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Diaspo #181 : Chama Mechtaly, de Dubaï à la Biennale de Jérusalem

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  • Diaspo #181 : Chama Mechtaly, de Dubaï à la Biennale de Jérusalem

    Artiste marocaine, de famille musulmane et d’héritage judéo-amazigh, Chama Mechtaly tente à travers ses tableaux, sa marque «Moors & Saints» et d’autres projets de promouvoir le multiculturalisme, le pluralisme, la paix et la coexistence. Elle prépare, dans ce sens, une exposition collective d’artistes qui sera présentée lors de la Biennale de Jérusalem, l’automne prochain.


    Mettre en avant les liens culturels entre peuples et cultures lorsque la politique montre ses limites, Chama Mechtaly en a fait une mission. Née en juillet 1992, cette artiste peintre et designer de bijoux inspirés par la culture mauresque, tente de «valoriser la culture et l’identité» marocaines multicolores et multiculturelles.

    Tout à commencer à Casablanca où elle voit le jour au sein d’une famille musulmane avec un héritage juif du côté de son père. «En grandissant à Casablanca, mon père avait eu des relations avec la communauté juive partout. Sa nourrice, l’infirmière à l’hôpital tout comme quelques-uns de ses enseignants étaient juifs. Mais pour moi, ce n’était pas du tout la même chose et j’entendais parler d’un Maroc pluriel, diversifié et riche sans pouvoir le constater», confie-t-elle à ********.



    Elle commence ainsi à effectuer des recherches sur cette représentation et cette histoire judéo-amazighe «qui a été complètement ignorée». Petite, Chama Mechtaly était aussi «obsédée par la représentation des minorités et des cultures marginalisées». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle décide de quitter le Maroc pour Boston, aux Etats-Unis pour étudier les relations internationales et en résolution de conflits à l’Université de Brandeis. La Marocaine travaille ainsi sur les conflits et les traumatismes touchant les communautés affectées par les conflits politiques et se focalise sur l’intersection entre les femmes et les efforts de paix. Dans ce sens, elle travaille aussi avec des organisations pour la promotion des droits des réfugiés.



    C’est également aux Etats-Unis que Chama Mechtaly continue à peindre puis à exposer ses œuvres, inspirées par les femmes judéo-amazighes au Maroc et en Afrique du Nord.

    «Je sentais que notre histoire n’est pas du tout représentée lorsqu’on est femme, amazighe et juive alors que les recherches approfondies ont mis en évidence la contribution énorme de ces femmes dans plusieurs domaines. Je voulais en parler et montrer des images pour rapprocher cette histoire à tout le monde et majoritairement aux jeunes.»

    Chama Mechtaly
    L’art, la peinture et le design pour «réparer les fissures»

    Car pour l’artiste et designer marocaine, «la fissure historique et les lacunes dans l’enseignement de notre histoire ont eu de mauvaises implications pour la jeunesse marocaine». «Elles ont créé un vide identitaire qui pourrait facilement être comblé par des idées radicales et violentes puisque notre référence à qui nous sommes ne permettait pas la complexité. Cette même complexité qui fait notre richesse d’ailleurs», nous explique-t-elle.



    Dans ce sens, elle considère que «bien que tardive», la décision prise par les autorités marocaines de commencer à enseigner l’histoire de la communauté juive au Maroc dans les écoles est à «applaudir». «C’est très intéressant de voir qu’après la décision (de reprise des relations entre le Maroc et Israël), on commence à voir quand-même du changement», estime l'artiste.



    Un clin d’œil à la large diffusion du drapeau rouge du Maroc, frappé de l’étoile de David, qui lui rappelle la censure dont elle a souffert lors d’une exposition en 2015 dans le royaume, lorsque les organisateurs lui avaient demandé de ne pas exposer son tableau réalisé en 2012.

    «Tout ce que je fais vient de mon envie de tisser des liens entre les communautés et réparer les fissures identitaires et les traumatismes de périodes dures. C’est pour cela que j’utilise l’art, la peinture et le design.»

    Chama Mechtaly
    Installée aujourd’hui aux Emirats arabes unis, la Marocaine œuvre d’ailleurs pour cette réparation. C’est à Dubaï où elle a crée «Moors & Saints», son entreprise qui produit aujourd’hui des bijoux inspirés par le design mauresque. «C’est un moyen pour valoriser notre culture et notre identité, qui ne vient pas de nulle part», rappelle-t-elle.

    «Moors & Saints», calligraphie et projet en préparation pour la Biennale de Jérusalem



    Pour Chama Mechtaly, sa marque lui permet de «continuer [sa] passion de tisser des liens entre des cultures différentes, promouvoir le multiculturalisme, le pluralisme et souligner les liens historiques entre religions et ethnies». «Ce que j’enseigne aussi à travers Moors & Saints, c’est que les empires musulmans sont souvent devenus puissants parce qu'ils ont compris la valeur de la diversité et mis en œuvre des politiques inclusives et c’est exactement ce qui a fait l’âge d’or de l’islam mais aussi l’âge d’or de l’hébreu en Andalousie», ajoute-t-elle.



    Si sa marque se démarque avec plusieurs collections lancées, Chama Mechtaly œuvre aussi sur un autre front. Depuis quelques mois, elle prépare avec deux autres artistes de confession juive un projet devant être exposé lors de la Biennale de Jérusalem. «Le projet est née d’une conversation avec une artiste juive d’origine syrienne. Nous avons discuté des moyens d’utiliser ce moment historique (les Accords d’Abraham, ndlr) pour réparer les fissures et parler de cette séparation qu’on a eu entre les deux peuples», se rappelle-t-elle.

    Ainsi, des artistes basées à Jérusalem et à Dubaï ont alors été choisis pour collaborer autour de la calligraphie avec des lettres en arabe et en hébreu. «C’est une invitation à la découverte et à l’exposition des liens sacrés entre les deux langues», détaille la Marocaine, ravie de son projet en partenariat avec le ministère de la Culture des Emirats arabes unis à Abou Dhabi.

    «Lorsque nous avons des conflits très durs et des fissures, il est difficile de les réparer uniquement à travers des agendas politiques. C’est primordial de parler d’héritage culturel que nous avons partagé et de tisser des liens à travers cet héritage.»

    Chama Mechtaly
    Le projet doit démarrer avant l’été puisque la Biennale se déroulera en octobre et en novembre.



    Ya biladi
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