Rapport complet ici: http://www.esisc.org/documents/pdf/f...ionale-412.pdf
7. Relations entre le Polisario et l’Algérie
Les relations du Polisario avec l’Etat qui est son soutien le plus appuyé, l’Algérie,
remontent à la création du mouvement séparatiste sahraoui. Alger a su
instrumentaliser le conflit du Sahara occidental pour chercher à déstabiliser le Maroc,
son rival régional.
7.1. Un soutien historique au Polisario
Depuis sa création en 1972, le Front Polisario a toujours bénéficié du soutien de
l’Algérie, qui appuie ses revendications indépendantistes pour des raisons autant
idéologiques que géopolitiques.
Lui-même né d’une guerre de libération nationale, l’Etat algérien s’est naturellement
impliqué dans la question sahraouie. C’est ainsi l’activisme diplomatique
d’Alger qui a permis à la République arabe sahraouie démocratique
d’obtenir la reconnaissance d’une trentaine d’Etats africains et de l’Union
africaine, dont le Maroc s’est retiré en 1984. Le parcours du président algérien
Abdelaziz Bouteflika, ancien membre de l’Armée de libération nationale (ALN) et
ancien ministre du président Ahmed Ben Bella, a sans doute aussi contribué à
consolider la position algérienne. Le président Bouteflika, qui perçoit la question du
Sahara occidental comme l’un des derniers conflits de la décolonisation53, a en effet
réaffirmé à plusieurs reprises le soutien de l’Algérie à « cette cause et toutes les autres
conformément à la charte de l’ONU en vue d’aider le peuple sahraoui ainsi que tous
les peuples à recouvrer leur liberté et leur indépendance54 .»
S’il est donc cohérent avec les fondements idéologiques de l’Etat, le soutien
algérien au Polisario répond également aux objectifs stratégiques d’Alger
au Maghreb. Le Maroc accuse en effet l’Algérie d’avoir « instrumentalisé » le
Polisario pour contrer sa politique et s’assurer un avantage dans la compétition pour
la première place en Afrique du Nord. De plus, la création d’un Etat indépendant au
7.2. Une relation qui entrave le processus de négociations
Le Maroc a accusé l’Algérie d’avoir joué un rôle majeur dans l’échec du quatrième
round de Manhasset. Ce sont, en effet les autorités algériennes qui ont
orchestré la plus grande part de la campagne médiatique qui a conduit
au départ de Peter van Walsum, jugé trop proche des thèses marocaines55.
Confrontée ces dernières années à plusieurs échecs diplomatiques56, l’Algérie a en
effet déployé d’importants efforts pour retourner l’opinion internationale sur la
question sahraouie.
Elle a ainsi développé une nouvelle stratégie de lobbying pour obtenir l’appui de
parlements occidentaux. Un groupe parlementaire de « solidarité avec le peuple
sahraoui » s’est ainsi constitué en juillet dernier au parlement britannique,
réunissant députés travaillistes et conservateurs. Le député conservateur John
Bercow, membre de ce groupe, a ainsi interpellé la secrétaire d’Etat aux Affaires
étrangères, Meg Munn, sur « l’absence de réaction du gouvernement face à des
violations des droits de l’homme perpétrées par le Maroc au Sahara occidental57 ».
Par ailleurs, Rabat accuse toujours le Polisario et l’Algérie d’essayer de profiter des
accords de cessez-le-feu conclus le 6 octobre 1991 grâce à la présence de la
MINURSO pour réinvestir la zone tampon évacuée par les Forces armées
marocaines. Selon des sources marocaines, des « éléments militaires »
algériens et du Polisario auraient en effet débuté l’installation de
nouveaux camps à Tifirati et à Mijik.
Selon Mohamed Talib, membre du Conseil royal consultatif pour les affaires
sahariennes, « ce mouvement, qui marque une nouvelle escalade dans le conflit
autour du Sahara, se veut la traduction de la volonté d’Alger, déjà exaspérée par
l’existence de la population sahraouie dans les camps de Tindouf.58 » Il s’inscrit en
effet dans l’objectif de repeuplement de la zone tampon exposé au 12ème congrès du
Polisario. Par ailleurs, Rabat accuse également l’Algérie d’apporter un soutien
financier à des opérations de déstabilisation dans la partie du Sahara
occidental sous administration marocaine.
