Ce sont des Marocains musulmans qui fréquentent les bars, brasseries et boîtes de nuit et qui achètent bières, bouteilles de vin et autres liqueurs dans les supermarchés du pays. Pourtant, au nom d’un arrêté de 1967, ils sont considérés comme des hors-la-loi. Avec des conséquences dramatiques pour la santé publique en l’absence d’une prise en charge des plus “accros” d’entre eux.
Casablanca. Les bars du centre-ville sont pris d’assaut quelques minutes après la sortie des bureaux. Sur le Bd Mohammed V, au Maârif, à Mers Sultan comme du côté de Bourgogne, les brasseries deviennent un lieu de rencontre qui rassemble cadres, employés, avocats ou journalistes. Tous se regroupent pour boire une bière, partager une bouteille de pinard ou trinquer un “kasse” (un verre de whisky, gin, vodka et autres liqueurs). D’autres bars, plus populaires, abritent un autre type de faune. Celle des “manouvriya”. Dans ces “bouges” de Casablanca, les bières “Aïcha twila” et Stork coulent à flots. D’autres clients préfèrent “rrouj”, le vin bon marché dont la fameuse bouteille Guerrouane est la plus prisée. Tous sont des habitués des brasseries.
Supermarchés, bars et guerrabas…
A la fin de la journée, ils se donnent rendez-vous dans leur bar préféré pour siroter une bière afin « d’oublier les tracas d’une journée de travail ». Une pause d’une ou deux heures avant de rentrer à la maison. D’autres rallongent leurs soirées jusqu’à une heure tardive de la nuit. « A 23 heures, les bars ferment mais on peut se rabattre sur les bars-restaurants qui restent ouverts jusqu’à 1h00 du matin. Et si l’envie est encore là, les dancings, eux, ne ferment qu’à 3h00 », explique cet habitué des comptoirs. Les Marocains sont friands de produits éthyliques. Un tour du côté des grandes surfaces ou dans les épiceries qui en proposent la vente donne une idée sur le succès que rencontrent les boissons alcoolisées.
Les stands d’alcool dans Acima, Marjane et autre Makro ne désemplissent jamais. Et le rush est à son comble entre 18 et 20h, heure de fermeture des débits de boissons. « On a toutes les peines du monde à fermer les portes métalliques à 20h00, surtout les vendredis et samedis ou avant une fête religieuse. Quelquefois, on a même droit à des sit-in de protestation », ironise cet employé de Marjane dans le quartier de Aïn Sebaâ.
Restent les « guerrabas », des pourvoyeurs illégaux d’alcool que l’on retrouve pratiquement dans tous les quartiers de la ville. Ces “revendeurs” s’activent particulièrement durant les fêtes religieuses, quand les débits de boissons sont obligés de fermer. Ils alimentent tous ceux qui ont eu la maladresse de ne pas prévoir leur stock pour les trois jours d’arrêt. Les prix peuvent doubler ou même tripler mais il y a toujours preneurs. Ailleurs, dans les grandes villes, même topo. A Rabat, Marrakech, Agadir ou Tanger, les bars sont souvent bondés. Alors que dans les petits patelins, les distilleries clandestines de l’eau-de-vie (mahiya) alimentent la population rurale de leur dose de boissons éthyliques. Cette activité a été longuement exercée par les juifs marocains, connus pour produire une “mahiya” de bonne qualité et le vin kacher dont le fameux Rabbi Jacob.
Les Marocains sont friands d’alcool. Tous âges et classes sociales confondus. Et ce business ne draine pas seulement beaucoup d’argent pour l’Etat (en 2006, il a récolté plus de 723 millions de dirhams de taxe intérieure de consommation) mais cette activité donne à une large frange de la population les moyens de subsister. Les bars, restaurants, cabarets et autres boîtes de nuit emploient des milliers de serveurs, barmen et barmaids. Et l’activité permet à d’autres secteurs de profiter de la faune nocturne. Notamment les chauffeurs de taxi qui font leur blé presque exclusivement avec les “skaïriya”. « C’est simple. Durant les fêtes religieuses, le business est réduit à néant », chuchote ce taxi driver. Ce qui n’est pas du goût des islamistes depuis que leur représentant légal, le PJD, dispose d’élus au Parlement.
