Alejandro Jara : «Le Maroc a supporté la crise beaucoup mieux que certains pays développés»
Alejandro Jara Selon Alejandro Jara directeur général adjoint de l’OMC, le Maroc doit se préoccuper de développer des relations très riches et très approfondies pour diversifier son marché et ses opportunités d’investissement.
ALM : Quel est votre diagnostic par rapport à la crise financière mondiale ?
Alejandro Jara : Il faut dire que la crise a été très profonde comme tout le monde a pu le voir. Mais, je crois qu’on assiste à une récupération des économies grâce à la politique de plusieurs gouvernements de mettre beaucoup d’argent dans l’économie notamment au niveau de la demande. Mais, il s’avère aussi qu’on a des signes positifs. Il y a des choses à faire à long terme notamment par rapport aux problèmes de déficit et de dettes extérieures de divers pays. Dans l’ immédiat, c’est une récupération positive, bien que le problème du chômage demeure. Même si statistiquement les chiffres de populations actives sont positifs, je crois qu’on va assister à un problème de chômage élevé pendant quelque temps. Cela pose un problème politique et social aux économies. Et il faut en être conscient et prendre des mesures dans ce sens.
Que préconise l’OMC comme mesures pour surmonter cette crise ?
Je ne peux pas dire quelles sont les mesures. Cela dépend de la situation objective de chaque économie. Mais, c’est surtout un problème humain. Et je dois dire qu’il y a des pays qui disposent de protections mieux que d’autres. En Europe en général, les systèmes de protection sociale sont mieux qu’aux Etats-Unis par exemple. Évidemment, dans des pays en voie de développement, il y a moins de ressources et cela donne parfois des systèmes de protection moins efficaces.
Justement en Europe, est-ce que le cas de la Grèce influera sur l’économie européenne et mondiale ?
Je crois que la crise de la Grèce n’a pas un impact direct sur l’économie dans l’immédiat. Mais si les marchés n’ont pas confiance dans les mesures prises pour le cas de la Grèce, il y a le risque que les marchés perdent confiance dans d’autres économies qui ont des problèmes pas aussi graves que ceux de la Grèce. Ce qui pourrait créer une autre crise mondiale dans le marché financier.
C’est un risque que le Fonds monétaire international et l’union européenne ont suffisamment limité à travers des mesures qui redonnent la confiance au marché. Finalement, il y a des réponses efficaces avec un montant suffisant pour faire face au défi de la situation grecque.
Comment évaluez-vous les mesures prises par le Maroc pour faire face à la crise ?
Je ne suis pas tout à fait au courant des détails des mesures prises par le Maroc. Mais les chiffres sont éloquents. Le Maroc a conservé un taux de croissance positif. Les pronostiques sont aussi positifs. Le Maroc a supporté la crise beaucoup mieux que d’autres pays, même mieux que certains pays développés. Cela reflète la bonne politique macro-économique appliquée par le Maroc. Le Maroc a une économie très ouverte. Le Maroc va dans la bonne direction. En tant qu’économie en développement, il est déjà très intégré dans l’économie internationale et il le sera plus dans l’avenir.
Quelles sont les mesures que doit prendre le Maroc pour une meilleure émergence dans le marché mondial ?
Sur le plan commercial, le Maroc a une politique commerciale très ouverte et transparente. Mais il y a des mesures à prendre pour faciliter encore les échanges au niveau des importations et exportations. Et il y a aussi des mesures à prendre sur le plan de la compétitivité. C’est principalement un défi que doit relever le secteur privé, avec les investissements pour profiter des nouvelles opportunités de commerce et d’investissement qui existent et qui sont de plus en plus présentes dans le contexte de cette économie mondiale qui commence à récupérer.
Quelle est la place du Maroc dans l’économie mondiale et particulièrement en Méditerranée ?
Le Maroc a une situation géopolitique, commerciale et économique privilégiée au niveau de la Méditerranée, principalement dans ses rapports avec l’Europe et la France en particulier. Il y a beaucoup de Marocains qui travaillent en Europe, cela constitue aussi une relation très riche et importante avec l’Europe. Mais, je crois que le Maroc devrait avancer et évoluer vers une politique globale, devenir ce qu’on appelle une «global trade». Il doit se préoccuper d’avoir des relations très riches et très approfondies avec tout le monde : regarder vers l’Amérique latine, l’Asie, le reste de l’Afrique, etc. tout cela pour diversifier le marché et les opportunités d’investissement.
