Les Algériens ont une relation ambivalente avec leurs ressources en hydrocarbures qu’ils considèrent depuis leur nationalisation en 1971 comme des bijoux de famille, mais dont ils n’apprécient le véritable enjeu qu’en situation de crise.
Ils se soucient très peu de leur gestion, car le discours officiel est d’une telle technicité qu’il décourage toute velléité de compréhension. Ils réalisent qu’ils n’ont aucune influence sur la politique énergétique de leur propre pays, mais on leur a inoculé l’illusion qu’ils agissent sur le cours mondial du pétrole et apprennent en conséquence à s’accommoder de l’alternance des périodes d’aisance financière et de pénurie. La 151e réunion de l’OPEP intervient dans ce contexte pour être présentée à l’opinion publique comme un événement majeur dans un pays où le secteur de l’énergie s’est érigé en un Etat de substitution. Pourtant, avec une production de 1,4 million de barils/jour, l’Algérie n’est que le poussin de l’OPEP (32 mbj ) qui ne produit elle-même que 40% du brut mondial. A ce titre, quel pourrait être notre poids réel dans la fixation du prix du baril devenu insensible même aux conflits armés, mais plutôt réactif à la croissance des économies chinoise et indienne et à la spéculation ?
Pour notre part, nous n’avons pas été capables de nous inscrire dans aucune des deux démarches par excès de prudence ou par défaut d’anticipation et d’ambition pour le pays. Il faut alors espérer que cette effervescence passagère profite au moins à l’hôtellerie et à l’artisanat d’Oran. Ce secteur étant entouré d’une opacité qui renseigne sur les intérêts qui le portent, il ne reste plus que les sources ouvertes étrangères comme l’OPEP, les clients de Sonatrach ou encore le bon sens pour nous en révéler les paradoxes les plus apparents. Ainsi, depuis 10 ans, le conseil d’administration et l’assemblée générale de Sonatrach ou encore le conseil supérieur de l’énergie sont inopérants et seuls le chef de l’Etat et son ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, décident de 60% de la production annuelle de richesse nationale. Une observation des principaux indicateurs de l’énergie renseigne sur le degré de désinformation destinée à produire une sorte d’exaltation nationale par les hydrocarbures et maquiller la réalité d’un état des lieux inquiétant.
Primo, la production algérienne de pétrole est certes passée de 909 000 b/j en1998 à 1 371 000 b/j en 2007, mais cette augmentation représente la part des associés étrangers, celle de Sonatrach seule ayant stagné puis chuté ces dernières années. C’est évidemment dans la même proportion que les étrangers ont réalisé de super-profits ces 5 dernières années. Si nous prenons l’exemple de l’Angola, sa production de 1998 (712 000b/j) a été multipliée par deux en moins de 10 ans (1 694 000 b/j).
Secundo, nos capacités de raffinage ont chuté à 19 millions de tonnes en 2006 et ne sont même pas au niveau où elles étaient il y a 30 ans (21 millions de tonnes) ; c’es pourquoi notre pays a fini par importer une partie de ses besoins en essence et en gasoil. Le gouvernement – à supposer qu’il dispose d’un droit de regard sur les hydrocarbures – aura attendu que les coûts des raffineries se multiplient par 3 en raison du renchérissement prévisible des matières entrant dans leur fabrication (cuivre, aciers spéciaux, étain...) et de la forte demande en raffineries pour se lancer dans l’hypothétique programme 2008-2012 qui couvrira à peine les besoins nationaux dans 10 ans si nous tenons compte de l’évolution actuelle de la demande globale du marché algérien. Un mémoire de fin d’études d’ingéniorat en commerce international dans un institut de gestion à Alger avait anticipé en 2003 le scénario catastrophe de la politique nationale de raffinage. Les deux étudiants n’avaient pas 23 ans.
