Si le taux de pauvreté a légèrement reculé en 2012, le niveau de pauvreté s’intensifie dans un contexte de baisse globale du niveau de vie en France.
En 2012, 8,5 millions de personnes vivaient en dessous du seuil de pauvreté annonce l’Insee. C’est 200.000 de moins qu’en 2011, mais l’explication est en partie mécanique. Le seuil de pauvreté est ainsi fixé par convention à 60% du niveau de vie médian de la population, ce qui s’élève pour 2012 à 987 euros par mois. Et ce niveau médian a baissé lui-même de 1 %, à 1.645 euros par mois. Car en réalité, s’il y a un peu moins de pauvres statistiquement définis en France, ils sont de plus en plus pauvres. Ainsi la moitié des personnes vivant sous ce seuil de pauvreté disposent de moins de 784 euros par mois soit, en euros constants, un niveau qui n’a jamais été aussi bas depuis 2006.
L’intensité de la pauvreté "augmente donc nettement", souligne l’Insee : les personnes pauvres sont globalement plus éloignées du seuil de pauvreté. La composition de la population la moins favorisée se modifie d’ailleurs un peu puisque parmi les adultes pauvres, la part des chômeurs augmente.
Les familles monoparentales sont particulièrement touchées par la pauvreté : leur part dans la population pauvre passe ainsi de 20,6% en 2011 à 22,3% en 2012. Leur niveau d’activité moyen diminue de 5,0%, si bien que "la pauvreté s’accroît fortement parmi les mères de familles monoparentales", relève l’Insee. Le nombre de retraités pauvres à l’inverse baisse. Ce qui s’explique par la très légère hausse des pensions en 2012, qui rapportée à la baisse générale du niveau de vie, en a fait sortir plusieurs du fameux seuil statistique. La baisse globale du niveau de vie se ressent chez les ménages aisés, touchés par les augmentations d’impôts, mais surtout chez les plus pauvres. La hausse du chômage, la stagnation des prestations sociales alors que les prix continuent à augmenter ont sérieusement touché les plus fragiles.
L’Insee est conscient des limites de ce seuil statistique, même s’il se révèle éclairant. Par exemple, il faut ajouter à ce nombre environ 500.000 pauvres en France non recensés, puisque vivants dans la rue, en prison ou en maison de retraite. Et les SDF sont environ 150.000 en France, en augmentation de 50 % en 10 ans. Autre limite, cet indice ne fait pas de différenciation entre les propriétaires et les locataires dans le calcul du niveau de vie. En étant conscient de ces limites, ce seuil reste néanmoins utile pour suivre les évolutions dans le temps et comparer les pays européens entre eux..
EN COMPLEMENT
Pauvreté, miroir des échecs politiques
Méfions-nous de certains chiffres. Et plus encore de leur éventuelle interprétation. Selon des statistiques publiées hier par l’Insee, la pauvreté toucherait légèrement moins de Français. Il y aurait tout lieu de croire que la situation s’améliore. Grave erreur ! Cette statistique n’est qu’un trompe-l’œil. Entre 2008 et 2011, près d’un million de personnes supplémentaires étaient passées en dessous du seuil de pauvreté. Si cette tendance a subi une « pause » en 2012, les auteurs du rapport ne cachent pas que la pauvreté « gagne en intensité », d’autant que le niveau de vie médian a, une nouvelle fois, baissé de 1 %. Les plus pauvres sont de plus en plus pauvres ; les plus riches, de plus en plus riches. Quant au principal chiffre, il donne le vertige : 8,5 millions de Français, près de 14 % de la population, vivaient avec moins de 987 euros par mois en 2012.
Comment ne pas croire que, depuis, cette situation s’est encore aggravée ? Résumons donc la réalité d’une simple formule : la majorité des Français continue de s’appauvrir, dans des proportions qui signent l’état d’urgence absolue. Car la pauvreté n’est rien d’autre que le cruel miroir des échecs politiques de nos gouvernants. Avec le morcellement du travail, la précarité salariale et la multiplication des formes « atypiques » d’emploi, chacun peut constater que le recul du pouvoir d’achat frappe dans la masse, et d’abord les plus faibles. Sans oublier bien sûr l’explosion du chômage, qui concerne non pas 3,5 millions de personnes mais plus de 6 millions. Ce vrai chiffre – effrayant pour un pays qui se vante d’être la cinquième puissance mondiale – correspond à l’ensemble des inscrits dans les cinq catégories de Pôle emploi. Jamais les responsables des associations caritatives n’ont autant exprimé leur « détresse » de ne plus pouvoir assurer les « missions élémentaires » que la société, laminée dans ses profondeurs, attend désormais d’elles. N’ayons pas peur des mots. C’est la République elle-même, et son idéal originel d’égalité, qui vacille. La simple indignation morale ne suffit plus. Du moins quand on est vraiment de gauche.