Ces dernières années, leurs parlementaires tiennent à agir sur ce registre. Surtout que les Acima et les Marjane ont décidé de mettre la bière, le vin et autres liqueurs à la disposition des habitants des zones périphériques (Aïn Sebaâ, My Rachid, Fida…). Des jeunes qui achètent en toute tranquillité bière et vin dans un magasin d’un quartier populaire est un spectacle qui est loin de plaire aux islamistes. Leur réaction ne s’est pas fait attendre. Dans leurs tribunes comme au Parlement, ils ont demandé (et le font encore d’ailleurs) l’application de la loi « stipulant qu’il est interdit de servir de l’alcool aux musulmans ». En effet, l’interdiction pour les Marocains musulmans de consommer de l’alcool, qui a été instaurée par le colonisateur, a été entérinée par l’arrêté viziriel du 17 juillet 1967 (B.O. N° 2856 du 26 juillet 1967 : 829) émanant du Directeur du Cabinet Royal.
Les responsables du ministère de l’Intérieur se sont ingéniés à leur faciliter la tâche en sortant l’argument classique : la présence d’une communauté étrangère nécessite la présence de compartiments d’alcool. Archifaux. Cette assertion faite par l’Exécutif est contredite par le profil des clients des produits alcoolisés composé généralement de Marocains musulmans. Les supermarchés, les bars et les discos du royaume font 99% de leurs bénéfices avec les Marocains. Et ce sont des entreprises nationales qui produisent de la bière locale, Flag et Stork, entre autres et des vins bien de chez nous (Guerrouane, Médaillon, Domaine du Sahari…). Leurs produits sont destinés non pas à l’exportation mais à la consommation locale. La bière Flag de la ville de Fès a obtenu en 1981 la médaille d’or selon le classement de la qualité à Amsterdam.
Selon une étude récente, la production des produits alcoolisés nationaux a connu une augmentation de 21% entre 2000 et 2005, s’installant à près de 153 millions de litres en 2005. Les ventes de la bière ont enregistré plus de 108,3 millions de litres en 2005, une hausse de 25% par rapport aux chiffres de 2000. Sans parler de l’immense quantité de produits éthyliques de contrebande qui inondent le marché en provenance d’Espagne, de Sebta et Melillia. Pour le compte de l’année 2005, les seules autorités d’Oujda ont confisqué près de 35.000 bouteilles dont plus de 20.000 de whisky. D’énormes quantités de gin, pastis, bourbon, en plus du vin espagnol, proviennent de Sebta et d’Espagne à destination du marché du nord du royaume.
La suite...
Casablanca. Les bars du centre-ville sont pris d’assaut quelques minutes après la sortie des bureaux. Sur le Bd Mohammed V, au Maârif, à Mers Sultan comme du côté de Bourgogne, les brasseries deviennent un lieu de rencontre qui rassemble cadres, employés, avocats ou journalistes. Tous se regroupent pour boire une bière, partager une bouteille de pinard ou trinquer un “kasse” (un verre de whisky, gin, vodka et autres liqueurs). D’autres bars, plus populaires, abritent un autre type de faune. Celle des “manouvriya”. Dans ces “bouges” de Casablanca, les bières “Aïcha twila” et Stork coulent à flots. D’autres clients préfèrent “rrouj”, le vin bon marché dont la fameuse bouteille Guerrouane est la plus prisée. Tous sont des habitués des brasseries.
Supermarchés, bars et guerrabas…
A la fin de la journée, ils se donnent rendez-vous dans leur bar préféré pour siroter une bière afin « d’oublier les tracas d’une journée de travail ». Une pause d’une ou deux heures avant de rentrer à la maison. D’autres rallongent leurs soirées jusqu’à une heure tardive de la nuit. « A 23 heures, les bars ferment mais on peut se rabattre sur les bars-restaurants qui restent ouverts jusqu’à 1h00 du matin. Et si l’envie est encore là, les dancings, eux, ne ferment qu’à 3h00 », explique cet habitué des comptoirs. Les Marocains sont friands de produits éthyliques. Un tour du côté des grandes surfaces ou dans les épiceries qui en proposent la vente donne une idée sur le succès que rencontrent les boissons alcoolisées.
Les stands d’alcool dans Acima, Marjane et autre Makro ne désemplissent jamais. Et le rush est à son comble entre 18 et 20h, heure de fermeture des débits de boissons. « On a toutes les peines du monde à fermer les portes métalliques à 20h00, surtout les vendredis et samedis ou avant une fête religieuse. Quelquefois, on a même droit à des sit-in de protestation », ironise cet employé de Marjane dans le quartier de Aïn Sebaâ.
