• "Torturés par Le Pen" par Hamid Bousselham
Extraits de
TORTURÉS PAR LE PEN
La guerre d’Algérie (1954 - 1962)
Introduction
"En 1943, rue Lauriston, des Français criaient d’angoisse et de douleur, la France entière les entendait.
En 1958, à Alger, on torture régulièrement, systématiquement, tout le monde le sait, de M. Lacoste aux cultivateurs de l’Aveyron, personne n’en parla, ou presque. "
Jean-Paul Sartre
Une Victoire
Oui, Jean Marie Le Pen a torturé en Algérie, et lui-même a admis avoir usé de la torture en déclarant notamment dans un entretien accordé au quotidien « Combat », le 9 novembre 1962 :
"Je n’ai rien à cacher. J’ai torturé parce qu’il fallait le faire. Quand on vous amène quelqu’un qui vient de poser vingt bombes qui peuvent exploser d’un moment à l’autre et qu’il ne veut pas parler, il faut employer des moyens exceptionnels pour l’y contraindre. C’est celui qui s’y refuse qui est le criminel car il a sur les mains le sang de dizaines de victimes dont la mort aurait pu être évitée".
Selon le journal officiel français du 12 juin 1957, le député parachutiste Le Pen déclarait également « J’étais à Alger officier de renseignement (...), comme tel je dois être aux yeux d’un certain nombre de mes collègues ce qui pourrait être le mélange d’un officier SS et d’un agent de la Gestapo. Ce métier, je l’ai fait... »
Tous les témoignages des algériens torturés par Le Pen rejoignirent celui de Mohamed Louli, arrêté à Alger le 14 février 1957, et emmené par Le Pen à la villa des Roses, Boulevard Galliéni, aujourd’hui 74 boulevard Bougara :
« Le Pen m’a torturé. Oui, lui personnellement à l’électricité et à l’eau. Et je l’ai vu aussi torturer d’autres détenus ».
Le commissaire principal R. Gilles dans un rapport à M. l’inspecteur général de l’administration en mission extraordinaire, préfet d’Alger, rapportait ceci : « J’ai l’honneur de porter à votre connaissance qu’à l’issue de son arrestation et de sa détention, du 8 au 31 mars, par les parachutistes du 1er REP, le nommé Yahiaoui Abdenour, né le 3 juillet 1938, domicilié 53 avenue Lavigerie à Kouba, s’est présenté devant moi et m’a déclaré avoir été l’objet de sévices de la part du Lieutenant Le Pen, et sur son ordre.
En particulier, lors de son arrestation, des fils électriques furent reliés aux lobes de ses oreilles. Le lieutenant Le Pen lui-même faisait fonctionner une magnéto à manivelles à l’aide de laquelle il envoyait des décharges électriques dans le corps. En présence de ce même officier, le jeune Yahiaoui fut frappé avec un nerf de bœuf, et y fut attaché nu sur un banc, pieds et poignets liés, et il dut y ingurgiter de force une certaine quantité d’eau.
Enfin, il reste cinq jours enfermé dans un "tombeau", trou creusé dans le sol et fermé par des barbelés, au 74 boulevard Galliéni où il était détenu. A la suite de ces cinq jours de "tombeau", il ne fut plus maltraité jusqu’à sa libération. »
Jean-Marie Le Pen doit être poursuivi pour les actes de torture qu’il a fait subir à nos compatriotes.
Tout comme le président du Front National, le tortionnaire Jean-Marie Le Pen, le général Bigeard, l’assassin de Larbi Ben M’hidi, le « Jean Moulin » algérien, le général Massu et Maurice Papon doivent être jugés comme criminels de guerre. Klaus Barbie et Papon ont été jugés en France. Il serait également juste que Le Pen, Massu, Bigeard, Papon et les autres soient jugés pour les mêmes crimes que Barbie par des tribunaux algériens et français.
Nous sommes en droit d’exiger un procès Nuremberg du colonialisme français à Alger pour les juger pour crimes contre l’humanité.
Mme Vve Mouloud MESSAOUD
70 ans. Mère de Hadj Ali Mouloud, lâchement assassiné.