Jean-Emmanuel Ducoin (l’humanité)
Le grand soir 13/09/2014
En 2012, 8,5 millions de personnes vivaient en dessous du seuil de pauvreté annonce l’Insee. C’est 200.000 de moins qu’en 2011, mais l’explication est en partie mécanique. Le seuil de pauvreté est ainsi fixé par convention à 60% du niveau de vie médian de la population, ce qui s’élève pour 2012 à 987 euros par mois. Et ce niveau médian a baissé lui-même de 1 %, à 1.645 euros par mois. Car en réalité, s’il y a un peu moins de pauvres statistiquement définis en France, ils sont de plus en plus pauvres. Ainsi la moitié des personnes vivant sous ce seuil de pauvreté disposent de moins de 784 euros par mois soit, en euros constants, un niveau qui n’a jamais été aussi bas depuis 2006.
L’intensité de la pauvreté "augmente donc nettement", souligne l’Insee : les personnes pauvres sont globalement plus éloignées du seuil de pauvreté. La composition de la population la moins favorisée se modifie d’ailleurs un peu puisque parmi les adultes pauvres, la part des chômeurs augmente.
Les familles monoparentales sont particulièrement touchées par la pauvreté : leur part dans la population pauvre passe ainsi de 20,6% en 2011 à 22,3% en 2012. Leur niveau d’activité moyen diminue de 5,0%, si bien que "la pauvreté s’accroît fortement parmi les mères de familles monoparentales", relève l’Insee. Le nombre de retraités pauvres à l’inverse baisse. Ce qui s’explique par la très légère hausse des pensions en 2012, qui rapportée à la baisse générale du niveau de vie, en a fait sortir plusieurs du fameux seuil statistique. La baisse globale du niveau de vie se ressent chez les ménages aisés, touchés par les augmentations d’impôts, mais surtout chez les plus pauvres. La hausse du chômage, la stagnation des prestations sociales alors que les prix continuent à augmenter ont sérieusement touché les plus fragiles.
L’Insee est conscient des limites de ce seuil statistique, même s’il se révèle éclairant. Par exemple, il faut ajouter à ce nombre environ 500.000 pauvres en France non recensés, puisque vivants dans la rue, en prison ou en maison de retraite. Et les SDF sont environ 150.000 en France, en augmentation de 50 % en 10 ans. Autre limite, cet indice ne fait pas de différenciation entre les propriétaires et les locataires dans le calcul du niveau de vie. En étant conscient de ces limites, ce seuil reste néanmoins utile pour suivre les évolutions dans le temps et comparer les pays européens entre eux..
EN COMPLEMENT
Pauvreté, miroir des échecs politiques
Méfions-nous de certains chiffres. Et plus encore de leur éventuelle interprétation. Selon des statistiques publiées hier par l’Insee, la pauvreté toucherait légèrement moins de Français. Il y aurait tout lieu de croire que la situation s’améliore. Grave erreur ! Cette statistique n’est qu’un trompe-l’œil. Entre 2008 et 2011, près d’un million de personnes supplémentaires étaient passées en dessous du seuil de pauvreté. Si cette tendance a subi une « pause » en 2012, les auteurs du rapport ne cachent pas que la pauvreté « gagne en intensité », d’autant que le niveau de vie médian a, une nouvelle fois, baissé de 1 %. Les plus pauvres sont de plus en plus pauvres ; les plus riches, de plus en plus riches. Quant au principal chiffre, il donne le vertige : 8,5 millions de Français, près de 14 % de la population, vivaient avec moins de 987 euros par mois en 2012.
Comment ne pas croire que, depuis, cette situation s’est encore aggravée ? Résumons donc la réalité d’une simple formule : la majorité des Français continue de s’appauvrir, dans des proportions qui signent l’état d’urgence absolue. Car la pauvreté n’est rien d’autre que le cruel miroir des échecs politiques de nos gouvernants. Avec le morcellement du travail, la précarité salariale et la multiplication des formes « atypiques » d’emploi, chacun peut constater que le recul du pouvoir d’achat frappe dans la masse, et d’abord les plus faibles. Sans oublier bien sûr l’explosion du chômage, qui concerne non pas 3,5 millions de personnes mais plus de 6 millions. Ce vrai chiffre – effrayant pour un pays qui se vante d’être la cinquième puissance mondiale – correspond à l’ensemble des inscrits dans les cinq catégories de Pôle emploi. Jamais les responsables des associations caritatives n’ont autant exprimé leur « détresse » de ne plus pouvoir assurer les « missions élémentaires » que la société, laminée dans ses profondeurs, attend désormais d’elles. N’ayons pas peur des mots. C’est la République elle-même, et son idéal originel d’égalité, qui vacille. La simple indignation morale ne suffit plus. Du moins quand on est vraiment de gauche.
Jean-Emmanuel Ducoin (l’humanité)
Le grand soir 13/09/2014
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