C’est une responsabilité du secteur privé, bien sûr avec l’appui de l’Etat, pour aller vers d’autres marchés. Je dis souvent que «les exportateurs ne font pas la distinction entre marché développé ou en développement, ce sont tous des marchés. Et ils sont tous de bons marchés». Même si c’est un petit marché au bon milieu du Pacifique, cela doit être important pour un exportateur. Il faut y aller, établir des relations. Cela prend du temps. C’est un effort de personnes qui s’appliquent et qui finalement vont trouver un marché. Et réussir des fois et des fois non. Mais c’est un effort qu’il faut faire.
Vous avez inauguré ce lundi la chaire de l’OMC attribuée l’Université Mohammed V Souissi. Qu’en est-il au juste ?
C’est un nouveau programme que nous avons commencé, il y a très peu de temps. On a établi des chaires dans quelques pays en voie de développement dont le Maroc. On a organisé un concours que l’Université Mohammed V Souissi a remporté avec d’autres centres académiques dans d’autres pays. Parce qu’elle se distingue par la qualité, l’expérience et la connaissance. L’Université a été notre partenaire, il y a quelques années pour faire un cours régional de politique commerciale. Donc c’était tout à fait naturel que l’Université soit sélectionnée pour ce programme qui a une durée de quatre ans prolongeable pour chaque centre. Il s’agit principalement pour la chaire de faire des cours par exemple sur le commerce international, le droit économique de l’OMC, ou des cours sur l’économie de la politique commerciale. Cela peut aussi concerner entre autres, la santé publique, la propriété intellectuelle... ainsi que divers autres thèmes qui sont importants pour l’OMC. Deuxièmement, il s’agit aussi de faire des recherches et des liens avec d’autres centres de recherche ainsi que des colloques et séminaires. Finalement, c’est un programme qui va être défini avec l’Université, on n’a pas de prescriptions fixes.
Bio express
Alejandro Jara est né en 1949 à Santiago (Chili). Il a fait ses études secondaires à Rio de Janeiro et à Santiago. En 1973, il a obtenu un diplôme de droit à l’Universidad de Chili. Grâce à une bourse Fulbright, il a poursuivi ses études à la Faculté de droit de l’Université California à Berkeley (1975-1976). En juin 2000, M. Jara a été nommé ambassadeur, représentant permanent du Chili auprès de l’OMC, à Genève. En 2001, il a présidé le Comité du commerce et de l’environnement à l’OMC. En février 2002 il a été élu président de la Session extraordinaire du Conseil du commerce des services, qui s’occupe des négociations prescrites par les ministres à Doha. Il est l’auteur de nombreux articles et ouvrages sur le commerce international.
Alejandro Jara Selon Alejandro Jara directeur général adjoint de l’OMC, le Maroc doit se préoccuper de développer des relations très riches et très approfondies pour diversifier son marché et ses opportunités d’investissement.
ALM : Quel est votre diagnostic par rapport à la crise financière mondiale ?
Alejandro Jara : Il faut dire que la crise a été très profonde comme tout le monde a pu le voir. Mais, je crois qu’on assiste à une récupération des économies grâce à la politique de plusieurs gouvernements de mettre beaucoup d’argent dans l’économie notamment au niveau de la demande. Mais, il s’avère aussi qu’on a des signes positifs. Il y a des choses à faire à long terme notamment par rapport aux problèmes de déficit et de dettes extérieures de divers pays. Dans l’ immédiat, c’est une récupération positive, bien que le problème du chômage demeure. Même si statistiquement les chiffres de populations actives sont positifs, je crois qu’on va assister à un problème de chômage élevé pendant quelque temps. Cela pose un problème politique et social aux économies. Et il faut en être conscient et prendre des mesures dans ce sens.
Que préconise l’OMC comme mesures pour surmonter cette crise ?
Je ne peux pas dire quelles sont les mesures. Cela dépend de la situation objective de chaque économie. Mais, c’est surtout un problème humain. Et je dois dire qu’il y a des pays qui disposent de protections mieux que d’autres. En Europe en général, les systèmes de protection sociale sont mieux qu’aux Etats-Unis par exemple. Évidemment, dans des pays en voie de développement, il y a moins de ressources et cela donne parfois des systèmes de protection moins efficaces.
Justement en Europe, est-ce que le cas de la Grèce influera sur l’économie européenne et mondiale ?
Je crois que la crise de la Grèce n’a pas un impact direct sur l’économie dans l’immédiat. Mais si les marchés n’ont pas confiance dans les mesures prises pour le cas de la Grèce, il y a le risque que les marchés perdent confiance dans d’autres économies qui ont des problèmes pas aussi graves que ceux de la Grèce. Ce qui pourrait créer une autre crise mondiale dans le marché financier.
C’est un risque que le Fonds monétaire international et l’union européenne ont suffisamment limité à travers des mesures qui redonnent la confiance au marché. Finalement, il y a des réponses efficaces avec un montant suffisant pour faire face au défi de la situation grecque.