Restent les « guerrabas », des pourvoyeurs illégaux d’alcool que l’on retrouve pratiquement dans tous les quartiers de la ville. Ces “revendeurs” s’activent particulièrement durant les fêtes religieuses, quand les débits de boissons sont obligés de fermer. Ils alimentent tous ceux qui ont eu la maladresse de ne pas prévoir leur stock pour les trois jours d’arrêt. Les prix peuvent doubler ou même tripler mais il y a toujours preneurs. Ailleurs, dans les grandes villes, même topo. A Rabat, Marrakech, Agadir ou Tanger, les bars sont souvent bondés. Alors que dans les petits patelins, les distilleries clandestines de l’eau-de-vie (mahiya) alimentent la population rurale de leur dose de boissons éthyliques. Cette activité a été longuement exercée par les juifs marocains, connus pour produire une “mahiya” de bonne qualité et le vin kacher dont le fameux Rabbi Jacob.
Les Marocains sont friands d’alcool. Tous âges et classes sociales confondus. Et ce business ne draine pas seulement beaucoup d’argent pour l’Etat (en 2006, il a récolté plus de 723 millions de dirhams de taxe intérieure de consommation) mais cette activité donne à une large frange de la population les moyens de subsister. Les bars, restaurants, cabarets et autres boîtes de nuit emploient des milliers de serveurs, barmen et barmaids. Et l’activité permet à d’autres secteurs de profiter de la faune nocturne. Notamment les chauffeurs de taxi qui font leur blé presque exclusivement avec les “skaïriya”. « C’est simple. Durant les fêtes religieuses, le business est réduit à néant », chuchote ce taxi driver. Ce qui n’est pas du goût des islamistes depuis que leur représentant légal, le PJD, dispose d’élus au Parlement.
Ces dernières années, leurs parlementaires tiennent à agir sur ce registre. Surtout que les Acima et les Marjane ont décidé de mettre la bière, le vin et autres liqueurs à la disposition des habitants des zones périphériques (Aïn Sebaâ, My Rachid, Fida…). Des jeunes qui achètent en toute tranquillité bière et vin dans un magasin d’un quartier populaire est un spectacle qui est loin de plaire aux islamistes. Leur réaction ne s’est pas fait attendre. Dans leurs tribunes comme au Parlement, ils ont demandé (et le font encore d’ailleurs) l’application de la loi « stipulant qu’il est interdit de servir de l’alcool aux musulmans ». En effet, l’interdiction pour les Marocains musulmans de consommer de l’alcool, qui a été instaurée par le colonisateur, a été entérinée par l’arrêté viziriel du 17 juillet 1967 (B.O. N° 2856 du 26 juillet 1967 : 829) émanant du Directeur du Cabinet Royal.
Les responsables du ministère de l’Intérieur se sont ingéniés à leur faciliter la tâche en sortant l’argument classique : la présence d’une communauté étrangère nécessite la présence de compartiments d’alcool. Archifaux. Cette assertion faite par l’Exécutif est contredite par le profil des clients des produits alcoolisés composé généralement de Marocains musulmans. Les supermarchés, les bars et les discos du royaume font 99% de leurs bénéfices avec les Marocains. Et ce sont des entreprises nationales qui produisent de la bière locale, Flag et Stork, entre autres et des vins bien de chez nous (Guerrouane, Médaillon, Domaine du Sahari…). Leurs produits sont destinés non pas à l’exportation mais à la consommation locale. La bière Flag de la ville de Fès a obtenu en 1981 la médaille d’or selon le classement de la qualité à Amsterdam.
Selon une étude récente, la production des produits alcoolisés nationaux a connu une augmentation de 21% entre 2000 et 2005, s’installant à près de 153 millions de litres en 2005. Les ventes de la bière ont enregistré plus de 108,3 millions de litres en 2005, une hausse de 25% par rapport aux chiffres de 2000. Sans parler de l’immense quantité de produits éthyliques de contrebande qui inondent le marché en provenance d’Espagne, de Sebta et Melillia. Pour le compte de l’année 2005, les seules autorités d’Oujda ont confisqué près de 35.000 bouteilles dont plus de 20.000 de whisky. D’énormes quantités de gin, pastis, bourbon, en plus du vin espagnol, proviennent de Sebta et d’Espagne à destination du marché du nord du royaume.
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