Par Abdelkrim BOUDRA, Président de CARE , le 23/08/2009
Le Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (CARE) espère, à travers cette contribution, participer à un débat positif et utile à l'économie nationale. N'étant ni une association professionnelle, ni une organisation patronale, CARE ne prétend aucunement parler au nom des entreprises algériennes dont les représentants se sont exprimés sur le sujet.
Au CARE, nous saluons l'amorce de ce débat public. Nous attirons toutefois l'attention sur le danger pour l'économie algérienne d'une posture mutuellement accusatrice. La communauté économique doit en finir avec « la présomption de culpabilité » mutuelle. Les entreprises qui s'expriment contre les récentes mesures ne sont pas anti-patriotiques, comme ne le sont pas les pouvoirs publics qui interviennent dans l'encadrement des activités économiques dans un contexte particulier.
Au CARE, nous sommes convaincus que sur les questions qui touchent à l'entreprise, l'heure est à la concertation authentique. L'intérêt économique national doit primer. Pour cela, il doit être pensé comme un projet global et cohérent dont la conception et la conduite requièrent vision stratégique, apport d'expertises et partenariat entre l'ensemble des parties prenantes. La vision administrative, parfois au mépris des formes et de la règle de droit, est malheureusement insuffisante et contre-productive en termes d'efficacité économique et de crédibilité des institutions.
Nous vous proposons dans cette contribution, d'articuler les trois niveaux suivants : le premier niveau est celui du cadre réglementaire à proprement dit. Le deuxième concerne l'exposé des motifs et les enjeux ayant présidé à cette intervention de l'état. Il s'agit ici d'analyser la cohérence interne entre l'exposé des motifs et le contenu des textes. Le troisième niveau est purement prospectif et concerne les scénarios d'évolution possibles.
1. Les décisions
Dans la dernière période, le gouvernement a pris à l'endroit du secteur économique des décisions qui reflètent une révision du cadre réglementaire régissant les activités industrielles et commerciales et leur articulation avec les échanges extérieurs du pays.
Dans une conjoncture où les réserves de change nationales tendent à se fragiliser, ces décisions ont concerné :
le réaménagement du repos hebdomadaire dans le sens d'un week-end semi universel
l'obligation pour les sociétés étrangères d'ouvrir leur capital à des partenaires nationaux ;
une série de mesures intégrées à l'occasion de la loi de finances complémentaire 2009. Les plus médiatisées étant : la limitation des modes de paiement au CREDOC, la règle des 70-30, la suppression du crédit à la consommation et l'obligation faite au dirigeant de se présenter pour certaines formalités administratives.
Toutefois, de nombreuses autres dispositions de la LFC 2009 méritent notre attention (exemples : le droit de préemption sur la cession des participations des actionnaires étrangers ou au profit d'actionnaires étrangers, l'obligation de passage par le CNI, le recours aux prestataires étrangers pour le contrôle des produits à l'international, les 48 fonds d'investissement, ...). CARE publiera dans les jours à venir une note technique détaillée concernant la LFC 2009 où nous reviendrons sur certaines de ces dispositions.
Ces récentes décisions des pouvoirs publics, utiles, voire salutaires dans certains cas, dénotent du grand intérêt accordé à ces questions notamment à la lumière de la grave crise internationale. Elles suggèrent toutefois de nombreuses questions quant à leur cohérence et leurs conséquences à terme sur l'économie nationale.
2. L'exposé des motif et les enjeux
Deux raisons majeures ont été officiellement évoquées par les pouvoirs publics :
La diversification des sources de revenus internes et externes en mettant en avant le primat de la production sur celui de l'importation et en canalisant les IDE (niches d'exportation) ;
la promotion de l'emploi en développant le rôle du secteur privé.
Une analyse approfondie fait ressortir l'enjeu majeur au cœur de ces modifications du cadre réglementaire : l'explosion des importations dans une conjoncture de crise internationale persistante a fragilisé grandement l'économie nationale ( les importations de notre pays ont explosé ces trois dernières années et ont atteint près de 40 milliards de dollars en 2008 (19 milliards, au premier semestre 2009) auxquels il faut ajouter quelque 11 milliards de dollars de services non facteurs (transports, assurances, assistance technique, grands travaux...). A noter la part importante induite par les besoins en équipement et biens intermédiaires des plans de relance initiés (et pas uniquement la consommation des ménages), l'absence de régulation des importations ajoutée au déséquilibre de la balance des services avec la part importante des transferts au titre des dividendes...)
Sur ce constat, il est important de relever que l'ensemble des parties prenantes sont d'accord sur la nécessité pour les pouvoirs publics de réagir afin de juguler ces problèmes. Et nous pouvons affirmer que les récentes mesures peuvent facilement atteindre l'objectif affiché de réduction des importations (5 %) et même le dépasser.
Avant d'analyser sous la forme de questions, la cohérence de ces mesures par rapport aux objectifs affichés et autres dimensions des réformes économiques menées par l'Algérie, deux remarques nous semblent importantes à rappeler :
Sur le plan de la forme, il est à se demander pourquoi choisir un tel support pour impacter des lois importantes comme la loi sur la monnaie et le crédit, le code de commerce, l'ordonnance relative au développement de l'investissement et bien d'autres textes réglementaires. N'est on pas en train de faire jouer un rôle de régulation à la LFC, avec des mesures universelles là où des solutions ciblées seraient plus efficaces ?
Une meilleure stratégie de concertation et de communication durant le processus de préparation et de lancement de ce nouveau cadre réglementaire nous aurait évités des tergiversations et des débats inutiles et contre-productifs.