Tertio, notre production de gaz à l’exportation a stagné à son niveau de 1999 puisqu’elle est de 59 milliards de mètres cubes, ce qui représente à peine la consommation nationale dans 10 ans, selon les prévisions de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG ), si par malheur les trois mégaprojets de complexes d’aluminium (AAOLA) et d’ammoniac et d’urée ( EBF et Orascom) très gros consommateurs en gaz venaient à se concrétiser. Il s’agira par ailleurs tout simplement d’une exportation déguisée de gaz financée de surcroît en grande partie sur des fonds publics. Pour ce qui est de l’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), l’Algérie qui a toujours opté pour une stratégie médiane, 50% par pipe et 50% par méthanier, est otage aujourd’hui des engagements avec l’Italie et l’Espagne pour 50 milliards de mètres cubes par gazoduc, ce qui réduit sa flexibilité et fait perdre des positions de marché spot autrement plus rentable, notamment sur le continent américain. Pour être valable, l’option construction de nouveaux gazoducs imposée par Chakib Khelil aurait dû être consolidée par des acquisitions stratégiques en Italie, où par exemple la Libye est déjà présente dans l’aval depuis 15 ans, et en Espagne où le groupe russe Lukoil cherche à acheter une partie de Repsol, notre principal client, qui à défaut d’être notre associé est engagé en justice contre Sonatrach dans un litige dont l’issue est incertaine et les causes obscures.
Sur le plan stratégique, il se pose un double problème : le premier réside dans l’entêtement des dirigeants à considérer les hydrocarbures comme un simple produit marchand, alors qu’il est depuis 60 ans un des outils de la souveraineté des nations et un levier de choix dans les relations internationales. A ce titre, on devrait impliquer chez nous les opérateurs de politique étrangère et de défense nationale dans l’élaboration de toute stratégie en la matière. Le second problème est représenté par le très faible niveau d’internationalisation du secteur énergétique réduit depuis 10 ans à une insignifiante participation dans une installation gazière en Amazonie péruvienne et dans quelques menus projets avec une participation minime qui n’autorise aucune synergie avec les intérêts de Sonatrach à l’international.
Ils se soucient très peu de leur gestion, car le discours officiel est d’une telle technicité qu’il décourage toute velléité de compréhension. Ils réalisent qu’ils n’ont aucune influence sur la politique énergétique de leur propre pays, mais on leur a inoculé l’illusion qu’ils agissent sur le cours mondial du pétrole et apprennent en conséquence à s’accommoder de l’alternance des périodes d’aisance financière et de pénurie. La 151e réunion de l’OPEP intervient dans ce contexte pour être présentée à l’opinion publique comme un événement majeur dans un pays où le secteur de l’énergie s’est érigé en un Etat de substitution. Pourtant, avec une production de 1,4 million de barils/jour, l’Algérie n’est que le poussin de l’OPEP (32 mbj ) qui ne produit elle-même que 40% du brut mondial. A ce titre, quel pourrait être notre poids réel dans la fixation du prix du baril devenu insensible même aux conflits armés, mais plutôt réactif à la croissance des économies chinoise et indienne et à la spéculation ?
Pour notre part, nous n’avons pas été capables de nous inscrire dans aucune des deux démarches par excès de prudence ou par défaut d’anticipation et d’ambition pour le pays. Il faut alors espérer que cette effervescence passagère profite au moins à l’hôtellerie et à l’artisanat d’Oran. Ce secteur étant entouré d’une opacité qui renseigne sur les intérêts qui le portent, il ne reste plus que les sources ouvertes étrangères comme l’OPEP, les clients de Sonatrach ou encore le bon sens pour nous en révéler les paradoxes les plus apparents. Ainsi, depuis 10 ans, le conseil d’administration et l’assemblée générale de Sonatrach ou encore le conseil supérieur de l’énergie sont inopérants et seuls le chef de l’Etat et son ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, décident de 60% de la production annuelle de richesse nationale. Une observation des principaux indicateurs de l’énergie renseigne sur le degré de désinformation destinée à produire une sorte d’exaltation nationale par les hydrocarbures et maquiller la réalité d’un état des lieux inquiétant.