Comment évaluez-vous les mesures prises par le Maroc pour faire face à la crise ?
Je ne suis pas tout à fait au courant des détails des mesures prises par le Maroc. Mais les chiffres sont éloquents. Le Maroc a conservé un taux de croissance positif. Les pronostiques sont aussi positifs. Le Maroc a supporté la crise beaucoup mieux que d’autres pays, même mieux que certains pays développés. Cela reflète la bonne politique macro-économique appliquée par le Maroc. Le Maroc a une économie très ouverte. Le Maroc va dans la bonne direction. En tant qu’économie en développement, il est déjà très intégré dans l’économie internationale et il le sera plus dans l’avenir.
Quelles sont les mesures que doit prendre le Maroc pour une meilleure émergence dans le marché mondial ?
Sur le plan commercial, le Maroc a une politique commerciale très ouverte et transparente. Mais il y a des mesures à prendre pour faciliter encore les échanges au niveau des importations et exportations. Et il y a aussi des mesures à prendre sur le plan de la compétitivité. C’est principalement un défi que doit relever le secteur privé, avec les investissements pour profiter des nouvelles opportunités de commerce et d’investissement qui existent et qui sont de plus en plus présentes dans le contexte de cette économie mondiale qui commence à récupérer.
Quelle est la place du Maroc dans l’économie mondiale et particulièrement en Méditerranée ?
Le Maroc a une situation géopolitique, commerciale et économique privilégiée au niveau de la Méditerranée, principalement dans ses rapports avec l’Europe et la France en particulier. Il y a beaucoup de Marocains qui travaillent en Europe, cela constitue aussi une relation très riche et importante avec l’Europe. Mais, je crois que le Maroc devrait avancer et évoluer vers une politique globale, devenir ce qu’on appelle une «global trade». Il doit se préoccuper d’avoir des relations très riches et très approfondies avec tout le monde : regarder vers l’Amérique latine, l’Asie, le reste de l’Afrique, etc. tout cela pour diversifier le marché et les opportunités d’investissement.
C’est une responsabilité du secteur privé, bien sûr avec l’appui de l’Etat, pour aller vers d’autres marchés. Je dis souvent que «les exportateurs ne font pas la distinction entre marché développé ou en développement, ce sont tous des marchés. Et ils sont tous de bons marchés». Même si c’est un petit marché au bon milieu du Pacifique, cela doit être important pour un exportateur. Il faut y aller, établir des relations. Cela prend du temps. C’est un effort de personnes qui s’appliquent et qui finalement vont trouver un marché. Et réussir des fois et des fois non. Mais c’est un effort qu’il faut faire.
Vous avez inauguré ce lundi la chaire de l’OMC attribuée l’Université Mohammed V Souissi. Qu’en est-il au juste ?
C’est un nouveau programme que nous avons commencé, il y a très peu de temps. On a établi des chaires dans quelques pays en voie de développement dont le Maroc. On a organisé un concours que l’Université Mohammed V Souissi a remporté avec d’autres centres académiques dans d’autres pays. Parce qu’elle se distingue par la qualité, l’expérience et la connaissance. L’Université a été notre partenaire, il y a quelques années pour faire un cours régional de politique commerciale. Donc c’était tout à fait naturel que l’Université soit sélectionnée pour ce programme qui a une durée de quatre ans prolongeable pour chaque centre. Il s’agit principalement pour la chaire de faire des cours par exemple sur le commerce international, le droit économique de l’OMC, ou des cours sur l’économie de la politique commerciale. Cela peut aussi concerner entre autres, la santé publique, la propriété intellectuelle... ainsi que divers autres thèmes qui sont importants pour l’OMC. Deuxièmement, il s’agit aussi de faire des recherches et des liens avec d’autres centres de recherche ainsi que des colloques et séminaires. Finalement, c’est un programme qui va être défini avec l’Université, on n’a pas de prescriptions fixes.
Bio express
Alejandro Jara est né en 1949 à Santiago (Chili). Il a fait ses études secondaires à Rio de Janeiro et à Santiago. En 1973, il a obtenu un diplôme de droit à l’Universidad de Chili. Grâce à une bourse Fulbright, il a poursuivi ses études à la Faculté de droit de l’Université California à Berkeley (1975-1976). En juin 2000, M. Jara a été nommé ambassadeur, représentant permanent du Chili auprès de l’OMC, à Genève. En 2001, il a présidé le Comité du commerce et de l’environnement à l’OMC. En février 2002 il a été élu président de la Session extraordinaire du Conseil du commerce des services, qui s’occupe des négociations prescrites par les ministres à Doha. Il est l’auteur de nombreux articles et ouvrages sur le commerce international.
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