Le Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (CARE) espère, à travers cette contribution, participer à un débat positif et utile à l'économie nationale. N'étant ni une association professionnelle, ni une organisation patronale, CARE ne prétend aucunement parler au nom des entreprises algériennes dont les représentants se sont exprimés sur le sujet.
Au CARE, nous saluons l'amorce de ce débat public. Nous attirons toutefois l'attention sur le danger pour l'économie algérienne d'une posture mutuellement accusatrice. La communauté économique doit en finir avec « la présomption de culpabilité » mutuelle. Les entreprises qui s'expriment contre les récentes mesures ne sont pas anti-patriotiques, comme ne le sont pas les pouvoirs publics qui interviennent dans l'encadrement des activités économiques dans un contexte particulier.
Au CARE, nous sommes convaincus que sur les questions qui touchent à l'entreprise, l'heure est à la concertation authentique. L'intérêt économique national doit primer. Pour cela, il doit être pensé comme un projet global et cohérent dont la conception et la conduite requièrent vision stratégique, apport d'expertises et partenariat entre l'ensemble des parties prenantes. La vision administrative, parfois au mépris des formes et de la règle de droit, est malheureusement insuffisante et contre-productive en termes d'efficacité économique et de crédibilité des institutions.
Nous vous proposons dans cette contribution, d'articuler les trois niveaux suivants : le premier niveau est celui du cadre réglementaire à proprement dit. Le deuxième concerne l'exposé des motifs et les enjeux ayant présidé à cette intervention de l'état. Il s'agit ici d'analyser la cohérence interne entre l'exposé des motifs et le contenu des textes. Le troisième niveau est purement prospectif et concerne les scénarios d'évolution possibles.
1. Les décisions
Dans la dernière période, le gouvernement a pris à l'endroit du secteur économique des décisions qui reflètent une révision du cadre réglementaire régissant les activités industrielles et commerciales et leur articulation avec les échanges extérieurs du pays.
Dans une conjoncture où les réserves de change nationales tendent à se fragiliser, ces décisions ont concerné :
le réaménagement du repos hebdomadaire dans le sens d'un week-end semi universel
l'obligation pour les sociétés étrangères d'ouvrir leur capital à des partenaires nationaux ;
une série de mesures intégrées à l'occasion de la loi de finances complémentaire 2009. Les plus médiatisées étant : la limitation des modes de paiement au CREDOC, la règle des 70-30, la suppression du crédit à la consommation et l'obligation faite au dirigeant de se présenter pour certaines formalités administratives.
Toutefois, de nombreuses autres dispositions de la LFC 2009 méritent notre attention (exemples : le droit de préemption sur la cession des participations des actionnaires étrangers ou au profit d'actionnaires étrangers, l'obligation de passage par le CNI, le recours aux prestataires étrangers pour le contrôle des produits à l'international, les 48 fonds d'investissement, ...). CARE publiera dans les jours à venir une note technique détaillée concernant la LFC 2009 où nous reviendrons sur certaines de ces dispositions.
Ces récentes décisions des pouvoirs publics, utiles, voire salutaires dans certains cas, dénotent du grand intérêt accordé à ces questions notamment à la lumière de la grave crise internationale. Elles suggèrent toutefois de nombreuses questions quant à leur cohérence et leurs conséquences à terme sur l'économie nationale.
2. L'exposé des motif et les enjeux
Deux raisons majeures ont été officiellement évoquées par les pouvoirs publics :
La diversification des sources de revenus internes et externes en mettant en avant le primat de la production sur celui de l'importation et en canalisant les IDE (niches d'exportation) ;
la promotion de l'emploi en développant le rôle du secteur privé.
Une analyse approfondie fait ressortir l'enjeu majeur au cœur de ces modifications du cadre réglementaire : l'explosion des importations dans une conjoncture de crise internationale persistante a fragilisé grandement l'économie nationale ( les importations de notre pays ont explosé ces trois dernières années et ont atteint près de 40 milliards de dollars en 2008 (19 milliards, au premier semestre 2009) auxquels il faut ajouter quelque 11 milliards de dollars de services non facteurs (transports, assurances, assistance technique, grands travaux...). A noter la part importante induite par les besoins en équipement et biens intermédiaires des plans de relance initiés (et pas uniquement la consommation des ménages), l'absence de régulation des importations ajoutée au déséquilibre de la balance des services avec la part importante des transferts au titre des dividendes...)
Sur ce constat, il est important de relever que l'ensemble des parties prenantes sont d'accord sur la nécessité pour les pouvoirs publics de réagir afin de juguler ces problèmes. Et nous pouvons affirmer que les récentes mesures peuvent facilement atteindre l'objectif affiché de réduction des importations (5 %) et même le dépasser.
Avant d'analyser sous la forme de questions, la cohérence de ces mesures par rapport aux objectifs affichés et autres dimensions des réformes économiques menées par l'Algérie, deux remarques nous semblent importantes à rappeler :
Sur le plan de la forme, il est à se demander pourquoi choisir un tel support pour impacter des lois importantes comme la loi sur la monnaie et le crédit, le code de commerce, l'ordonnance relative au développement de l'investissement et bien d'autres textes réglementaires. N'est on pas en train de faire jouer un rôle de régulation à la LFC, avec des mesures universelles là où des solutions ciblées seraient plus efficaces ?
Une meilleure stratégie de concertation et de communication durant le processus de préparation et de lancement de ce nouveau cadre réglementaire nous aurait évités des tergiversations et des débats inutiles et contre-productifs.
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