7.3. Ambiguïtés de la position d’Alger
La presse marocaine a évoqué récemment un document déclassifié par la CIA
dévoilant une offre faite par l’ancien président algérien Chadli Benjedid
au roi Hassan II en 1988, portant sur un plan d’autonomie du Sahara
occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine. Le texte précise que
le président Benjedid était à l’époque « frustré par l’incapacité du Polisario à
enregistrer une victoire militaire59 ». Cette proposition, qui aurait été largement
similaire au plan d’autonomie marocain rejeté à Manhasset, démontre que
plusieurs courants cohabitent depuis cette époque à Alger au sujet du
problème sahraoui.
Aujourd’hui encore, s’affrontent au sommet du pouvoir algérien le clan des militaires
et celui des technocrates pragmatiques, plus ouverts à une solution négociée avec le
Maroc. C’est cette faction qui a mené au rapprochement opéré ces dernières années
par l’Algérie avec les Etats-Unis, la France ou l’Espagne, motivé par la nécessité de
rétablir l’économie et l’image internationale du pays après les évènements de la
décennie 1990. De plus, la nécessité d’améliorer la lutte antiterroriste en Afrique du
Nord a amené une coopération nouvelle avec les autorités marocaines.
L’armée, principal soutien du Front Polisario, continue toutefois de jouer
de son influence dans l’entourage du président Bouteflika pour
maintenir la position algérienne sur le Sahara occidental. Avec la lutte
antiterroriste, l’éventualité d’un conflit militaire avec le Maroc sur la
question sahraouie fournit en effet l’une des principales justifications du
programme massif de modernisation de l’armée entrepris depuis 1999 et
qui a fait de l’Algérie – un pays qui n’a aucun ennemi extérieur déclaré –
le principal acheteur d’armes lourdes et de systèmes d’armes
sophistiqués du camp africain.
Par ailleurs, le maintien d’une situation de conflit permet à l’armée de
conserver un rôle prépondérant dans les affaires algériennes. De plus,
chaque clan essaie de se positionner alors que commence à se poser la question de la
succession d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence de la république, pour laquelle le
Premier ministre Ahmed Ouyahia, proche des militaires, fait figure de favori. Dans ce
cadre, les problèmes de politiques intérieures influenceront donc plus que jamais le
positionnement de l’Algérie sur la question du Sahara, provoquant, par voie de
conséquence, de nouvelles incertitudes sur l’évolution du processus de règlement du
conflit.
7. Relations entre le Polisario et l’Algérie
Les relations du Polisario avec l’Etat qui est son soutien le plus appuyé, l’Algérie,
remontent à la création du mouvement séparatiste sahraoui. Alger a su
instrumentaliser le conflit du Sahara occidental pour chercher à déstabiliser le Maroc,
son rival régional.
7.1. Un soutien historique au Polisario
Depuis sa création en 1972, le Front Polisario a toujours bénéficié du soutien de
l’Algérie, qui appuie ses revendications indépendantistes pour des raisons autant
idéologiques que géopolitiques.
Lui-même né d’une guerre de libération nationale, l’Etat algérien s’est naturellement
impliqué dans la question sahraouie. C’est ainsi l’activisme diplomatique
d’Alger qui a permis à la République arabe sahraouie démocratique
d’obtenir la reconnaissance d’une trentaine d’Etats africains et de l’Union
africaine, dont le Maroc s’est retiré en 1984. Le parcours du président algérien
Abdelaziz Bouteflika, ancien membre de l’Armée de libération nationale (ALN) et
ancien ministre du président Ahmed Ben Bella, a sans doute aussi contribué à
consolider la position algérienne. Le président Bouteflika, qui perçoit la question du
Sahara occidental comme l’un des derniers conflits de la décolonisation53, a en effet
réaffirmé à plusieurs reprises le soutien de l’Algérie à « cette cause et toutes les autres
conformément à la charte de l’ONU en vue d’aider le peuple sahraoui ainsi que tous
les peuples à recouvrer leur liberté et leur indépendance54 .»
S’il est donc cohérent avec les fondements idéologiques de l’Etat, le soutien
algérien au Polisario répond également aux objectifs stratégiques d’Alger
au Maghreb. Le Maroc accuse en effet l’Algérie d’avoir « instrumentalisé » le
Polisario pour contrer sa politique et s’assurer un avantage dans la compétition pour
la première place en Afrique du Nord. De plus, la création d’un Etat indépendant au
7.2. Une relation qui entrave le processus de négociations
Le Maroc a accusé l’Algérie d’avoir joué un rôle majeur dans l’échec du quatrième
round de Manhasset. Ce sont, en effet les autorités algériennes qui ont
orchestré la plus grande part de la campagne médiatique qui a conduit
au départ de Peter van Walsum, jugé trop proche des thèses marocaines55.