En 1957, deux années après la mort de mon mari Mouloud Messaoud dit Lounès, ancien combattant de la première Guerre Mondiale, et mobilisé entre 1939 et 1945, le lieutenant Jean Marie Le Pen et ses militaires ont débarqué chez moi, au 22, rue d’Amourah, à Belcourt, sans aucun motif. Jean Marie Le Pen a donné des ordres à ses paras, pour qu’on m’attache avec du fil de fer, de 10h du matin à 16h, dans la cour de ma maison. J’ai reçu des coups de crosses sur la tête, derrière la nuque, dont je garde jusqu’à présent des séquelles. Ma pauvre fille de 19 ans qui était cardiaque, et qui se faisait soigner par des religieuses dans le quartier du ruisseau, près de mon habitation, voyait sa pauvre mère se faire torturer sous ses yeux. Après un choc terrible, un an après, elle était décédée. Pendant la perquisition à mon domicile, le carnet militaire de mon mari, le carnet de pension et quatre médailles de la première Guerre Mondiale m’ont été dérobés. La maison a été entièrement saccagée. Un de mes fils, Hadj Ali Mouloud, a été embarqué par les militaires du lieutenant Le Pen, à la villa des Roses, à El-Biar (Alger). Après avoir subi des tortures, il a été lâchement assassiné. D’autres témoins qui étaient avec mon fils Hadj Ali Mouloud, à la villa des Roses, le centre de torture de Le Pen, m’ont confirmé que mon fils Hadj Ali a été lâchement assassiné, et que le Pen leur aurait dit : « Voilà ce qui arrive à ceux qui tentent de m’échapper, je suis prêt à me farcir un bougnoule à chaque petit déjeuner, vous les ratons, vous ne comprenez qu’un seul langage, l’insulte, les coups, et quand vous ne voulez pas comprendre que vous êtes à ma botte, je vous élimine. ». Mon fils Mustapha, alors âgé de 15 ans, quand le lieutenant Le Pen est venu chez moi, ayant appris que sa mère avait été tabassée et torturée, et que son frère Hadj Ali était mort sous les tortures, mon fils en a perdu la raison. Retrouvé errant près de la frontière tunisienne en 1963, il est décédé à l’hôpital psychiatrique de Blida en 1980, après 17 ans d’hospitalisation. Dire que ce tortionnaire de Le Pen est aujourd’hui un homme politique français influent, à tête d’un parti, et qu’il n’a jamais été jugé pour ses crimes racistes qui sont de véritables crimes contre l’humanité. Je suis en tout cas prête, de mon vivant, et bien que j’ai 70 ans et que je souffre encore des séquelles de la torture, à venir en France témoigner contre la barbarie de Le Pen et de ses comparses.
Le livre Torturés par Le Pen de Hamid Bousselham est édité par Rahma en 2000 à Alger
Extraits de
TORTURÉS PAR LE PEN
La guerre d’Algérie (1954 - 1962)
Introduction
"En 1943, rue Lauriston, des Français criaient d’angoisse et de douleur, la France entière les entendait.
En 1958, à Alger, on torture régulièrement, systématiquement, tout le monde le sait, de M. Lacoste aux cultivateurs de l’Aveyron, personne n’en parla, ou presque. "
Jean-Paul Sartre
Une Victoire
Oui, Jean Marie Le Pen a torturé en Algérie, et lui-même a admis avoir usé de la torture en déclarant notamment dans un entretien accordé au quotidien « Combat », le 9 novembre 1962 :
"Je n’ai rien à cacher. J’ai torturé parce qu’il fallait le faire. Quand on vous amène quelqu’un qui vient de poser vingt bombes qui peuvent exploser d’un moment à l’autre et qu’il ne veut pas parler, il faut employer des moyens exceptionnels pour l’y contraindre. C’est celui qui s’y refuse qui est le criminel car il a sur les mains le sang de dizaines de victimes dont la mort aurait pu être évitée".
Selon le journal officiel français du 12 juin 1957, le député parachutiste Le Pen déclarait également « J’étais à Alger officier de renseignement (...), comme tel je dois être aux yeux d’un certain nombre de mes collègues ce qui pourrait être le mélange d’un officier SS et d’un agent de la Gestapo. Ce métier, je l’ai fait... »
Tous les témoignages des algériens torturés par Le Pen rejoignirent celui de Mohamed Louli, arrêté à Alger le 14 février 1957, et emmené par Le Pen à la villa des Roses, Boulevard Galliéni, aujourd’hui 74 boulevard Bougara :
« Le Pen m’a torturé. Oui, lui personnellement à l’électricité et à l’eau. Et je l’ai vu aussi torturer d’autres détenus ».
Le commissaire principal R. Gilles dans un rapport à M. l’inspecteur général de l’administration en mission extraordinaire, préfet d’Alger, rapportait ceci : « J’ai l’honneur de porter à votre connaissance qu’à l’issue de son arrestation et de sa détention, du 8 au 31 mars, par les parachutistes du 1er REP, le nommé Yahiaoui Abdenour, né le 3 juillet 1938, domicilié 53 avenue Lavigerie à Kouba, s’est présenté devant moi et m’a déclaré avoir été l’objet de sévices de la part du Lieutenant Le Pen, et sur son ordre.
