager », le peuple égyptien a brisé un tabou que les générations précédentes n’ont jamais eu le courage de remettre en cause : celui du culte de la personnalité. Il s’est débarrassé d’une culture ancrée dans l’inconscient collectif et a ouvert la voie à une transformation radicale de son existence et, au-delà, à un bouleversement de la carte politique de l’ensemble du monde arabe.
C. C.
Économie
Pendant des semaines, al-Jazira a repris en boucle une petite scène où l’on voyait une Tunisienne, proche de l’évanouissement, murmurer que ses quatre fils étaient au chômage : c’était le drame de sa vie. Les hommes qui l’entouraient hochaient la tête d’un air grave. Pour eux aussi, c’était là l’essentiel. Depuis le début du printemps arabe, dès qu’on interroge des citoyens égyptiens, yéménites ou marocains, c’est toujours la question économique qui prend le pas sur les autres. Bien sûr, on parle globalement de dignité, de démocratie, de rejet du despotisme, etc., mais quand on s’adresse à un individu donné, quand on lui demande pourquoi il est en colère, qu’est-ce qui le pousse à manifester, on peut être sûr qu’il évoquera la cherté de la vie, la difficulté à trouver un logement, et le chômage. Ceux qui réclament aujourd’hui le pouvoir sont-ils bien conscients de cette donnée ? Ont-ils un plan pour fournir un emploi à chaque Égyptien qui entre sur le marché du travail ? Comprennent-ils la question de l’eau au Yémen ? Ont-ils une alternative au tout-tourisme en Tunisie ? Mille questions similaires attendent d’être traitées. Ce sont elles qui décideront de l’avenir du printemps arabe.
F.L.
On le savait agora, Hyde Park, retrouvailles, partage… Mais voici le « livre des visages » investi d’une nouvelle mission, pas moins que réveiller et bouleverser le monde arabe. La « révolution Facebook » est en marche depuis bientôt un an. Un manifestant égyptien a même ainsi baptisé sa fille, née pendant le printemps du Caire ! Difficile de croire que Zuckerberg, l’inventeur du réseau intercampus à Harvard, aurait imaginé qu’un jour son outil de génie servirait à organiser des manifestations à Alexandrie ou à Taëz, avec une liste des délateurs du pouvoir à éviter dans un quartier de Tunis ou de Tripoli, ou des avertissements adressés à des manifestants dans un faubourg de Damas, du genre : « Attention, franc-tireur embusqué sur le toit du bureau des Postes… ».
En plus de cette logistique de combat, Facebook remplit le vide laissé par une opposition souvent désuète. Les réseaux sociaux et les blogs tenus par les « cyberactivistes » informent en continu (on peut toujours compter sur des amis plus matinaux qui font pour vous le tour de la presse…), mobilisent, coordonnent (les rendez-vous, les slogans des vendredis, les manifs, les sit-in, les manifestes, voire l’appel aux « like » pour protéger un site…), jouent aux sondeurs d’opinion pour ensuite évaluer et faire l’autocritique. Que reste-t-il à faire pour un parti politique ? Défi à venir : Facebook, si efficace dans le combat pour la liberté contre un régime dictatorial qui monopolise les médias, pourra-t-il convoyer au mieux la construction démocratique souhaitée quand il n’est plus le seul à diffuser la bonne parole ?
J.D.
Femmes
À Deraa, ce sont les femmes qui, les premières, se sont rassemblées pour exprimer leur révolte après la disparition de leurs enfants. Quand on sait que dans les dictatures, les femmes sont les plus sensibles, pour des raisons dit-on œdipiennes, au charisme du chef, le régime aurait dû réagir en châtiant les coupables des abus commis à l’encontre des enfants. Mais il a laissé pourrir, et la gangrène s’est répandue dans tout le pays. Nous vivons dans des contrées où les hommes ne semblent capables d’affirmer leur virilité qu’en écrasant les femmes. Partout, pendant le printemps arabe, les femmes sont descendues dans la rue. Place Tahrir, elles priaient aux côtés des hommes. Le prix Nobel de la paix attribué à l’opposante yéménite, les trois cents femmes en tête de liste aux élections tunisiennes sont la preuve de l’engagement de la gent féminine dans ces révolutions dont elles sont les actrices… Même l’Arabie saoudite, qui sent gronder la révolte féminine, vient d’accorder aux femmes le droit de vote. Largesse dérisoire quand on sait qu’elles n’ont toujours pas le droit de conduire, pire, qu’elles n’ont le droit de se déplacer qu’avec la permission de leur « gardien ». Mais le printemps est sans aucun doute leur saison.
F.A.D.
Gavroche
Les échos des manifestations du Caire et de Tunis sont parvenus jusqu’à Deraa, ville des confins, au sud de la Syrie. « Le peuple veut la chute du régime. » Par jeu, par provocation, les enfants de Deraa ont gribouillé le slogan sur un mur sans se douter que celui-ci avait des oreilles. Aussitôt raflés par les sbires du régime, ils ont subi des tortures inouïes et leurs parents sont restés sans nouvelles. Quand ils les ont réclamés, on les a envoyé en « fabriquer d’autres ». Dans Deraa assiégée depuis lors, seuls les enfants filaient à travers les barrages pour dénicher des vivres. Hamza el-Khatib avait 13 ans quand il a été pris. Gavroche est mort d’une seule balle sur les barricades de l’insurrection républicaine de 1832. La faute à Rousseau. Hamza a été torturé. On l’a fouetté, battu, brûlé, on lui a broyé les os, on l’a émasculé. Quelle cause suprême justifie pareille perversion ?
F.A.D.
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