Une stratégie pour contrer la baisse des carnets de commandes
· La plateforme de Jorf fermée provisoirement pour entretien
· Le groupe se recentre sur les chantiers à haute valeur ajoutée
S’IL faut appeler un chat un chat, l’OCP, à l’instar de beaucoup d’autres entreprises dans le monde, est rattrapé par la crise. Par son statut international, le groupe reste, il est vrai, directement exposé aux soubresauts de l’économie réelle.
Pour faire face à un coup de frein de la demande, le géant mondial des phosphates baisse sa production. Une mesure qui se traduit par l’arrêt temporaire de l’usine de Jorf ainsi que le ralentissement de celle de Safi. Le groupe saisit cette occasion pour entretenir ses installations, plus tôt que prévu.
La nouvelle conjoncture s’avère être un véritable test pour la stratégie actuelle de réduction des coûts amorcée par les équipes de Mustapha Terrab. L’année 2008 aura certes été exceptionnelle avec des cours de phosphates et des recettes euphoriques. «Mais elle ne pouvait être une année de référence. D’ailleurs, nous ne l’avons jamais intégrée, dans notre business plan», assure d’emblée le DG du groupe.
Quoiqu’exceptionnel, ce jackpot aura tout de même permis de sauver, partiellement, notre export, et constituer un bonus pour financer confortablement le transfert au RCAR de la caisse de retraite de l’Office sans plomber les comptes de la CDG comme cela était envisagé initialement.
Il aurait également permis d’accélérer le toilettage du bilan de l’Office et de se constituer une manne qui permettra de financer entre 20 et 30 milliards de DH d’investissements propres sur les cinq prochaines années. Un trésor de guerre qui permet d’envisager l’avenir sans grandes inquiétudes. En clair, le groupe maintient sa stratégie, ses investissements. Sa politique sera néanmoins calibrée à la nouvelle donne.
En réalité, l’activité n’est pas en train de replonger dans la crise. D’abord grâce à l’OCP, le secteur est beaucoup plus concentré qu’il y a quelques années. Ce qui favorise la discipline, la maîtrise des prix, donc des marges. L’OCP, en tant que faiseur de marché, a multiplié les investissements ces dernières années pour peser davantage. C’est ce qui explique pourquoi les cours des phosphates, actuellement entre 100 et 200 dollars, ont baissé mais pas de façon significative. Ensuite, la demande est structurellement là. «En tout état de cause, n’oublions pas que la demande est alimentaire. Le ralentissement ne peut être que provisoire».
Pour la moitié vide du verre, l’analyse peut s’arrêter sur l’impact de cette conjoncture sur la balance commerciale du pays. Il y aura sans doute moins de recettes de phosphates. A l’OCP, l’on voit les choses autrement. «Nous devons rester objectifs. D’abord, s’il y a moins de recettes, il y aura aussi moins de dépenses phosphates du fait des économies d’énergie. Ensuite, que les choses soient claires, le pilotage par le volume n’a jamais été notre objectif. Au-deçà d’un certain prix, nous ne vendrons pas», précise-t-on.
Aujourd’hui, l’optimisme est tel que l’on n’hésite pas à comparer cette situation à 1973, qui aura été un tournant pour le plan de développement de l’Office, et qui l’a lancé dans la chimie moderne. Dans un marché dominé jusque-là par les Etats-Unis et le France, la période antérieure avait été marquée par un effondrement des cours. Ce qui ne pouvait encourager le Maroc en tant que producteur à investir. L’accroissement de la demande, du fait de récoltes décevantes et de la sécheresse, allait inverser la tendance, constituant par la même occasion une aubaine que l’Office ne pouvait pas ne pas saisir. La flambée des cours avait été attribuée à l’époque à une décision stratégique unilatérale du Maroc. L’OCP avait alors augmenté les prix des phosphates de 200% obligeant les autres acteurs à en faire de même. Il en a profité pendant plus d’une année se constituant un trésor de guerre qui a été très utile ensuite pour financer les investissements que l’on connaît: Maroc Chimie, Maroc Phosphore II à Safi, Maroc Phosphore 3 et 4 à Jorf. Des projets sur lesquels le groupe est toujours en train de capitaliser aujourd’hui. «Tout avait été pensé à l’époque, le terrain, la logistique, le foncier qui ont permis aux autres projets d’être déployés», reconnaît Terrab, qui ne veut surtout pas insulter la mémoire. «D’autres pensent qu’il y a eu des erreurs en 1973, je ne partage pas cette analyse. L’Office avait parfaitement agi en cette année». Comme pour 1973, l’OCP estime être à un tournant sur lequel le groupe et le Maroc pourraient capitaliser pour les 20 prochaines années.
L’ONCF, partenaire stratégique
Le chantier du pipeline vers Jorf Lasfar constitue incontestablement l’un des projets structurants du groupe. La conjoncture semble avoir donné raison à l’Office, puisque la baisse du carnet de commandes justifie ce souci d’économie des coûts du transport. A ce niveau, les acquisitions de terrain ont démarré et l’on s’attend à ce que le pipeline soit opérationnel dans deux ou trois ans. Quid de l’ONCF?
«Au contraire, nous poursuivons les discussions de manière à ce que l’ONCF puisse tirer pleinement profit du projet». Parmi les idées qui font leur chemin, celle d’un transfert des bénéfices vers l’ONCF ou encore l’intégration du pipeline dans des droits de passage de cet Office qui, à ce moment, créerait une filiale de transport des phosphates.