Primo, la production algérienne de pétrole est certes passée de 909 000 b/j en1998 à 1 371 000 b/j en 2007, mais cette augmentation représente la part des associés étrangers, celle de Sonatrach seule ayant stagné puis chuté ces dernières années. C’est évidemment dans la même proportion que les étrangers ont réalisé de super-profits ces 5 dernières années. Si nous prenons l’exemple de l’Angola, sa production de 1998 (712 000b/j) a été multipliée par deux en moins de 10 ans (1 694 000 b/j).
Secundo, nos capacités de raffinage ont chuté à 19 millions de tonnes en 2006 et ne sont même pas au niveau où elles étaient il y a 30 ans (21 millions de tonnes) ; c’es pourquoi notre pays a fini par importer une partie de ses besoins en essence et en gasoil. Le gouvernement – à supposer qu’il dispose d’un droit de regard sur les hydrocarbures – aura attendu que les coûts des raffineries se multiplient par 3 en raison du renchérissement prévisible des matières entrant dans leur fabrication (cuivre, aciers spéciaux, étain...) et de la forte demande en raffineries pour se lancer dans l’hypothétique programme 2008-2012 qui couvrira à peine les besoins nationaux dans 10 ans si nous tenons compte de l’évolution actuelle de la demande globale du marché algérien. Un mémoire de fin d’études d’ingéniorat en commerce international dans un institut de gestion à Alger avait anticipé en 2003 le scénario catastrophe de la politique nationale de raffinage. Les deux étudiants n’avaient pas 23 ans.
Tertio, notre production de gaz à l’exportation a stagné à son niveau de 1999 puisqu’elle est de 59 milliards de mètres cubes, ce qui représente à peine la consommation nationale dans 10 ans, selon les prévisions de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG ), si par malheur les trois mégaprojets de complexes d’aluminium (AAOLA) et d’ammoniac et d’urée ( EBF et Orascom) très gros consommateurs en gaz venaient à se concrétiser. Il s’agira par ailleurs tout simplement d’une exportation déguisée de gaz financée de surcroît en grande partie sur des fonds publics. Pour ce qui est de l’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), l’Algérie qui a toujours opté pour une stratégie médiane, 50% par pipe et 50% par méthanier, est otage aujourd’hui des engagements avec l’Italie et l’Espagne pour 50 milliards de mètres cubes par gazoduc, ce qui réduit sa flexibilité et fait perdre des positions de marché spot autrement plus rentable, notamment sur le continent américain. Pour être valable, l’option construction de nouveaux gazoducs imposée par Chakib Khelil aurait dû être consolidée par des acquisitions stratégiques en Italie, où par exemple la Libye est déjà présente dans l’aval depuis 15 ans, et en Espagne où le groupe russe Lukoil cherche à acheter une partie de Repsol, notre principal client, qui à défaut d’être notre associé est engagé en justice contre Sonatrach dans un litige dont l’issue est incertaine et les causes obscures.
Sur le plan stratégique, il se pose un double problème : le premier réside dans l’entêtement des dirigeants à considérer les hydrocarbures comme un simple produit marchand, alors qu’il est depuis 60 ans un des outils de la souveraineté des nations et un levier de choix dans les relations internationales. A ce titre, on devrait impliquer chez nous les opérateurs de politique étrangère et de défense nationale dans l’élaboration de toute stratégie en la matière. Le second problème est représenté par le très faible niveau d’internationalisation du secteur énergétique réduit depuis 10 ans à une insignifiante participation dans une installation gazière en Amazonie péruvienne et dans quelques menus projets avec une participation minime qui n’autorise aucune synergie avec les intérêts de Sonatrach à l’international.
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