Confrontée ces dernières années à plusieurs échecs diplomatiques56, l’Algérie a en
effet déployé d’importants efforts pour retourner l’opinion internationale sur la
question sahraouie.
Elle a ainsi développé une nouvelle stratégie de lobbying pour obtenir l’appui de
parlements occidentaux. Un groupe parlementaire de « solidarité avec le peuple
sahraoui » s’est ainsi constitué en juillet dernier au parlement britannique,
réunissant députés travaillistes et conservateurs. Le député conservateur John
Bercow, membre de ce groupe, a ainsi interpellé la secrétaire d’Etat aux Affaires
étrangères, Meg Munn, sur « l’absence de réaction du gouvernement face à des
violations des droits de l’homme perpétrées par le Maroc au Sahara occidental57 ».
Par ailleurs, Rabat accuse toujours le Polisario et l’Algérie d’essayer de profiter des
accords de cessez-le-feu conclus le 6 octobre 1991 grâce à la présence de la
MINURSO pour réinvestir la zone tampon évacuée par les Forces armées
marocaines. Selon des sources marocaines, des « éléments militaires »
algériens et du Polisario auraient en effet débuté l’installation de
nouveaux camps à Tifirati et à Mijik.
Selon Mohamed Talib, membre du Conseil royal consultatif pour les affaires
sahariennes, « ce mouvement, qui marque une nouvelle escalade dans le conflit
autour du Sahara, se veut la traduction de la volonté d’Alger, déjà exaspérée par
l’existence de la population sahraouie dans les camps de Tindouf.58 » Il s’inscrit en
effet dans l’objectif de repeuplement de la zone tampon exposé au 12ème congrès du
Polisario. Par ailleurs, Rabat accuse également l’Algérie d’apporter un soutien
financier à des opérations de déstabilisation dans la partie du Sahara
occidental sous administration marocaine.
7.3. Ambiguïtés de la position d’Alger
La presse marocaine a évoqué récemment un document déclassifié par la CIA
dévoilant une offre faite par l’ancien président algérien Chadli Benjedid
au roi Hassan II en 1988, portant sur un plan d’autonomie du Sahara
occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine. Le texte précise que
le président Benjedid était à l’époque « frustré par l’incapacité du Polisario à
enregistrer une victoire militaire59 ». Cette proposition, qui aurait été largement
similaire au plan d’autonomie marocain rejeté à Manhasset, démontre que
plusieurs courants cohabitent depuis cette époque à Alger au sujet du
problème sahraoui.
Aujourd’hui encore, s’affrontent au sommet du pouvoir algérien le clan des militaires
et celui des technocrates pragmatiques, plus ouverts à une solution négociée avec le
Maroc. C’est cette faction qui a mené au rapprochement opéré ces dernières années
par l’Algérie avec les Etats-Unis, la France ou l’Espagne, motivé par la nécessité de
rétablir l’économie et l’image internationale du pays après les évènements de la
décennie 1990. De plus, la nécessité d’améliorer la lutte antiterroriste en Afrique du
Nord a amené une coopération nouvelle avec les autorités marocaines.
L’armée, principal soutien du Front Polisario, continue toutefois de jouer
de son influence dans l’entourage du président Bouteflika pour
maintenir la position algérienne sur le Sahara occidental. Avec la lutte
antiterroriste, l’éventualité d’un conflit militaire avec le Maroc sur la
question sahraouie fournit en effet l’une des principales justifications du
programme massif de modernisation de l’armée entrepris depuis 1999 et
qui a fait de l’Algérie – un pays qui n’a aucun ennemi extérieur déclaré –
le principal acheteur d’armes lourdes et de systèmes d’armes
sophistiqués du camp africain.
Par ailleurs, le maintien d’une situation de conflit permet à l’armée de
conserver un rôle prépondérant dans les affaires algériennes. De plus,
chaque clan essaie de se positionner alors que commence à se poser la question de la
succession d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence de la république, pour laquelle le
Premier ministre Ahmed Ouyahia, proche des militaires, fait figure de favori. Dans ce
cadre, les problèmes de politiques intérieures influenceront donc plus que jamais le
positionnement de l’Algérie sur la question du Sahara, provoquant, par voie de
conséquence, de nouvelles incertitudes sur l’évolution du processus de règlement du
conflit.
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