L' EXPRESS Par Thomas Bronnec, publié le 06/11/2008
Longtemps décriée, la monnaie unique fait aujourd'hui figure de bouclier anticrise. Démonstration.
L'euro a longtemps joué les boucs émissaires. Peu après sa naissance, il était déjà soupçonné de faire exagérément monter les prix : profitant de l'aubaine, les commerçants ont abusé de la règle de l'arrondi.
Quelques dates clefs :
1er janvier 1999 Création de l'euro : 1 euros= 1,18 $.
26 octobre 2000 Record à la baisse : 1 euros = 0,82 $.
1er janvier 2002 Mise en circulation des pièces et des billets : 1 euros = 0,89 $.
28 juin 2002 1 euros = 1 $.
22 avril 2008 Record à la hausse : 1 euros = 1,6 $.
29 octobre 2008 1 euros = 1,29 $.
Plus tard, quand il n'en finissait plus de s'apprécier face au dollar, on l'accusait, cette fois, de plomber la croissance : son envol minait la compétitivité des entreprises. Pourtant, depuis que la crise financière a éclaté, la monnaie unique européenne a sans doute épargné à ses détenteurs une tempête monétaire et une série de dévaluations. La zone euro prend même, aujourd'hui, des airs d'eldorado. Tout le monde se bouscule à sa porte.
L'Islande, en perdition, obligée de négocier tous azimuts pour trouver de l'argent frais, envisage une adhésion à l'Union européenne (UE). La Hongrie, un genou à terre, a obtenu in extremis une aide d'urgence de 20 milliards de dollars du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et de l'UE. Sans être tombé si bas, le Danemark souffre aussi. Sa monnaie menace de s'effondrer, et sa banque centrale est contrainte d'augmenter les taux d'intérêt pour retenir les investisseurs. Le genre de mesure qui pénalise la croissance... Résultat, le débat sur l'adhésion à l'euro est relancé. Au nord, mais à l'est aussi. Budapest vise 2012 pour entrer dans la zone euro. En Pologne, le président, l'eurosceptique Lech Kaczynski, a, semble-t-il, fini par se rallier aux arguments de son Premier ministre, Donald Tusk.
Pourquoi un tel engouement ? « L'euro est un bouclier, explique Henri Sterdyniak, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques. Les Etats qui l'ont adopté sont protégés des attaques des spéculateurs. Les marchés savent que, quels que soient les déficits de ces pays, la Banque centrale européenne (BCE) sera là pour financer et garantir leur dette. » De quoi rassurer les investisseurs sur la solidité de leur système bancaire national et éviter une fuite des capitaux. « Regardez les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, analyse Willem Hendrik Buiter, professeur à la London School of Economics : ces Etats ont un secteur financier bien trop développé par rapport à la taille de leur banque centrale. S'ils n'avaient pas la BCE en back up, les marchés les auraient immédiatement sanctionnés. » Et, dans le pire des cas, ils auraient pu connaître un scénario à l'islandaise.
L'euro a pour le moment servi de paratonnerre face à l'orage financier. Pas sûr, en revanche, qu'il soit le meilleur allié des Etats de la zone euro face à la récession qui s'annonce. Déjà, certains pays, comme la France, paraissent tentés de mettre entre parenthèses les règles du pacte de stabilité pour se donner la possibilité d'une relance par le déficit budgétaire. Les querelles byzantines sur la règle des 3 % pourraient reprendre de plus belle.
Un tel environnement peut-il refroidir les ardeurs des postulants ? « Au contraire, pronostique Henri Sterdyniak, les demandes d'adhésion vont s'accélérer, mais la zone euro va être beaucoup plus exigeante avec les candidats. Le Danemark sera accepté sans difficulté, et sans délai. Mais pour les pays Baltes et d'Europe de l'Est, dont l'instabilité a été révélée par la crise, ce sera sans doute une autre histoire. »
Longtemps décriée, la monnaie unique fait aujourd'hui figure de bouclier anticrise. Démonstration.
L'euro a longtemps joué les boucs émissaires. Peu après sa naissance, il était déjà soupçonné de faire exagérément monter les prix : profitant de l'aubaine, les commerçants ont abusé de la règle de l'arrondi.
Quelques dates clefs :
1er janvier 1999 Création de l'euro : 1 euros= 1,18 $.
26 octobre 2000 Record à la baisse : 1 euros = 0,82 $.
1er janvier 2002 Mise en circulation des pièces et des billets : 1 euros = 0,89 $.
28 juin 2002 1 euros = 1 $.
22 avril 2008 Record à la hausse : 1 euros = 1,6 $.
29 octobre 2008 1 euros = 1,29 $.
Plus tard, quand il n'en finissait plus de s'apprécier face au dollar, on l'accusait, cette fois, de plomber la croissance : son envol minait la compétitivité des entreprises. Pourtant, depuis que la crise financière a éclaté, la monnaie unique européenne a sans doute épargné à ses détenteurs une tempête monétaire et une série de dévaluations. La zone euro prend même, aujourd'hui, des airs d'eldorado. Tout le monde se bouscule à sa porte.
L'Islande, en perdition, obligée de négocier tous azimuts pour trouver de l'argent frais, envisage une adhésion à l'Union européenne (UE). La Hongrie, un genou à terre, a obtenu in extremis une aide d'urgence de 20 milliards de dollars du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et de l'UE. Sans être tombé si bas, le Danemark souffre aussi. Sa monnaie menace de s'effondrer, et sa banque centrale est contrainte d'augmenter les taux d'intérêt pour retenir les investisseurs. Le genre de mesure qui pénalise la croissance... Résultat, le débat sur l'adhésion à l'euro est relancé. Au nord, mais à l'est aussi. Budapest vise 2012 pour entrer dans la zone euro. En Pologne, le président, l'eurosceptique Lech Kaczynski, a, semble-t-il, fini par se rallier aux arguments de son Premier ministre, Donald Tusk.
Pourquoi un tel engouement ? « L'euro est un bouclier, explique Henri Sterdyniak, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques. Les Etats qui l'ont adopté sont protégés des attaques des spéculateurs. Les marchés savent que, quels que soient les déficits de ces pays, la Banque centrale européenne (BCE) sera là pour financer et garantir leur dette. » De quoi rassurer les investisseurs sur la solidité de leur système bancaire national et éviter une fuite des capitaux. « Regardez les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, analyse Willem Hendrik Buiter, professeur à la London School of Economics : ces Etats ont un secteur financier bien trop développé par rapport à la taille de leur banque centrale. S'ils n'avaient pas la BCE en back up, les marchés les auraient immédiatement sanctionnés. » Et, dans le pire des cas, ils auraient pu connaître un scénario à l'islandaise.
L'euro a pour le moment servi de paratonnerre face à l'orage financier. Pas sûr, en revanche, qu'il soit le meilleur allié des Etats de la zone euro face à la récession qui s'annonce. Déjà, certains pays, comme la France, paraissent tentés de mettre entre parenthèses les règles du pacte de stabilité pour se donner la possibilité d'une relance par le déficit budgétaire. Les querelles byzantines sur la règle des 3 % pourraient reprendre de plus belle.
Un tel environnement peut-il refroidir les ardeurs des postulants ? « Au contraire, pronostique Henri Sterdyniak, les demandes d'adhésion vont s'accélérer, mais la zone euro va être beaucoup plus exigeante avec les candidats. Le Danemark sera accepté sans difficulté, et sans délai. Mais pour les pays Baltes et d'Europe de l'Est, dont l'instabilité a été révélée par la crise, ce sera sans doute une autre histoire. »