Mohamed BENABID
· La plateforme de Jorf fermée provisoirement pour entretien
· Le groupe se recentre sur les chantiers à haute valeur ajoutée
S’IL faut appeler un chat un chat, l’OCP, à l’instar de beaucoup d’autres entreprises dans le monde, est rattrapé par la crise. Par son statut international, le groupe reste, il est vrai, directement exposé aux soubresauts de l’économie réelle.
Pour faire face à un coup de frein de la demande, le géant mondial des phosphates baisse sa production. Une mesure qui se traduit par l’arrêt temporaire de l’usine de Jorf ainsi que le ralentissement de celle de Safi. Le groupe saisit cette occasion pour entretenir ses installations, plus tôt que prévu.
La nouvelle conjoncture s’avère être un véritable test pour la stratégie actuelle de réduction des coûts amorcée par les équipes de Mustapha Terrab. L’année 2008 aura certes été exceptionnelle avec des cours de phosphates et des recettes euphoriques. «Mais elle ne pouvait être une année de référence. D’ailleurs, nous ne l’avons jamais intégrée, dans notre business plan», assure d’emblée le DG du groupe.
Quoiqu’exceptionnel, ce jackpot aura tout de même permis de sauver, partiellement, notre export, et constituer un bonus pour financer confortablement le transfert au RCAR de la caisse de retraite de l’Office sans plomber les comptes de la CDG comme cela était envisagé initialement.
Il aurait également permis d’accélérer le toilettage du bilan de l’Office et de se constituer une manne qui permettra de financer entre 20 et 30 milliards de DH d’investissements propres sur les cinq prochaines années. Un trésor de guerre qui permet d’envisager l’avenir sans grandes inquiétudes. En clair, le groupe maintient sa stratégie, ses investissements. Sa politique sera néanmoins calibrée à la nouvelle donne.
En réalité, l’activité n’est pas en train de replonger dans la crise. D’abord grâce à l’OCP, le secteur est beaucoup plus concentré qu’il y a quelques années. Ce qui favorise la discipline, la maîtrise des prix, donc des marges. L’OCP, en tant que faiseur de marché, a multiplié les investissements ces dernières années pour peser davantage. C’est ce qui explique pourquoi les cours des phosphates, actuellement entre 100 et 200 dollars, ont baissé mais pas de façon significative. Ensuite, la demande est structurellement là. «En tout état de cause, n’oublions pas que la demande est alimentaire. Le ralentissement ne peut être que provisoire».
Pour la moitié vide du verre, l’analyse peut s’arrêter sur l’impact de cette conjoncture sur la balance commerciale du pays. Il y aura sans doute moins de recettes de phosphates. A l’OCP, l’on voit les choses autrement. «Nous devons rester objectifs. D’abord, s’il y a moins de recettes, il y aura aussi moins de dépenses phosphates du fait des économies d’énergie. Ensuite, que les choses soient claires, le pilotage par le volume n’a jamais été notre objectif. Au-deçà d’un certain prix, nous ne vendrons pas», précise-t-on.
Aujourd’hui, l’optimisme est tel que l’on n’hésite pas à comparer cette situation à 1973, qui aura été un tournant pour le plan de développement de l’Office, et qui l’a lancé dans la chimie moderne. Dans un marché dominé jusque-là par les Etats-Unis et le France, la période antérieure avait été marquée par un effondrement des cours. Ce qui ne pouvait encourager le Maroc en tant que producteur à investir. L’accroissement de la demande, du fait de récoltes décevantes et de la sécheresse, allait inverser la tendance, constituant par la même occasion une aubaine que l’Office ne pouvait pas ne pas saisir. La flambée des cours avait été attribuée à l’époque à une décision stratégique unilatérale du Maroc. L’OCP avait alors augmenté les prix des phosphates de 200% obligeant les autres acteurs à en faire de même. Il en a profité pendant plus d’une année se constituant un trésor de guerre qui a été très utile ensuite pour financer les investissements que l’on connaît: Maroc Chimie, Maroc Phosphore II à Safi, Maroc Phosphore 3 et 4 à Jorf. Des projets sur lesquels le groupe est toujours en train de capitaliser aujourd’hui. «Tout avait été pensé à l’époque, le terrain, la logistique, le foncier qui ont permis aux autres projets d’être déployés», reconnaît Terrab, qui ne veut surtout pas insulter la mémoire. «D’autres pensent qu’il y a eu des erreurs en 1973, je ne partage pas cette analyse. L’Office avait parfaitement agi en cette année». Comme pour 1973, l’OCP estime être à un tournant sur lequel le groupe et le Maroc pourraient capitaliser pour les 20 prochaines années.
L’ONCF, partenaire stratégique
Le chantier du pipeline vers Jorf Lasfar constitue incontestablement l’un des projets structurants du groupe. La conjoncture semble avoir donné raison à l’Office, puisque la baisse du carnet de commandes justifie ce souci d’économie des coûts du transport. A ce niveau, les acquisitions de terrain ont démarré et l’on s’attend à ce que le pipeline soit opérationnel dans deux ou trois ans. Quid de l’ONCF?
«Au contraire, nous poursuivons les discussions de manière à ce que l’ONCF puisse tirer pleinement profit du projet». Parmi les idées qui font leur chemin, celle d’un transfert des bénéfices vers l’ONCF ou encore l’intégration du pipeline dans des droits de passage de cet Office qui, à ce moment, créerait une filiale de transport des phosphates.
Mohamed BENABID