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Le crédit documentaire et la loi de finances complémentaire pour 2009

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  • Le crédit documentaire et la loi de finances complémentaire pour 2009

    Le crédit documentaire et la loi de finances complémentaire pour 2009
    La loi de finances complémentaire pour 2009 a suscité des débats sur les dispositions, notamment celles relatives à la réalisation des importations de biens et de services au moyen exclusif du crédit documentaire.


    Il ressort de ces débats, deux tendances :
    certains seraient favorables à ces nouvelles mesures ;
    d’autres, au contraire, sans toutefois afficher des motivations précises et convaincantes, seraient contre l’application des mesures édictées. Face à ce débat contradictoire, cette contribution s’efforcera, sans prétention de notre part, d’apporter un éclairage sur cet instrument, largement, utilisé dans le commerce international, et ce, à la lumière de notre longue expérience dans la pratique des opérations du commerce extérieur et notamment celle du crédit documentaire. D’emblée, et pour lever toute équivoque, on peut aisément affirmer que le crédit documentaire n’a pas la vocation d’un titre d’importation et ne peut être un instrument de régulation et de contrôle des flux du commerce extérieur ou utilisé à l’effet de décourager les fraudeurs.
    Le crédit documentaire, par abréviation « crédoc », est simplement un instrument de garantie, de paiement et de financement du commerce extérieur. Son objectif est de réaliser un équilibre aussi harmonieux que possible entre les intérêts des parties concernées. Lorsqu’il est affirmé que le choix de cet instrument est retenu par les dispositions de la loi de finances complémentaire pour 2009 pour la meilleure traçabilité qu’il offre par rapport aux autres instruments de paiement, cela paraît excessif.
    En effet, par cette affirmation, on oublie que l’Algérie est sous le régime du contrôle des changes et que les procédures de contrôle commercial et financier des importations de biens mises en place,offrent une traçabilité sur toutes les transactions opérées, par le biais du circuit bancaire, quels que soient, du reste, leurs modes et modalités de paiement.
    Cette préoccupation est donc déjà prise en charge par ces procédures qui gagneraient certainement à être révisées, informatisées et enrichies par une base de données constamment actualisée pour parfaire le système de traitement des opérations et lutter contre les fraudeurs de tous bords. En effet, à la lecture des procédures actuelles en usage, on constate aisément que le crédit documentaire ne peut apporter une solution pour répondre aux préoccupations posées aujourd’hui par certains aspects spécifiques du contrôle commercial et financier des transactions avec l’étranger.
    On craint donc qu’une telle mesure ne véhicule que des conséquences plus négatives que positives pour les opérateurs et donc pour notre pays. Ces appréhensions sont motivées par les quelques raisons, non exhaustives du reste, et développées dans les cinq points suivants :
    1- Le coût des opérations réalisées par crédit documentaire est excessif par rapport aux autres instruments de paiement. En effet, le coût final d’une opération est, d’une façon ou d’une autre, toujours à la charge de l’acheteur et donc du consommateur. La généralisation du crédit documentaire à toutes les transactions induira une augmentation certaine des charges financières au niveau de la balance des paiements et ceci se répercutera sur les prix des produits.
    Cette utilisation généralisée peut, en raison d’engagements excessifs des banques confirmantes, faire réapparaître la pratique du fameux sweetner auquel notre pays avait été soumis pendant toute la période de son déséquilibre financier. Ces surcoûts atteignaient vers la fin des années 1980 le taux de 30% environ de la valeur de la transaction, pendant que la décote du papier algérien sur le marché secondaire durant cette période dépassait également les 30 % de sa valeur, En somme, ce surcoût se répercutera sur la trésorerie du pays et sur celle du consommateur final. Plus encore, et pour peu que les partenaires étrangers imposent systématiquement que les crédits documentaires soient confirmés par leurs banques, on verra s’ accroître le taux de la prime d’assurance pour pays à risque et le niveau du taux de la commission de confirmation.
    Quand bien même, si le bénéficiaire consent un crédit documentaire irrévocable seulement pour faire plaisir à son client, il se peut qu’il ait préalablement obtenu l’accord d’une banque (généralement sa propre banque) pour lui fournir la confirmation à l’insu de la banque émettrice. Cette façon de faire est appelée « confirmation silencieuse ». Celle-ci consiste en un engagement de paiement de la banque qui a pris le risque. Le coût de ce risque est toujours compris dans le prix de vente. Un engagement de la banque confirmante sert à couvrir le fournisseur (bénéficiaire) non seulement de l’insolvabilité de son client, mais également contre le risque pays et le risque de la banque émettrice.
    Il convient, aussi, de noter qu’une banque étrangère qui possède une participation ou une filiale en Algérie verra ses dividendes en devises en hausse en raison de la rentabilité des opérations du commerce extérieur. D’une façon générale, on peut affirmer qu’une telle mesure est plus au goût du vendeur que de l’acheteur si l’on se réfère aux avantages que lui procurent les autres modes de règlement proscrits par cette nouvelle disposition législative.
    2- Cette mesure aura certainement des conséquences sur les conventions et autres accords portant libre-échange entre notre pays et le reste du monde du fait qu’elle ôte toute possibilité de négociation entre les partenaires sur le choix d’un mode de paiement autre que le crédit documentaire. D’emblée, au vu de la contrainte imposée par cette disposition légale, l’importateur n’a aucune marge de manœuvre qui lui permette d’imposer à son partenaire la révision des prix à la baisse, surtout lorsqu’il s’agit de produits spécifiques.
    3- Par cette généralisation du crédit documentaire à toutes les transactions, il est à craindre, (du fait que bon nombre d’hommes d’affaires ne comprennent pas clairement son utilité, ainsi que ses mécanismes et règles internationales qui régissent son ouverture et sa portée) qu’elle se traduise (par méconnaissance) par des conflits avec les banques.
    Bon nombre d’opérateurs ignorent que le crédit documentaire n’a rien à voir avec les marchandises ; dès lors qu’il s’appuie exclusivement sur les documents relatifs à la transaction. De ce fait, ils doivent savoir que les banques ne sont pas concernées par le contrat de vente ou autres accords pour lesquels le crédit est ouvert. Elles n’exercent aucun contrôle sur les marchandises, pas plus qu’elles ne peuvent affirmer leur existence. La responsabilité des banques et leur exonération sont clairement définies par les règles et usages de la CCI auxquels le crédit documentaire se réfère.
    De par sa complexité, cet instrument de garantie, de paiement et de financement exige, (comme pour tout autre instrument remplissant des fonctions similaires), de la compétence technique des intervenants, de l’honnêteté, de la probité, de la bonne foi et de la solvabilité de tous les acteurs concernés. Aussi, le choix des compétences et des qualifications du personnel dédié au traitement et au contrôle des opérations et la mise à jour constante des procédures sont les meilleurs gages de lutte contre les fraudeurs.
    4- S’agissant d’un crédit par signature, les banques ont la faculté de se prononcer sur ce type de transaction. Elles peuvent accepter ou refuser l’ouverture d’un crédit documentaire au client, fut-il provisionné à 100%. En cas de rejet de l’opération, la banque souveraine de sa décision n’a pas à justifier son refus. L’accroissement des engagements, qui seront générés par cette mesure, va certainement contrarier le niveau des ratios des risques de la banque sur sa clientèle.
    Le conseil d’administration aura à veiller scrupuleusement sur le niveau des engagements de la banque car la principale garantie du crédit documentaire réside dans la marchandise qui en fait l’objet et qui sert de gage au banquier. Souvent, certaines marchandises sont, de par leur nature, destinées à l’usage exclusif de l’importateur lui-même. La moindre défaillance ou négligence peut se traduire par une perte partielle ou totale pour la banque.
    à suivre...
    Mieux vaut un cauchemar qui finit qu’un rêve inaccessible qui ne finit pas…