En particulier, lors de son arrestation, des fils électriques furent reliés aux lobes de ses oreilles. Le lieutenant Le Pen lui-même faisait fonctionner une magnéto à manivelles à l’aide de laquelle il envoyait des décharges électriques dans le corps. En présence de ce même officier, le jeune Yahiaoui fut frappé avec un nerf de bœuf, et y fut attaché nu sur un banc, pieds et poignets liés, et il dut y ingurgiter de force une certaine quantité d’eau.
Enfin, il reste cinq jours enfermé dans un "tombeau", trou creusé dans le sol et fermé par des barbelés, au 74 boulevard Galliéni où il était détenu. A la suite de ces cinq jours de "tombeau", il ne fut plus maltraité jusqu’à sa libération. »
Jean-Marie Le Pen doit être poursuivi pour les actes de torture qu’il a fait subir à nos compatriotes.
Tout comme le président du Front National, le tortionnaire Jean-Marie Le Pen, le général Bigeard, l’assassin de Larbi Ben M’hidi, le « Jean Moulin » algérien, le général Massu et Maurice Papon doivent être jugés comme criminels de guerre. Klaus Barbie et Papon ont été jugés en France. Il serait également juste que Le Pen, Massu, Bigeard, Papon et les autres soient jugés pour les mêmes crimes que Barbie par des tribunaux algériens et français.
Nous sommes en droit d’exiger un procès Nuremberg du colonialisme français à Alger pour les juger pour crimes contre l’humanité.
Mme Vve Mouloud MESSAOUD
70 ans. Mère de Hadj Ali Mouloud, lâchement assassiné.
En 1957, deux années après la mort de mon mari Mouloud Messaoud dit Lounès, ancien combattant de la première Guerre Mondiale, et mobilisé entre 1939 et 1945, le lieutenant Jean Marie Le Pen et ses militaires ont débarqué chez moi, au 22, rue d’Amourah, à Belcourt, sans aucun motif. Jean Marie Le Pen a donné des ordres à ses paras, pour qu’on m’attache avec du fil de fer, de 10h du matin à 16h, dans la cour de ma maison. J’ai reçu des coups de crosses sur la tête, derrière la nuque, dont je garde jusqu’à présent des séquelles. Ma pauvre fille de 19 ans qui était cardiaque, et qui se faisait soigner par des religieuses dans le quartier du ruisseau, près de mon habitation, voyait sa pauvre mère se faire torturer sous ses yeux. Après un choc terrible, un an après, elle était décédée. Pendant la perquisition à mon domicile, le carnet militaire de mon mari, le carnet de pension et quatre médailles de la première Guerre Mondiale m’ont été dérobés. La maison a été entièrement saccagée. Un de mes fils, Hadj Ali Mouloud, a été embarqué par les militaires du lieutenant Le Pen, à la villa des Roses, à El-Biar (Alger). Après avoir subi des tortures, il a été lâchement assassiné. D’autres témoins qui étaient avec mon fils Hadj Ali Mouloud, à la villa des Roses, le centre de torture de Le Pen, m’ont confirmé que mon fils Hadj Ali a été lâchement assassiné, et que le Pen leur aurait dit : « Voilà ce qui arrive à ceux qui tentent de m’échapper, je suis prêt à me farcir un bougnoule à chaque petit déjeuner, vous les ratons, vous ne comprenez qu’un seul langage, l’insulte, les coups, et quand vous ne voulez pas comprendre que vous êtes à ma botte, je vous élimine. ». Mon fils Mustapha, alors âgé de 15 ans, quand le lieutenant Le Pen est venu chez moi, ayant appris que sa mère avait été tabassée et torturée, et que son frère Hadj Ali était mort sous les tortures, mon fils en a perdu la raison. Retrouvé errant près de la frontière tunisienne en 1963, il est décédé à l’hôpital psychiatrique de Blida en 1980, après 17 ans d’hospitalisation. Dire que ce tortionnaire de Le Pen est aujourd’hui un homme politique français influent, à tête d’un parti, et qu’il n’a jamais été jugé pour ses crimes racistes qui sont de véritables crimes contre l’humanité. Je suis en tout cas prête, de mon vivant, et bien que j’ai 70 ans et que je souffre encore des séquelles de la torture, à venir en France témoigner contre la barbarie de Le Pen et de ses comparses.
Le livre Torturés par Le Pen de Hamid Bousselham est édité par Rahma en 2000 à Alger
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