  • #2
    Suite...

    5- En sa qualité d’intermédiaire agréé du contrôle des changes, le banquier est tenu, avant d’accepter d’ouvrir la lettre de crédit documentaire, de s’assurer qu’elle obéit à toutes les règles et exigences fixées par la réglementation des changes et du commerce extérieur. C’est le seul point qui paraît conforter la LFC 2009. Mais cet aspect, à lui seul, ne peut servir à justifier l’utilité de la généralisation d’un tel instrument de paiement. Car dans les autres instruments de paiement (remise documentaire ou transfert libre), ce contrôle se fait selon la nature de la tâche a priori ou a posteriori à différents niveaux de la chaîne de contrôle des opérations.
    Dès lors, on est droit de se demander si une telle généralisation ne pourrait pas être interprétée comme une façon déguisée des autorités financières de réactiver la procédure d’autorisation préalable instituée par l’avis de change de J 972 et abrogée de nos jours. A notre connaissance, il semble que c’est la première fois dans les annales du commerce extérieur qu’un Etat administre le mode de paiement des contrats commerciaux.
    On pourrait dès lors s’interroger sur l’éventualité d’une mise en cause de la responsabilité civile de l’Etat dans certains cas. En conclusion, au vu de cette succincte et modeste analyse, on se demande donc quelle est l’utilité de rendre obligatoire la réalisation des transactions à l’importation au moyen du seul crédit documentaire et pour quelle perspective ou objectif ?
    Quand bien même celui-ci offre plus de transparence dans l’exécution financière des transactions, ce qu’il faut surtout noter c’est que l’expérience a démontré que la falsification et la fraude sont les risques les plus redoutables en matière de crédit documentaire contre lesquels l’acheteur lui-même demeure désarmé. Il est donc inutile de croire ou de faire croire que cet instrument peut résoudre les problèmes que pose la fraude ou la falsification. Il revient à l’Etat (en impliquant peut être ses partenaires) de mettre les moyens dont il dispose pour lutter contre ce fléau et aux opérateurs du commerce extérieur d’agir en toute circonstance sans porter, avant tout, atteinte aux intérêts de leur pays. Ce n’est qu’à ce prix que notre nation sera forte et respectée par ses partenaires.
    Pour contraindre les opérateurs peu scrupuIeux à respecter les règles établies, il est impératif que l’Elat instaure un guichet unique mettant en œuvre une procédure d’échange de données informatisées (EOl) pour cerner convenablement tous les circuits de traitement et de contrôle commercial et financier de l’ensemble des transactions avec l’étranger. Ce n’est qu’à ce prix qu’on peut disposer d’outils performants au service des intervenants dans les activités du commerce extérieur.
    Le règlement du litige récent entre les USA et l’Union des banques suisses relatif à la fuite des capitaux américains vers cette banque est un exemple à méditer par Ies pays qui veulent réellement lutter contre les fraudeurs et défendre leurs intérêts dans le monde.
    L’auteur est : Ex-directeur central et inspecteur général de banque, auteur d’un ouvrage sur le crédit documentaire
    El WAtan
    Mieux vaut un cauchemar qui finit qu’un rêve inaccessible qui ne finit pas…

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